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Date : 20200131


Dossier : IMM‑4195‑19

Référence : 2020 CF 185

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 31 janvier 2020

En présence de madame la juge Strickland

ENTRE :

OWOLOLA ADULRAZAQ KAZEEM

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

[1]  La Cour est saisie d’une demande de contrôle judiciaire visant la décision du 14 juin 2019 par laquelle la Section d’appel des réfugiés (la SAR) de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié du Canada a confirmé, en vertu du paragraphe 111(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 (la LIPR), la décision de la Section de la protection des réfugiés (la SPR) portant que le demandeur n’est ni un réfugié au sens de la Convention ni une personne à protéger aux termes des articles 96 et 97 de la LIPR, respectivement.

[2]  Pour les motifs qui suivent, la présente demande de contrôle judiciaire est rejetée.

Le contexte

[3]  Le demandeur, Owolola Adulrazaq Kazeem, est un citoyen du Nigéria. Il a quitté ce pays en octobre 2009 et est entré au Canada muni d’un permis d’études. Il a fréquenté l’université pendant un an, et il demeure au Canada depuis. Le demandeur prétend qu’il a reçu, en 2012, un appel téléphonique de sa mère vivant au Nigéria, qui lui a dit qu’elle avait été attaquée et passée à tabac par des individus qu’elle soupçonnait d’appartenir à un groupe musulman. À l’époque, ses agresseurs lui avaient demandé si elle avait un enfant, ce à quoi elle avait répondu par la négative. En 2016, elle l’a de nouveau appelé pour l’informer que d’autres personnes avaient été attaquées à Lagos en 2014. En 2016, un ami du demandeur l’a informé qu’il pouvait demander l’asile au Canada, ce qu’il a fait en mars 2017.

[4]  Le demandeur affirme qu’il craint d’être victime d’attaques aléatoires par des extrémistes musulmans au Nigéria et ajoute qu’il sera persécuté parce qu’il s’est fait tatouer pendant son séjour au Canada et que l’islam interdit les tatouages.

[5]  Le 16 juillet 2018, la SPR a rejeté la demande d’asile du demandeur et conclu qu’il n’avait ni la qualité de réfugié au sens de la Convention ni celle de personne à protéger aux termes des articles 96 et 97 de la LIPR. La question déterminante tenait à l’existence d’une possibilité de refuge intérieur (PRI) à Port Harcourt ou à Ibadan. Le 14 juin 2019, la SAR a confirmé la décision de la SPR. C’est la décision de la SAR qui fait l’objet du présent contrôle judiciaire.

La décision faisant l’objet du contrôle

[6]  La SAR a estimé que le demandeur était crédible et qu’il craignait sincèrement d’être victime de crimes aléatoires après l’agression dont sa mère a été victime.

[7]  La SAR s’est ensuite penchée sur l’analyse de la PRI effectuée par la SPR. Elle a convenu que cette dernière ne s’était pas prononcée sur la question de savoir si le demandeur avait une crainte fondée de persécution ou était exposé à une menace à sa vie ou à un risque de traitements cruels et inusités à Lagos, sa ville d’origine. Cependant, la SAR a affirmé, en s’appuyant sur l’arrêt Kanagaratnam c Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), 194 NR 46, [1996] ACF no 75 (CA) (QL/Lexis) (Kanagaratnam), rendu par la Cour d’appel fédérale, qu’il n’est pas nécessaire de déterminer si un demandeur d’asile est exposé à un risque dans sa région d’origine. La SAR a estimé que la SPR avait eu raison de conclure qu’il existait une PRI valide à Port Harcourt ou à Ibadan, peu importe qu’il existe ou non un risque à Lagos, et que l’analyse de la SPR au sujet de la PRI était correcte.

[8]  La SAR a également souscrit à la conclusion de la SPR portant que la crainte du demandeur d’être victime d’attaques aléatoires par des extrémistes musulmans dans l’une ou l’autre des PRI était conjecturale. La SAR a fait remarquer que le demandeur n’avait jamais été attaqué ni menacé et que comme sa mère avait dit à ses agresseurs qu’elle n’avait pas de fils ceux-ci ne savaient probablement pas qu’il existait. Par ailleurs, sa mère n’avait eu aucun contact avec ses assaillants depuis 2012.

[9]  Pour la SAR, rien n’indiquait que le demandeur devrait s’isoler pour vivre dans l’une ou l’autre des PRI proposées, que les agents de persécution étaient encore intéressés par sa mère ou qu’ils soient même au courant de l’existence du demandeur. Par conséquent, la SAR a conclu que les agents de persécution n’apprendraient pas où se trouvaient les PRI du demandeur.

