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Date : 20200319


Dossier : IMM-2362-19

Référence : 2020 CF 390

Ottawa (Ontario), le 19 mars 2020

En présence de monsieur le juge LeBlanc

ENTRE :

MARIE EVENA INNOCENT

demanderesse

et

LE MINISTRE DE L’IMMIGRATION, DES RÉFUGIÉS ET DE LA CITOYENNETÉ

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

I.  INTRODUCTION

[1]  La demanderesse est originaire d’Haïti. Elle a un fils – Don Stanley Dupiton – né le 12 avril 1995, lequel vit toujours dans ce pays. Après avoir tenté, sans succès, en 2007, d’obtenir l’asile au Canada, elle s’est vue octroyer le statut de résidente permanente le 18 novembre 2015 aux termes d’une demande fondée sur des motifs d’ordre humanitaire. Le 21 mars 2017, elle a présenté aux autorités de Citoyenneté et Immigration Canada [CIC], pour son fils, une demande de parrainage dans la catégorie du regroupement familial. Le même jour, Don Stanley a présenté une demande de résidence permanente, qu’il a lui-même signée.

[2]  À ce moment, Don Stanley était âgé de 21 ans. Pour que la demande de parrainage soit accueillie, la demanderesse devait démontrer que son fils avait le statut d’enfant à charge au sens de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001 c 27 [Loi], et de son règlement d’application, le Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002-227 [Règlement].

[3]  Quelques jours après le dépôt de sa demande de parrainage, soit le 3 avril 2017, CIC a informé la demanderesse de la définition d’enfant à charge en vigueur à ce moment. On l’a informé, du même souffle, qu’étant donné qu’il était possible que son fils ne rencontre pas la définition applicable d’enfant à charge, il lui était loisible de retirer ladite demande, auquel cas une partie des frais afférents à celle-ci lui seraient remboursés. Il lui était aussi loisible d’aller de l’avant avec ladite demande, moyennant le paiement de frais supplémentaires de l’ordre de 400 $. La demanderesse a choisi cette voie et a transmis à CIC, le 14 août 2017, une lettre, qui, selon les notes au Système mondial de gestion des cas [SMGC], expliquait que bien Don Stanley ne rencontrait pas la définition d’enfant à charge mentionnée à la lettre du 3 avril 2017, elle désirait tout de même que le traitement de sa demande de parrainage se poursuive.

II.  DÉCISIONS SOUS ÉTUDE

[4]  Le 10 août 2018, un agent de migration de CIC a refusé la demande de parrainage, étant d’avis que Don Stanley ne répondait pas à la définition d’enfant à charge puisqu’à ce moment, il était âgé de plus de 19 ans, n’était plus aux études, n’était pas affligé d’une condition médicale et ne dépendait plus financièrement de la demanderesse. Quelques jours plus tôt, un agent avait indiqué dans les notes apposées au SMGC, ne pas être satisfait, après avoir révisé le dossier, que des motifs humanitaires justifiaient une exemption.

[5]  Cette décision a été portée en appel devant la Section d’appel de l’immigration [SAI]. Le 21 mars 2019, la SAI a rejeté l’appel, n’étant pas satisfaite que Don Stanley répondait à la définition d’enfant à charge et qu’il faisait partie, par conséquent, de la catégorie du regroupement familial sur la base de laquelle la demande de parrainage avait été déposée. La SAI s’est par conséquent déclarée sans compétence, sur la base de l’article 65 de la Loi, pour examiner la dite demande sur le fondement de considérations d’ordre humanitaire.

