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                                                                 Date : 20030225

                                                             Dossier : IMM-3353-02

                                                 Référence neutre : 2003 CFPI 221

Entre :

                             MIRIELLE RAYMOND

                                                    Partie demanderesse

                                  - et -

                     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

                          ET DE L'IMMIGRATION

                                                    Partie défenderesse

                         MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE PINARD :

   Il s'agit ici d'une demande de contrôle judiciaire présentée en vertu de l'article 72 de la Loi sur l'immigration, L.R.C. (1985), ch. I-2 (la « Loi » ), à l'encontre de la décision de la Section d'appel de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié (la « Section d'appel » ) rendue le 25 juin 2002 par Me Taya de Pietro, statuant qu'il n'y avait pas de circonstances particulières au sens de l'alinéa 70(1)b) pour justifier que la demanderesse ne soit pas renvoyée du Canada.

   La demanderesse est citoyenne d'Haïti et une résidente permanente du Canada depuis le 19 janvier 1998. Elle est visée par l'alinéa 27(1)e) de la Loi puisqu'elle a obtenu le droit d'établissement suite à une fausse indication sur un fait important : elle a omis de déclarer la naissance de sa fille, Phaémie Charles, née le 1er avril 1995, avant son départ d'Haïti.


   La Section d'appel a refusé d'accueillir l'appel de la demanderesse contre la mesure de renvoi prise contre elle le 16 mai 2001. Dans sa décision, elle écrit ce qui suit :

Puisque la fausse déclaration de l'appelante semble, de toute évidence, être une façon d'agir au sein de sa famille, sa soeur aînée ayant également obtenu son droit d'établissement suite à une fausse représentation, je ne peux pas croire qu'il s'agirait d'une erreur ou omission de bonne foi. Par ailleurs, j'estime que les facteurs positifs établis en l'espèce sont insuffisants pour justifier l'octroi d'une mesure spéciale, d'autant plus certains semblent avoir été exagérés, minant davantage la crédibilité de l'appelante.

   La demanderesse soumet que la Section d'appel a erré en lui reprochant la fausse déclaration de sa soeur et la mauvaise foi de son père. Cependant, la Section d'appel devait considérer toute la preuve devant elle, y inclus la fausse déclaration de la soeur, qui avait poursuivi la même démarche que la demanderesse poursuivait elle-même. Puisque la soeur aînée avait déjà eu des problèmes reliés à sa fausse déclaration, la Section d'appel pouvait raisonnablement croire que la demanderesse serait consciente de l'importance de déclarer la naissance de sa fille au moment de l'application pour la résidence permanente.

   Également, puisque la demanderesse avait informé la Section d'appel que son père serait présent pour expliquer pourquoi il n'a pas déclaré l'existence de sa petite-fille lors de son application pour parrainer sa fille, il était loisible à la Section d'appel de tirer une inférence négative de son absence. La demanderesse, qui avait le fardeau de prouver l'existence de circonstances qui justifieraient son non-renvoi du Canada, n'a pas déposé d'affidavit signé par son père pour établir les faits qu'elle alléguait.


   La demanderesse plaide en outre que la Section d'appel, en jugeant la qualitédu rapport psychologique rédigépar un psychologue indépendant, porte un jugement de valeurs tout à fait gratuit et en dehors complètement de ses compétences. Cependant, la Section d'appel a relevé plusieurs lacunes dans l'information sur laquelle le psychologue a basé ses conclusions. Le docteur Gadoua a avoué qu'il n'avait pas posé de questions à la demanderesse au niveau des blessures qu'elle aurait subies, bien qu'il ait témoigné qu'elle avait été victime d'actes criminels et aurait subi des sévices physiques et psychologiques. Également, le psychologue indique dans son rapport que la demanderesse est suivie par une femme médecin, tandis que la demanderesse n'a consulté ce médecin qu'une seule fois.

   En basant sa conclusion sur une question de faits qui pouvait raisonnablement influencer la nature du rapport psychologique, la Section d'appel avait pleine compétence et n'a commis aucune erreur. Puisque les faits qui sous-tendaient le rapport n'étaient pas dignes de foi, il était donc loisible à la Section d'appel d'accorder moins de poids au rapport lui-même (voir Kalia c. Ministre de la Citoyennetéet de l'Immigration(5 décembre 1997), IMM-3717-96 et Randhawa c. Ministre de la Citoyennetéet de l'Immigration (30 avril 1999), IMM-1482-98).

   La demanderesse soumet enfin que la Section d'appel a appliquéle mauvais test pour déterminer si elle devait accueillir l'appel, en cherchant des raisons extraordinaires qui justifieraient l'application de mesures spéciales. Il appert au contraire d'une lecture de la décision en entier que la Section d'appel a étudié l'ensemble des circonstances particulières du dossier afin de déterminer si une raison quelconque existait pour ne pas renvoyer la demanderesse (Ribic c. Ministre de l'Emploi et de l'Immigration(20 août 1985), no T84-09623, [1985] I.A.B.D. no 4 (QL), approuvé par la Cour suprême du Canada dans Chieu c. Canada (M.C.I.), 2002 CSC 3, [2002] A.C.S. no 1 (QL)). Seulement après avoir décidé que les circonstances particulières ne démontraient aucune raison justifiant un non-renvoi a-t-elle considéré si les facteurs positifs établis étaient suffisants pour justifier l'octroi d'une mesure spéciale. Elle n'a donc commis aucune erreur et a bien appliqué le test pertinent.


   Pour le reste, ma révision de la preuve m'empêche de conclure à l'existence de quelque erreur de fait manifeste et dominante.

Par ces motifs, la demande de contrôle judiciaire est rejetée.

                                                                         

       JUGE

OTTAWA (ONTARIO)

Le 25 février 2003


                             COUR FÉDÉRALE DU CANADA

                          SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

             NOMS DES AVOCATS ET PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                              IMM-3353-02

INTITULÉ :                           MIRIELLE RAYMOND c. LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉET DE L'IMMIGRATION

LIEU DE L'AUDIENCE :                   Montréal (Québec)

DATE DE L'AUDIENCE :                   Le 14 janvier 2003

MOTIFS DE L'ORDONNANCE DE :     L'honorable juge Pinard

EN DATE DU :                    25 février 2003             

ONT COMPARU :

Me Michelle Langelier                 POUR LA PARTIE DEMANDERESSE

Me Jocelyne Murphy                    POUR LA PARTIE DÉFENDERESSE

PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER :

Michelle Langelier                          POUR LA PARTIE DEMANDERESSE

Montréal (Québec)

Morris Rosenberg                      POUR LA PARTIE DÉFENDERESSE

Sous-procureur général du Canada

Ottawa (Ontario)

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