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                                                                                                                                 Date : 20030915

                                                                                                                    Dossier : IMM-4236-02

                                                                                                               Référence : 2003 CF 1062

OTTAWA (ONTARIO), LE LUNDI 15 SEPTEMBRE 2003

EN PRÉSENCE DE MADAME LA JUGE SNIDER

ENTRE :

                                  TIBOR BANDULA, TIBORNE TUNDE BANDULA

                     (alias TIBORNE TUNDE BANDULA KOTAI), ZSOLT BANDULA

                                                        et TIBOR BANDULA fils

demandeurs

- et -

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

défendeur

                                MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE


[1]                Tibor Bandula (le demandeur), son épouse Tiborne Tunde Bandula (la demanderesse) et leurs fils jumeaux âgés de quatorze ans, Zsolt Bandula et Tibor Bandula fils (les demandeurs mineurs), sont tous les quatre des citoyens de Hongrie qui sont entrés au Canada en septembre 2001. Ils revendiquent le statut de réfugié au sens de la Convention au motif qu'ils sont des personnes qui craignent avec raison d'être persécutées du fait de leur origine rom.

[2]                Les demandeurs fondent en outre leur revendication sur celle présentée par le frère de la demanderesse, Zsigmond Kotai. L'audition de la revendication du statut de réfugié au sens de la Convention présentée par M. Kotai a eu lieu au même moment que celle des demandeurs et M. Kotai était au départ une des parties dans la présente demande de contrôle judiciaire. Toutefois, il s'est désisté de sa demande le 19 septembre 2002.

[3]                Une audience a eu lieu devant la Section du statut de réfugié de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié (la Commission) afin que soient tranchées la revendication des demandeurs et celle de M. Kotai. Bien que la Commission ait reconnu que les demandeurs étaient des Rom et qu'ils avaient subi diverses formes de discrimination en Hongrie, elle a conclu ce qui suit :

·            la discrimination subie par les demandeurs et par M. Kotai ne constituait pas de la persécution;

·            les demandeurs pouvaient obtenir la protection de l'État, mais ils ne se sont pas prévalus de la possibilité de se plaindre des traitements subis et des ressources auxquelles ils pouvaient avoir recours en Hongrie.


[4]                Par conséquent, dans une décision datée du 6 juin 2002, la Commission a conclu que les demandeurs n'étaient pas des réfugiés au sens de la Convention. Les demandeurs sollicitent le contrôle judiciaire de cette décision.

Les questions en litige

[5]                Les demandeurs soulèvent les questions suivantes :

1.          La Commission a-t-elle commis une erreur dans son analyse de la différence entre la discrimination et la persécution?

2.          La Commission a-t-elle commis une erreur dans son analyse de la protection de l'État?

Analyse

[6]                Pour les motifs ci-après énoncés, je suis d'avis que la présente demande devrait être rejetée.


Première question en litige (a) : La Commission a-t-elle commis une erreur dans son analyse de la différence entre la discrimination et la persécution?

[7]                Selon ce que prétendent les demandeurs, la Commission a commis une erreur lorsqu'elle a, de façon indue, limité la portée de la persécution et lorsqu'elle a omis de traiter de la question de savoir si la discrimination subie de façon répétée équivalait à de la persécution. Notamment, les demandeurs prétendent ce qui suit :

·            Les coups, les actes de violence, les menaces de mort, la violence psychologique et les graves pertes économiques peuvent tous constituer des éléments de persécution (voir l'arrêt Chan c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration), [1993] 3 C.F. 675 (C.A.), confirmé par [1995] 3 R.C.S. 593, la décision Porto c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration), [1993] A.C.F. no 881 (1re inst.) (QL), la décision Munoz c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1994] A.C.F. no 1824 (1re inst.) (QL), la décision Bragagnini-Ore c. Canada (Secrétaire d'État), [1994] A.C.F. no 143 (1re inst.) (QL), la décision Lerer c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1995] A.C.F. no 31 (1re inst.) (QL), et la décision Ammery c. Canada (Secrétaire d'État), [1994] A.C.F. no 676 (1re inst.) (QL)).


