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                                                                                                                                            Date : 20020129

                                                                                                                                         Dossier : T-828-01

Ottawa (Ontario), le 29 janvier 2002

En présence de Monsieur le juge Pinard

Entre :

                                                             JOHN H.T. SANGSTER

                                                                                                                                                     demandeur

                                                                              - et -

                                           LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

                                                                                                                                                      défendeur

                                                                     ORDONNANCE

La demande de contrôle judiciaire de la décision rendue le 26 janvier 2001 par E. A. McNally, président du comité d'appel du Tribunal des anciens combattants (révision et appel), est rejetée.

                      YVON PINARD                        

       JUGE

Traduction certifiée conforme

Suzanne Bolduc, LL.B.


                                                                                                                                            Date : 20020129

                                                                                                                                         Dossier : T-828-01

                                                                                                                 Référence neutre : 2002 CFPI 97

Entre :

                                                             JOHN H.T. SANGSTER

                                                                                                                                                     demandeur

                                                                              - et -

                                           LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

                                                                                                                                                      défendeur

                                                    MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE PINARD

        Le demandeur sollicite, en vertu de l'article 18.1 de la Loi sur la Cour fédérale, L.R.C. (1985), ch. F-7, le contrôle judiciaire de la décision datée du 26 janvier 2001 par laquelle M. E.A. McNally, président du comité d'appel du Tribunal des anciens combattants (révision et appel) (le TACRA), a décidé de ne pas modifier la date à compter de laquelle la pension d'invalidité du demandeur prend effet et a refusé de lui accorder une compensation supplémentaire en vertu des paragraphes 39(1) et (2) de la Loi sur les pensions, L.R.C. (1985), ch. P-6 (la Loi).

        Le demandeur a servi dans les Forces canadiennes au Canada et à l'étranger du 1er janvier 1941 au 13 novembre 1945.


        Le 9 septembre 1994, le demandeur, qui souffrait d'une bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO), s'est adressé à la Commission canadienne des pensions (la CCP) pour demander une pension d'invalidité en vertu du paragraphe 21(1) de la Loi.

        Le 1er février 1995, la CCP a déterminé que la BPCO n'était pas attribuable au service du demandeur dans les Forces canadiennes et ne donnait donc pas droit à pension en vertu du paragraphe 21(1) de la Loi.

        En 1999, le demandeur a interjeté appel devant le TACRA de la décision rendue par la CCP en 1995, mais le TACRA a rejeté son appel.

        Le 11 mars 1999, le demandeur a demandé, en vertu du paragraphe 21(1) de la Loi, une pension d'invalidité pour sinusite chronique (SC).

        Dans une décision datée du 25 juin 1999, le ministère des Anciens combattants ayant conclu que la CS était attribuable à son service militaire a accordé au demandeur une pension d'invalidité en vertu du paragraphe 21(1) de la Loi. Le droit à pension a pris effet le 11 mars 1999, conformément au paragraphe 39(1) de la Loi.

        Le 29 novembre 1999, le demandeur a présenté une demande d'invalidité en vertu du paragraphe 21(5) de la Loi, alléguant que la BPCO était la conséquence de son affection ouvrant droit à pension, c'est-à-dire la SC.


        Dans une décision datée du 27 avril 2000, le ministère des Anciens combattants a accordé au demandeur, en vertu du paragraphe 21(5) de la Loi, une pension d'invalidité pour sa BPCO, estimant qu'elle était la conséquence de l'affection ayant ouvert droit à pension, c'est-à-dire la SC. Le droit à pension a pris effet le 29 novembre 1999, conformément au paragraphe 39(1) de la Loi.

      Le demandeur a demandé la tenue d'une audience en vue d'examiner l'admissibilité pour que soit examinée la date de prise d'effet de la pension lui ayant été accordée en vertu du paragraphe 21(5) pour sa BPCO. Le comité d'examen de l'admissibilité du TACRA a tenu une audience le 11 août 2000.

      Le comité d'examen de l'admissibilité a décidé de ne pas modifier la date de prise d'effet, en vertu du paragraphe 39(1), de la décision rendue en vertu du paragraphe 21(5) relativement à la BPCO et il a estimé que rien dans la preuve ne permettait d'accorder une pension supplémentaire en vertu du paragraphe 39(2) de la Loi.

      Le demandeur a interjeté appel devant le TACRA de la décision rendue le 11 août 2000 par le comité d'examen de l'admissibilité.

