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Date : 20031006

Dossier : IMM-5678-01

Référence : 2003 CF 1157

OTTAWA (ONTARIO), le 6 octobre 2003

EN PRÉSENCE DE MADAME LA JUGE DOLORES M. HANSEN                             

ENTRE :

                                                             STEVEN ROMANS

                                                                                                                                          demandeur

                                                                             et

                     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                                           défendeur

                                MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

Introduction

[1]                Une mesure d'expulsion a été prise à l'endroit du demandeur sur le fondement de l'alinéa 27(1)d) de la Loi sur l'immigration, L.R.C. 1985, ch. I-2 (la Loi). La Section d'appel de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié a rejeté l'appel interjeté par le demandeur à l'égard de la mesure d'expulsion. La demande de contrôle judiciaire présentée par le demandeur à l'égard de cette décision a été rejetée de même que l'appel qui a suivi.


[2]                Étant donné que la Section d'appel devait suivre l'arrêt de la Cour d'appel fédérale Chieu c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1999] 1 C.F. 605, au moment où elle a entendu l'appel, elle ne pouvait pas, dans l'exercice de sa compétence en equity, prendre en compte les circonstances entourant les conditions du pays vers lequel le demandeur serait expulsé, à savoir la Jamaïque. Le demandeur a choisi l'un des mécanismes proposés dans l'arrêt Chieu, précité, et il a présenté une demande fondée sur des considérations d'ordre humanitaire. Il demandait que sa demande soit examinée en tenant compte du fait que tous ses liens familiaux étaient au Canada et du fait qu'il n'avait pas de famille ou d'autres liens en Jamaïque et en tenant compte du fait que sa vie serait éventuellement menacée s'il retournait en Jamaïque. Le demandeur sollicite maintenant le contrôle judiciaire de la décision par laquelle l'agente d'immigration a refusé sa demande.

Le contexte

[3]                Le demandeur est un citoyen de la Jamaïque âgé de trente-sept ans. Il est entré au Canada avec ses parents et ses deux frères alors qu'il avait deux ans. Les membres de sa famille sont maintenant des citoyens canadiens.

[4]                Le demandeur a commencé à présenter des signes de maladie mentale au cours de son adolescence. En 1990, un diagnostic de schizophrénie paranoïde chronique a été établi à son endroit. Le demandeur a commencé à commettre des infractions criminelles en 1987 et son dossier démontre qu'il a commis 37 infractions au cours d'une période de 11 ans. Bien que certaines de ces infractions soient graves, la peine la plus longue qui lui a été infligée a été six mois d'emprisonnement.


[5]                Au soutien de sa demande fondée sur des considérations d'ordre humanitaire, le demandeur a déposé une lettre du consulat général de la Jamaïque qui établissait que le Bellevue Hospital est le seul établissement de santé en Jamaïque qui peut accueillir des patients souffrant de maladie mentale chronique. La lettre mentionne en outre qu'il existe très peu de services de réadaptation et que l'établissement de santé est habituellement bondé. Le demandeur a en outre déposé des documents et des articles décrivant l'atmosphère politique et le traitement des personnes souffrant de troubles psychiques en Jamaïque, des notes cliniques, des résumés à la sortie et des évaluations psychologiques préparées par le Wellesley Central Hospital et le Queen Street Mental Health Centre, un rapport psychologique préparé par le Dr J. Pilowsky et des lettres de ses parents et de ses frères.

[6]                Les parents du demandeur ont assisté tous deux à l'entrevue tenue par l'agente d'immigration comme l'a fait l'avocat du demandeur. Lors de l'entrevue, les parents du demandeur se sont vigoureusement opposés à son renvoi du Canada. Ils ont expliqué le début de la maladie mentale du demandeur, le lien entre sa maladie mentale et ses problèmes avec la justice, ses problèmes avec l'abus de drogues et leurs efforts pour faire soigner leur fils. La mère du demandeur a dit à l'agente qu'elle avait rencontré le consul de la Jamaïque. Le consul l'a informée qu'à son retour à la Jamaïque, le demandeur serait conduit au Bellevue Hospital. Toutefois, étant donné que le Bellevue n'est pas un établissement de santé médico-légal, on ne peut pas forcer le demandeur à y rester s'il ne veut pas le faire.

