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Date : 20200123


Dossier : IMM-2321-19

Référence : 2020 CF 108

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 23 janvier 2020

En présence de monsieur le juge Russell

ENTRE :

PRITPAL SINGH BADIAL

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

I.  INTRODUCTION

[1]  La Cour est saisie d’une demande de contrôle judiciaire, présentée au titre du paragraphe 72(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 [la LIPR], à l’encontre de la décision du 5 avril 2019 par laquelle un agent d’immigration [l’agent] a refusé la demande de permis de travail ouvert pour un époux présentée par le demandeur [la décision contestée].

II.  LE CONTEXTE

[2]  Le demandeur est un citoyen de l’Inde. Le 29 décembre 2018, il a épousé Mme Simarjit Kaur, une citoyenne de l’Inde, qui séjourne au Canada depuis 2017 grâce à un permis d’études. Mme Kaur a obtenu un permis d’études canadien afin d’obtenir un diplôme en administration des affaires au Collège Bow Valley.

[3]  Le 22 mars 2019, le demandeur a présenté une demande de permis de travail ouvert au titre du sous‑alinéa 205c)(ii) du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002‑227 [le Règlement], dans le but d’aller rejoindre Mme Kaur au Canada pendant ses études.

[4]  Le demandeur a joint à sa demande deux documents concernant les études de Mme Kaur. Le premier document était une lettre du Collège Bow Valley datée du 26 janvier 2017 et adressée à Mme Kaur, qui précisait que le programme d’administration des affaires, auquel elle avait été admise, s’étalerait du 24 août 2017 au 21 août 2019. Le deuxième document, daté du 5 février 2019, était le relevé de notes de Mme Kaur. Il indiquait qu’elle était inscrite à cinq cours à l’automne 2017 et à l’hiver 2018, à trois cours au printemps 2018 et à quatre cours à l’automne 2018 et à l’hiver 2019.

[5]  Le 5 avril 2019, l’agent a refusé la demande de permis de travail ouvert présentée par le demandeur.

III.  LA DÉCISION FAISANT L’OBJET DU CONTRÔLE

[6]  L’agent a rejeté la demande de permis de travail ouvert au motif que le demandeur n’a pas été en mesure de démontrer qu’il remplissait les conditions requises pour obtenir un permis de travail ouvert pour un époux au titre du sous‑alinéa 205c)(ii) du Règlement.

[7]  Dans les notes du Système mondial de gestion des cas [le SMGC], un agent d’immigration a d’abord noté, le 2 avril 2019, qu’aucun document récent n’avait été fourni comme preuve de la durée du statut de Mme Kaur, à l’exception de son relevé de notes du Collège Bow Valley.

[8]  Le 5 avril 2019, l’agent a ensuite noté dans le SMGC qu’aucune lettre du Collège Bow Valley confirmant que Mme Kaur était actuellement inscrite « à temps plein » n’avait été fournie. Par conséquent, l’agent a noté que le demandeur n’avait pas été en mesure de démontrer qu’il remplissait les conditions requises pour obtenir un permis de travail ouvert au titre du sous‑alinéa 205c)(ii) du Règlement.

IV.  LES QUESTIONS À TRANCHER

[9]  En l’espèce, les questions à trancher sont les suivantes :

  1. L’agent a-t-il violé le droit du demandeur à l’équité procédurale?
  2. L’agent a-t-il commis une erreur en concluant que le demandeur n’a pas été en mesure de démontrer qu’il remplissait les conditions requises pour obtenir un permis de travail ouvert à titre d’époux?