III.  POSITION DE LA DEMANDERESSE

[6]  La demanderesse soutient que cette décision est erronée. Elle estime qu’étant donné que sa situation était régie par un processus d’immigration à « étapes multiples », l’âge de l’enfant à charge pouvait être fixé à une date antérieure à celle de la demande de parrainage. En l’espèce, Don Stanley répondait, ajoute la demanderesse, à la définition d’enfant à charge tant lors du dépôt de sa demande d’asile en 2007 que lors de celui de sa demande de résidence permanente en 2013. La date déterminante n’aurait donc pas dû être, selon elle, celle du dépôt de la demande de parrainage et de la demande de résidence permanente de Don Stanley, car celui-ci bénéficiait – ou devait bénéficier – de la définition d’enfant à charge en vigueur avant la modification du 1er août 2014, laquelle modification a fait passer le marqueur d’âge lié à cette définition de 22 à 19 ans. D’ailleurs, ajoute-t-elle, Don Stanley a été identifié et reconnu comme enfant à charge dans le cadre des procédures qui ont mené à l’octroi de son statut de résidente permanente.

[7]  Elle reproche aussi à la SAI de ne pas avoir examiné son appel sous l’angle des considérations d’ordre humanitaire qui militent, selon elle, en faveur de l’octroi de la demande de parrainage.

IV.  QUESTION EN LITIGE

[8]  Il s’agit ici de déterminer si la SAI, en concluant comme elle l’a fait, a commis une erreur justifiant l’intervention de la Cour.

[9]  Pour les motifs qui suivent, j’estime qu’il n’y a pas lieu d’intervenir.

V.  ANALYSE

A.  La définition applicable d’enfant à charge

[10]  Je note, d’entrée de jeu, que la demanderesse ne parait pas avoir remis en cause, devant la SAI, la conclusion de l’agent de migration voulant que son fils ne rencontrait pas la définition d’enfant à charge applicable à son cas, soit, selon l’agent, celle en vigueur au moment où la demande de parrainage et la demande de résidence permanente de Don Stanley ont été soumises aux autorités de CIC. La demanderesse s’est plutôt limitée à faire valoir que ladite demande devrait être reçue pour des considérations d’ordre humanitaire.

[11]  Pourtant, dans la lettre que la SAI a fait parvenir à la demanderesse, en date du 16 janvier 2019, dans le but de lui « explique[r] la procédure à suivre pour que [la SAI] puiss[e] régler [son] appel le plus tôt possible », la demanderesse était invitée à présenter des arguments par écrit pour démontrer que la personne qu’elle souhaitait parrainer rencontrait la définition d’enfant à charge (Dossier certifié du tribunal [DCT] aux p. 82-83). Comme je viens de le mentionner, par le biais d’une missive signée par son procureur et datée du 5 février 2019, la demanderesse n’a présenté aucun argument de cette nature, préférant centrer ses efforts à étayer les considérations d’ordre humanitaire pouvant militer en faveur de l’octroi de sa demande de parrainage (DCT p. 85-86).

[12]  Cela explique, je pense, le passage de la décision de la SAI où celle-ci souligne que la demanderesse « admet que [son fils] ne répondait pas à la définition d’enfant à charge » et conclut qu’elle n’a donc pas démontré, selon la prépondérance des probabilités, que son fils était un enfant à charge au sens du Règlement (Décision de la SAI, DCT aux para 3 et 5). Cela explique aussi, que la SAI se soit déclarée sans compétence, en raison du libellé de l’article 65 de la Loi, pour examiner la demande de parrainage sous l’angle en vertu duquel la demanderesse l’invitait à le faire, soit sous celui de considérations d’ordre humanitaire.

[13]  Bien qu’un appel devant la SAI soit de novo, encore faut-il que l’exercice se fasse à la lumière des reproches que l’on adresse au décideur administratif de premier niveau dont la décision se retrouve devant la SAI. Ici, l’appel ne semblait porter que sur la question des considérations humanitaires militant en faveur d’une issue favorable à la demande de parrainage. Il est difficile, dans un tel contexte, de reprocher à la SAI d’avoir conclu comme elle l’a fait. Cela, à mon sens, suffirait normalement pour disposer du présent contrôle judiciaire.

[14]  Quoi qu’il en soit, même en supposant que la question de la définition d’enfant à charge applicable à Don Stanley se pose ici, la demanderesse ne m’a pas convaincu que l’application, à sa demande de parrainage, de la définition d’enfant à charge qui était en vigueur au moment où cette demande a été faite, soit en mars 2017, était déraisonnable.

