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                                                                                                                                 Date : 20031230

                                                                                                                               Dossier : 03-T-50

                                                                                                                                                           

                                                                                                                Référence : 2003 CF 1526

Ottawa (Ontario), le 30 décembre 2003

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE BLANCHARD

ENTRE :

                                                            MARCUS WILLIAMS

                                                                                                                                           demandeur

                                                                             et

                                          LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

                                                                                                                                             défendeur

                                MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

[1]                Il s'agit d'une requête du demandeur, déposée le 14 octobre 2003, en vue d'obtenir une prorogation du délai de production d'un avis de demande de contrôle judiciaire.

Les faits


[2]                Le 27 mars 2003, le demandeur a demandé à la Commission de la fonction publique du Canada (la Commission) d'ouvrir une enquête en vertu de l'article 7.1 de la Loi sur l'emploi dans la fonction publique (LEFP) concernant ses allégations quant à des « irrégularités dans la dotation du personnel » au sein de Développement des ressources humaines Canada (DRHC).

[3]                La demande du demandeur a été rejetée dans une lettre datée du 23 juin 2003. La lettre de refus faisait état de ce qui suit : la demande n'était pas faite au moment opportun, la Commission n'allait pas enquêter puisque d'autres recours étaient disponibles en vertu de la LEFP et la demande du demandeur ne répondait pas aux exigences nécessaires à une enquête en vertu de l'article 7.1 de la LEFP.

[4]                Le demandeur a fait parvenir un courrier électronique à la Commission le 5 août 2003, pour demander le réexamen de la décision du 23 juin. Dans une lettre datée du 13 août 2003, la Commission a refusé la demande et a confirmé la décision initiale du 23 juin 2003.

[5]                L'avis de requête du demandeur demande la prorogation du délai pour déposer une demande de contrôle judiciaire de la lettre du 13 août, et dit que cette lettre constitue une décision. Cependant, le dossier complémentaire du demandeur dit que la décision à reconsidérer est la décision de la Commission, datée du 23 juin.

[6]                Dans l'arrêt Canada (Procureur général) c. Hennelly, [1999] A.C.F. no 846 (CAF) en ligne : QL, la Cour d'appel fédérale a établi le critère auquel on doit répondre pour qu'une prorogation de délai soit accordée; il comporte les quatre volets suivants :

(1)        une intention manifeste, formée dans le délai, de poursuivre sa demande;


(2)        une explication raisonnable pour le retard;

(3)        le défendeur ne subit pas de préjudice en raison du retard; et

(4)        la demande est bien fondée.

Le demandeur a le fardeau de démontrer que les quatre volets sont comblés pour que la prorogation du délai soit accordée.

Question en litige

[7]                La requête en vue d'obtenir une prorogation du délai devrait-elle être accordée?

L'intention de poursuivre la demande

[8]                Une période d'environ quatre mois (111 jours) s'est écoulée avant que le demandeur ne manifeste son intention de faire une demande de contrôle judiciaire. Même si la demande de réexamen datée du 5 août 2003 démontre l'intention du demandeur de poursuivre l'affaire, elle ne constitue pas un moyen de proroger le délai. De plus, le courrier électronique demandant le réexamen ne démontre pas que le demandeur avait l'intention de faire une demande de contrôle judiciaire. De toute manière, il a été envoyé deux semaines après l'expiration du délai fixé pour le dépôt d'une demande de contrôle judiciaire de la décision de la Commission. Le demandeur n'a fourni aucune preuve qu'il avait formé l'intention de procéder à une demande de contrôle judiciaire de la décision de la Commission datée du 23 juin 2003 dans le délai prescrit.


Explication du retard

[9]                Même si j'étais convaincu que le demandeur avait formé l'intention de procéder à une demande de contrôle judiciaire dans le délai prévu, ce qui n'est pas le cas, le demandeur n'a pas fourni d'explication raisonnable pour le retard.

[10]            Le demandeur n'a pas offert d'argument ou d'élément de preuve précis au soutien de sa prétention qu'il avait une raison pour justifier le retard. Essentiellement, il prétend que le retard a été occasionné par le défaut de ses dirigeants syndicaux de lui fournir des renseignements adéquats concernant les délais et la procédure lui permettant de faire la demande de contrôle judiciaire.

