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Date : 20000308

Dossier : IMM-6036-98

ENTRE :

DIOGENES FERRER CARBONELL

demandeur

et

MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

défendeur

MOTIFS D'ORDONNANCE

LE JUGE HENEGHAN

[1]         Il s'agit d'une demande d'autorisation et de contrôle judiciaire contre une décision, datée du 23 octobre 1998, dans laquelle la Section d'appel de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié a rejeté l'appel que le demandeur avait formé à l'égard d'une mesure d'expulsion prise contre lui le 24 juin 1998, pour absence de compétence.


LES FAITS

[2]         Le demandeur, un citoyen de Cuba, s'est vu reconnaître le statut de réfugié au sens de la Convention conformément au par. 2(1) de la Loi sur l'immigration, L.R.C. (1985), ch. I-2 (la Loi).

[3]         Le 25 janvier 1993, le demandeur a été reconnu coupable d'un chef d'accusation de possession de stupéfiants pour en faire le trafic en vertu du paragraphe 4(2) de la Loi sur les stupéfiants, L.R.C. (1985), ch. N-1. Il a été condamné à 15 mois d'emprisonnement en plus de deux années de probation.

[4]         Le 6 mai 1998, un agent d'immigration, Paul Ennis, a présenté un rapport fondé sur l'alinéa 27(2)a) de la Loi au sous-ministre de la Citoyenneté et de l'immigration. Ce rapport mentionnait que le demandeur appartenait à une catégorie de personnes non admissibles. Plus particulièrement, il concluait que le demandeur était visé par l'alinéa 19(1)c) de la Loi.

[5]         Par suite de ce rapport, une enquête a été tenue, et il a été conclu que le demandeur était visé par les alinéas 27(2)a) et 19(1)c). En conséquence, une mesure d'expulsion a été prise le 22 juin 1998.


[6]         Le demandeur a déposé un avis d'appel conformément à l'article 70 de la Loi le 22 juin 1998. La Section d'appel a conclu qu'il n'avait pas établi qu'il était visé par l'art. 70 de la Loi. En conséquence, l'appel n'a pas été accueilli. Le demandeur s'est vu accorder jusqu'au 1er septembre 1998 pour faire des observations écrites. Le demandeur a écrit une lettre, datée du 24 août 1998. Dans sa lettre, il a décrit la situation à Cuba de même que ses idées anti-communistes, il a expliqué que sa famille appuyait le Parti communiste et qu'il s'était vu reconnaître le statut de réfugié au sens de la Convention. Le 27 octobre 1998, la Section d'appel a rejeté l'appel pour manque de compétence.

[7]         Le demandeur soutient que la Section d'appel a commis une erreur lorsqu'elle a conclu qu'elle n'avait pas compétence pour entendre son appel. Le défendeur soutient que la lettre du demandeur ne fait état d'aucun motif de nature humanitaire pour lequel la Section d'appel aurait pu ordonner qu'il soit sursis à l'exécution de la mesure d'expulsion. En conséquence, le défendeur soutient que c'est à bon droit que la Section d'appel a statué qu'elle n'avait pas la compétence voulue.

[8]         Voici les parties pertinentes de l'article 70 de la Loi, L.R.C. (1985), ch. I-2 :



70.(2) Subject to subsections (3) to (5), an appeal lies to the Appeal Division from a removal order or conditional removal order made against a person who

(a) has been determined under this Act or the regulations to be a Convention refugee but is not a permanent resident; or

(3) An appeal to the Appeal Division under subsection (2) may be based on either or both of the following grounds:

(a) on any ground of appeal that involves a question of law or fact, or mixed law and fact; and

(b) on the ground that, having regard to the existence of compassionate or humanitarian considerations, the person should not be removed from Canada.

(5) No appeal may be made to the Appeal Division by a person described in subsection (1) or paragraph (2)(a) or (b) against whom a deportation order or conditional deportation order is made where the Minister is of the opinion that the person constitutes a danger to the public in Canada and the person has been determined by an adjudicator to be

...