[15]  Au moment où cette affaire a été plaidée, la demanderesse soutenait que la norme de contrôle applicable à la question de la définition d’enfant à charge applicable à sa demande de parrainage était celle de la décision correcte et que l’erreur commise à cet égard en était une de droit. Le défendeur, pour sa part, prétendait que le présent contrôle judiciaire interpellait la norme de la décision raisonnable puisque cette question en était une mixte, de faits et de droit.

[16]  Toutefois, quelques jours après avoir pris le présent dossier en délibéré, la Cour suprême du Canada rendait jugement dans l’affaire Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Vavilov, 2019 CSC 65 [Vavilov], une affaire qui s’est présentée à elle comme une « occasion de se pencher de nouveau sur sa façon d’aborder le contrôle judiciaire des décisions administratives » (Vavilov au para 1).

[17]  Aux termes d’une directive émise aux parties, je leur ai offert de produire des représentations écrites additionnelles sur l’impact que pouvait avoir cet arrêt sur la présente affaire. Les parties ont fait savoir à la Cour qu’elles n’avaient pas de représentations additionnelles à faire en lien avec Vavilov.

[18]  Avant que la Cour suprême ne rende son jugement dans Vavilov, il était acquis que lorsqu’un décideur administratif était appelé à interpréter des dispositions de sa loi constitutive ou d’une loi étroitement liée à son mandat, sa décision était révisable suivant la norme de la décision raisonnable. En d’autres termes, la déférence était habituellement de mise, sauf si la question relevait d’une catégorie de questions à laquelle la norme de la décision correcte demeurait applicable (Alberta (Information and Privacy Commissioner) c Alberta Teachers’ Association, 2011 CSC 61 au para 30; Vavilov au para 25).

[19]  À mon avis, Vavilov n’a pas modifié le droit à cet égard. En effet, dans un souci de clarification et de simplification du droit applicable eu égard à la détermination de la norme de contrôle applicable dans un cas donné, la Cour suprême a adopté un « cadre d’analyse repos[ant] sur la présomption voulant que la norme de la décision raisonnable soit la norme applicable dans tous les cas » (Vavilov aux para 10 et 25). Ce cadre d’analyse tient pour acquis, en tant que fondement conceptuel de cette présomption, l’expertise du décideur administratif, considérée inhérente à ses fonctions spécialisées (Vavilov aux para 26 à 28).

[20]  Il ne peut y avoir dérogation à cette présomption que dans deux types de situations. Le premier type de situations concerne les cas où le législateur a indiqué clairement souhaiter l’application d’une norme différente de la norme de la décision raisonnable. Ce sera le cas lorsque le législateur prescrit lui-même la norme applicable ou encore lorsqu’il prévoit un mécanisme d’appel d’une décision administrative devant une cour de justice. Il s’agit ici de respecter la volonté du législateur (Vavilov au para 17).

[21]  Le deuxième type de situations vise, pour sa part, les instances où la présomption d’application de la norme de la décision raisonnable doit céder le pas lorsque la primauté du droit commande l’application de la norme de la décision correcte. Ce sera le cas des questions de nature constitutionnelle, des questions de droit générales d’importance capitale pour le système juridique dans son ensemble et des questions liées à la délimitation des compétences respectives d’organismes administratifs (Vavilov au para 17).

[22]  Le présent dossier ne présente pas les traits d’une affaire soulevant une question de droit générale d’importance capitale pour le système juridique dans son ensemble. Comme la Cour suprême l’a rappelé dans Vavilov, la norme de contrôle de la décision correcte s’impose à l’égard « des questions de droit générales qui sont « d’une importance fondamentale, de grande portée » et susceptibles d’avoir des répercussions juridiques significatives sur le système de justice dans son ensemble ou sur d’autres institutions gouvernementales » (Vavilov au para 59). Elle a tenu à préciser, à cet égard, que le simple fait qu’un conflit puisse être d’intérêt général ou puisse porter sur un enjeu important ne suffisait pas pour qu’il entre dans la catégorie des questions de droit générales d’importance capitale pour le système juridique dans son ensemble (Vavilov au para 61).