V.  LA NORME DE CONTRÔLE

[10]  La présente demande a été plaidée avant que la Cour suprême du Canada rende sa décision dans les affaires Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Vavilov, 2019 CSC 65 [Vavilov], et Bell Canada c Canada (Procureur général), 2019 CSC 66. Le jugement de la Cour en l’espèce a été mis en délibéré. Les observations des parties sur la norme de contrôle ont donc été présentées en fonction du cadre élaboré dans l’arrêt Dunsmuir c Nouveau‑Brunswick, 2008 CSC 9 [Dunsmuir]. Toutefois, compte tenu des circonstances en l’espèce et des directives énoncées par la Cour suprême du Canada dans l’arrêt Vavilov, au paragraphe 144, la Cour a conclu qu’il n’était pas nécessaire de demander aux parties de présenter de nouvelles observations sur la norme de contrôle. J’ai appliqué le cadre établi dans l’arrêt Vavilov dans mon examen de la demande, et cela ne change pas la norme de contrôle applicable ni mes conclusions en l’espèce.

[11]  Dans l’arrêt Vavilov, aux paragraphes 23 à 32, les juges majoritaires ont cherché à simplifier la façon dont les tribunaux choisissent la norme de contrôle applicable aux questions qui leur sont soumises. Les juges majoritaires ont choisi de ne pas appliquer l’approche fondée sur le contexte et les catégories adoptée dans l’arrêt Dunsmuir en faveur de la présomption selon laquelle la norme de la décision raisonnable s’applique. Toutefois, les juges majoritaires ont souligné que cette présomption peut être réfutée (1) s’il existe une intention claire du législateur de prescrire une norme de contrôle différente (Vavilov, aux par. 33 à 52) et (2) dans les cas où la primauté du droit commande l’application de la norme de la décision correcte, par exemple à l’égard des questions constitutionnelles, des questions de droit générales d’une importance capitale pour le système juridique dans son ensemble et des questions liées aux délimitations des compétences respectives d’organismes administratifs (Vavilov, aux par. 53 à 64).

[12]  Le demandeur et le défendeur ont convenu que la norme de contrôle applicable à la question de l’équité procédurale est celle de la décision correcte. Les parties ont également convenu que la norme de contrôle applicable à l’examen que la Cour doit effectuer à l’égard de la manière dont l’agent a évalué si le demandeur répondait aux exigences applicables est celle de la décision raisonnable.

[13]  Certains tribunaux ont conclu que la norme de contrôle applicable à une allégation de manquement à l’équité procédurale est celle de la « décision correcte » (Établissement de Mission c Khela, 2014 CSC 24, au par. 79; Canada (Citoyenneté et Immigration) c Khosa, 2009 CSC 12, aux par. 59 et 61 [Khosa]). L’arrêt Vavilov de la Cour suprême du Canada ne traite pas de la norme de contrôle applicable aux questions relatives à l’équité procédurale (Vavilov, au par. 23). Toutefois, une approche plus judicieuse sur le plan doctrinal consiste à conclure qu’aucune norme de contrôle n’est applicable à la question de l’équité procédurale. Voici comment la Cour suprême du Canada s’est exprimée sur la question de l’équité procédurale dans l’arrêt Moreau‑Bérubé c Nouveau‑Brunswick (Conseil de la magistrature), 2002 CSC 11 :

[L’équité procédurale] n’exige pas qu’on détermine la norme de révision judiciaire applicable. Pour vérifier si un tribunal administratif a respecté l’équité procédurale ou l’obligation d’équité, il faut établir quelles sont les procédures et les garanties requises dans un cas particulier (Moreau-Bérubé, au par. 74).

[14]  En ce qui concerne la norme de contrôle applicable à la manière dont l’agent a évalué si les éléments de preuve produits démontrent que le demandeur satisfait aux exigences du Règlement, rien ne vient en l’espèce réfuter la présomption selon laquelle la norme de la décision raisonnable s’applique. L’application de la norme de la décision raisonnable à cette question respecte aussi la jurisprudence établie avant l’arrêt Vavilov. Voir Toor c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2019 CF 1143, au par. 6.