      Le 15 décembre 2000, le TACRA a confirmé la décision du comité d'examen de l'admissibilité. Cette décision fait l'objet de la présente demande de contrôle judiciaire.

      En rejetant la demande présentée par le demandeur, E.A. McNally a fait les commentaires suivants :

[Traduction] Pour arriver à la présente décision, le Tribunal a examiné attentivement tous les documents et leurs annexes présentés à l'audience. Il a écouté attentivement l'exposé fait par l'avocat au nom de l'appelant.

Seuls les renseignements dont avait été saisi le comité ont été fournis au Tribunal. Le Tribunal estime que la décision du comité d'examen de l'admissibilité était fondée compte tenu de la preuve et de la législation, et il souscrit à sa décision que la date correcte de prise d'effet est le 29 novembre 1999, confirmant ainsi la décision du 11 août 2000.


Pour arriver à cette décision, le Tribunal a examiné attentivement tous les éléments de preuve, les dossiers médicaux ainsi que les observations faites par le représentant, et il s'est conformé à l'obligation que lui impose la loi de trancher en faveur du demandeur ou de l'appelant toute incertitude quant au bien-fondé de la demande, comme le prévoient les articles 3 et 39 de la Loi sur le Tribunal des anciens combattants (révision et appel).

      La principale question en litige en l'espèce consiste à déterminer si le TACRA a commis une erreur en confirmant la décision du comité d'examen de l'admissibilité qui a statué que la date de prise d'effet de la pension d'invalidité accordée au demandeur pour sa BPCO était le 29 novembre 1999, conformément à l'article 39 de la Loi.

      Le demandeur a obtenu une pension d'invalidité pour la SC en vertu de l'alinéa 21(1)a) de la Loi :


21. (1) Pour le service accompli pendant la Première Guerre mondiale ou la Seconde Guerre mondiale, sauf dans la milice active non permanente ou dans l'armée de réserve, le service accompli pendant la guerre de Corée, le service accompli à titre de membre du contingent spécial et le service spécial_:

a) des pensions sont, sur demande, accordées aux membres des forces ou à leur égard, conformément aux taux prévus à l'annexe I pour les pensions de base ou supplémentaires, en cas d'invalidité causée par une blessure ou maladie -- ou son aggravation -- survenue au cours du service militaire ou attribuable à celui-ci;

21. (1) In respect of service rendered during World War I, service rendered during World War II other than in the non-permanent active militia or the reserve army, service as a member of the special force, service in the Korean War, and service in a special duty area as a member of the Canadian Forces,

(a) where a member of the forces suffers disability resulting from an injury or disease or an aggravation thereof that was attributable to or was incurred during such military service, a pension shall, on application, be awarded to or in respect of the member in accordance with the rates for basic and additional pension set out in Schedule I;


      Le demandeur a obtenu, en application du paragraphe 21(5) de la Loi, une pension d'invalidité pour la BPCO découlant de la SC :



21. (5) En plus de toute pension accordée au titre des paragraphes (1) ou (2), une pension est accordée conformément aux taux indiqués à l'annexe I pour les pensions de base ou supplémentaires, sur demande, à un membre des forces, relativement au degré d'invalidité supplémentaire qui résulte de son état, dans le cas où :

a) d'une part, il est admissible à une pension au titre des alinéas (1)a) ou (2)a) ou du présent paragraphe, ou a subi une blessure ou une maladie - ou une aggravation de celle-ci - qui aurait donné droit à une pension à ce titre si elle avait entraîné une invalidité;

b) d'autre part, il est frappé d'une invalidité supplémentaire résultant, en tout ou en partie, de la blessure, maladie ou aggravation qui donne ou aurait donné droit à la pension.

21. (5) In addition to any pension awarded under subsection (1) or (2), a member of the forces who

(a) is eligible for a pension under paragraph (1)(a) or (2)(a) or this subsection in respect of an injury or disease or an aggravation thereof, or has suffered an injury or disease or an aggravation thereof that would be pensionable under that provision if it had resulted in a disability, and

(b) is suffering an additional disability that is in whole or in part a consequence of the injury or disease or the aggravation referred to in paragraph (a)

shall, on application, be awarded a pension in accordance with the rates for basic and additional pensions set out in Schedule I in respect of that part of the additional disability that is a consequence of that injury or disease or aggravation thereof.