[23]  Mais plus important encore, la Cour suprême a réitéré, dans Vavilov, que la norme de la décision raisonnable continuait à s’appliquer aux décisions où le décideur administratif se livre à l’interprétation d’une disposition législative ou règlementaire relevant de son champ de compétence. Elle a rappelé que dans de tels cas, il n’appartenait pas à la Cour de révision de procéder à une analyse de novo ni de déterminer quelle aurait été, à son avis, l’interprétation correcte à donner au texte de loi (Vavilov au para 116). Toutefois, elle a précisé qu’il fallait tenir pour acquis, lors d’un contrôle judiciaire, que les décideurs administratifs appelés à interpréter la loi, le feront, au même titre que les cours de justice, en tenant compte, conformément aux attentes du législateur, du principe moderne d’interprétation des lois, c’est-à-dire en tenant compte du libellé, du contexte et de l’objet de la disposition concernée (Vavilov aux para 118-120).

[24]  Je rappelle que la demanderesse soutient, pour l’essentiel, que sa situation était régie par un processus d’immigration à « étapes multiples » – un concept qu’elle ne définit pas – et que l’âge de l’enfant à charge pouvait donc être fixé à une date antérieure à celle de sa demande de parrainage, notamment à la date de sa propre demande de résidence permanente faite en 2013, époque où Don Stanley, alors âgé de 18 ans, rencontrait sans difficulté cette définition. 

[25]  Au cours de la période pertinente au présent litige, la définition d’enfant à charge a été modifiée à trois reprises.

[26]  Lors du dépôt de la demande de résidence permanente de la demanderesse en 2013, la définition pertinente d’enfant à charge incluait les enfants âgés de moins de vingt-deux-ans et ceux qui, âgés de plus de vingt-deux-ans, n’avaient pas cessés de dépendre du soutien financier de l’un ou l’autre de leurs parents, soit pour le financement de leurs études ou soit parce que leur état physique ou mental l’exigeait.

[27]  Cette définition a été modifiée le 1er août 2014, par le biais de l’entrée en vigueur du Règlement modifiant le Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2014-133 [Règlement modifiant de 2014], le marqueur de l’âge étant abaissé de 22 à 19 ans. C’est ainsi que jusqu’au 23 octobre 2017, la définition d’enfant à charge incluait les enfants de moins de dix-neuf ans et ceux qui, âgés de plus de dix-neuf ans, n’avait pas cessés de dépendre du soutien financier de l’un ou l’autre de leurs parents et ne pouvaient subvenir à leurs propres besoins en raison de leur état physique ou mental.

[28]  La définition d’enfant à charge a été de nouveau modifiée par le biais du Règlement modifiant le Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés (âge des enfants à charge), DORS/2017-60 [Règlement modifiant de 2017]. Entré en vigueur le 24 octobre 2017, et toujours en vigueur à ce jour, le Règlement modifiant de 2017 a essentiellement eu pour effet de ramener le marqueur d’âge à 22 ans.

[29]  La date déterminante pour établir si une personne est un enfant à charge, est, selon la règle générale établie à l’article 25.1 du Règlement, celle où la « demande » est faite. Cette règle souffre d’exceptions pour certaines catégories particulières de demandes :

Règle générale — processus à une étape

General rule — one-step process

25.1 (1) La date déterminante de l’âge d’un enfant, pour établir s’il est l’enfant à charge d’une personne appartenant à une catégorie visée par le présent règlement — sauf dans les cas visés aux paragraphes (2) à (9) — qui présente une demande au titre des sections 5, 6 ou 7 de la partie 5, est celle où la demande est faite.