·            La Commission avait l'obligation d'examiner la question de savoir si des actes de harcèlement cumulés par le passé peuvent entraîner une possibilité sérieuse de persécution à l'avenir (voir la décision Bobrik c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1994] A.C.F. no 1364 (1re inst.) (QL), et Yip c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1994] A.C.F. no 1529 (T.D.) (QL))

[8]                Il est utile de traiter d'abord des conclusions tirées par la Cour à l'égard de la définition de « persécution » . Ces conclusions sont les suivantes :

·            Il est nécessaire, pour être en présence de persécution, que la personne soit tourmentée sans relâche par des traitements cruels ou qu'il y ait une succession de mesures prises systématiquement pour punir (voir l'arrêt Sagharichi c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration), [1993] A.C.F. no 796 (C.A.) (QL), pour lequel une autorisation d'appel a été rejetée par [1993] C.S.C.R. no 461 (QL), et l'arrêt Rajudeen c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration), [1984] A.C.F. no 601 (C.A.) (QL)).


·            Pour que les actes discriminatoires puissent constituer de la persécution, ils doivent être « suffisamment graves et doivent avoir lieu sur une période de temps assez longue pour en conclure que l'intégrité physique ou morale des revendicateurs est menacée » (voir la décision N. K. c. Canada (Solliciteur général), [1995] A.C.F. no 889, au paragraphe 21 (1re inst.) (QL)).

·            La Commission commet une erreur de droit lorsqu'elle omet de tenir compte de preuve qui ne constitue pas en soi de la persécution, mais qui participe d'un mode de persécution (voir l'arrêt Retnem c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration), [1991] A.C.F. no 428 (C.A.) (QL), l'arrêt Madelat c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration), [1991] A.C.F. no 49 (C.A.) (QL), et les décisions Porto et Yip, précitées.

[9]                Dans des termes plus généraux, la Commission doit aller au-delà de l'acte unique de discrimination pour examiner l'effet cumulatif des actes allégués par les revendicateurs du statut de réfugié. La question est celle de savoir si la Commission a respecté les décisions de référence précédemment mentionnées. Un examen de la décision de la Commission révèle que la Commission a compris quelle était la jurisprudence applicable et qu'elle a examiné le témoignage des demandeurs de façon appropriée. Dans ses motifs, la Commission a reconnu qu'il s'agissait d'une erreur d'avoir omis d'évaluer la question de savoir si les actes de discrimination à effet cumulatif constituent de la persécution. La Commission a alors tiré la conclusion suivante à l'égard de cette question :


De l'avis du tribunal, la violence verbale dont ont fait l'objet tous les revendicateurs à l'école ne constitue pas de la persécution. Il n'existe aucune preuve substantielle montrant qu'ils ont déjà été privés d'un de leurs droits fondamentaux. Ils ont dû subir un certain préjudice physique aux mains de hooligans et de skinheads. Le tribunal traitera de la question de la protection de l'État dans le paragraphe suivant. Pour ce qui est de leur situation économique pendant leur jeunesse et de la discrimination dont ils ont été l'objet au travail et à l'école, le tribunal estime que cela ne constitue pas de la persécution.

[10]            Après avoir examiné le témoignage des demandeurs à l'égard du traitement subi, qui selon ce qu'ils prétendent équivaut à de la persécution, je conclus que la conclusion finale tirée par la Commission selon laquelle la discrimination subie par les demandeurs au travail et à l'école ne constituait pas de la persécution n'était pas déraisonnable ou arbitraire.

[11]            En outre, même après avoir pris en compte l'agression physique subie par le demandeur en 1997, la Commission pouvait raisonnablement conclure que les demandeurs n'étaient pas des personnes qui avaient raison de craindre d'être persécutées. Cette agression physique est survenue en août 1997. Les demandeurs sont restés en Hongrie jusqu'en septembre 2001. Il n'y avait pas de preuve que le demandeur ait fait l'objet d'autres agressions au cours des quatre années écoulées entre 1997 et 2001. Par conséquent, je suis d'avis que cette agression unique, survenue plus de quatre ans avant que les demandeurs s'enfuient de Hongrie, n'est pas suffisante pour appuyer une conclusion selon laquelle les demandeurs sont des personnes qui craignent avec raison d'être persécutées en Hongrie du fait de leur origine rom.


Première question en litige (b) : La persécution, s'il y a eu de la persécution, subie par M. Kotai est-elle pertinente?

