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Date : 20200225


Dossier : IMM‑3297‑19

Référence : 2020 CF 295

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Toronto (Ontario), le 25 février 2020

En présence de monsieur le juge Diner

ENTRE :

BUNMI TOMILOLA OSUN,

OLUWANISUN FERANMI OSUN,

FARAYOLA BRENDA OSUN

ET OLUWADARASMI ABISOLA OSUN

demandeurs

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

défendeurs

JUGEMENT ET MOTIFS

[1]  La Cour est saisie d’une demande de contrôle judiciaire par laquelle les demandeurs contestent la décision portant rejet de leur demande de résidence permanente fondée sur des considérations d’ordre humanitaire. Je conclus que l’évaluation contestée comportait des lacunes, particulièrement en ce qui concerne la prise en considération de l’intérêt supérieur des enfants. J’accueillerai donc la présente demande de contrôle judiciaire.

I.  Contexte

[2]  Mme Osun et ses trois enfants mineurs sont des citoyens du Nigéria. Les trois enfants sont actuellement inscrits à l’école au Canada, et Mme Osun travaille comme préposée aux services de soutien à la personne. La famille est arrivée au Canada en septembre 2016 et a présenté une demande d’asile à la Section de la protection des réfugiés [la SPR]. Cette demande a été rejetée en décembre 2016.

[3]  La famille a interjeté appel de cette décision défavorable devant la Section d’appel des réfugiés [la SAR], mais l’appel a été rejeté en mai 2017. De même, la Cour a rejeté la demande d’autorisation en vue du contrôle judiciaire de la décision de la SAR. Les demandeurs ont ensuite présenté, en septembre 2018, une demande d’examen des risques avant renvoi [la demande d’ERAR], qui a été rejetée en février 2019.

[4]  Les demandeurs ont présenté leur demande fondée sur des considérations d’ordre humanitaire à peu près en même temps que leur demande d’ERAR. Par une décision datée du 13 mars 2019, un agent principal d’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada [l’agent] a rejeté la demande fondée sur des considérations d’ordre humanitaire. Il s’agit de cette décision qui fait l’objet du présent contrôle judiciaire.

[5]  Dans la décision, l’agent a commencé par citer largement les décisions de la SPR et de la SAR, faisant observer que ces deux tribunaux ont conclu au manque de crédibilité des déclarations de Mme Osun concernant sa bisexualité et à l’absence de risques pour elle au Nigéria.

[6]  L’agent a ensuite examiné les difficultés que subiraient les demandeurs en cas de renvoi au Nigéria. Il a indiqué que la demande fondée sur des considérations d’ordre humanitaire contenait certains des éléments de preuve déjà produits dans le cadre de la demande d’asile et de l’appel, et que les demandeurs n’avaient pas abordé les conclusions défavorables tirées sur leur crédibilité par la SPR et la SAR. Il a conclu qu’il ne disposait pas d’éléments de preuve objective suffisants pour établir que les demandeurs seraient exposés à des difficultés au Nigéria en raison de l’orientation sexuelle de Mme Osun. L’agent a cependant ajouté qu’ils éprouveraient certaines difficultés en cas de retour au Nigéria après une absence de presque trois ans et a donc accordé [traduction] « le poids qu’il convient » à ce facteur.

[7]  L’agent a ensuite examiné le degré d’établissement de Mme Osun au Canada, prenant note des éléments de preuve démontrant qu’elle a suivi des cours de niveau collégial, qu’elle occupe un poste de préposée aux services de soutien à la personne et qu’elle est membre d’une église, en plus des lettres d’appui qui accompagnaient la demande. L’agent a reconnu que Mme Osun a déployé des efforts louables en vue de s’établir au Canada et il a accordé [traduction] « le poids qu’il convient » à ce facteur. Cependant, il a aussi fait observer que Mme Osun a bénéficié de [traduction] « l’application régulière de la loi dans le cadre du programme d’immigration et de protection des réfugiés, qu’on lui a donc offert les outils et les possibilités nécessaires pour acquérir un certain degré d’établissement au sein de la société canadienne », que son degré d’établissement [traduction] « n’a rien d’inhabituel » et que la rupture de ses nouveaux liens d’amitié ne lui [traduction] « causerait pas de difficultés » justifiant la prise de mesures spéciales pour des motifs d’ordre humanitaire.