[10]  La SAR a également examiné la demande d’asile sur place que le demandeur a présentée en raison de ses tatouages et du fait que les tatouages seraient interdits par l’islam. Ayant noté la conclusion de la SPR portant que le demandeur n’avait fourni aucune preuve établissant que les personnes ayant un profil semblable au sien sont prises pour cibles au Nigéria en raison de leurs tatouages, la SAR a déclaré avoir également examiné le cartable national de documentation (CND) de manière indépendante et tiré une conclusion semblable quant à l’absence d’une telle preuve. La SAR a souscrit à l’évaluation de la SPR selon laquelle les tatouages du demandeur ne lui permettent pas de présenter une demande d’asile sur place et ne compromettent pas non plus la sécurité des PRI. La SAR a également souscrit à l’évaluation par la SPR du caractère raisonnable des PRI proposées, et elle a conclu que l’analyse de la SPR était claire, rationnelle et correcte. Comme le demandeur dispose d’une PRI, la SAR a conclu que sa demande d’asile devait échouer.

Les questions en litige

[11]  Le demandeur soulève deux questions en litige, soit celle de savoir si le raisonnement tenu par la SAR à l’égard de la PRI était cohérent et celle de savoir si l’analyse relative à la PRI était pertinente au regard de la demande d’asile. À mon avis, ces questions se rapportent à la question plus générale de savoir si la décision de la SAR était raisonnable.

La norme de contrôle

[12]  Aucune des parties n’aborde dans ses observations écrites la norme de contrôle applicable. Lorsqu’ils ont comparu devant moi, les avocats ont fait valoir que la norme du caractère raisonnable demeure celle que la Cour doit utiliser pour évaluer le bien‑fondé de la décision de la SAR, et je suis d’accord.

[13]  Dans l’arrêt Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Vavilov, 2019 CSC 65 (Vavilov), la Cour suprême du Canada a établi une présomption voulant que la norme de la décision raisonnable soit la norme applicable chaque fois qu’une cour contrôle une décision administrative (Vavilov, aux par. 16, 23, 25). Cette présomption peut être réfutée dans deux types précis de situations (Vavilov, aux par. 17, 69). En l’espèce, la norme présumée, soit celle de la décision raisonnable, s’applique parce que la SAR a le pouvoir délégué de rendre la décision et parce qu’il n’existe aucune des circonstances qui pourraient réfuter la présomption.

[14]  Dans l’arrêt Vavilov, la Cour suprême a également décrit les modalités de l’examen selon la norme de la décision raisonnable (aux par. 73 à 145). À cet égard, elle a déclaré que, « [a]fin de remplir la promesse formulée dans l’arrêt Dunsmuir d’assurer “la légalité, la rationalité et l’équité du processus administratif et de la décision rendue”, le contrôle selon la norme de la décision raisonnable doit comporter une évaluation sensible et respectueuse, mais aussi rigoureuse, des décisions administratives : par. 28 » (Vavilov, au par. 12). La cour de révision doit tenir compte du résultat de la décision administrative eu égard au raisonnement sous-jacent à celle-ci afin de s’assurer que cette décision dans son ensemble est transparente, intelligible et justifiée (Vavilov, au par. 15).

[15]  Au chapitre de la déférence, la cour de révision doit examiner la décision d’un décideur administratif à la lumière des contraintes d’ordre contextuel particulières qui lui sont imposées, interpréter ses motifs à la lumière du dossier et en tenant dûment compte du contexte administratif dans lequel ils sont fournis, et accorder une attention respectueuse à l’expérience et à l’expertise établies du décideur (Vavilov, aux par. 31, 88 à 98).

[16]  Lorsqu’une décision est fondée sur une analyse intrinsèquement cohérente et rationnelle et qu’elle est justifiée au regard des contraintes juridiques et factuelles auxquelles le décideur est assujetti, elle sera jugée raisonnable et exigera de la cour de révision qu’elle fasse preuve de retenue (Vavilov, au par. 85).

La décision de la SAR était-elle raisonnable?

