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     Date : 20000124

     Dossier : IMM-2571-99

Toronto (Ontario), le lundi 24 janvier 2000

En présence de Madame le juge McGillis


ENTRE :

     LI XIN

     demandeur

     - et -


     LA MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

     défenderesse



     ORDONNANCE


     La Cour fait droit à la requête. Le dossier de la demande du demandeur est réputé avoir été signifié et déposé en temps voulu. La défenderesse signifiera et déposera son dossier de la demande d'ici au 14 février 2000. Le demandeur signifiera et déposera, conformément à la règle 314, sa demande d'audience d'ici au 24 février 2000.


     Signé : D. McGillis

     ________________________________

     Juge

Traduction certifiée conforme,




Bernard Olivier, LL.B.




     Date : 20000124

     Dossier : IMM-2571-99


ENTRE :

     LI XIN

     demandeur

     - et -


     LA MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

     défenderesse



     MOTIFS DE L'ORDONNANCE


Le juge McGILLIS



[1]      Il y a en l'espèce requête par écrit de l'avocat du demandeur en prorogation du délai d'appel et tenant lieu d'appel contre l'ordonnance en date du 25 novembre 1999 du protonotaire Lafrenière, laquelle requête est instruite sur pièces sous le régime de la règle 369 des Règles de la Cour fédérale (1998).


[2]      Le 21 mai 1999, le demandeur a déposé un recours en contrôle judiciaire contre le rejet par un agent des visas de sa demande de résidence permanente au Canada. La défenderesse a déposé son avis de comparution le 27 mai 1999. L'affidavit du demandeur a été signifié et déposé le 21 juin 1999, conformément à la règle 306 des Règles de la Cour fédérale (1998). Le 21 juillet 1999, la défenderesse a signifié et déposé l'affidavit de l'agent des visas. Cependant, celui-ci n'a pas été disponible pour être contre-interrogé dans les 20 jours qui suivaient le dépôt de son affidavit, ainsi que le prescrit la règle 308. L'avocat du demandeur l'a contre-interrogé le 7 septembre 1999, et a reçu la transcription du contre-interrogatoire le 27 septembre 1999, le jour même où le dossier de la demande devait être déposé conformément à la règle 309.


[3]      Le 2 novembre 1999, l'avocat du demandeur a déposé, en application de la règle 369, une requête en prorogation du délai imparti pour contre-interroger l'agent des visas et pour signifier et déposer le dossier de la demande. Puisqu'il avait annexé le dossier de la demande à sa requête et l'avait signifié à la défenderesse, il a également conclu à ordonnance portant régularisation de la signification et du dépôt de ce dossier. À l'appui de la requête en prorogation, il a soumis l'affidavit en date du 1er novembre 1999 de Monlee Ip, une secrétaire de son cabinet, qui témoignait notamment que Mme Lam était en congé certains jours pendant la période allant du 29 septembre au 16 octobre 1999, et qu'elle avait quatre audiences inscrites au rôle pour la période allant du 16 au 29 octobre 1999. Elle affirmait encore que Mme Lam travaillait sur le dossier de la demande " chaque fois qu'elle en avait le temps ", mais n'a pu le parachever que le 1er novembre 1999. Mme Lam était l'un des avocats chargés de ce dossier.


[4]      Par ordonnance en date du 25 novembre 1999, le protonotaire Lafrenière a rejeté la requête en prorogation de délai, notamment par ces motifs :

     Je conclus des preuves et témoignages produits qu'il y a des arguments susceptibles de justifier l'annulation du rejet par l'agent des visas de la demande de résidence permanente du demandeur. En outre, il se peut que le retard mis par le demandeur à contre-interroger cet agent des visas soit excusable. Seulement le demandeur n'a pu donner une explication satisfaisante du long retard dans le dépôt de son dossier de la demande.
     Les raisons citées pour expliquer le retard durant la période allant du 7 septembre au 2 novembre 1999 n'étaient certainement pas indépendantes de la volonté du demandeur ou de son avocat [voir Chin c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration) (1993), 69 F.T.R. 77 (1re inst.)]. Le demandeur aurait dû prendre immédiatement les mesures nécessaires pour demander une prorogation de délai, lorsqu'il lui est apparu évident qu'il ne pouvait respecter les délais stricts prévus dans les Règles.
     J'ai conscience des conséquences graves que le rejet de cette requête pourrait avoir sur le recours du demandeur. Cependant, dans l'exercice de mon pouvoir d'appréciation discrétionnaire en la matière, je ne peux ignorer que le retard a été causé par la procrastination d'un avocat chevronné.