[8]  Enfin, l’agent a déclaré avoir accordé [traduction] « une attention particulière » à l’intérêt supérieur des trois enfants. Il a constaté l’insuffisance d’éléments de preuve démontrant que leur renvoi au Nigéria [traduction] « compromettrait leur bien-être ». Il a reconnu que leur intérêt serait mieux servi au Canada et que le renvoi perturberait leur vie, mais que cette perturbation serait minime puisque les enfants resteraient avec leur mère (soit leur principal dispensateur de soins), et qu’ils pourraient renouer avec leur père et leur famille élargie, n’ayant été absents du Nigéria que pendant moins de trois ans. L’agent a admis la différence des niveaux de vie entre le Nigéria et le Canada, mais a ajouté que le but du pouvoir discrétionnaire fondé sur des considérations d’ordre humanitaire n’est pas de compenser les différences de cette nature. Il a terminé en déclarant avoir accordé [traduction] « un poids considérable » à l’intérêt supérieur des enfants, mais a conclu que ce facteur ne justifiait pas non plus la prise de mesures spéciales pour des motifs d’ordre humanitaire.

II.  Analyse

[9]  Les demandeurs contestent le bien-fondé de la décision, mais ne soulèvent aucune question d’équité procédurale. En conséquence, les parties conviennent que la norme de la décision raisonnable s’applique (Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Vavilov, 2019 CSC 65, au par. 23 [Vavilov]). Il s’ensuit que je dois établir si la décision se justifie au regard des contraintes factuelles et juridiques pertinentes (Vavilov, au par. 99).

[10]  Les demandeurs soutiennent que la décision est déraisonnable dans son ensemble, et allèguent trois erreurs précises, notamment dans l’analyse effectuée par l’agent concernant i) les éléments de preuve relatifs à la santé mentale de Mme Osun; ii) son degré d’établissement; et iii) l’intérêt supérieur des enfants. Comme il est expliqué ci‑dessous, bien que je n’estime pas que chacune des erreurs relevées par les demandeurs justifie l’intervention de la Cour, je conclus que la décision, prise dans son ensemble, est déraisonnable.

A.  L’évaluation des éléments de preuve psychologiques

[11]  Premièrement, les demandeurs avancent qu’un élément de preuve produit devant l’agent – soit un rapport de psychologue daté d’octobre 2016 [le rapport] – établissait que Mme Osun souffrait de troubles psychologiques, et que l’agent était tenu de prendre en considération et d’évaluer l’effet que le renvoi aurait sur sa santé mentale. Ils invoquent à cet égard l’arrêt Kanthasamy c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 CSC 61, au par. 48 [Kanthasamy]. Selon eux, l’agent a omis cette étape, se contentant de signaler l’existence du rapport sans s’étendre sur le sujet.

[12]  Les demandeurs ne m’ont pas convaincu sur ce premier point. L’agent a mentionné explicitement le rapport, mais a conclu que [traduction] « la demandeure d’asile n’aborde les conclusions relatives à la crédibilité ni de la SPR ni de la SAR, devant lesquelles elle a produit le même élément de preuve ». Il est certainement permis à un agent chargé de l’examen des considérations d’ordre humanitaire de rejeter des éléments de preuve que les tribunaux responsables des affaires relatives au statut de réfugié ont déclarés non crédibles (Zingoula c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2019 CF 201, au par. 11; et Nwafidelie c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2017 CF 144, au par. 22).

B.  L’établissement

[13]  Deuxièmement, les demandeurs soutiennent que l’agent a déraisonnablement omis de prendre en compte l’établissement de Mme Osun en se contentant de relever qu’elle avait bénéficié de [traduction] « l’application régulière de la loi » au Canada, et qu’il a soumis son établissement à un critère déraisonnablement rigoureux en notant que les efforts qu’elle avait fournis en ce sens n’avaient [traduction] « rien d’inhabituel ». Voici les passages de la décision attaquée que contestent les demandeurs à cet égard :