La position du demandeur

[17]  Les observations du demandeur sont alambiquées et avancent de grandes analyses théoriques qui ne sont pas appuyées par des renvois à la jurisprudence ou à d’autres sources. Le demandeur soutient essentiellement que les décisions de la SAR et le SPR sont incohérentes parce qu’elles n’ont pas analysé le risque auquel il craignait d’être exposé à Lagos, sa ville d’origine. Le demandeur reconnaît qu’il n’est [traduction] « pas nécessaire de déterminer si un demandeur d’asile est exposé à un risque dans sa région d’origine avant d’examiner la sécurité d’un autre lieu ». Or, il affirme aussi que, dans le contexte d’une demande d’asile, il est essentiel que l’analyse du risque par le décideur tienne compte du risque appréhendé par le demandeur d’asile, qui l’aurait amené à s’enfuir. Selon le demandeur, puisqu’il omet cette étape, le raisonnement de la SAR et de la SPR était incohérent. En particulier, le demandeur affirme qu’une [traduction] « analyse [de la PRI] n’aurait été adéquate que si la [SAR] avait tenu compte du risque établi ou présumé dans le lieu d’origine et qu’elle l’avait comparé au refuge dans la [PRI] envisagée ».

[18]  Le demandeur invoque à l’appui de son argument l’arrêt Kanagaratnam, mais tente d’établir une distinction sur la base des faits. Il soutient que, dans cet arrêt, la demanderesse ne prétendait pas que le risque allégué existait à l’extérieur de sa ville d’origine alors qu’en l’espèce, le demandeur affirme être également exposé à un risque à l’endroit de la PRI. Toujours d’après le demandeur, la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Kanagaratnam n’a pas dit qu’il ne fallait jamais considérer le risque existant dans la ville d’origine, et cet arrêt appuie simplement l’idée voulant que la conclusion relative à l’existence d’une PRI appelle une démarche axée sur les faits.

[19]  Le demandeur conteste également la pertinence de l’analyse sur la PRI. Il affirme avoir déclaré durant son témoignage qu’il craignait d’être victime d’une attaque aléatoire par des terroristes islamiques n’importe où au Nigéria. Ainsi, il n’est pas certain de comprendre pourquoi la SPR et la SAR ont procédé à une analyse de la PRI. Il était essentiel d’évaluer en premier lieu le risque à Lagos pour déterminer s’il convenait ou non d’entamer une analyse de la PRI. Comme la SPR et la SAR n’ont pas procédé de cette manière, l’analyse de la PRI n’avait aucun sens compte tenu du contexte dans lequel elle s’inscrivait. Vu que les PRI proposées, soit Port Harcourt et Ibadan, sont situées à une distance semblable de Lagos, dans le sud du Nigéria, et comme ni la SAR ni la SPR n’ont conclu que le risque dans ces villes était différent de celui existant à Lagos, l’analyse sur la PRI constituait un faux-fuyant et était dépourvue de pertinence.

La position du défendeur

[20]  Le défendeur fait valoir que la question de la PRI est déterminante quant à l’issue d’une demande d’asile (Magusic c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2014 CF 823, au par. 16 (Magusic)), et que l’argument selon lequel l’évaluation de cette question pourrait être dépourvue de pertinence revient à ne pas tenir compte du fait qu’une demande d’asile ne peut aboutir lorsqu’il existe une PRI valide.

[21]  Il ajoute par ailleurs que dans l’arrêt Kanagaratnam, la Cour d’appel fédérale a affirmé de manière décisive que l’évaluation du risque dans une région d’origine n’est pas un prérequis pour conclure à l’existence d’une PRI, et elle a confirmé le principe bien établi portant que lorsqu’une telle conclusion est tirée, la demande d’asile ne peut aboutir. Pour le défendeur, l’interprétation de l’arrêt Kanagaratnam retenue par le demandeur déforme la décision de la Cour d’appel fédérale et ne tient pas compte du fait que cette décision a été rendue en réponse à une question certifiée.

[22]  Le défendeur soutient que l’analyse de la PRI effectuée par la SAR était aussi cohérente et correcte. Dans la décision Sarker c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2005 CF 353 (Sarker), la Cour a conclu que la SPR pouvait faire abstraction de la question de savoir si le demandeur était exposé à un risque de persécution dans sa région d’origine, ou décider de ne pas l’aborder, et qu’elle pouvait plutôt directement passer à l’analyse de la PRI, pour autant qu’elle applique le bon critère en la matière et que sa conclusion quant à l’existence d’une PRI ne soit pas manifestement déraisonnable, c’est-à-dire non étayée par la preuve (Sarker, au par. 8). En l’espèce, les motifs de la SAR démontrent que la SPR et la SAR ont examiné la preuve dont elles disposaient et appliqué le bon critère pour déterminer si le demandeur pouvait se prévaloir d’une PRI. Par conséquent, la Cour ne devrait pas intervenir.