[5]      L'ordonnance du protonotaire Lafrenière n'a été communiquée à l'avocat du demandeur que le 29 novembre 1999. Selon la règle 51(2)a), l'appel formé contre une décision de protonotaire doit être " signifié dans les 10 jours suivant la date de l'ordonnance visée par l'appel ". En l'espèce, l'ordonnance en question n'a été portée à l'attention de l'avocat du demandeur que quatre jours après qu'elle eut été rendue. La requête portant appel contre la décision a été déposée dans les dix jours de la notification. Dans ces conditions, je suis convaincue qu'il y a lieu d'accorder la prorogation du délai de signification et de dépôt de la requête.

[6]      La requête portant appel contre l'ordonnance du protonotaire Lafrenière a été déposée le 9 décembre 1999, avec à l'appui l'affidavit de Mary Lam, l'un des avocats chargés du dossier. Mme Lam témoignait notamment que durant la période du retard, " les relations de travail entre Mary Lam et Cecil Rotenberg traversaient des difficultés, dont ni l'un ni l'autre avocat ne tient à divulguer les détails pour le moment ".

[7]      La norme de contrôle à appliquer par le juge des requêtes, saisi de l'appel formé contre une ordonnance discrétionnaire de protonotaire, a été expliquée dans Canada c. Aqua-Gem Investments Ltd., [1993] 2 C.F. 425 (C.A.), où le juge MacGuigan, prononçant le jugement majoritaire de la Cour d'appel, s'est prononcé en ces termes, pages 462 et 463 :

         Je souscris aussi en partie à l'avis du juge en chef au sujet de la norme de révision à appliquer par le juge des requêtes à l'égard des décisions discrétionnaires de protonotaires. Selon en particulier la conclusion tirée par lord Wright dans Evans v. Bartlam, [1937] A.C. 473 (H.L.) à la page 484, et par le juge Lacourcière, J.C.A., dans Stoicevski v. Casement (1983), 43 O.R. (2d) 436 (C. div.), le juge saisi de l'appel contre l'ordonnance discrétionnaire d'un protonotaire ne doit pas intervenir sauf dans les deux cas suivants :
             a) l'ordonnance est entachée d'erreur flagrante, en ce sens que le protonotaire a exercé son pouvoir discrétionnaire en vertu d'un mauvais principe ou d'une mauvaise appréciation des faits,
             b) l'ordonnance porte sur des questions ayant une influence déterminante sur l'issue du principal.
         Si l'ordonnance est manifestement erronée parce que le protonotaire a commis une erreur de droit (concept qui, à mon avis, embrasse aussi la décision discrétionnaire fondée sur un mauvais principe ou sur une mauvaise appréciation des faits) ou si elle porte sur des questions ayant une influence déterminante sur l'issue du principal, le juge saisi du recours doit exercer son propre pouvoir discrétionnaire en reprenant l'affaire depuis le début.

[8]      L'ordonnance discrétionnaire du protonotaire Lafrenière porte sur une question ayant une influence déterminante sur l'issue du principal, en ce que l'impossibilité pour le demandeur de signifier et de déposer son dossier de la demande aura pour résultat inéluctable le rejet sommaire de son recours. Donc, conformément aux principes dégagés dans l'arrêt Canada c. Aqua-Gem Investments Ltd., je dois exercer mon propre pouvoir discrétionnaire pour reprendre l'affaire depuis le début.