[traduction] 
Je reconnais que la demandeure d’asile a fait des efforts louables pour s’établir au Canada, mais je note aussi qu’elle a bénéficié de l’application régulière de la loi dans le cadre du programme d’immigration et de protection des réfugiés, et qu’on lui a donc offert les outils et les possibilités nécessaires pour acquérir un certain degré d’établissement au sein de la société canadienne. Je constate qu’il n’y a rien d’inhabituel dans le fait d’occuper un emploi, de payer des impôts, de faire du bénévolat, d’être membre d’une église ou d’exercer d’autres activités de même nature que celles dont la demandeure fait état. […] S’il est vrai que la demandeure a acquis un certain degré d’établissement par ses études et son activité professionnelle, et aimerait conserver la qualité de vie dont elle jouit au Canada, cela ne me paraît pas une situation exceptionnelle que n’auraient pas prévue nos dispositions législatives sur l’immigration.

[Non souligné dans l’original.]

[14]  L’agent a conclu son analyse de l’établissement dans les termes suivants : [traduction] « D’après l’ensemble des éléments de preuve dont je dispose, je reconnais que la demandeure d’asile a déployé des efforts louables pour s’établir au Canada, et j’ai accordé à ce fait le poids qu’il convient dans mon évaluation. »

[15]  Je conviens que ce passage relève de la logique défectueuse critiquée dans la décision Sebbe c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2012 CF 813 [Sebbe], où le juge Zinn explique que l’agent « ne doit pas simplement faire abstraction des mesures prises par les demandeurs et en attribuer le mérite au régime canadien de l’immigration et de la protection des réfugiés pour leur avoir donné le temps de prendre ces mesures, [sans] reconnaître l’initiative dont les demandeurs ont fait preuve à cet égard ». Il doit plutôt évaluer le degré d’établissement et se demander si celui‑ci milite en faveur de l’octroi d’une dispense (Sebbe, au par. 21).

[16]  En outre, la Cour a jugé qu’il est déraisonnable d’exiger, sans autre explication, un degré « extraordinaire » d’établissement (Sivalingam c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2017 CF 1185, au par. 13). Or, en l’espèce, l’agent a conclu que si Mme Osun avait acquis un certain degré d’établissement, ce n’était pas là une [traduction] « situation exceptionnelle ».

[17]  Il est vrai que le seul emploi du mot « exceptionnelle » ne suffit pas à rendre une décision déraisonnable, puisque l’agent peut simplement vouloir dire que le demandeur n’a pas fait état de liens assez solides pour justifier une dispense pour des considérations d’ordre humanitaire (Boukhanfra c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2019 CF 4, au par. 29). Cependant, l’effet cumulatif des observations portant que les demandeurs ont bénéficié de [traduction] « l’application régulière de la loi » et que leur situation n’a [traduction] « rien d’inhabituel » ou n’est pas [traduction] « exceptionnelle » affaiblit l’analyse de l’établissement en l’espèce. Quoi qu’il en soit, cet affaiblissement se trouve aggravé par l’analyse erronée qui suit touchant l’intérêt supérieur des enfants. Considérés ensemble, ces défauts obligent à conclure au caractère déraisonnable de la décision.

C.  L’intérêt supérieur des enfants

[18]  Je relève deux problèmes dans l’évaluation de l’intérêt supérieur des enfants effectuée par l’agent. Le premier concerne l’analyse des difficultés dans le contexte de ce facteur, et le second, le rapport de psychologue sur l’un des enfants. Je traiterai ces deux problèmes tour à tour.

[19]  Premièrement, la jurisprudence contient de nombreuses mises en garde contre la tentation de tenir compte exclusivement des difficultés dans l’évaluation des demandes fondées sur des considérations d’ordre humanitaire (voir par exemple Mursalim c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2018 CF 596, au par. 37, ainsi que l’arrêt Kanthasamy). Autrement dit, s’il est vrai que les agents peuvent considérer les difficultés comme un facteur dans leur évaluation de l’intérêt supérieur des enfants, l’analyse des difficultés ne peut remplacer une analyse complète et contextuelle de l’intérêt supérieur. Les cours de révision doivent avoir des motifs de croire que les agents « ont tenu compte, outre les difficultés, de facteurs humanitaires au sens plus élargi » (non souligné dans l’original; Marshall c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2017 CF 72, au par. 33 [Marshall]).