Analyse

[23]  Le point de départ de notre analyse est l’arrêt Kanagaratnam, dans lequel la Cour d’appel fédérale a fait remarquer que la SPR avait, dans cette affaire, déterminé que la demanderesse disposait d’une PRI et qu’il n’était donc pas nécessaire de trancher aussi la question de savoir si sa crainte de persécution était autrement fondée. Compte tenu de l’existence d’une PRI, la SPR a conclu que la demanderesse ne pouvait obtenir la qualité de réfugié. Saisie du contrôle judiciaire de la décision de la SPR, la Cour a conclu que la question pertinente était de savoir si la SPR avait dûment déterminé que la demanderesse pouvait se prévaloir d’une PRI raisonnable. Concluant que c’était le cas, la Cour a rejeté la demande, mais elle a certifié la question suivante :

Faut-il trancher au préalable la question de savoir si un demandeur a raison de craindre d’être persécuté dans la région dont il est originaire avant d’examiner la question de la possibilité de refuge dans une autre partie du même pays?

[24]  La Cour d’appel fédérale a estimé que ce n’était pas nécessaire :

4  La réponse à cette question est « NON ». En examinant s’il existe une possibilité raisonnable de refuge dans une autre partie du même pays, la Commission doit bien entendu tenir compte de l’ensemble des circonstances pertinentes. C’est ce qu’elle a fait en l’espèce. Étant donné qu’une possibilité de refuge dans une autre partie du même pays existait, la requérante ne pouvait, par définition, avoir raison de craindre d’être persécutée dans le pays dont elle a la nationalité. Ainsi, bien que la Commission puisse certainement le faire si elle en décide ainsi, elle n’était aucunement tenue en droit de décider, au préalable, si la requérante avait raison de craindre d’être persécutée dans la région dont elle était originaire lorsqu’elle s’est prononcée sur la question de la possibilité de refuge dans une autre partie du même pays.

[25]  Le demandeur s’arrête sur l’expression « doit [...] tenir compte de l’ensemble des circonstances pertinentes » pour faire valoir que dans certains cas, la SPR doit d’abord se demander si des actes de persécution ont été commis dans la région d’origine du demandeur avant de se lancer dans l’analyse de la PRI. Il soutient à cet égard que les faits rapportés dans les décisions où l’arrêt Kanagaratnam est cité sont différents de ceux en l’espèce, puisqu’il craint d’être exposé au même risque dans sa région d’origine que dans les PRI, semblables sur le plan démographique et géographique à ladite région. À mon avis, ce n’est pas ce que laisse entendre l’arrêt Kanagaratnam. Les décisions citées par le demandeur n’étayent pas non plus le moindrement cette observation. À mon avis, la Cour d’appel fédérale s’est montrée très claire lorsqu’elle a répondu « Non » à la question de savoir s’il fallait, avant de se pencher sur la PRI, déterminer si le demandeur d’asile avait une crainte fondée de persécution dans sa région d’origine. La Cour d’appel fédérale a ensuite examiné ce qu’exigeait l’évaluation visant à déterminer s’il existe une PRI viable. Elle a précisé que la SPR doit, au titre de cette évaluation, tenir compte de toutes les circonstances pertinentes. Cela signifie que la SPR ou la SAR, lorsqu’elles tentent de déterminer s’il existe une PRI viable, doivent examiner l’ensemble des circonstances pertinentes. À mon avis, cela oblige la SPR et la SAR à définir et à appliquer correctement le critère relatif à la PRI.

[26]  Ce point de vue est appuyé par la décision Sarker. Dans cette décision, les parties et la Cour ont convenu que lorsqu’elle n’est pas erronée, la conclusion relative à l’existence d’une PRI est décisive. La juge Snider a déclaré qu’une telle conclusion signifie essentiellement que le demandeur d’asile ne sera pas persécuté dans la PRI identifiée. Elle a ensuite fait remarquer que les parties avaient eu des discussions quant aux inférences qui pouvaient, le cas échéant, être tirées lorsque la SPR conclut à l’existence d’une PRI sans se prononcer clairement sur le risque de persécution auquel est exposé le demandeur d’asile dans sa région d’origine. Dans cette affaire, le demandeur faisait valoir qu’il fallait conclure que la SPR avait implicitement reconnu que sa crainte de persécution était fondée. La juge Snider a déclaré :