[15]  Lorsqu’une décision est contrôlée selon la norme de la décision raisonnable, l’analyse visera à déterminer « si la décision possède les caractéristiques d’une décision raisonnable, soit la justification, la transparence et l’intelligibilité, et si la décision est justifiée au regard des contraintes factuelles et juridiques pertinentes qui ont une incidence sur celle‑ci » (Vavilov, au par. 99). La norme de la décision raisonnable constitue une norme unique « qui s’adapte au contexte » (Vavilov, au par. 89, citant Khosa, au par. 59). Ces contraintes d’ordre contextuel « cernent les limites et les contours de l’espace à l’intérieur duquel le décideur peut agir, ainsi que les types de solution qu’il peut retenir » (Vavilov, au par. 90). Autrement dit, avant de pouvoir intervenir, la Cour « doit être convaincue [que la décision] souffre de lacunes graves à un point tel qu’on ne peut pas dire qu’elle satisfait aux exigences de justification, d’intelligibilité et de transparence » (Vavilov, au par. 100). La Cour suprême du Canada a énoncé deux catégories de lacunes fondamentales qui rendent une décision déraisonnable : (1) le manque de logique interne du raisonnement du décideur et (2) le caractère indéfendable d’une décision « compte tenu des contraintes factuelles et juridiques pertinentes qui ont une incidence sur la décision » (Vavilov, au par. 101).

VI.  LES DISPOSITIONS LÉGISLATIVES APPLICABLES

[16]  Les dispositions suivantes du Règlement s’appliquent à la présente demande de contrôle judiciaire :

Intérêts canadiens

Canadian interests

205 Un permis de travail peut être délivré à l’étranger en vertu de l’article 200 si le travail pour lequel le permis est demandé satisfait à l’une ou l’autre des conditions suivantes :

205 A work permit may be issued under section 200 to a foreign national who intends to perform work that

c) il est désigné par le ministre comme travail pouvant être exercé par des étrangers, sur la base des critères suivants :

(c) is designated by the Minister as being work that can be performed by a foreign national on the basis of the following criteria, namely,

(ii) un accès limité au marché du travail au Canada est justifiable pour des raisons d’intérêt public en rapport avec la compétitivité des établissements universitaires ou de l’économie du Canada;

(ii) limited access to the Canadian labour market is necessary for reasons of public policy relating to the competitiveness of Canada’s academic institutions or economy; or

[17]  L’extrait suivant tiré des Instructions relatives à l’exécution des programmes qui se rapportent au sous‑alinéa 205c)(ii) (« Époux ou conjoints de fait d’étudiants à temps plein [C42] ») s’applique à la présente demande de contrôle judiciaire :

Époux ou conjoints de fait d’étudiants à temps plein [C42]

Spouses or common-law partners of full-time students [C42]

Les époux ou conjoints de fait de certains étudiants étrangers sont autorisés à accepter un emploi sur le marché général du travail sans qu’il soit nécessaire d’avoir une EIMT. Cette dispense vise les époux qui ne sont pas eux-mêmes des étudiants à temps plein.

Spouses or common-law partners of certain foreign students are allowed to accept employment in the general labour market without the need for an LMIA. This exemption is intended for spouses who are not, themselves, full-time students.

Recevabilité

Eligibility

Le demandeur doit fournir la preuve qu’il est l’époux ou le conjoint de fait d’un titulaire de permis d’études qui étudie à temps plein dans un des types d’établissements suivants :

Applicants must provide evidence that they are the spouse or common-law partner of a study permit holder who is a full-time student at either

un établissement d’enseignement postsecondaire public, tel que :

  a public post-secondary institution, such as:

un collège,

a college

une école technique ou de métiers,

trade/technical school

une université,

university

un cégep au Québec;

  CEGEP in Quebec

Les époux ou conjoints de fait d’étudiants à temps plein sont admissibles à un permis de travail ouvert ou ouvert avec des restrictions, selon qu’ils ont ou non passé un examen médical. Ils ne sont pas tenus d’avoir une offre d’emploi pour qu’un permis de travail leur soit délivré.

Spouses or common-law partners of full-time students are eligible for open or open/restricted work permits, depending on whether a medical examination has been passed. There is no need for an offer of employment before issuing a work permit.

Validité

Validity

Un permis de travail peut être délivré de façon à être valide jusqu’à la fin de la période de validité du permis d’études de l’époux.