[20]  En l’espèce, l’agent a écrit au sujet des trois enfants : [traduction] « Les éléments de preuve dont je dispose ne suffisent pas à établir que leur bien-être serait compromis s’ils quittaient le Canada pour retourner au Nigéria. » Il a reconnu que l’intérêt des enfants serait [traduction] « mieux servi au Canada », mais ne s’est pas étendu sur ce point et a expliqué que la perturbation que causerait le renvoi serait minime. Voici ce qu’il a mentionné dans cette partie de la décision :

[traduction] 
[
…] Je note que les demandeurs mineurs ont été absents du Nigéria moins de trois ans et que tous les autres membres de leur famille continuent de résider dans ce pays, de sorte qu’il paraît raisonnable de croire que le renvoi ne devrait entraîner pour eux qu’une perturbation minime. Je reconnais que les conditions de vie des demandeurs mineurs pourraient ne pas être aussi favorables au Nigéria qu’au Canada; cependant, c’est un fait que le niveau de vie varie d’un pays à l’autre, et bien des pays n’ont pas la chance de pouvoir fournir le même soutien social, financier et médical que le Canada. Le pouvoir discrétionnaire relatif aux considérations d’ordre humanitaire n’a pas pour objet de compenser les différences de niveau de vie entre le Canada et d’autres pays, mais plutôt d’offrir la souplesse nécessaire pour accueillir les demandes dans les cas qui justifient l’octroi d’une dispense.

[21]  Cela ressemble fort à une analyse des difficultés, proposée comme point de départ d’une analyse de l’intérêt supérieur des enfants : sera‑t‑il ou ne sera‑t‑il pas difficile, se demande‑t‑on, de quitter le Canada? Cette manière de procéder substitue erronément des conclusions sur les difficultés à une évaluation de l’intérêt supérieur des enfants, aux fins d’établir la ligne de conduite la mieux adaptée à la situation. Comme l’enseigne une jurisprudence récente – Singh c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2019 CF 1633, au par. 30 [Singh], et Patousia c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2017 CF 876, aux par. 53 à 56 –, la constatation de l’absence de difficultés ne peut se substituer validement à une analyse de l’intérêt supérieur de l’enfant.

[22]  De même, on ne peut substituer une conclusion de présence ou d’absence de difficultés en cas de renvoi à une analyse de l’établissement : « l’agent ne doit pas évaluer les difficultés sous la rubrique de "l’établissement", de crainte que ces deux facteurs ne soient fusionnés en un seul et que celui de l’établissement perde tout son sens. Comme l’a fait remarquer la Cour dans Marshall […], au par. 35, une telle démarche reviendrait à n’examiner l’établissement que sous l’angle des difficultés, ce qui serait erroné » (Singh, au par. 26).

[23]  Cela ne veut pas dire pour autant que la présence ou l’absence de difficultés en cas de départ du Canada et de retour au pays d’origine ne peut occuper une place centrale dans l’analyse de la demande fondée sur des considérations d’ordre humanitaire. En fait, il s’agit souvent de l’un des principaux facteurs à prendre en considération dans une telle analyse. Il faut cependant, au moment de l’intégrer dans cet ensemble, distinguer chacun des éléments, et éviter de le déguiser ou de le confondre avec d’autres – en particulier lorsqu’il s’agit de l’intérêt supérieur de l’enfant. Ainsi que l’écrivait la juge Abella au paragraphe 41 de l’arrêt Kanthasamy, comme « "[l]es enfants méritent rarement, sinon jamais, d’être exposés à des difficultés", la notion de "difficultés inhabituelles et injustifiées" ne saurait généralement s’appliquer aux difficultés alléguées par un enfant à l’appui de sa demande de dispense pour considérations d’ordre humanitaire (Hawthorne, par. 9 ». Il faut une distinction plus nette pour permettre à la cour de révision d’établir si le décideur a raisonnablement pris en considération tous les facteurs applicables.

[24]  En résumé, s’il est vrai que le critère des difficultés peut peser lourd dans l’évaluation d’une demande fondée sur des considérations d’ordre humanitaire, il faut expliquer l’application de ce critère pour justifier le résultat. Une analyse des difficultés entremêlée à une analyse de l’intérêt supérieur de l’enfant (et qu’il est impossible de distinguer) ne remplit pas l’exigence de transparence, parce que la Cour ne peut évaluer le poids respectif attribué à ces facteurs.