[7]                La mère du demandeur a expliqué qu'étant donné qu'on ne pouvait pas forcer son fils à rester au Bellevue, il finirait, selon toute vraisemblance, dans la rue ou en prison. Elle a mis l'accent sur le fait que son fils, en raison de sa maladie mentale et de l'absence de tout traitement dans les prisons jamaïcaines, serait l'objet d'abus en prison. Le demandeur, compte tenu de la nature violente de la société et de l'absence de protection pour les personnes souffrant de troubles psychiques, ne survivrait pas très longtemps, selon toute vraisemblance, s'il devait vivre dans la rue.

[8]                La mère du demandeur a en outre informé l'agente de ce qu'elle prévoyait faire pour s'assurer que son fils demeure hospitalisé au Canada et pour qu'il reçoive des soins.

La décision faisant l'objet du contrôle

[9]                Étant donné que le demandeur a quitté la Jamaïque alors qu'il était enfant et qu'il n'a pas de liens familiaux en Jamaïque, l'agente était convaincue qu'il éprouverait certaines difficultés s'il était renvoyé en Jamaïque. L'agente a mentionné que les parents du demandeur et ses frères vivaient au Canada. Quant aux soins offerts, l'agente a fait remarquer que bien que les établissements offrant des soins aux personnes souffrant de troubles psychiques soient peu nombreux, ils ne sont pas inexistants. L'agente a ajouté qu'elle avait en outre pris en compte l'état de santé du demandeur, ses antécédents d'activités criminelles et les [TRADUCTION] « conséquences pour le public au Canada » . L'agente a déclaré qu'après avoir [TRADUCTION] « apprécié les difficultés qu'elle entrevoyait à l'égard du retour du demandeur dans son pays d'origine par rapport aux autres facteurs » , elle n'était [TRADUCTION] « pas convaincue que les difficultés qu'il éprouverait surpasseraient les problèmes criminels et médicaux combinés » .

[10]            L'agente a renvoyé au diagnostic de schizophrénie établi à l'endroit du demandeur, à son dossier criminel, à ses séjours en établissement de santé, à ses emprisonnements et à ses séjours dans des foyers de groupe et des pensions de famille, à son comportement destructeur et violent et aux services publics qu'il reçoit. L'agente a fait remarquer qu'[TRADUCTION] « il y avait peu d'éléments de preuve tangibles démontrant un soutien familial » . En outre, elle a fait remarquer que [TRADUCTION] « les parents déclarent maintenant qu'ils veulent que le sujet soit hospitalisé. Cependant, rien n'indique que des dispositions aient été prises à cet effet » .

[11]            L'agente a conclu qu'il n'y avait pas suffisamment de motifs justifiant une demande fondée sur des considérations d'ordre humanitaire.

Les questions en litige

[12]            Le demandeur a soulevé la question en litige suivante qui, à mon avis, est déterminante dans la présente demande : La décision de l'agente était-elle déraisonnable compte tenu de son omission d'avoir évalué l'ensemble de la preuve dont elle disposait?

Les prétentions des parties

[13]            Le demandeur prétend que la décision de l'agente était déraisonnable pour deux motifs. Premièrement, le demandeur prétend que l'agente a commis une erreur lorsqu'elle a conclu qu'il n'avait pas le soutien de sa famille. Le demandeur prétend la preuve n'appuie pas cette conclusion. En outre, l'agente, lorsqu'elle a tiré cette conclusion, a omis de tenir compte d'éléments de preuve qui démontraient clairement le soutien familial tant dans le passé qu'actuellement.


[14]            Deuxièmement, le demandeur prétend que l'agente a omis de tenir compte de l'ensemble de la preuve lorsqu'elle a tiré sa conclusion. Le demandeur soumet que l'agente avait tous les renseignements pertinents quant aux risques liés à un retour à la Jamaïque. Le demandeur soutient que bien que l'agente ait mentionné qu'elle avait examiné toute la preuve pertinente, elle n'a pas tenu compte du rapport psychologique préparé par le Dr Pilowsky, de la preuve documentaire déposée ni des renseignements fournis par les parents du demandeur. Le demandeur prétend que l'omission de l'agente d'avoir accepté les renseignements fournis à l'égard des conséquences éventuelles d'un retour à la Jamaïque et son omission d'avoir tenu compte de cet élément de preuve constituent des erreurs susceptibles de contrôle. Le demandeur prétend que l'agente n'a même pas estimé que la question des risques était un facteur à examiner. Au soutien de cette prétention, le demandeur mentionne les réponses de l'agente à certaines questions du formulaire type. En réponse à la question : [TRADUCTION] « Les risques sont-ils des facteurs à examiner dans cette affaire? » , l'agente a répondu [TRADUCTION] « non » . En réponse à une autre question : [TRADUCTION] « Une évaluation des risques a-t-elle été faite et y a-t-il eu une opinion émise à cet égard? » , l'agente a répondu [TRADUCTION] « non » . En réponse à la troisième question : [TRADUCTION] « Existe-t-il de nouveaux facteurs de risques, n'ayant pas été évalués précédemment, dans la présente demande? » , l'agente a répondu [TRADUCTION] « non » .