      La date de prise d'effet d'une pension est déterminée par l'article 39 de la Loi. Les paragraphes 39(1) et 39(2) de la Loi prévoient ce qui suit :


39. (1) Le paiement d'une pension accordée pour invalidité prend effet à partir de celle des dates suivantes qui est postérieure à l'autre :

a) la date à laquelle une demande à cette fin a été présentée en premier lieu;

b) une date précédant de trois ans la date à laquelle la pension a été accordée au pensionné.

(2) Malgré le paragraphe (1), lorsqu'il est d'avis que, en raison soit de retards dans l'obtention des dossiers militaires ou autres, soit d'autres difficultés administratives indépendantes de la volonté du demandeur, la pension devrait être accordée à partir d'une date antérieure, le ministre ou le Tribunal, dans le cadre d'une demande de révision ou d'un appel prévus par la Loi sur le Tribunal des anciens combattants (révision et appel), peut accorder au pensionné une compensation supplémentaire dont le montant ne dépasse pas celui de deux années de pension.


39. (1) A pension awarded for disability shall be made payable from the later of

(a) the day on which application therefor was first made, and

(b) a day three years prior to the day on which the pension was awarded to the pensioner.

(2) Notwithstanding subsection (1), where a pension is awarded for a disability and the Minister or, in the case of a review or an appeal under the Veterans Review and Appeal Board Act, the Veterans Review and Appeal Board is of the opinion that the pension should be awarded from a day earlier than the day prescribed by subsection (1) by reason of delays in securing service or other records or other administrative difficulties beyond the control of the applicant, the Minister or Veterans Review and Appeal Board may make an additional award to the pensioner in an amount not exceeding an amount equal to two years pension.


                                                                     * * * * * * * * * *

      La norme de contrôle d'une demande de ce genre est relativement exigeante; par conséquent, notre Cour ne modifiera pas à la légère les conclusions du TACRA. Dans l'affaire Schott c. Canada (Procureur général), [2001] A.C.F. no 126 (1re inst.) (QL), ma collègue le juge Hansen a examiné la norme de contrôle et a dit ce qui suit au paragraphe [11] :


La norme de contrôle à appliquer à une décision du TAC [TACRA] est celle de la décision manifestement déraisonnable comme il a été statué dans la décision Metcalfe c. Canada, [1999] A.C.F. no 22. Le tribunal qui examine l'affaire peut donc uniquement intervenir lorsque la décision contestée est entachée d'une erreur de droit ou qu'elle est fondée sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire, ou sans tenir compte des éléments dont l'office disposait comme il a été statué dans les décisions MacDonald c. Canada (Procureur général), [1999] A.C.F. no 346; Hall c. Canada (Procureur général), [1998] A.C.F. no 890.

      Le demandeur fait tout d'abord valoir que le Bureau de services juridiques des pensions (le BSJP) a commis de nombreuses erreurs en ce qui concerne sa demande du 9 septembre 1994. Il prétend en outre que la CCP a commis une erreur dans sa décision du 1er février 1995.

      Dans sa demande de contrôle judiciaire datée du 16 mai 2001, le demandeur indique clairement qu'il sollicite l'annulation de la décision no 6417456 en vertu de l'article 18.1 de la Loi sur la Cour fédérale. Compte tenu de ce fait, je dois conclure que toutes les questions relatives à la demande de septembre 1994 ainsi qu'à la décision du 1er février 1995 ne sont pas pertinentes au présent contrôle judiciaire ou ne sont pas visées par celui-ci.

      Le demandeur soutient en outre que le TACRA a commis une erreur en refusant de lui accorder des prestations rétroactives en vertu des paragraphes 39(1) et (2) de la Loi. Il affirme que la date de prise d'effet de la pension accordée devrait être en réalité le 9 septembre 1994.