25.1 (1) For the purposes of determining whether a child is a dependent child, the lock-in date for the age of a child of a person who is a member of any of the classes set out in these Regulations, other than in those cases referred to in subsections (2) to (9), and who makes an application under Division 5, 6 or 7 of Part 5 is the date on which the application is made.

Certificat de sélection — situation particulière de détresse

Certificat de sélectiondistressful situation

(2) La date déterminante de l’âge d’un enfant, pour établir s’il est l’enfant à charge d’une personne visée à l’article 71 à qui est délivré un certificat de sélection du Québec attestant qu’elle est dans une situation particulière de détresse et qui présente une demande au titre de la section 6 de la partie 5, est celle où la demande de sélection a été faite auprès de la province.

(2) For the purposes of determining whether a child is a dependent child, the lock-in date for the age of a child of a person who is referred to in section 71, to whom a Certificat de sélection du Québec has been issued declaring that that person is in a particularly distressful situation and who makes an application under Division 6 of Part 5 is the date on which the application for selection was made to Quebec.

Candidats économiques du Québec

Quebec economic candidate

(3) La date déterminante de l’âge d’un enfant, pour établir s’il est l’enfant à charge d’une personne visée aux articles 86, 90, 97 ou 101 à qui est délivré un certificat de sélection du Québec et qui présente une demande au titre de la section 6 de la partie 5, est celle où la demande de sélection a été faite auprès de la province.

(3) For the purposes of determining whether a child is a dependent child, the lock-in date for the age of a child of a person who is referred to in section 86, 90, 97 or 101, to whom a Certificat de sélection du Québec has been issued and who makes an application under Division 6 of Part 5 is the date on which the application for selection was made to Quebec.

Candidats des autres provinces

Provincial nominee

(4) La date déterminante de l’âge d’un enfant, pour établir s’il est l’enfant à charge d’une personne appartenant à la catégorie des candidats des provinces désignée par la province et qui présente une demande au titre de la section 6 de la partie 5, est celle où la demande de désignation a été faite auprès de la province.

(4) For the purposes of determining whether a child is a dependent child, the lock-in date for the age of a child of a person who is a member of the provincial nominee class, who is nominated by the province and who makes an application under Division 6 of Part 5 is the date on which the application for nomination was made to the province.

(5) [Abrogé, DORS/2017-78, art. 2]

(5) [Repealed, SOR/2017-78, s. 2]

Parrainage — réfugiés

Sponsorship — refugee

(6) La date déterminante de l’âge d’un enfant, pour établir s’il est l’enfant à charge d’une personne visée à l’alinéa 139(1)h) qui présente une demande au titre de la section 6 de la partie 5 et à l’égard de laquelle une demande d’engagement est présentée par un répondant qui satisfait aux exigences de parrainage visées à l’article 158, est celle où la demande d’engagement a été faite auprès de la province de Québec.

(6) For the purposes of determining whether a child is a dependent child, the lock-in date for the age of a child of a person who is referred to in paragraph 139(1)(h), who makes an application under Division 6 of Part 5 and in respect of whom an undertaking application is made by a sponsor who meets the requirements of sponsorship set out in section 158 is the date on which the undertaking application was made to Quebec.

Réfugiés

Refugee

(7) La date déterminante de l’âge d’un enfant, pour établir s’il est l’enfant à charge d’une personne qui présente une demande de visa de résident permanent au titre de la section 1 de la partie 8 accompagnée de l’une des recommandations visées à l’article 140.3, est celle où la recommandation a été fournie.

(7) For the purposes of determining whether a child is a dependent child, the lock-in date for the age of a child of a person who submits an application for a permanent resident visa under Division 1 of Part 8 along with one of the referrals set out in section 140.3 is the date on which the referral was made.

Membre de la famille n’accompagnant pas le demandeur

Family member who does not accompany applicant

(8) La date déterminante de l’âge d’un enfant qui présente la demande visée à l’alinéa 141(1)b), pour établir s’il est l’enfant à charge d’une personne qui fait la demande visée à l’alinéa 139(1)b), est celle où cette dernière a fait sa demande.