[12]            Les demandeurs prétendent que la persécution subie par M. Kotai continue à être pertinente pour les revendications des autres membres de la famille et que toute erreur commise par la Commission à l'égard de la revendication de M. Kotai a une influence sur ces revendications. Les actes dirigés contre un membre de la famille peuvent être considérés comme des actes de persécution contre le revendicateur lui-même (voir la décision Arguello-Garcia c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration), [1993] A.C.F. no 635 (1re inst.) (QL), l'arrêt Madelat, précité, et l'arrêt Surujpal c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration), 1985 A.C.F. no 326 (C.A.) (QL)). Selon le demandeur, la décision de la Commission selon laquelle ce qu'avait vécu M. Kotai équivalait à de la discrimination et non à de la persécution était totalement déraisonnable.


[13]            Des portions importantes de la preuve touchaient le traitement subi par M. Kotai, dont la revendication n'est pas incluse dans la présente demande. Bien que la Cour ait statué que le mauvais traitement subi par des membres de la famille constituait de la persécution, les affaires citées par les demandeurs sur cette question sont différentes. Aucune des affaires ne traite de cas dans lesquels il avait été conclu que le membre de la famille en cause n'était pas un réfugié au sens de la Convention et dans lesquels une telle conclusion n'était pas contestée. En outre, le mauvais traitement subi par des membres de la famille dans la décision Arguello-Garcia, précitée, et dans l'arrêt Surujpal, précité, était beaucoup plus grave que celui subi dans la présente affaire et les demandeurs eux-mêmes avaient également subi un mauvais traitement.

[14]            Par conséquent, il devrait être accordé peu d'importance au mauvais traitement subi par M. Kotai étant donné qu'il ne conteste pas la décision défavorable rendue par la Commission à l'égard de sa revendication du statut de réfugié au sens de la Convention. Par conséquent, même en prenant en compte le traitement subi par M. Kotai, je suis d'avis que la conclusion de la Commission selon laquelle les demandeurs (un groupe qui n'inclut pas M. Kotai) n'avaient pas fait l'objet de persécution n'était pas déraisonnable ou arbitraire.

Deuxième question en litige : La Commission a-t-elle commis une erreur dans son analyse de la protection de l'État?

[15]            Selon ce que prétendent les demandeurs, la Commission a commis les erreurs suivantes, à savoir :

·            elle n'a pas tenu compte d'éléments de preuve dignes de foi démontrant que M. Kotai avait été persécuté par les policiers à au moins quinze reprises et que les policiers avaient refusé de protéger le demandeur. Lorsque les policiers refusent de poser des gestes, cela équivaut à déclarer qu'ils sont incapables de protéger (voir la décision Kraitman c. Canada (Secrétaire d'État), [1994] A.C.F. no 1063 (1re inst.) (QL)).


·            elle a choisi, sans expliquer son choix, de la preuve documentaire sélective plutôt que des éléments de preuve dignes de foi qui se rapportaient particulièrement au demandeur (voir les décisions Balogh c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2002 CFPI 809, [2002] A.C.F. no 1080 (1re inst.) (QL), et Munkoh c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration), [1994] A.C.F. no 863 (1re inst.) (QL)).

·            elle a omis de prendre en compte le témoignage du demandeur à l'égard des conditions du pays alors qu'elle avait jugé qu'il était digne de foi (voir l'arrêt Camara c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration), 13 Imm. L.R. (2d) 145, [1991] A.C.F. no 56 (C.A.) (QL)).


·            elle était d'avis qu'elle pouvait s'attendre à ce que les demandeurs aient cherché d'autres possibilités de recours, autres que celui de contacter les policiers, lorsqu'ils ont été victimes d'actes criminels. Les incidents pour lesquels les demandeurs se plaignaient étaient de nature criminelle et n'étaient pas de la compétence de la Commission des droits de la personne (voir les décisions Cuffy c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1996] A.C.F. no 1316 (1re inst.) (QL), Elcock c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1999] A.C.F. no 1438 (1re inst.) (QL), et Molnar c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2003] 2 C.F. 339, 2002 CFPI 1081, [2002] A.C.F. no 1425 (1re inst.) (QL)).

·            elle a assimilé une volonté de régler la question de la protection de l'État à une protection adéquate de l'État (voir l'arrêt Canada (Procureur général) c. Ward, [1993] 2 R.C.S. 689, et la décision Balogh, précitée).