[25]  La seconde lacune de l’analyse de l’intérêt supérieur des enfants en l’espèce se rapporte à la justification de la décision au regard des faits et du droit. Les demandeurs avaient produit une lettre dans laquelle un thérapeute de famille déclarait que i) l’un des enfants de Mme Osun souffrait de [traduction] « symptômes de traumatisme » causés par la peur d’une expulsion vers le Nigéria; ii) l’enfant avait besoin de services de santé mentale; et iii) le renvoi au Nigéria mettrait en péril son bien-être émotionnel, social et psychologique.

[26]  L’agent, pour toute réaction à cette lettre, a déclaré l’avoir [traduction] « attentivement prise en considération ». Il n’a ni évalué son contenu ni fait mention du passage où le thérapeute explique l’effet que le renvoi pourrait avoir sur la santé mentale de l’enfant – ce qui est en soi un facteur relevant des difficultés. Étant donné l’importance de cet élément de preuve – la seule lettre concernant la santé mentale de l’enfant –, je conclus que le défaut d’en proposer la moindre appréciation, par exemple d’expliquer en quoi on l’estimait insuffisante, oblige à considérer la décision comme étant déraisonnable (Vavilov, au par. 98). Par cet aspect, la décision se trouve aussi en défaut par rapport aux lignes directrices de l’arrêt Kanthasamy selon lesquelles l’intérêt supérieur de l’enfant doit être « bien identifié et défini », puis examiné « avec beaucoup d’attention » eu égard à l’ensemble de la preuve (aux par. 35 et 39).

[27]  Les divers défauts examinés plus haut ont pour effet cumulatif que la décision, prise dans son ensemble, [traduction« ne se tient pas ». Certes, l’agent a relevé que Mme Osun avait déployé des efforts louables pour s’établir et que l’intérêt des enfants serait mieux servi au Canada, mais là encore sans proposer d’analyse digne de ce nom. Vu l’importance centrale de l’établissement et de l’intérêt supérieur de l’enfant dans toute analyse des considérations d’ordre humanitaire, nous ne pouvons savoir si le résultat aurait pu être différent si la décision n’avait pas comporté de lacune.

III.  Conclusion

[28]  Le fait que les demandeurs aient bénéficié de [traduction] « l’application régulière de la loi » et que les observations de Mme Osun concernant son orientation sexuelle n’aient pas été jugées crédibles ne signifient pas qu’il soit permis de prendre des raccourcis à l’égard d’autres motifs invoqués dans la demande de dispense pour des considérations d’ordre humanitaire, en particulier lorsque lesdits motifs touchent les demandeurs enfants. L’agent a commis une erreur en omettant d’évaluer des éléments de preuve centraux sur l’intérêt supérieur des enfants, ainsi qu’en formulant des observations problématiques dans son analyse de l’établissement et des difficultés. Ces erreurs ont pour effet cumulatif de priver la décision attaquée du niveau de transparence et d’intelligibilité qu’exige l’arrêt Vavilov. En conséquence, j’accueillerai la présente demande de contrôle judiciaire.


JUGEMENT dans le dossier IMM-3297-19

LA COUR STATUE :

  1. La présente demande de contrôle judiciaire est accueillie.

  2. L’affaire est renvoyée au ministère pour qu’elle soit réexaminée par un autre agent.

  3. Aucune question n’a été proposée aux fins de certification, et je conviens que l’affaire n’en soulève aucune.

  4. Aucuns dépens ne sont adjugés.

« Alan S. Diner »

Juge

Traduction certifiée conforme

Ce 17e jour de mars 2020

Mélanie Vézina, traductrice


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM‑3297‑19

 

INTITULÉ :

BUNMI TOMILOLA OSUN ET AL c MCI

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 29 JANVIER 2020

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LE JUGE DINER

 

DATE DU JUGEMENT ET DES MOTIFS :

LE 25 FÉVRIER 2020

 

COMPARUTIONS :

Ryan Hardy

 

POUR LES DEMANDEURS

 

Asha Gafar

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Rexdale Community Legal Clinic

Avocats

Toronto (Ontario)

 

POUR LES DEMANDEURS

 

Procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DÉFENDEUIR

 

 

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