(8) For the purposes of determining whether a child who submits an application under paragraph 141(1)(b) is the dependent child of a person who has submitted an application under paragraph 139(1)(b), the lock-in date for the age of that child is the date on which that person submitted the application.

Demande d’asile

Refugee protection

(9) La date déterminante de l’âge d’un enfant, pour établir s’il est l’enfant à charge d’une personne qui a présenté une demande d’asile au Canada conformément au paragraphe 99(3) de la Loi, à qui la qualité de personne protégée a été reconnue, et qui a présenté une demande de résidence permanente, est celle où la demande d’asile a été faite.

(9) For the purposes of determining whether a child is a dependent child, the lock-in date for the age of a child of a person who has submitted a claim for refugee protection inside Canada under subsection 99(3) of the Act, who has acquired protected person status and who has made an application for permanent residence is the date on which the claim for refugee protection was made.

[30]  Force est de constater que le cas de la demanderesse et de son fils ne tombe sous aucune de ces exceptions. C’est donc dire que c’est la règle générale qui doit s’appliquer, laquelle, suivant le libellé du paragraphe 25.1(1) du Règlement, fait en sorte que la date déterminante pour établir si Don Stanley est visé par la définition d’enfant à charge est celle où la « demande » a été présentée.

[31]  La question qui se pose maintenant est celle de savoir à quelle « demande » l’article 25.1 du Règlement fait référence dans le contexte de la présente affaire : la demande de parrainage accompagnée de la demande de résidence permanente signée par Don Stanley (21 mars 2017), la demande d’asile (2007) ou encore la demande de résidence permanente de la demanderesse (2013)?

[32]  La date de la demande l’asile doit être écartée d’entrée de jeu. En effet, suivant l’effet combiné des articles 13(1) de la Loi et 130(1) du Règlement, seuls les résidents permanents ou les citoyens canadiens peuvent présenter une demande de parrainage. Comme la demande d’asile de la demanderesse a été rejetée, celle-ci n’avait donc pas le statut requis, avant de se faire octroyer le statut de résidente permanente, pour présenter une telle demande. En d’autres termes, elle ne pouvait faire bénéficier un membre de sa famille d’un statut qu’elle ne possédait pas elle-même.

[33]  Quant à la demande de résidence permanente de la demanderesse, produite en 2013, le défendeur soutient qu’elle ne peut être retenue car Don Stanley n’accompagnait pas sa mère au Canada au moment où cette demande a été faite, et ce, même si pour les fins de cette demande, il avait été identifié comme enfant à charge. Je suis d’accord.

[34]  Il appert en effet du paragraphe 69(2) du Règlement que Don Stanley ne pouvait être considéré pour l’octroi d’un visa de résident permanent au moment où la demanderesse a présenté sa demande de résidence permanente, étant donné qu’il était à l’extérieur du Canada. Cette disposition permet aux membres de la famille qui accompagnent un étranger qui se voit octroyer un tel visa, sur la base de motifs d’ordre humanitaire, de s’en voir délivrer un également. Comme Don Stanley n’accompagnait pas la demanderesse, il ne pouvait bénéficier de cette possibilité.

[35]  La date du 21 mars 2017 – date du dépôt de la demande de parrainage – est celle qui a été privilégiée par l’agent de migration qui a statué sur ladite demande. C’est aussi, tel que j’en ai fait mention au tout début des présents motifs, la date où Don Stanley a produit sa propre demande de résidence permanente (DCT aux p. 21 à 23). À cette date, je le rappelle, le marqueur d’âge, selon la réglementation en vigueur, avait été abaissé de nouveau à 19 ans.

[36]  J’estime donc qu’il était raisonnable d’appliquer à Don Stanley la définition d’enfant à charge en vigueur entre le 1er août 2014 au 27 octobre 2017, et de le faire au moment où la demande de parrainage faite en son nom a été produite.

