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                                                                 Date : 20031107

                                                             Dossier : IMM-1827-02

                                                          Référence : 2003 CF 1313

Entre :

                               KATIR BRAHIM

                    Lot. Andalloussia, Imm. 49, no. 8

                          Casablanca, Morocco

                                                                Applicant

                                 - and -

                      THE MINISTER OF CITIZENSHIP

                             AND IMMIGRATION

                 c/o Deputy Attorney General of Canada,

                Department of Justice, having office at

             Complexe Guy Favreau 200 René-Lévesque West,

            East Tower, 5th floor, in the city of Montreal,

                          Province of Quebec,

                                                               Respondent

                         MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE PINARD :

[1]    Il s'agit d'une demande de contrôle judiciaire de la décision par laquelle Louis Saint-Arnaud, agent des visas (l' « agent » ) à l'Ambassade du Canada à Paris (France), a conclu, le 27 mars 2002, que le demandeur ne remplissait pas les conditions nécessaires pour immigrer au Canada au motif qu'il fait partie de la catégorie de personnes non admissibles décrite au sous-alinéa 19(1)a)(ii) de la Loi sur l'immigration, L.R.C. (1985), c. I-2 (la « Loi » ).


[2]    Au mois de mai 2001, le demandeur, Brahim Katir, âgé de 53 ans, a déposé une demande de résidence permanente sous la catégorie « indépendant » auprès du service de l'immigration de l'Ambassade du Canada à Paris. Lpouse du demandeur, Zoubida Kreitif, et leur fille, Aziza Katir, sont les personnes à charge du demandeur.

[3]    Le 18 mai 2001, le formulaire IMM-1017 « Rapport médical » est envoyé au demandeur afin qu'il puisse soumettre le rapport médical exigé par la Loi. Ce formulaire est complété le 14 juin 2001 par le Dr Joseph El Baz à Casablanca au Maroc. Selon ce rapport, le demandeur souffre d'une obésité et d'une hypertension artérielle. Le demandeur est référé à un cardiologue en raison d'un électrocardiogramme montrant une ischémie.

[4]    Selon le cardiologue, Dr Ahmed Setti, le demandeur souffre de troubles de la répolarisation à l'ECG. De plus, le demandeur a plusieurs facteurs de risque, tels un excès de poids, le tabagisme et une dyslipémie mixte. Le rapport du Dr Setti est accompagné de plusieurs résultats d'examens subis par le demandeur.

[5]    À la lumière de ces deux rapports médicaux, le Dr Saint-Germain rédige une déclaration contresignée par le Dr Bertrand le 16 août 2001. Selon cette déclaration :

Ce requérant âgé de 51 ans souffre d'une maladie coronaire avancée, tel que démontré par une coronarographie datée du 28 juin 2001 révélant une atteinte multiple et sévère des vaisseaux coronaires.

Lvolution de cette maladie est telle qu'il est raisonnable de s'attendre à ce que le requérant ait besoin de soins médicaux spécialisés ainsi que d'investigations hospitalières et, en dernier lieu, des hospitalisations. Selon les évaluations faites par le ministère, ces services sont coûteux et entraînent des dépenses médicales plus élevées que celles engagées annuellement pour le canadien moyen. Selon le rapport annuel de l'Institut Fraser "Waiting your turn", basé sur des études provinciales récentes de disponibilité des soins médicaux, il y a aussi des listes d'attente pour les services médicaux dont le requérant a besoin. L'admission de ce requérant déplacerait des canadiens et des résidents du Canada sur les listes d'attente pour ces soins. En raison de ses besoins en soins médicaux, l'admission du requérant au Canada imposera probablement un fardeau excessif sur les services médicaux canadiens. En conséquence, le requérant est inadmissible en vertu de l'article 19(1)(a)(ii) de la loi de l'immigration du Canada.


[6]    Le 27 septembre 2001, un agent d'immigration envoie une lettre au demandeur afin de lui signaler les conclusions du médecin et lui permettre de fournir des renseignements médicaux supplémentaires.

[7]    Le 30 novembre 2001, le Service de l'immigration reçoit un rapport du Dr Benmimoun, daté du 15 novembre 2001, accompagné d'une lettre de l'avocat du demandeur. Selon ce rapport, les problèmes cardiaques du demandeur peuvent être surmontés par la suppression des facteurs de risque. Le rapport du Dr Benmimoun n'est accompagné d'aucun résultat des examens subis par le demandeur.

[8]    Après avoir analysé cette information, le Dr Saint-Germain et le Dr Bertrand concluent que le rapport du Dr Benmimoun ne modifie pas la déclaration d'inadmissibilité du 16 août 2001.

[9]    Le 27 mars 2002, l'agent a refusé la demande de résidence permanente du demandeur parce que celle-ci ne répondait pas aux exigences relatives à l'immigration au Canada. Dans sa lettre de cette même date, l'agent explique :

. . . vous rentrez dans la catégorie de personnes non admissibles décrite à l'alinéa 19(1)a) de la Loi sur l'immigration de 1976, . . . , parce que vous souffrez de "Maladie coronarienne - 414, obésitéet hypertension artérielle" dont la nature, la gravité ou la durée probable sont telles que, selon un médecin agréé, dont l'avis est confirmé par au moins un autre médecin agréé:

"votre admission entraînerait ou risquerait d'entraîner un fardeau excessif pour les services sociaux ou de santé".