      La principale question en cause en l'espèce est l'effet de l'article 39 de la Loi. Cet article détermine le moment à partir duquel une pension doit être versée une fois qu'elle a été accordée. Dans la décision Leclerc c. Canada (Procureur général), [1998] A.C.F. no 153 (1re inst.) (QL), le juge Noël confirme l'interprétation qui doit être donnée de l'article 39, qui était alors l'article 29 de la Loi :

L'article 12 de la Loi sur les pensions prévoit l'octroi de pensions pour l'aggravation d'invalidités déjà existante [sic] ce qui a pour effet de créer des pensions fractionnaires ou partielles. Il est clair que le fondement de l'octroi d'une pension fractionnaire n'est pas le même que le fondement de l'octroi d'une pension pour invalidité entière et conséquentement [sic] les paiements qui s'y rattachent varient. Une pension partielle dans la proportion de un cinquième est différente d'une pension dans la proportion de deux cinquièmes et ces deux types sont différents d'une pension pour l'invalidité entière. Ainsi, lorsqu'un pensionné a droit à une pension dans la proportion de un cinquième puis dans la proportion de deux cinquième [sic] et ensuite, le droit à un [sic] pension pour l'invalidité entière, il lui a, dans les faits, été accordé trois types de pension distincts à des époques différentes.


Le Conseil est d'avis que l'article 29 a été conçus [sic] pour être appliqué a [sic] chaque type de pension au moment de l'octroi. Ledit article s'applique donc à une pension partielle au moment où elle est accordée et à une pension pour l'invalidité entière au moment où elle est accordée. L'expression « la pension » dans l'article 29 se rapporte donc à la pension visée par la décision au moment où elle est rendue et non à une autre pension accordée antérieurement. Le Conseil estime que la présente interprétation décrit clairement l'esprit de l'article 29.

      En l'espèce, je ne peux convenir que le TACRA a commis une erreur lorsqu'il a déterminé la date de prise d'effet de la pension. Comme dans la décision Leclerc, précitée, je suis d'avis que la pension demandée le 9 septembre 1994, qui était en fait une demande de pension d'invalidité présentée en vertu du paragraphe 21(1) de la Loi pour la BPCO, est complètement distincte de la demande par laquelle, le 29 novembre 1999, le demandeur a sollicité une pension d'invalidité supplémentaire pour la BPCO celle-ci étant la conséquence de la SC, une affection ouvrant droit à pension en vertu du paragraphe 21(5) de la Loi.

      Compte tenu de cette distinction, je crois que la décision du TACRA est raisonnable, la pension pertinente en l'espèce ayant pris effet à la date à laquelle la demande, qui faisait l'objet de la décision, a été présentée pour la première fois.

      Enfin, le demandeur affirme que ce n'est qu'après avoir fait des recherches considérables qu'il s'est rendu compte que la BPCO était la conséquence de la SC et qu'il devait tout d'abord établir son droit à une pension pour la SC avant de pouvoir prétendre que la BPCO en était la conséquence.

      Comme l'a dit la Cour dans la décision Leclerc, précitée :


[20]          Le requérant fait remarquer que dans l'instance, c'est la rectification d'une erreur de droit qui mena à l'octroi de sa pleine pension et qu'il n'est aucunement responsable du fait que dix ans se soient écoulés avant que ce droit ne lui soit reconnu [note de bas de page omise]. Le fait que la cause du retard ne soit pas imputable au requérant n'écarte pas l'article 39(1) lequel s'applique à toute pension sans égard aux circonstances dans lesquelles elle est octroyée.

      J'estime, par conséquent, que le TACRA a eu raison de fixer la prise d'effet de la pension au 29 novembre 1999 puisque l'article 39 s'applique sans égard aux circonstances dans lesquelles la pension a été accordée.

      Par conséquent, malgré toute la sympathie que suscite l'affaire à l'égard du demandeur, je dois rejeter sa demande de contrôle judiciaire.

                         YVON PINARD                     

       JUGE

OTTAWA (ONTARIO)

29 janvier 2002

Traduction certifiée conforme

Suzanne Bolduc, LL.B.


                                                    COUR FÉDÉRALE DU CANADA

                                               SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

                                                 AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                              T-828-01

INTITULÉ :                                             John H.T. Sangster c. Le procureur général du Canada

LIEU DE L'AUDIENCE :                      Vancouver (Colombie-Britannique)

DATE DE L'AUDIENCE :                    13 décembre 2001

MOTIFS DE L'ORDONNANCE :     le juge Pinard

DATE DES MOTIFS :              29 janvier 2002

COMPARUTIONS:

John H.T. Sangster                                  POUR LE DEMANDEUR

(604) 421-3533

Ward Bansley                                           POUR LE DÉFENDEUR

(604) 666-9211

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER:

John H.T. Sangster                                  POUR LE DEMANDEUR

(en son propre nom)

(604) 421-3533

Ward Bansley                                           POUR LE DÉFENDEUR

Ministère de la Justice

(604) 666-9211

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