Work permits may be issued with a validity date to coincide with the spouse’s study permit.

VII.  LES ARGUMENTS DES PARTIES

A.  Les arguments du demandeur

[18]  Le demandeur soutient que l’agent a commis des erreurs : (1) il a violé son droit à l’équité procédurale en omettant de lui donner l’occasion de répondre aux préoccupations de l’agent qui ne découlaient pas des exigences de la loi; et (2) il a omis de tenir compte d’éléments de preuve importants démontrant que Mme Kaur était toujours inscrite « à temps plein » au Collège Bow Valley. En raison de ces erreurs, le demandeur demande à la Cour d’accueillir la présente demande de contrôle judiciaire, d’infirmer la décision contestée et de renvoyer l’affaire à un autre agent d’immigration pour qu’il rende une nouvelle décision.

(1)  Le manquement à l’équité procédurale

[19]  Le demandeur fait valoir que, même s’il a fourni tous les renseignements nécessaires exigés par la LIPR et le Règlement, l’agent avait manifestement des préoccupations au sujet de l’inscription de Mme Kaur au Collège Bow Valley. Par conséquent, le demandeur aurait dû avoir l’occasion de répondre aux préoccupations de l’agent. Le demandeur affirme que le fait de ne pas lui avoir offert une telle occasion constitue un manquement à l’équité procédurale.

[20]  Le demandeur s’appuie principalement sur les décisions Hernandez Bonilla c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2007 CF 20 [Bonilla], et Hassani c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2006 CF 1283 [Hassani]. Le demandeur fait remarquer que la Cour a confirmé, dans la décision Bonilla, au paragraphe 27, que l’équité procédurale commande que le demandeur ait l’occasion de répondre aux préoccupations de l’agent lorsque ces préoccupations ont trait à des conclusions défavorables sur les intentions du demandeur. Le demandeur souligne également que la Cour a conclu, dans la décision Hassani, au paragraphe 24, que le demandeur doit avoir la possibilité de répondre aux préoccupations lorsque celles-ci ne découlent pas directement des exigences de la loi.

(2)  Le caractère raisonnable de la décision de l’agent

[21]  Le demandeur fait valoir que les doutes de l’agent concernant l’inscription « à temps plein » de Mme Kaur ne sont pas fondés, puisque la preuve indique le contraire. La lettre d’acceptation de Mme Kaur ainsi que son relevé de notes récent indiquant qu’elle était inscrite à quatre cours à l’hiver 2019 démontrent bien qu’elle a toujours été inscrite « à temps plein » au Collège Bow Valley.

[22]  Le demandeur affirme qu’il est bien établi en droit qu’un agent doit tenir compte des éléments de preuve importants qui contredisent ses conclusions (Cepeda-Gutierrez c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1998] 157 FTR 35, au par. 17). Le demandeur fait donc valoir que la décision contestée était déraisonnable, car l’agent a omis de prendre en considération certains éléments de preuve importants qui contredisaient ses conclusions concernant l’inscription « à temps plein » de Mme Kaur au Collège Bow Valley.

B.  Les arguments du défendeur

[23]  Le défendeur soutient que la décision contestée : (1) ne violait pas le droit du demandeur à l’équité procédurale, car l’agent n’était pas tenu de lui donner l’occasion de répondre à ses préoccupations concernant les éléments de preuve insuffisants; et (2) était raisonnable puisqu’elle appliquait simplement les Instructions relatives à l’exécution des programmes qui se rapportent au sous‑alinéa 205c)(ii). Par conséquent, le défendeur demande à la Cour de rejeter la présente demande de contrôle judiciaire.

(1)  Le manquement à l’équité procédurale

[24]  Le défendeur soutient que l’agent n’était pas tenu de donner au demandeur la possibilité de répondre à ses préoccupations, car il est bien établi qu’il incombe au demandeur de fournir des éléments de preuve suffisants pour démontrer qu’il satisfait aux conditions requises pour obtenir un permis de travail (Sulce c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 CF 1132, aux par. 10 et 11).

