Dossier : T-876-02
Référence : 2003 CF 920
ENTRE :
GLAXOSMITHKLINE INC. et
SMITHKLINE BEECHAM P.L.C.
demanderesses
et
APOTEX INC. et
LE MINISTRE DE LA SANTÉNATIONALE
défendeurs
MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE
[1] La Cour est saisie d'une demande présentée par les défendeurs en vue d'obtenir une ordonnance radiant deux affidavits souscrits au nom des demanderesses par Ravinder Kumar, le 1er avril 2003, et Dianne Azzarello, le 2 avril 2003.
[2] Les demanderesses, GlaxoSmithKline Inc. et SmithKline Beecham P.L.C. (GSK), sont propriétaires des droits afférents aux brevets canadiens 2,168,829, 2,210,023 et 2,211,522. Le ou vers le 22 avril 2002, la défenderesse Apotex a déposé un avis d'allégation dans lequel elle affirmait que le brevet 522 était invalide pour cause d'évidence. La demanderesse GSK a répondu en introduisant la présente instance par le dépôt, le 6 juin 2002, d'un avis de demande dans lequel elle affirmait que l'allégation d'invalidité du brevet n'était pas fondée, d'autant plus que l'invention décrite et revendiquée dans le brevet répondait aux critères de nouveauté et de non-évidence, au vu de l'un ou l'autre des exemples cités par Apotex.
[3] GSK a déposé plusieurs affidavits pour appuyer sa thèse, y compris les deux affidavits en litige dans la présente demande, à savoir ceux de M. Kumar et de Mme Dianne Azzarello. La défenderesse réclame la radiation de ces affidavits au motif qu'ils n'ont rien à voir avec le point litigieux à la base de l'action principale, c'est-à-dire la question de l'évidence. GSK rétorque qu'il ressort de ces affidavits que les exemples d'antériorité cités par Apotex dans son avis d'allégation ne sont pas suffisants pour convaincre Santé Canada de l'efficacité et de l'innocuité du médicament en question et que, par analogie, ils ne peuvent donc servir à rendre le brevet évident.
[4] Il est de jurisprudence constante que les requêtes en radiation d'affidavits ne doivent être accueillies que dans des cas exceptionnels. Une des exceptions à cette règle générale se présente lorsque l'affidavit en question est manifestement dénué de pertinence, ce qui est précisément le point litigieux soumis à la Cour en l'espèce.
[5] Après avoir attentivement examiné les affidavits en question et après avoir pris connaissance des observations orales et écrites des parties, je suis convaincu que les affidavits n'ont aucun rapport avec la question de l'évidence et qu'ils devraient par conséquent être radiés dans leur intégralité. Dans leurs affidavits, les déclarants font essentiellement valoir qu'il est difficile d'obtenir un avis de conformité du ministre de la Santé et qu'un avis de conformité n'est délivré que si l'efficacité et l'innocuité du médicament visé sont établies à la satisfaction de Santé Canada. Au paragraphe 25 de son affidavit, Mme Azzarello se dit d'avis qu'aucun des documents déposés par Apotex ne répond aux exigences de la Loi sur les aliments et drogues et du Règlement sur les aliments et drogues aux fins d'établir l'efficacité et l'innocuité d'un produit en vue d'obtenir un avis de conformité permettant ensuite de commercialiser ce produit au Canada. Dans le même ordre d'idées, M. Kumar affirme dans son affidavit que Santé Canada exige que des tests poussés soient effectués et que, tant que ces tests n'ont pas eu lieu, Santé Canada ne devrait pas délivrer d'avis de conformité à Apotex ou à qui que ce soit.
[6] La facilité ou la difficulté avec laquelle le ministre homologue un produit n'a absolument rien à voir avec la question de savoir si le produit en question est inventif et non évident. Il est question dans les affidavits en question des critères exigeants appliqués par le ministre de la Santé pour décider de l'opportunité de délivrer un avis de conformité. Les déclarants n'y abordent pas la question de l'évidence, qui suppose un examen de l'état antérieur de la technique et de la question de savoir si, en se fondant sur l'état antérieur de la technique, on serait amené directement et sans aucune difficulté à l'invention revendiquée. Or, on ne trouve pas, dans les affidavits contestés, le moindre élément qui se rapporte au présent débat. Les déclarants émettent simplement l'hypothèse que Apotex aura du mal à obtenir l'approbation de Santé Canada et ils affirment que d'autres tests sont nécessaires.
[7] Par ailleurs, contrairement aux demanderesses, je crois qu'admettre ces deux affidavits causerait un préjudice à Apotex. La thèse des demanderesses est qu'il ne s'agit après tout que de deux affidavits parmi bien d'autres et qu'ils sont par ailleurs probablement les plus courts. Cela ne change rien au fait qu'il faudra consacrer du temps pour examiner ces affidavits manifestement dénués de toute pertinence, ce qui entraînera des retards qui causeront effectivement un préjudice aux demanderesses.
O R D O N N A N C E
[8] La demande est accueillie et les deux affidavits sont radiés en entier. Les dépens sont adjugés à Apotex. Ils sont fixés 2 000 $ et sont payables sans délai, quelle que soit l'issue de la cause.
« P. Rouleau »
JUGE
OTTAWA (Ontario)
Le 25 juillet 2003
Traduction certifiée conforme
Martine Guay, LL.L.
COUR FÉDÉRALE DU CANADA
SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER : T-876-02
INTITULÉ: GLAXOSMITHKLINE INC. et al. c. APOTEX INC. et al.
LIEU DE L'AUDIENCE : Ottawa (Ontario)
DATE DE L'AUDIENCE : 17 juillet 2003
MOTIFS : Monsieur le juge Rouleau
DATE DES MOTIFS : 25 juillet 2003
COMPARUTIONS: Mes Jay Zakaib, Chantal Sasunders et Corine DeLellegrin
Pour les demanderesses
Mes A. Brodkin et N. Butterfield
Pour les défendeurs
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER:
Gowling Lafleur Henderson Pour les demanderesses
Avocats
Me Harry Radomski
Goodmans Pour la défenderesse APOTEX
Avocats
Me Frederick Woyiwada
Ministère de la Justice du Canada Pour le défendeur, le ministre de la Santé