[10] Le demandeur soumet que la décision de l'agent de visa est fondée sur des considérations erronées et manifestement déraisonnables sans rapport avec la Loi et les critères de son article 19.

[11] Il incombe à la personne qui demande la résidence permanente de prouver que le fait, pour elle, dtre admise au Canada ne contrevient pas à la Loi (voir le paragraphe 8(1) de la Loi).


[12] En l'espèce, l'agent a fait tout le nécessaire pour s'assurer que le demandeur ait la chance de déposer les documents et les informations relativement à sa demande, tel qu'il appert de l'affidavit de l'agent et des notes enregistrées au système informatisé des dossiers d'immigration. Selon ces informations, l'agent a envoyé une lettre datée du 27 septembre 2001 permettant au demandeur de fournir des renseignements pertinents supplémentaires au Service de l'immigration. Cependant, le rapport additionnel du demandeur n'a pas réussi à convaincre les deux médecins agréés que le fait d'admettre le demandeur au Canada ne contrevient pas à la Loi.

[13] Le demandeur a raison de souligner que le simple fait qu'il souffre d'une maladie ne suffit pas à le rendre inadmissible en vertu du sous-alinéa 19(1)a)(ii). En effet, l'agent des visas doit se pencher plus particulièrement sur les répercussions qu'aura la maladie sur la société canadienne (voir Mo c. ministre de la Citoyennetéet de l'Immigration, [2001] A.C.F. no 216 (C.F.,1re inst.) (QL) et Prada c. ministre de la Citoyennetéet de l'Immigration, [2001] A.C.F. no 137 (C.F., 1re inst.) (QL)). Une lecture du rapport du Dr Setti suggère que même s'il ne prescrit pas de traitement spécifique immédiat, la condition du demandeur nécessitera des traitements spécialisés dans le futur. De plus, selon la déclaration du Dr Saint-Germain, il y a de longues listes d'attente au Canada pour ces mêmes traitements et l'admission du demandeur risque de déplacer des Canadiens.

[14] L'agent des visas n'a commis aucune erreur en se basant sur les conclusions des Drs Saint-Germain et Bertrand afin dvaluer l'admissibilité du demandeur. En effet, l'agent des visas doit respecter l'opinion des médecins agréés par la Loi (voir Tong c. ministre de la Citoyennetéet de l'Immigration (le 31 octobre 1997), IMM-2565-96). Ces médecins, à leur tour, se sont fiés sur les résultats d'examens subis par le demandeur et sur le rapport du Dr Setti. À la lumière de ces informations, les Drs Saint-Germain et Bertrand ont conclu d'une manière raisonnable que le demandeur est inadmissible.


[15] Je peux aisément conclure que l'agent n'a commis aucune erreur manifeste dans son appréciation des faits.     

[16] Pour tous ces motifs, la demande de contrôle judiciaire est rejetée.

[17] Suite à l'audition de cette affaire, un délai de quinze jours a été accordé à l'avocat de la partie demanderesse pour proposer toute question pouvant être certifiée, proposition devant être appuyée par des représentations écrites. Le 21 octobre 2003, l'avocat de la partie demanderesse a proposé la certification des deux questions suivantes, sans déposer de représentations écrites :

1.       Est-ce que la possibilité de détérioration, dans la condition du requérant, si les facteurs de risque se sont pas éliminés, peut suffire comme motif d'inadmissibilité au Canada?

2.      Pour constater l'existence d'un fardeau excessif sur le soins de la santé, faut-il déterminer préalablement quelles procédures médicales deviendraient nécessaires pour le requérant (e.g. chirurgie, hospitalisation)?

[18] Après lecture des représentations écrites déposées par l'avocate de la partie défenderesse pour s'objecter à la certification demandée, je suis d'accord avec cette dernière que les deux questions proposées ne rencontrent pas les critères de l'alinéa 74d) de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, L.C. (2001), c. 27 (voir aussi Liyanagamage c. Canada (M.C.I.) (1994), 176 N.R. 4). Aucune question n'est donc certifiée.

                                                                          

       JUGE

OTTAWA (ONTARIO)

Le 7 novembre 2003


                                  COUR FÉDÉRALE

             NOMS DES AVOCATS ET PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                              IMM-1827-02

INTITULÉ :                           KATIR BRAHIM v. THE MINISTER OF CITIZENSHIP AND IMMIGRATION

LIEU DE L'AUDIENCE :                   Montréal (Québec)

DATE DE L'AUDIENCE :                   Le 7 octobre 2003

MOTIFS DE L'ORDONNANCE DE :     L'honorable juge Pinard

EN DATE DU :                    7 novembre 2003

ONT COMPARU :

Me Julius H. Grey                      POUR LA PARTIE DEMANDERESSE

Me Michèle Joubert                     POUR LA PARTIE DÉFENDERESSE

PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER :

Grey Casgrain                                POUR LA PARTIE DEMANDERESSE

Montréal (Québec)

Morris Rosenberg                      POUR LA PARTIE DÉFENDERESSE

Sous-procureur général du Canada

Ottawa (Ontario)

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