[25]  En l’espèce, l’agent a examiné les documents fournis et a conclu qu’ils ne démontraient pas suffisamment que Mme Kaur était toujours inscrite « à temps plein » au Collège Bow Valley. L’agent n’a pas fondé sa décision sur une conclusion relative à la crédibilité ni sur une conclusion concernant les intentions du demandeur. La décision était plutôt fondée sur les exigences énoncées dans les Instructions relatives à l’exécution des programmes applicables.

(2)  Le caractère raisonnable de la décision de l’agent

[26]  Le défendeur soutient que la décision contestée était raisonnable, car les Instructions relatives à l’exécution des programmes qui se rapportent au sous‑alinéa 205c)(ii) ont manifestement été appliquées. Ces instructions prévoient qu’un permis de travail peut être délivré à un étranger s’il établit qu’il est l’époux ou le conjoint de fait d’un étudiant inscrit « à temps plein » dans un établissement d’enseignement postsecondaire public. Le défendeur fait remarquer que l’agent chargé de l’examen est assujetti aux Instructions relatives à l’exécution des programmes et qu’il ne peut pas délivrer de permis de travail à moins d’être convaincu que les exigences sont satisfaites.

[27]  En l’espèce, le défendeur soutient que la décision de l’agent était tout à fait raisonnable, puisque le relevé de notes de Mme Kaur ne fait pas mention de son statut actuel comme étudiante et montre clairement qu’elle a réduit sa charge de cours après le trimestre d’hiver 2018. Par conséquent, l’agent n’a pas pu déterminer si le demandeur répondait aux exigences énoncées dans les Instructions relatives à l’exécution des programmes qui se rapportent au sous‑alinéa 205c)(ii).

VIII.  ANALYSE

[28]  Aucune question relative à l’équité procédurale ne se pose en l’espèce. Comme l’illustre la décision contestée, le permis de travail a été refusé pour une seule raison :

[traduction]

Le Collège Bow Valley n’a fourni aucune lettre confirmant l’inscription à temps plein de l’épouse [du demandeur]. [Le demandeur] n’a pas été en mesure de démontrer qu’il satisfait aux conditions requises pour obtenir un permis de travail ouvert pour un époux au titre du sous‑alinéa 205c)(ii) du Règlement. La demande est rejetée.

[29]  Les motifs et les préoccupations de l’agent découlent directement et manifestement des exigences de la LIPR et du Règlement. Il ressort clairement de la jurisprudence de la Cour qu’un agent n’est pas tenu de faire part de ces préoccupations au demandeur. Voir la décision Hassani, au par. 24.

[30]  Le demandeur affirme avoir fourni à l’agent tous les renseignements nécessaires pour satisfaire aux exigences de la LIPR et du Règlement. L’agent n’avait manifestement aucun doute quant à l’inscription de Mme Kaur au Collège Bow Valley, contrairement à ce qu’a affirmé le demandeur. La seule question à trancher était de savoir si elle était toujours inscrite comme étudiante « à temps plein » dans un établissement d’enseignement postsecondaire public, comme l’exige le sous‑alinéa 205c)(ii) du Règlement.

[31]  Le demandeur ne dit pas qu’il a fourni une lettre du Collège Bow Valley confirmant le statut actuel de Mme Kaur en tant qu’étudiante inscrite « à temps plein ». Dans la lettre d’acceptation de Mme Kaur datée du 26 janvier 2017, il est question de son statut d’étudiante « à temps plein », mais le dossier indique que l’agent était préoccupé par le fait que le relevé de notes actuel de Mme Kaur n’indiquait pas qu’elle était étudiante « à temps plein ». De fait, le relevé de notes montrait plutôt qu’elle avait réduit sa charge de cours après le trimestre d’hiver 2018. Il est donc tout à fait raisonnable de croire qu’en l’absence d’une confirmation concernant le statut d’inscription actuel de Mme Kaur, l’agent ne pouvait pas savoir si elle était toujours inscrite « à temps plein ». Aucune preuve n’a été présentée pour expliquer comment le Collège Bow Valley définit la notion d’étudiant « à temps plein », et les relevés de notes de Mme Kaur laissent à tout le moins entendre que des changements ont été apportés à sa charge de cours. Par conséquent, les préoccupations de l’agent ne sont pas sans fondement.