70.(2) Sous réserve des paragraphes (3) à (5), peuvent faire appel devant la section d'appel d'une mesure de renvoi ou de renvoi conditionnel:

a) les non-résidents permanents qui se sont vu reconnaître le statut de réfugié au sens de la Convention aux termes de la présente loi ou de ses règlements;

(3) Les moyens que peuvent invoquer les appelants visés au paragraphe (2) sont les suivants :

a) question de droit, de fait ou mixte;

b) le fait que, pour des raisons d'ordre humanitaire, ils ne devraient pas être renvoyés du Canada.

(5) Ne peuvent faire appel devant la section d'appel les personnes, visées au paragraphe (1) ou aux alinéas (2)a) ou b), qui, selon la décision d'un arbitre :

...


[9]         Le demandeur est un réfugié au sens de la Convention qui n'a pas obtenu le statut de résident permanent. Le paragraphe 70(2) permet aux réfugiés au sens de la Convention et personnes qui ont un visa de former un appel contre une mesure de renvoi que la Section d'appel a prise contre eux. Cependant, ce paragraphe s'applique sous réserve des paragraphes (3) et (5).

[10]       Le paragraphe (3) prévoit qu'un appel formé contre une décision de la Section d'appel peut être fondé sur un motif qui porte sur une question de fait, une question de droit, ou une question à la fois de fait et de droit, et le paragraphe (3) prévoit un motif découlant de l'existence de motifs de nature humanitaire. Le paragraphe (5) renvoie à la situation dans laquelle le ministre est d'avis que la personne constitue un danger pour le public. Le paragraphe (5) ne s'applique pas en l'espèce vu qu'il n'a pas été conclu que le demandeur constituait un danger pour le public.

[11]       En conséquence, dans la présente affaire, la Section d'appel avait compétence, en vertu de l'alinéa 70(2)a), pour déterminer si un appel formé contre la mesure de renvoi prise contre le demandeur devait être accueilli. Les alinéas (3)a) et b) indiquent les motifs pour lesquels la Section d'appel aurait pu accueillir l'appel.


[12]       La Section d'appel était tenue d'examiner la lettre que le demandeur avait produite, pour déterminer si celle-ci exposait un quelconque motif d'appel. La décision de la Section d'appel aurait dû refléter son raisonnement sur la question de savoir pourquoi il y avait des motifs d'appel ou il n'y en avait pas. En conséquence, à mon avis, la Section d'appel a commis une erreur lorsqu'elle a conclu qu'elle n'avait pas la compétence voulue pour entendre l'appel, sans examiner la question des motifs d'appel.

[13]       La présente demande de contrôle judiciaire est accueillie. L'ordonnance doit être renvoyée à une formation différemment constituée conformément aux présents motifs.

     « Elizabeth Heneghan »     

        J.C.F.C.

Toronto (Ontario)

Le 8 mars 2000

Traduction certifiée conforme

Bernard Olivier, B.A., LL.B.


COUR FÉDÉRALE DU CANADA

Avocats inscrits au dossier

NO DU GREFFE :                                          IMM-6036-98

INTITULÉ DE LA CAUSE :               DIOGENES FERRER CARBONELL

c.

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L'IMMIGRATION

DATE DE L'AUDIENCE :                             LE VENDREDI 17 DÉCEMBRE 1999

LIEU DE L'AUDIENCE :                               ST. JOHN'S (TERRE-NEUVE)

MOTIFS D'ORDONNANCE EXPOSÉS PAR MADAME LE JUGE HENEGHAN

EN DATE DU :                                               MARDI 8 MARS 2000

ONT COMPARU :                                        M. Nicholas Summers (709) 753-7860

Pour le demandeur

Mme Lori Rasmussen

Pour le défendeur

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :     Legal Aid Commission

Barristers and Solicitors

2, Steers Cove

boîte postale 399, succursale C

St. John's (Terre-Neuve)

A1C 5J9

Pour le demandeur

Morris Rosenberg

Sous-procureur général du Canada

Pour le défendeur

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