[15]            Le défendeur soutient que les notes de l'agente mentionnent qu'elle a examiné toute la preuve pertinente, y compris les observations des membres de la famille du demandeur, les observations de l'avocat, la preuve médicale et la preuve à l'égard de la situation en Jamaïque. Le défendeur soutient notamment que le fait que l'agente ait mentionné que les établissements de santé pour les traitements étaient [TRADUCTION] « peu nombreux » et le fait qu'elle ait mentionné les préoccupations exprimées par les parents du demandeur à cet égard démontrent clairement qu'elle était consciente des questions pertinentes et qu'elle n'a pas omis de tenir compte des éléments de preuve pertinents.

[16]            À l'égard du rapport du Dr Pilowsky, le défendeur prétend que le rapport traite simplement de la maladie mentale du demandeur. Étant donné que ce fait n'est pas contesté et que l'agente n'a tiré aucune conclusion à l'égard de la maladie, l'omission de l'agente d'avoir mentionné ce rapport n'est pas déterminante.

[17]            Le défendeur nie la prétention selon laquelle l'agente a omis d'apprécier les éléments de preuve à l'égard des risques. Le défendeur prétend que lorsque la décision est examinée dans son ensemble, il est évident que l'agente a effectivement évalué les risques auxquels le demandeur était exposé. Cependant, l'agente a conclu, tout compte fait, que les risques allégués n'équivalaient pas à des difficultés qui surpasseraient l'application normale de la Loi. Le défendeur prétend que le demandeur demande à la Cour d'évaluer à nouveau la question des risques par rapport à la criminalité. Comme la Cour suprême du Canada a déclaré dans l'arrêt Suresh c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2002] 1 R.C.S. 3, la pondération des divers facteurs ne ressortit pas au tribunal appelé à contrôler l'exercice du pouvoir discrétionnaire ministériel.

Analyse

[18]            Les parties partagent l'opinion selon laquelle la norme de contrôle applicable est la décision raisonnable simpliciter. En outre, selon ce qu'il a été déclaré dans l'arrêt Baker c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1999] 2 R.C.S. 817, il devrait être fait preuve d'une retenue considérable envers les décisions d'agents d'immigration exerçant leur pouvoir discrétionnaire dans le contexte d'une demande fondée sur des considérations d'ordre humanitaire.


[19]            À l'égard de la conclusion de l'agente quant à l'absence de soutien familial, les documents ci-après énumérés dont l'agente disposait sont pertinents dans la présente analyse. Un résumé à la sortie provenant du Queen Street Mental Health Center daté du 17 août 1995 énonce à l'égard du demandeur que ses [TRADUCTION] « parents ont apporté beaucoup de soutien et qu'il a pu vivre à la maison chaque fois qu'il ne pouvait trouver un endroit où vivre » . Les notes cliniques consignées à l'égard de son séjour au Health Centre énoncent que [TRADUCTION] « son père et sa mère sont vivants et il a une bonne relation avec eux » . Les notes mentionnent en outre que le demandeur, bien qu'il soit toujours le bienvenu à la maison, préfère vivre à Seaton House et il considère qu'[TRADUCTION] « il entretient des rapports avec les gens de l'endroit » . L'évaluation psychologique du demandeur énonce qu'[TRADUCTION] « il semble avoir beaucoup de soutien de ses parents et que leur relation semble bonne » . Un travailleur social conclut qu'un élément clé du plan de soins du demandeur est de [TRADUCTION] « continuer d'avoir des contacts avec ses parents pour du soutien et de l'éducation » .