[7]  Je suis d’avis qu’il n’est pas important ni nécessaire que je me prononce sur le bien-fondé de cette prétention du demandeur pour rendre une décision sur la présente demande. La question de l’existence d’une PRI constitue un élément distinct de l’analyse de la Commission qui se suffit à lui-même (Tharmaratnam c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1995] A.C.F. no 92 (C.F. 1re inst.)). Pour dire les choses simplement, lorsqu’il est constaté que le demandeur dispose d’une PRI, ce demandeur n’est pas un réfugié ni une personne à protéger (Zalzali c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1991] 3 C.F. 605 (C.A.F.), Rasaratnam c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1992] 1 C.F. 706 (C.A.F.)). Lorsque la Commission s’est demandé si le demandeur disposait d’une PRI, elle pouvait conclure qu’il faisait face à un risque de persécution à Bogra, elle pouvait prendre pour hypothèse (sans se prononcer définitivement sur cette question) qu’il était exposé à un risque de persécution ou elle pouvait faire abstraction de l’ensemble de la question. Dans la mesure où :

a)  la Commission a appliqué le bon critère dans son analyse de la question de la PRI;

b)  sa conclusion sur l’existence d’une PRI n’était pas manifestement déraisonnable, dans le sens où elle n’était étayée par aucun élément de preuve (Chorny c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2003] A.C.F. no 1263 (C.F.)); Charway c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2004] A.C.F. no 701 (C.F.));

sa décision doit être confirmée.

[27]  La juge Snider a estimé que la question déterminante était donc de savoir si la décision de la SPR à l’égard de la PRI était étayée par la preuve, ce qui était le cas dans l’affaire dont elle était saisie.

[28]  Le raisonnement tenu dans la décision Sarker a ensuite été adopté et suivi dans la décision Nzayisenga c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2012 CF 1103 (Nzayisenga), où la Cour a conclu que la SPR avait formulé et appliqué le bon critère dans son analyse de la PRI. Ses conclusions, étayées par la preuve, étaient raisonnables. Pour la Cour, le fait que la SPR n’avait pas tiré de conclusion ni appliqué de présomption quant à l’existence d’une crainte fondée de persécution dans la région dont le demandeur était originaire était sans importance (Nzayisenga, aux par. 34 à 38).

[29]  Comme l’indique la décision Nzayisenga, pour avoir droit à une protection au titre des articles 96 ou 97 de la LIPR, le demandeur d’asile doit être exposé à un risque dans toutes les régions du pays dont il s’est enfui. S’il n’est exposé à aucun risque dans une région donnée (la PRI), il ne remplit alors pas les exigences requises pour obtenir une protection, peu importe qu’il soit exposé ou non à un risque dans la région qu’il a fuie (Nzayisenga, au par. 34). En d’autres mots, « quand le demandeur d’asile a une possibilité de refuge intérieur viable, la crainte n’est pas fondée et, par conséquent, le critère applicable à la demande d’asile ne peut être respecté (Kanagaratnam c Canada (Emploi et Immigration), [1996] ACF no 75 (CA)) » (Magusic, au par. 11).

[30]  En l’espèce, la SAR était donc en droit de passer directement à l’analyse de la PRI, et la question de savoir si les PRI sont semblables sur le plan géographique et démographique ou si le demandeur craint d’être exposé au même risque dans ces lieux n’a aucune importance – pour autant que l’analyse de la PRI elle-même ait été dûment effectuée. C’est là la question essentielle dans la présente affaire, car une conclusion portant qu’il existe une PRI revient effectivement à déterminer que le demandeur ne sera pas persécuté dans la PRI en question (Sarker, au par. 5). De même, l’argument du demandeur selon lequel l’analyse de la PRI était incohérente et dépourvue de pertinence parce qu’elle n’abordait pas le risque auquel il prétendait être exposé à Lagos, doit également échouer pour autant que l’analyse de la PRI effectuée par la SAR soit raisonnable.

[31]  Par ailleurs, bien que le demandeur invoque également la décision Dakpokpo c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2017 CF 580 (Dakpokpo), ainsi que les décisions qui y sont citées, je ne suis pas convaincue qu’elles étayent sa position. Dans la décision Dakpokpo, la demanderesse affirmait que la SAR avait eu tort de ne pas se pencher sur les conclusions de la SPR en matière de crédibilité ou de ne pas effectuer sa propre évaluation en la matière, et que la viabilité d’une PRI était inextricablement liée à la crédibilité des allégations du demandeur. Le juge Zinn, en désaccord, a déclaré ce qui suit :

[9]  À mon avis, ni la décision Torres ni l’affaire qui y est citée (Bokhari c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2005 CF 574) n’appuient la position prise ici par la demanderesse. Dans les deux affaires précitées, la Cour a conclu qu’il faut considérer que le tribunal en passant directement à la question d’une possibilité de refuge intérieur avait accepté la preuve du demandeur. Lorsque cette preuve contredit la conclusion concernant la possibilité de refuge intérieur, comme c’était le cas dans ces deux affaires, le tribunal doit d’abord examiner les autres questions avant de se pencher sur la possibilité de refuge intérieur. Ces deux affaires ne défendent pas la proposition audacieuse selon laquelle, lorsque la crédibilité est en cause, elle doit d’abord faire l’objet d’une évaluation avant qu’une possibilité de refuge intérieur ne soit examinée.