·            elle n'a pas analysé l'importance, l'efficacité et la durabilité des changements récents et elle a tiré des conclusions qui n'étaient pas fondées sur la preuve documentaire (voir la décision Orgona c. Canada (Ministre de Citoyenneté et de l'Immigration), 2001 CFPI 346, [2001] A.C.F. no 574 (1re inst.) (QL), l'arrêt Cuadra c. Canada (Solliciteur général), [1993] A.C.F. no 736 (C.A.) (QL), et la décision Vodopianov c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration), [1995] A.C.F. no 964 (1re inst.) (QL)). La preuve dont disposait la Commission démontrait que, bien que la Hongrie ait la volonté de régler la situation critique des Rom, les tentatives faites à cet égard n'avaient pas été exagérément réussies.

[16]            En dépit de la longue liste d'erreurs alléguées par les demandeurs quant aux conclusions de la Commission, à mon avis, la Commission pouvait raisonnablement tirer les conclusions qu'elle a tirées à l'égard de la protection de l'État en se fondant sur l'ensemble du dossier.


[17]            La conclusion de la Commission selon laquelle la protection de l'État en Hongrie est appropriée peut être renversée si la Cour est convaincue que la Commission avait clairement tort (voir l'arrêt Cihal c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2000] A.C.F. no 577 (C.A.) (QL)).

[18]            La question de la protection de l'État est primordiale dans la demande de contrôle judiciaire présentée par les demandeurs. Les demandeurs doivent, afin d'être reconnus comme des réfugiés au sens de la Convention, fournir une preuve claire et convaincante de l'incapacité pour la Hongrie d'offrir la protection de l'État (voir l'arrêt Ward, précité).

[19]            La Commission a entrepris un examen complet et adéquat de la preuve documentaire dont elle disposait. En tant que partie de son analyse, la Commission a reconnu que les Rom en Hongrie subissaient de façon répétée et répandue des mauvais traitements de même que des abus de pouvoir de la part des policiers. Finalement, après avoir apprécié toute la preuve, la Commission a conclu que la protection de l'État était appropriée. Un contrôle judiciaire n'a pas pour but d'apprécier à nouveau la preuve.


[20]            Il importe, lors de l'examen de la conclusion de la Commission à l'égard de la protection de l'État, de garder en tête le contexte factuel. Ce contexte comprend la discrimination subie par les demandeurs au travail et à l'école de même que l'agression subie en 1997 par le demandeur aux mains des skinheads. Par conséquent, les faits d'un certain nombre d'affaires sur lesquelles s'appuyaient les demandeurs, notamment les décisions Molnar et Balogh, précitées, sont différents parce que ces affaires traitent de l'incapacité de l'État à protéger les demandeurs contre les agressions physiques par les policiers ou par d'autres agresseurs.

[21]            Étant donné qu'il n'existe pas en l'espèce de preuve que les deux skinheads qui ont attaqué le demandeur étaient des agents de l'État, la Commission n'a pas commis d'erreur en jugeant que la protection de l'État était présente en Hongrie (voir l'arrêt Ward, précité, et la décision Zhuravlvev c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2000] 4 C.F. 3, [2000] A.C.F. no 507 (1re inst.) (QL)).

[22]            Comme il l'a été mentionné précédemment, il incombait aux demandeurs de fournir une preuve claire et convaincante que la Hongrie était incapable de les protéger. Ce fardeau est directement proportionnel au degré de démocratie atteint en Hongrie (voir la décision Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) c. Smith, [1999] 1 C.F. 310 (1re inst.), [1998] A.C.F. no 1613 (1re inst.) (QL), et l'arrêt Kadenko c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), A.C.R. no 1376 (C.A.) (QL). Selon M. le juge Décary, rédigeant au nom de la Cour d'appel fédérale dans l'arrêt Kadenko, précité, au paragraphe 5 :

Lorsque l'État en cause est un état démocratique comme en l'espèce, le revendicateur doit aller plus loin que de simplement démontrer qu'il s'est adressé à certains membres du corps policier et que ses démarches ont été infructueuses. Le fardeau de preuve qui incombe au revendicateur est en quelque sorte directement proportionnel au degré de démocratie atteint chez l'État en cause : plus les institutions de l'État seront démocratiques, plus le revendicateur devra avoir cherché à épuiser les recours qui s'offrent à lui. [Notes de bas de pages omises.]