[9]      Le critère à observer en cas de requête en prorogation de délai a été exposé de façon succincte dans l'arrêt Nelson c. Établissement d'Edmonton, [1996] A.C.F. no 1492, A-711-95 (18 novembre 1996) (C.A.), par le juge Strayer qui s'est prononcé en ces termes au paragraphe 4 du jugement rendu au nom de la Cour d'appel :

         Les principaux facteurs à prendre en considération pour examiner s'il y a lieu à prorogation sont bien établis dans la jurisprudence de la Cour " savoir : la volonté, exprimée en temps voulu, d'engager la procédure; l'existence d'un dossier défendable; la cause et la longueur réelle du retard; et la question de savoir si le retard a été cause de préjudice. En l'espèce, tous ces facteurs auraient dû être jugés favorables au requérant. Le fait que la demande de contrôle judiciaire a été déposée mais n'a pas été signifiée dans les délais confirme la volonté d'engager l'instance. Le retard mis à signifier la requête aux avocats des intimés était de 11 jours, ce qui n'est guère un retard dirimant, lequel retard s'explique d'ailleurs par le fait que le requérant se trouvait en prison et qu'il y a eu un changement d'avocat. Les intimés n'ont pas cherché à faire valoir le préjudice; il n'y en a d'ailleurs aucun. Il est également clair que le requérant a un dossier défendable, bien qu'il puisse y avoir des points de fait et de droit susceptibles de débats et restant à résoudre. Tous les critères juridiques sont donc réunis pour l'octroi d'une prorogation des délais.

[10]      En l'espèce, le demandeur a exprimé, clairement et dans les délais, sa volonté d'exercer son recours et a toujours eu l'intention d'y donner suite. Qui plus est, il a un dossier défendable dans ce recours. La défenderesse ne s'est plainte d'aucun préjudice par suite du retard, et d'ailleurs elle n'aurait pas pu le faire, vu le retard causé par l'indisponibilité de son témoin pour le contre-interrogatoire. Inutile de préciser qu'on ne saurait imputer d'aucune façon ce retard au demandeur.

[11]      Le seul point qu'il reste à examiner, ce sont la cause et la longueur réelle du retard. Comme noté supra, le demandeur a contre-interrogé l'auteur de l'affidavit le 7 septembre 1999. Selon la règle 309(1), il devait déposer son dossier de la demande " dans les 20 jours suivant le contre-interrogatoire des auteurs des affidavits déposés par les parties ", soit le 27 septembre 1999 au plus tard. Cependant, la transcription du contre-interrogatoire n'était prête ou communiquée à son avocat qu'à cette dernière date. En conséquence, à tout le moins jusqu'au 27 septembre 1999, aucun retard n'était imputable au demandeur. Le retard a donc réellement duré du 27 septembre au 1er novembre 1999, date à laquelle a été déposée la requête en prorogation de délai. L'avocat du demandeur l'a expliqué entre autres par les relations difficiles avec sa collègue Mme Lam. Pareille explication, prise isolément, ne serait normalement pas suffisante pour excuser un retard. Cependant, cette explication du retard doit être considérée dans le contexte de tous les autres critères pertinents, lesquels sont tous favorables à la requête en prorogation. Après examen des éléments de preuve versés au dossier, à la lumière de tous les critères dégagés par l'arrêt Nelson c. Établissement d'Edmonton, je conclus, par exercice de mon pouvoir discrétionnaire, qu'il est conforme à la justice d'accorder la prorogation du délai.

[12]      La requête est accueillie. Le dossier de la demande du demandeur est réputé avoir été signifié et déposé en temps voulu. La défenderesse signifiera et déposera son dossier de la demande d'ici au 14 février 2000. Le demandeur signifiera et déposera, conformément à la règle 314, sa demande d'audience d'ici au 24 février 2000.


     Signé : D. McGillis

     ________________________________

     Juge


Ottawa, le 24 janvier 2000




Traduction certifiée conforme,




Bernard Olivier, LL.B.


     COUR FÉDÉRALE DU CANADA

     SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

     AVOCATS ET AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER



DOSSIER No :              IMM-2571-99

INTITULÉ DE LA CAUSE :      Li Xin c. Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration


REQUÊTE INSTRUITE SUR PIÈCES SANS LA COMPARUTION DES PARTIES


MOTIFS DE L'ORDONNANCE PRONONCÉS PAR MME LE JUGE McGILLIS


LE :                      24 février 2000



MÉMOIRES SOUMIS PAR :


M. Cecil L. Rotenberg                  POUR LE DEMANDEUR
M. Toby J. Hoffman                      POUR LA DÉFENDERESSE


AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :


Cecil L. Rotenberg                      POUR LE DEMANDEUR

Don Mills (Ontario)

M. Morris Rosenberg                      POUR LA DÉFENDERESSE

Sous-procureur général du Canada

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