[32]  Les observations présentées par le conseil à l’agent n’indiquent pas clairement que Mme Kaur était toujours une étudiante « à temps plein », et je ne crois pas qu’il soit possible de dire que l’agent a exigé qu’une lettre d’inscription actuelle soit produite pour qu’un visa puisse être décerné. C’est la lettre initiale qui établissait que Mme Kaur était inscrite « à temps plein ». L’agent laisse donc simplement entendre qu’une preuve plus récente de son inscription « à temps plein » pourrait être accessible, et rien ne laisse entendre que la présentation d’une autre lettre n’aurait pas permis de régler la question hors de tout doute.

[33]  Le visa de Mme Kaur ne saurait constituer une preuve qu’elle est toujours inscrite « à temps plein ». Si c’était le cas, le demandeur n’aurait eu besoin d’aucun autre élément de preuve.

[34]  Il n’y a rien non plus qui laisse entendre qu’il faut présumer que l’agent connaît les exigences pour être considéré comme un étudiant « à temps plein » du Collège Bow Valley.

[35]  Je conviens avec le demandeur qu’il n’aurait pas été déraisonnable pour l’agent d’accepter les éléments de preuve présentés, mais les doutes de l’agent ne sont pas sans fondement et je ne peux pas dire que sa décision était déraisonnable. Il s’agit essentiellement de déterminer le poids à accorder aux éléments de preuve.

[36]  Le demandeur doit fournir tous les éléments de preuve nécessaires pour répondre aux exigences du Règlement, ce que le demandeur n’a pas fait en l’espèce. Voir Belen c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2019 CF 1175, au par. 11, et Hamza c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2013 CF 264, aux par. 22 et 23. Les Instructions relatives à l’exécution des programmes qui se rapportent au sous‑alinéa 205c)(ii) prévoient clairement que le demandeur doit être « l’époux ou le conjoint de fait d’un titulaire de permis d’études qui étudie à temps plein […] ».

[37]  Le fait que Mme Kaur ait peut‑être déjà été une étudiante inscrite « à temps plein » ne signifie pas qu’elle l’était toujours au moment de la présentation de la demande de permis de travail ouvert du demandeur, et c’est à cette date que la demande a été évaluée.

[38]  L’agent a soupesé les éléments de preuve présentés et a conclu qu’il existait un certain doute quant au statut d’étudiante « à temps plein » de l’épouse du demandeur. Il y avait un fondement raisonnable à ce doute, et la Cour n’a pas pour rôle d’apprécier à nouveau la preuve. Voir Vavilov, au par. 125, et Oladihinde c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2019 CF 1246, au par. 16.

[39]  Dans l’ensemble, je ne peux pas dire que la décision contestée était injuste ou déraisonnable du point de vue de l’équité procédurale.

[40]  Les avocats conviennent qu’il n’y a aucune question à certifier, et la Cour est d’accord.


JUGEMENT dans le dossier IMM‑2321‑19

LA COUR STATUE :

  1. La demande est rejetée.

  2. Il n’y a aucune question à certifier.

« James Russell »

Juge

Traduction certifiée conforme

Ce 4e jour de février 2020.

Julie Blain McIntosh, LL.B., trad. a.


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-2321-19

 

INTITULÉ :

PRITPAL SINGH BADIAL c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

CALGARY (ALBERTA)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 21 NOVEMBRE 2019

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LE JUGE RUSSELL

 

DATE DES MOTIFS :

LE 23 JANVIER 2020

 

COMPARUTIONS :

Raj Sharma

 

POUR LE DEMANDEUR

 

David Shiroky

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Stewart Sharma Harsanyi

Calgary (Alberta)

 

POUR LE DEMANDEUR

 

Procureur général du Canada

Calgary (Alberta)

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

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