[20]            Le Dr J. Pilosky a fourni une opinion sur les conséquences de l'expulsion éventuelle du demandeur sur sa schizophrénie. Le Dr Pilosky a en outre reçu Mme Romans en entrevue. À l'égard de la schizophrénie en général, le Dr Pilosky a déclaré que des recherches récentes avaient amené à une percée sur le traitement de la maladie lorsque les membres de la famille participent à du soutien, à de la collecte de renseignements et à des interventions en cas de crise. En outre, [TRADUCTION] « des thérapeutes travaillent avec les familles afin qu'elles participent à du soutien et qu'elles apprennent certaines méthodes d'intervention en cas de crise pour aider le membre de la famille qui est atteint de la maladie » . À l'égard de la schizophrénie paranoïde, le Dr Pilosky était d'avis que les patients vont relativement mieux lorsqu'ils sont suivis et lorsqu'ils vivent dans un établissement de santé, et qu'il serait bénéfique pour le demandeur que sa mère suive une [TRADUCTION] « cothérapie » . À l'égard de Mme Romans en particulier, le Dr Pilosky a déclaré ce qui suit :

[TRADUCTION]

Mme Romans, la mère de Steven a semblé très déprimée par la perspective de l'expulsion de Steven. Elle déclare qu'elle « l'aime énormément » et qu'elle a peur pour lui étant donné qu'il n'aura pas de famille ni aucun soutien en Jamaïque [...]. Mme Romans et son époux travaillent tous deux et elle semble être une mère dévouée et responsable.

[...]


Je perçois de façon certaine Mme Romans comme une mère responsable qui ferait tout ce qu'elle peut pour aider son fils. Ses efforts visant à aider son fils avec sa maladie pendant des années sont évidents. Même si on dit que Steven a « été dans la rue » à plusieurs reprises, il semble que Mme Romans était assez préoccupée pour connaître ses allées et venues, et elle a tenté de lui apporter tout le soutien qu'elle pouvait lui apporter. Je crois que si elle avait plus de soutien de la part des ressources communautaires en santé mentale, Mme Romans pourrait offrir un plus grand soutien à son fils ici au Canada [...].

[21]            La lettre écrite par les frères du demandeur énonce que sa maladie mentale a été [TRADUCTION] « très difficile pour la famille » . La lettre mentionne que les parents du demandeur ont fait tout ce qu'ils pouvaient pour qu'il obtienne l'aide dont il avait besoin, mais que rien n'avait semblé réussir. La lettre énonce ensuite que, bien que la situation ait été [TRADUCTION] « déchirante » pour la famille, ils aiment beaucoup leur frère et ils espèrent qu'il aille mieux et qu'il puisse vivre une vie productive et épanouissante.


[22]            Une lettre datée du 8 janvier 2000, signée par les parents du demandeur, énonce que la perspective de l'expulsion du demandeur a eu un effet dévastateur pour la famille. La lettre énonce ensuite que [TRADUCTION] « la maladie mentale de Steven a été la préoccupation principale et le problème majeur étant donné qu'elle a entraîné l'absence de contacts prolongés avec la famille, le fait qu'il a vécu dans des refuges ou dans la rue et ses problèmes avec le système de justice pénale. Nous avons pu garder des contacts fréquents avec la plupart des ressources que Steven utilise au coeur du centre-ville afin de savoir ce qu'il faisait [...] » . En outre, les parents du demandeur affirment que [TRADUCTION] « le fait de savoir que notre fils est malade et qu'il vit dans des conditions tragiques nous a blessés ma famille et moi à un point inimaginable. Je ne pensais pas que la douleur pouvait être pire. Elle l'est. Au moins, j'avais l'impression que je pouvais joindre mon fils et pendant les périodes au cours desquelles il était plus lucide et qu'il ne craignait pas qu'on lui fasse du mal, il passait du temps à la maison. Pendant ces périodes, il s'excusait pour ce qu'il avait ressenti auparavant et il reconnaissait l'amour qu'il nous porte » . M. et Mme Romans décrivent l'historique de la maladie de leur fils et déclarent qu'au début ils [TRADUCTION] « essayaient de le garder à la maison, mais que cela ne fonctionnait pas » . Ils déclarent que leur fils était trop paranoïaque et qu'il croyait toujours qu'ils voulaient lui faire du mal. La lettre explique que les parents du demandeur ont toujours pensé qu'il avait besoin de vivre dans un établissement de santé où il serait protégé, où il serait en sécurité et où il pourrait recevoir des soins. La lettre se termine en mentionnant de quelle façon la maladie de leur fils a eu des conséquences sur tous les aspects de leur vie.

[23]            Il faut également remarquer que les parents du demandeur ont assisté à l'entrevue tenue par l'agente. Lors de l'entrevue, les parents du demandeur se sont vigoureusement opposés à son renvoi du Canada. Ils ont expliqué le début de la maladie mentale du demandeur, le lien entre sa maladie mentale et ses problèmes avec la justice, ses problèmes avec l'abus de drogues et leurs efforts pour faire soigner leur fils.