[10]  Je suis d’accord avec le défendeur pour dire que ce n’est pas une erreur pour la SAR de conclure que la possibilité de refuge intérieur était déterminante, car les questions de crédibilité soulevées par la SPR en l’espèce (les traditions du clan de la demanderesse, sa sortie du Nigéria et son entrée au Canada) n’ont eu aucune incidence sur l’analyse de la possibilité de refuge intérieur. De plus, en règle générale, le fait de passer immédiatement à une analyse de la possibilité de refuge intérieur ne constitue pas une erreur si l’analyse tient compte de la situation particulière d’un demandeur, ainsi que des éléments de preuve testamentaire et documentaire dont disposait le tribunal. Ce fut le cas là aussi.

[32]  La décision Dakpokpo portait sur la question de savoir si la SPR devait évaluer la crédibilité avant d’examiner la viabilité d’une PRI, ce qui ne correspond pas aux circonstances de la présente affaire puisque la SAR a conclu que le demandeur était crédible.

[33]  La décision Bokhari c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2005 CF 574 (Bokhari), citée dans la décision Dakpokpo, comporte huit paragraphes et repose ultimement sur la conclusion portant que la déclaration par laquelle la SPR avait indiqué qu’elle s’intéressait surtout à la PRI et à la protection de l’État avait induit l’avocat en erreur en l’empêchant de présenter des observations sur la crédibilité, qui s’est révélée être au cœur de la décision de la SPR. Dans la décision Bokhari, la Cour a affirmé que la déclaration erronée pouvait uniquement signifier que la crédibilité ainsi que la crainte objective et subjective avaient été établies, car « [a]près tout, la protection de l’État et la PRI (les sujets qui intéressent le plus le commissaire) n’entrent en ligne de compte qu’une fois que le récit du demandeur est accepté (c’est‑à‑dire que l’on a admis sa crédibilité) et que sa crainte objective et subjective est établie » (au par. 5). Le premier paragraphe de la décision Torres c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2011 CF 581 (Torres) reprend cet extrait de la décision Bokhari, sans le commenter. Cependant, la Cour a déclaré ensuite que l’existence d’une PRI peut en soi se révéler déterminante, mais que la décision de la SPR concernant la viabilité d’une PRI dans les régions proposées doit attester un examen de l’ensemble de la preuve (Torres, aux par. 1 et 2). Aux paragraphes 1 et 2 de cette décision, la conclusion de la SPR à l’égard de la PRI a été jugée déraisonnable parce qu’elle contredisait la preuve dont cette dernière disposait.

[34]  Aucune de ces décisions ne fait référence à l’arrêt Kanagaratnam de la Cour d’appel fédérale, pas plus qu’elles n’abordent le point avancé par le demandeur en l’espèce, à savoir que le même risque est allégué dans sa ville d’origine et dans les PRI. Dans la mesure où ces décisions contredisent l’arrêt Kanagaratnam, je refuse de les suivre.

[35]  Je fais remarquer aussi que dans la décision Sarker, il a été établi que la question de l’existence d’une PRI constitue un élément distinct de l’analyse de la SPR qui « se suffit à lui-même » (au par. 7). Cela ressort des cas où la décision de la SPR est confirmée, même si des erreurs ont été relevées dans l’analyse d’un autre aspect de la demande d’asile, parce qu’on a aussi raisonnablement conclu à l’existence d’une PRI viable et que cette conclusion est déterminante (voir, par exemple, Gutierrez c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 CF 266, au par. 54).

[36]  Lorsque la SPR analyse la question de la PRI, il incombe au demandeur de fournir une preuve crédible établissant, selon la prépondérance des probabilités, qu’il existe une possibilité sérieuse de persécution dans la PRI. Que la SPR aborde ou non la crédibilité dans son analyse avant de passer à la question de la PRI, le point essentiel demeure qu’elle doit raisonnablement, dans son évaluation de la question, examiner l’ensemble de la preuve pertinente pour prendre sa décision.