[37]  À cette date, soit en mars 2017, Don Stanley était âgé de plus de 19 ans. Pour répondre à la définition d’enfant à charge en vigueur à ce moment, il devait donc satisfaire aux critères additionnels énoncés à la définition d’enfant à charge, à savoir, qu’en raison de son état physique ou mental, il dépendait du soutien financier de ses parents. Or, il n’y a aucune preuve à cet effet au dossier. De surcroît, cet argument, je le rappelle, n’a été ni soulevé devant l’agent de migration qui a statué sur la demande de parrainage, ni devant la SAI.

[38]  Je suis d’avis, en somme, que la conclusion suivant laquelle la définition d’enfant à charge applicable au cas de Don Stanley était celle en vigueur à la date de la demande de parrainage produite par la demanderesse et celle suivant laquelle Don Stanley ne rencontrait pas les exigences de cette définition à ce moment, étaient raisonnables.

[39]  Il n’y a pas davantage de mérite, et ceci dit avec égards, à l’argument voulant qu’il était de mise d’évaluer le cas de Don Stanley à une date antérieure parce qu’il s’inscrivait dans un processus à « étapes multiples ». Outre l’article 25.1 du Règlement, qui parle d’un processus à une seule étape, le Résumé de l’étude d’impact de la réglementation [RÉIR], qui accompagne le Règlement modifiant de 2014 et auquel il est permis de recourir afin de déterminer l’objet du Règlement et son application envisagée (Tharmarasa c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2018 CF 1174 au para 18; Bristol-Myers Squibb Co c Canada, 2005 CSC 533 au para 157) confirme qu’il s’agissait bien là d’un processus à une seule étape.

[40]  En effet, le RÉIR accompagnant le Règlement modifiant de 2014 spécifie que les demandes de résidence permanente déposées au titre de la catégorie du regroupement familial font partie d’un processus comportant une seule étape :

Les procédures que doivent suivre les agents pour établir l’âge d’un enfant afin de savoir s’il satisfait ou non aux critères de la définition d’enfant à charge seront clairement énoncées dans le Règlement, pour chacune des catégories. Plus précisément, l’âge des enfants à charge sera établi comme suit :

Pour les processus comportant une seule étape

  la date à laquelle CIC reçoit la demande de résidence permanente complète, pour les demandeurs au titre de la catégorie fédérale de l’immigration économique (travailleurs qualifiés du volet fédéral, travailleurs de métiers spécialisés du volet fédéral, demandeurs au titre de la catégorie de l’expérience canadienne, gens d’affaires du volet fédéral);

  la date à laquelle CIC reçoit la demande de résidence permanente complète, pour les demandeurs au titre de la catégorie du regroupement familial (y compris la catégorie des époux ou conjoints de fait au Canada);

  la date à laquelle CIC reçoit la demande de résidence permanente complète, pour les demandeurs présentant une demande pour des circonstances d’ordre humanitaire au Canada;

  la date à laquelle CIC reçoit la demande de résidence permanente complète, accompagnée d’un engagement de parrainage complet, pour les réfugiés parrainés par le secteur privé.

[Je souligne]

[41]  À l’inverse, le RÉIR donne également des exemples de ce que constituent un processus d’immigration à « étapes multiples », ou, à plusieurs étapes :

Pour les processus comportant au moins deux étapes

  la date à laquelle le Québec reçoit la demande complète de certificat de sélection du Québec, pour les demandeurs au titre de l’une des catégories d’immigration économique du Québec (travailleurs qualifiés du Québec et investisseurs, entrepreneurs et travailleurs autonomes du Québec), pour les personnes se trouvant dans une situation de détresse et pour les personnes visées par un parrainage de groupe devant s’établir au Québec;

  la date à laquelle la province ou le territoire, autre que le Québec, reçoit la demande complète en tant que candidat de la province ou du territoire, pour les demandeurs au titre du Programme des candidats des provinces;

  la date à laquelle CIC reçoit une demande initiale complète de permis de travail présentée depuis l’étranger par un demandeur au titre du Programme des aides familiaux résidants;