[11]            Selon la preuve offerte par le demandeur, il comptait sur ses dirigeants syndicaux pour le guider concernant les règles et les procédures souvent complexes et il affirme que ces dirigeants étaient pleinement conscients de son [traduction] « désir sincère de continuer à suivre toutes les pistes qui s'offraient à [lui] » . Une liste d'échanges entre le demandeur et son syndicat, jointe à son affidavit, est offerte en preuve pour justifier le retard. Toutefois, la liste des échanges, par ordre chronologique, intitulée [traduction] « Dates des discussions avec le syndicat » , ne montre que des inscriptions allant jusqu'au 24 février 2003, soit la date à laquelle il a retiré son [traduction] « appel de PM-05 » . Je n'ai tout simplement pas devant moi d'élément de preuve concernant la période en question, c'est-à-dire, à partir du 23 juin 2003, soit la date de la décision attaquée, jusqu'à la date du dépôt de la requête faisant l'objet des présentes.


[12]            Essentiellement, je suis d'accord avec l'argument du défendeur selon lequel la preuve par affidavit du demandeur ne porte pas sur la période pertinente et selon lequel le fait que le demandeur dit avoir compté sur les dirigeants syndicaux ne l'exempte pas de son obligation de déployer des efforts raisonnables pour s'enquérir du processus et de déposer sa demande à temps. Nous parlons d'un retard de quatre mois qui ne saurait être considéré comme un simple oubli administratif ou un manquement mineur aux règles. Les motifs fournis par le demandeur sont insuffisants pour expliquer le retard et ne justifient pas une prorogation de délai. De plus, on ne peut pas dire que le retard était hors du contrôle du demandeur.

Bien-fondé de la demande

[13]            De plus, je ne suis pas convaincu que le demandeur ait une chance raisonnable de réussir dans sa demande de contrôle judiciaire. À mon avis, il n'a pas réussi à démontrer qu'il avait des motifs soutenables. L'article 7.1 de la LEFP énonce ce qui suit : « La Commission peut effectuer les enquêtes et vérifications qu'elle juge indiquées sur toute question relevant de sa compétence. » La Commission n'exercera son pouvoir discrétionnaire d'effectuer une enquête que si les quatre conditions décrites dans sa politique concernant les enquêtes en vertu de l'article 7.1 de la LEFP sont remplies. L'une de ces quatre conditions prévoit que « aucun autre mécanisme de recours est disponible pour la question soulevée, soit en vertu de la LEFP, d'une convention collective, ou d'une autre loi, telle que la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, [et] la Loi canadienne des droits de la personne » .


[14]            Le demandeur ne nie pas le fait qu'il ait déposé une plainte dans la présente affaire en vertu de la Loi canadienne sur les droits de la personne et que la Commission canadienne des droits de la personne mène présentement une enquête concernant la prétention du demandeur. Par conséquent, le demandeur dispose clairement d'au moins un recours subsidiaire pour traiter de sa plainte, soit la procédure en vertu de la Loi canadienne sur les droits de la personne. Puisque le demandeur a utilisé l'un des recours disponibles, son dossier ne répond pas aux quatre conditions comprises dans la politique et, par conséquent, ne peut faire l'objet d'une enquête en vertu de l'article 7.1 de la LEFP.

Conclusion

[15]            Je conclus que dans la présente affaire, les conditions requises pour la prorogation d'un délai n'ont pas été remplies. Le demandeur n'a pas démontré qu'il avait toujours eu l'intention de demander le contrôle judiciaire, n'a pas fourni d'explication raisonnable pour le retard, et n'a pas réussi à me convaincre du bien-fondé de la demande de contrôle judiciaire. Pour les motifs susmentionnés, la présente requête sera rejetée.


                                                                ORDONNANCE

LA COUR ORDONNE :

1.         La requête pour la prorogation du délai pour déposer une demande de contrôle judiciaire de la décision du 23 juin 2003 de la Commission canadienne de la fonction publique est rejetée.

                                                                                                                     « Edmond P. Blanchard »          

                                                                                                                                                     Juge                           

Traduction certifiée conforme

Caroline Raymond, LL.L.


                                                             COUR FÉDÉRALE

                                             AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                               03-T-50     

INTITULÉ :                                              MARCUS WILLIAMS

c.

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

LIEU DE L'AUDIENCE :                       HALIFAX (NOUVELLE-ÉCOSSE)

DATE DE L'AUDIENCE :                      LE 17 DÉCEMBRE 2003

MOTIFS DE L'ORDONNANCE :         LE JUGE BLANCHARD

DATE DES MOTIFS :                             LE 30 DÉCEMBRE 2003

COMPARUTIONS :                            

Marcus Williams                                          POUR LE DEMANDEUR

POUR LE DÉFENDEUR   

                                                                                                                                                           

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :               

Marcus Williams                                          POUR LE DEMANDEUR

Morris Rosenberg                                       POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada


COUR FÉDÉRALE

                                           Dossier : 03-T-50

ENTRE :

                       MARCUS WILLIAMS

demandeur

                                         et

   LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

                                         

                                                                 défendeur

                                                                                   

MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

                                                                                   


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