[24]            Selon ma compréhension du dossier, il n'y a pas de fondement pour la conclusion de l'agente selon laquelle il y avait [TRADUCTION] « peu d'éléments de preuve tangibles démontrant du soutien familial » . En fait, le dossier démontre l'existence de soutien familial fort tant dans le passé qu'actuellement.

[25]            Avant de passer à la prétention du demandeur selon laquelle l'agente a omis de tenir compte d'éléments de preuve pertinents, je vais traiter de la prétention du demandeur selon laquelle l'agente n'a même pas estimé que la question des risques était un facteur à examiner. Bien que l'agente ait répondu [TRADUCTION] « non » à la question à l'égard de l'existence de nouveaux facteurs n'ayant pas été évalués précédemment, elle a, à la deuxième partie de la question qui est rédigée ainsi : [TRADUCTION] « Si oui, veuillez fournir des détails » , répondu ce qui suit :


[TRADUCTION]

L'avocat déclare que le sujet serait exposé à des risques en Jamaïque en raison de son état de santé mentale et de l'absence d'établissements de santé en Jamaïque pour le soigner. Cependant, le seul élément de preuve fourni pour attester la vérité de cette prétention est une lettre du consulat de la Jamaïque qui ne confirme pas qu'il n'existe pas d'établissements, mais qui énonce que de tels établissements sont peu nombreux.

[26]            À mon avis, la réponse montre clairement que l'agente était consciente qu'il y avait une question soulevée à l'égard des risques auxquels le demandeur serait exposé. Cependant, la question en litige demeure celle de savoir si l'agente a omis de tenir compte d'éléments de preuve pertinents lors de son examen des risques.

[27]            Les parents du demandeur ont trouvé et fourni des renseignements à l'égard de facteurs qui, à leur avis, auraient des conséquences pour la sécurité du demandeur s'il retournait en Jamaïque.

[28]            Le dossier révèle les difficultés importantes associées au traitement de la schizophrénie paranoïaque chronique, une maladie qui par sa nature même incite parfois les personnes qui en sont atteintes à refuser des soins et du soutien. Il révèle en outre le besoin de recevoir des soins suivis dans un établissement de santé et l'importance de la participation de la famille pour du soutien, pour la collecte de renseignements et pour une intervention en cas de crise. Bien que la mention par l'agente de l'existence d'un établissement de santé offrant des soins dont le demandeur avait besoin démontre qu'elle était consciente du besoin d'un traitement en général, cette mention ne démontre pas qu'il y a eu un examen des renseignements fournis par les parents du demandeur à l'égard de la maladie mentale particulière de leur fils, des soins dont il avait besoin et de la question de savoir si l'établissement de santé pouvait adéquatement offrir ces soins. Cette mention ne traite pas non plus des conséquences qui découleraient de soins offerts non adéquats.


[29]            Il n'appartient pas à la Cour d'apprécier les divers facteurs. Cependant, étant donné les raisons invoquées au soutien de la demande fondée sur des considérations d'ordre humanitaire, l'omission de l'agente d'avoir tenu compte de ces éléments de preuve pertinents, eu égard à la situation particulière du demandeur, constitue une erreur susceptible de contrôle.

[30]            La demande de contrôle judiciaire est accueillie et l'affaire est renvoyée à un autre agent d'immigration pour un nouvel examen.

[31]            Étant donné que la question proposée aux fins de la certification n'est pas liée à la présente décision, aucune question ne sera certifiée.

                                        ORDONNANCE

LA COUR ORDONNE :

1.         La demande de contrôle judiciaire est accueillie, la décision rendue le 29 novembre 2001 est annulée et l'affaire est renvoyée à un autre agent d'immigration pour un nouvel examen.

2.         Aucune question ne sera certifiée.

« Dolores M. Hansen »

Juge

Traduction certifiée conforme

Danièle Laberge, LL.L.


                                     COUR FÉDÉRALE

                    SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

                      AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                      IMM-5678-01

INTITULÉ :                                     STEVENS ROMANS c. M.C.I.

LIEU DE L'AUDIENCE :              TORONTO (ONTARIO)

DATE DE L'AUDIENCE :             LE 12 JUIN 2002

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

ET ORDONNANCE :                    LA JUGE HANSEN

DATE DES MOTIFS :                   LE 6 OCTOBRE 2003

COMPARUTIONS :

Krassina KostadinovPOUR LE DEMANDEUR

David TyndalePOUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Waldman and AssociatesPOUR LE DEMANDEUR

Toronto (Ontario)

Morris RosenbergPOUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada

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