  la date à laquelle CIC reçoit, d’un organisme de recommandation, une recommandation visant un réfugié sélectionné à l’étranger et faisant l’objet d’une recommandation par un organisme de recommandation;

  la date à laquelle CIC reçoit la demande de visa de résident permanent aux fins de la protection d’un réfugié en vertu de l’alinéa 139(1)b) du Règlement pour les personnes qui n’accompagnent par le demandeur et qui demandent la résidence permanente avant la fin de la période d’un an suivant l’octroi du statut de réfugié au demandeur (délai prescrit d’un an);

  la date à laquelle un agent a reçu la demande d’asile en vertu du paragraphe 99(3) de la LIPR, pour les personnes qui ont présenté une demande d’asile au Canada et qui ont par la suite acquis le statut de personne protégée.

[42]  Il est donc permis d’en comprendre que le processus d’immigration entrepris par la demanderesse n’en était pas un à « étapes multiples », puisqu’il n’était assujetti, comme ces exemples tirés du RÉIR le démontrent, à aucune étape préalable. Comme Don Stanley n’accompagnait pas la demanderesse au moment où celle-ci s’est vue attribuer le statut de résidente permanente, le processus pouvant mener à l’octroi de ce même statut à Don Stanley ne pouvait, lui aussi, en être un à « étapes multiples » dans le mesure où il reposait sur une demande de parrainage ou une demande de résidence permanente faite personnellement de l’étranger, et, donc, sur un processus à une seule étape. Je rappelle, à cet égard, que la demanderesse n’a nulle part spécifié, dans ses représentations écrites ou orales devant cette Cour, où, dans la réglementation applicable, l’on pouvait trouver le fondement de ce qu’elle avance sur ce point.

B.  Le volet des considérations humanitaires 

[43]  Compte tenu de ce qui précède, la SAI était bien fondée, à mon sens, sur la base de l’article 65 de la Loi, de se déclarer sans compétence pour considérer les motifs d’ordre humanitaire soulevés par la demanderesse.

[44]  L’article 65 de la Loi stipule en effet que les motifs d’ordre humanitaire ne peuvent être pris en considération par la SAI que s’il est statué que l’étranger qui s’adresse à elle fait partie de la catégorie du regroupement familial. Ainsi, dès qu’il est décidé que ce n’est pas le cas, la SAI n’a aucune autorité pour tenir compte des facteurs d’ordre humanitaire soulevés par cette personne (Essindi c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2018 CF 288 au para 22). C’est ce qui s’est produit en l’espèce. Cette conclusion, à la lumière de l’ensemble des circonstances de la présente affaire, était à la portée de la SAI. Il n’y a là aucune erreur pouvant justifier l’intervention de la Cour.

[45]  La présente demande de contrôle judiciaire sera donc rejetée. Aucune des parties n’a proposé de certifier une question en vue d’un appel. J’estime aussi qu’il n’y a pas matière à le faire dans les circonstances de la présente affaire.


JUGEMENT dans le dossier IMM-2362-19

LA COUR STATUE que :

  1. La demande de contrôle judiciaire est rejetée;

  2. Aucune question n’est certifiée.

« René LeBlanc »

Juge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-2362-19

 

INTITULÉ :

MARIE EVENA INNOCENT c LE MINISTRE DE L’IMMIGRATION, DES RÉFUGIÉS ET DE LA CITOYENNETÉ

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Montréal (Québec)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 11 décembre 2019

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT :

LE JUGE LEBLANC

 

DATE DES MOTIFS :

LE 19 MARS 2020

 

COMPARUTIONS :

Me Murhula Juguace Mweze

 

Pour la demanderesse

 

Me Andrea Shahin

 

Pour le défendeur

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Murhula Juguace Mweze

Avocat

Montréal (Québec)

 

Pour la demanderesse

 

Procureur général du Canada

Montréal (Québec)

 

Pour le défendeur

 

 

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