[37]  En l’espèce, la SAR a conclu que le demandeur était crédible. Elle a reconnu qu’il craignait sincèrement d’être victime de crimes aléatoires après l’agression de sa mère, et elle a estimé, dans son analyse de la PRI, que cette crainte était conjecturale. Par ailleurs, peu importe si le même risque de persécution est invoqué à Lagos et dans les PRI, le fait que ce même risque puisse exister ou non à Lagos n’a aucune pertinence si l’analyse de la PRI est raisonnable. C’est le fait que le demandeur ne sera pas exposé à un risque dans les PRI qui est important.

[38]  Ce principe est illustré dans la décision Dakpokpo, dans laquelle le juge Zinn a explicitement reconnu qu’il n’est pas erroné pour le décideur d’examiner immédiatement la PRI, pour autant que l’analyse de cette question tienne dûment compte de la situation du demandeur d’asile. Cette démarche est conforme à la conclusion tirée par la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Kanagaratnam. Par conséquent, comme je l’ai déjà conclu, la SAR n’a pas commis d’erreur en n’abordant pas d’abord la crainte fondée de persécution du demandeur à Lagos, et la question essentielle est de savoir si son analyse de la PRI était raisonnable.

[39]  Le critère servant à établir l’existence d’une PRI viable comporte deux volets. Premièrement, le décideur doit être convaincu, selon la prépondérance des probabilités, qu’il n’existe aucune possibilité sérieuse que le demandeur d’asile soit persécuté dans la PRI. Deuxièmement, il doit être objectivement raisonnable de s’attendre à ce que le demandeur cherche refuge dans la région du pays considérée comme une PRI (Rasaratnam c Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1992] 1 CF 706, [1991] ACF no 1256 (CA) (QL/Lexis), au par. 10 (Rasaratnam)). Il incombe au demandeur de montrer qu’une PRI n’est pas viable (Thirunavukkarasu c Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1994] 1 CF 589, [1993] ACF 1172 (CA) (QL/Lexis), aux par. 5 et 6; voir aussi Quebrada Batero c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2017 CF 988, au par. 14).

[40]  La SPR a explicitement cité la décision Rasaratnam et a correctement formulé dans sa décision le critère susmentionné avant de conclure que le demandeur ne s’était pas acquitté de son fardeau. La SAR a convenu que le critère, tel qu’il a été formulé par la SPR, était correct et elle s’est attelée à évaluer l’analyse effectuée par cette dernière au titre de chaque volet du critère.

[41]  La SAR a convenu que le risque d’attaques aléatoires par des extrémistes musulmans dans l’une ou l’autre des PRI était simplement conjectural. La SPR a conclu que le demandeur avait indiqué durant son témoignage qu’il craignait d’être victime d’attaques aléatoires par des radicaux musulmans, y compris dans les PRI proposées; elle a conclu que cette crainte était conjecturale, notant que le demandeur ne se trouvait pas au Nigéria en 2012 lorsque sa mère a été attaquée et qu’il a affirmé que sa mère avait dit à ses agresseurs qu’elle n’avait pas de fils. La SPR a conclu qu’elle ne disposait pas d’une preuve suffisante établissant que des membres de ce groupe musulman avaient ciblé ou cibleraient le demandeur dans l’une ou l’autre des PRI proposées ou confirmant que le groupe musulman avait l’intérêt, la motivation ou les ressources nécessaires pour le retrouver ou lui faire du mal dans l’une ou l’autre des PRI. Par ailleurs, comme le formulaire Fondement d’une demande d’asile du demandeur ne faisait pas référence à Boko Haram, la SPR a conclu qu’il n’avait pas établi qu’il s’agissait du prétendu groupe ayant attaqué sa mère. La SAR a souscrit à l’évaluation de la SPR portant que le risque était conjectural et a ajouté que la mère du demandeur n’avait eu aucun contact avec ses assaillants depuis 2012. La SAR a également écarté la jurisprudence invoquée par le demandeur à l’appui de son argument soumis en appel et selon lequel la SPR ne s’était pas posé la question de savoir si les extrémistes musulmans finiraient par apprendre l’emplacement de la PRI, exposant ainsi le demandeur à un risque et invalidant de ce fait l’analyse sur la PRI.