[23]            Lors de l'audience, le demandeur a témoigné à l'égard d'un incident survenu en 1997 au cours duquel deux policiers hongrois avaient refusé de l'aider après qu'il eut été agressé par deux skinheads. Je partage l'opinion des demandeurs selon laquelle ils n'avaient pas l'obligation de signaler à une agence ou à un organisme autre que la police l'acte criminel perpétré. Mme la juge Tremblay-Lamer a fait remarquer dans la décision Molnar, précitée, qu'il appartient à la police, et non à des organismes défendant les droits de la personne, d'offrir une protection contre le crime. Cependant, le simple refus de ces deux policiers, en 1997, d'aider le demandeur n'est pas suffisant pour établir l'incapacité de la Hongrie à protéger les demandeurs (voir l'arrêt Kadenko, précité, et la décision Zhuravlvev, précitée). Compte tenu des récentes améliorations survenues en Hongrie à l'égard du traitement des minorités, de la réduction du nombre d'agressions par les skinheads au cours des dernières années et de la mise sur pied d'organismes qui reçoivent les plaintes formulées contre les policiers et qui font des recommandations à cet égard, comme la Commission l'a énoncé dans ses motifs, il n'était pas manifestement erroné pour la Commission de conclure que la protection de l'État était offerte aux demandeurs en Hongrie.


[24]            Le demandeur a en outre décrit la discrimination que lui et sa famille ont subie au travail et à l'école. Cependant, même s'il avait entendu parler du protecteur du citoyen et du gouvernement autonome rom, le demandeur ne leur a pas signalé, ni à d'autres organismes, la discrimination subie. Par conséquent, les demandeurs n'ont pas réussi à établir qu'ils avaient tenté quoi que ce soit et encore moins qu'ils avaient épuisé les recours qui étaient à leur disposition (voir l'arrêt Kadenko, précité).

[25]            Contrairement à ce qui a été fait dans l'arrêt Cuadra, précité, et dans la décision Vodopianov, précitée, la Commission a procédé à une analyse détaillée de la preuve documentaire quant aux changements survenus en Hongrie à l'égard de la discrimination à l'endroit des Rom et quant à la protection de l'État dans ce pays. En outre, la Commission a expressément accepté la preuve qui appuyait la position des demandeurs. Par conséquent, contrairement aux décisions Munkoh, et Balogh, précitées, la Commission n'a pas commis une erreur en s'appuyant sur la preuve documentaire sélective sans mentionner la preuve contradictoire. En outre, la présente affaire est différente de la décision Balogh, précitée, parce qu'il n'a pas été allégué que la Commission a mal interprété la preuve en l'espèce; le demandeur dans la décision Balogh, précitée, s'était adressé à la police et à d'autres agences hongroises pour obtenir de l'aide et la discrimination subie dans cette décision Balogh, précitée, était d'une nature beaucoup plus grave que dans la présente affaire.

[26]            À mon avis, la Commission pouvait raisonnablement conclure que les demandeurs « ne se sont pas pleinement prévalus des voies de recours et des ressources qui étaient à leur disposition » . Il n'y a pas d'erreur susceptible de contrôle.


Question certifiée

[27]            Ni l'une ni l'autre des parties n'a proposé une question de portée générale aux fins de la certification. Aucune question ne sera certifiée.

                                                                ORDONNANCE

LA COUR ORDONNE :

1.          La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

2.          Aucune question n'est certifiée.

« Judith A. Snider »

Juge

Traduction certifiée conforme

Danièle Laberge, LL.L.


COUR FÉDÉRALE

                                              AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                         IMM-4236-02

INTITULÉ :                                        TIBOR BANDULA ET AL.

DEMANDEURS

- ET -

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

DÉFENDEUR

LIEU DE L'AUDIENCE :                  TORONTO (ONTARIO)

DATE DE L'AUDIENCE :                LE MARDI 9 SEPTEMBRE 2003

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

ET ORDONNANCE :                        LA JUGE SNIDER

DATE DES MOTIFS :                       LE LUNDI 15 SEPTEMBRE 2003

COMPARUTIONS :

Elizabeth Jaszi                                                                            POUR LES DEMANDEURS

Jillian M. Siskind                                                                                    POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

ELIZABETH JASZI                                                                              POUR LES DEMANDEURS

AVOCATE

1267 A ST. CLAIR AVE. W.

BUREAU 1

TORONTO (ONTARIO)

M6E 1B8

MORRIS ROSENBERG                                                                      POUR LE DÉFENDEUR

SOUS-PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA


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