[42]  Je ne relève aucune erreur dans l’analyse de la SAR ni dans sa conclusion portant que rien n’indiquait que le demandeur allait devoir s’isoler de sa mère ou de quiconque afin de vivre dans l’une ou l’autre des PRI. Cette conclusion reposait sur le fait que l’attaque dont sa mère avait été victime était aléatoire, qu’il n’y avait pas eu d’autres menaces ou communication depuis 2012, et que rien n’indiquait que les agents de persécution étaient encore intéressés par le demandeur ou qu’ils soient même au courant de son existence. La SAR a correctement abordé la question de la PRI en considérant la nature de la menace associée aux acteurs aléatoires non étatiques que le demandeur prétendait craindre et a raisonnablement conclu qu’ils n’apprendraient pas où il se trouvait. Le demandeur n’invoque aucune preuve objective dont la SAR aurait fait abstraction dans son analyse.

[43]  La conclusion de la SAR portant que la demande sur place du demandeur était sans fondement est également raisonnable. La SPR a conclu que cette demande n’avait pas été établie, car le demandeur n’avait pas fourni suffisamment d’éléments de preuve attestant qu’une personne ou un groupe le ciblerait en raison de ses tatouages et que ce danger était conjectural. La SAR, qui a pris acte de cette conclusion, a précisé avoir mené un examen indépendant du CND, qui n’a révélé aucune preuve documentant la persécution ou le mauvais traitement au Nigéria des personnes tatouées. Le demandeur ne conteste pas cette conclusion. La SAR a conclu que les tatouages du demandeur ne compromettaient pas sa sécurité dans les PRI proposées. À mon avis, en l’absence de preuve objective relative au risque, la conclusion de la SAR était justifiée et raisonnable.

[44]  S’agissant du deuxième volet du critère relatif à la PRI, à savoir qu’il doit être objectivement raisonnable de s’attendre à ce qu’un demandeur d’asile cherche refuge dans la région du pays considérée comme une PRI, la SAR a estimé que la SPR avait évalué correctement le caractère raisonnable des PRI. La SAR a fait remarquer que la SPR avait conclu que le demandeur avait fait des études secondaires au Nigéria, des études universitaires au Canada, qu’il parlait anglais et yoruba, qu’il détenait une expérience professionnelle dans le domaine industriel et qu’il était musulman. La SPR a également examiné la preuve objective, estimant que les Nigérians ont le droit de résider n’importe où dans ce pays, qu’environ la moitié de la population des PRI est musulmane et que les langues anglaise et yoruba y sont parlées couramment. La SPR a estimé que le demandeur serait en mesure de s’adapter à la vie dans l’une ou l’autre des PRI et qu’il pourrait avoir accès à des services en matière de logement, d’emploi et d’éducation. La SAR a souscrit à cette évaluation et a fait remarquer également que le caractère raisonnable des PRI n’avait pas été contesté dans le cadre de l’appel dont elle était saisie.

[45]  Je note que la SPR a conclu qu’il était objectivement raisonnable compte tenu de l’ensemble des circonstances, y compris la situation personnelle du demandeur, que le demandeur déménage dans l’une ou l’autre des PRI. Je ne relève aucune erreur dans l’évaluation et la confirmation par la SAR de cette conclusion. De plus, s’agissant d’évaluer le second volet du critère de la PRI et la conclusion portant qu’il était objectivement raisonnable que le demandeur cherche refuge dans les PRI proposées, la SAR a tenu compte de toutes les circonstances pertinentes (Kanagaratnam, au par. 4).

[46]  Ayant examiné l’issue de la décision de la SAR à la lumière du raisonnement qui la sous-tend, je suis convaincue que cette décision dans son ensemble est transparente, intelligible et justifiée (Vavilov, au par. 15). Par conséquent, l’analyse de la PRI par la SAR était raisonnable.


JUGEMENT dans le dossier IMM‑4195‑19

LA COUR STATUE :

1.  La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

2.  Aucuns dépens ne sont adjugés.

3.  Aucune question de portée générale n’a été proposée aux fins de certification, et aucune n’est soulevée.

« Cecily Y. Strickland »

Juge

Traduction certifiée conforme

Ce 7e jour d’avril 2020.

Julie Blain McIntosh, LL.B., trad. a.


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM‑4195‑19

 

INTITULÉ :

OWOLOLA ADULRAZAQ KAZEEM c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

WINNIPEG (MANITOBA)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 20 JANVIER 2020

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LE JUGE STRICKLAND

 

DATE DES MOTIFS :

LE 31 JANVIER 2020

 

COMPARUTIONS :

DAVID MATAS

DAVID GROHMUELLER

POUR LE DEMANDEUR

POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

DAVID MATAS

AVOCAT

WINNIPEG (MANITOBA)

 

POUR LE DEMANDEUR

PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

WINNIPEG (MANITOBA)

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

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