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Date : 20030303

Dossier : T-1833-00

Référence neutre : 2003 CFPI 268

Vancouver (Colombie-Britannique), le 3 mars 2003

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE JOHN A. O'KEEFE

ENTRE :

                                                                 BLAINE TANNER

                                                                                                                                                     demandeur

                                                                              - et -

                                           LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

                                                                                                                                                      défendeur

                                  MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

LE JUGE O'KEEFE

[1]                 Il s'agit d'une demande de contrôle judiciaire visant la décision de la Commission nationale des libérations conditionnelles (la Commission) datée du 21 août 2000, par laquelle la réhabilitation octroyée par la Commission le 18 juin 1999 a été révoquée.

[2]                 Le demandeur sollicite l'annulation de la décision du 21 août 2000 de la Commission des libérations conditionnelles et le rétablissement de sa réhabilitation.


Contexte

[3]                 Le demandeur, Blaine Tanner, avait demandé sa réhabilitation à l'égard de condamnations antérieures.

[4]                 Le 9 janvier 1975, le demandeur a été reconnu coupable de vol avec effraction. Le 1er février 1988, il a été déclaré coupable de fausse déclaration. Ces deux infractions sont visées au Code criminel du Canada, L.R.C. (1985), ch. C-46.

[5]                 Le 24 septembre 1993, le demandeur a été déclaré coupable d'une infraction punissable par procédure sommaire, en application du paragraphe 239(1) de la Loi de l'impôt sur le revenu, L.R.C. (1985), ch. 1 (5e suppl.); sa sentence a été prononcée le 1er mars 1994. Sa peine comportait le versement d'une amende de 100 000 $. Le demandeur a payé cette amende le 14 avril 2000.

[6]                 En août 1997, le demandeur a décidé de demander sa réhabilitation. Il a obtenu au bureau de poste local une trousse renfermant les documents requis pour présenter une demande.


[7]                 Le demandeur a rempli une demande de casier judiciaire, de la Commission nationale de libérations conditionnelles, qu'il a transmise à la Gendarmerie royale du Canada (la GRC). Le 5 septembre 1997, le demandeur a reçu par la poste copie de son casier judiciaire. Intitulé Condamnations au criminel -- Libérations conditionnelles et inconditionnelles et Renseignements connexes, le document comportait deux inscriptions faisant état des condamnations du demandeur pour les infractions visées au Code criminel du Canada, précité : (1) la condamnation du 9 janvier 1995 pour vol avec effraction; (2) la condamnation du 1er février 1988 pour fausse déclaration.

[8]                 Le demandeur a rempli la formule de demande et il l'a présentée le 2 avril 1998. Le passage suivant figure à la partie 11 de la formule :

La présente demande de réhabilitation vise les condamnations suivantes. Vous devez inscrire toutes les infractions dont vous avez été condamné(e), sauf celles qui ont déjà fait l'objet d'une réhabilitation qui n'a pas été révoquée ou n'a pas cessé d'être valide.

[9]                 En regard de la partie 11 de la formule, le demandeur a écrit : « [traduction] VOIR LA LISTE. LISTE JOINTE » . Il n'a fait état d'aucune condamnation spécifique, ni fait mention de sa condamnation en application de la Loi de l'impôt sur le revenu, précitée.

[10]            Le 18 juin 1999, la Commission nationale des libérations conditionnelles a octroyé la réhabilitation au demandeur en vertu de la Loi sur le casier judiciaire, L.R.C. (1985), ch. 12, (1er suppl.). La réhabilitation a été octroyée à l'égard de l'infraction dont le demandeur avait été reconnu coupable le 9 janvier 1975 et de celle dont il l'avait été le 1er février 1988.

[11]            Le 4 avril 2000, la Commission a été informée que le demandeur avait également été déclaré coupable en application de la Loi de l'impôt sur le revenu, avant la présentation de sa demande de réhabilitation.

[12]            Dans une lettre datée du 7 avril 2000, la Commission informait le demandeur qu'elle se proposait de révoquer sa réhabilitation pour les motifs suivants :

[traduction]

M. Tanner a omis de divulguer, lorsqu'il a présenté sa demande, qu'il avait fait l'objet d'une condamnation additionnelle et qu'il lui restait une amende à acquitter. Sa demande ne pouvait, par conséquent, être prise en considération. Cette personne ayant obtenu sa réhabilitation par fraude, la Commission se propose de la révoquer.

On informait également le demandeur dans cette lettre de son droit de présenter des observations à la Commission.


[13]            Le 4 août 2000, le demandeur et son avocat sont venus aux bureaux de la Commission nationale des libérations conditionnelles. Le demandeur a présenté des observations à un membre de la Commission. Il a décrit les étapes qu'il avait suivies pour remplir sa demande de réhabilitation. Il a expliqué qu'il n'avait pas omis délibérément de divulguer sa condamnation en application de la Loi de l'impôt sur le revenu, mais qu'il n'avait plutôt pas compris qu'une condamnation en application de cette loi était du type de celles pour lesquelles la réhabilitation pouvait être demandée, ou était pertinente aux fins d'une demande de réhabilitation, en vertu de la Loi sur le casier judiciaire, à l'égard de condamnations au criminel. Le demandeur a expliqué qu'au moment où il a présenté sa demande de réhabilitation, il ne comprenait pas qu'une condamnation en application de la Loi de l'impôt sur le revenu constituait une condamnation au criminel. Le demandeur a en outre expliqué que sa conviction s'était trouvée renforcée par les documents transmis par la GRC, qui ne faisaient aucune mention de sa condamnation en application de la Loi de l'impôt sur le revenu.

[14]            Dans une lettre datée du 21 août 2000, la Commission nationale des libérations conditionnelles informait le demandeur de sa décision de révoquer sa réhabilitation, en vertu de l'article 7 de la Loi sur le casier judiciaire. Les motifs suivants étaient invoqués :

[traduction]

La Commission a décidé de révoquer la réhabilitation qui vous avait été octroyée le 17 juin 1999. Nous avons conclu que vous avez dissimulé délibérément de l'information pertinente lorsque vous avez présenté une demande de réhabilitation le 2 avril 1998. L'information en cause, c'était que vous aviez été reconnu coupable d'une infraction punissable par procédure sommaire en application du paragraphe 239(1) de la Loi de l'impôt sur le revenu le 24 septembre 1993, la sentence ayant été prononcée le 1er mars 1994. Lorsque vous avez rempli la demande de réhabilitation, vous avez omis sciemment de divulguer cette information, de même que le fait que la sentence comportait l'infliction d'une amende de 100 000 $, que vous n'aviez pas payée. Ainsi, lorsque vous avez demandé votre réhabilitation, vous n'étiez pas admis à le faire. Nous relevons toutefois, pour les fins du dossier, que l'amende a été acquittée le 14 avril 2000.

La Commission en est arrivée à cette décision après avoir conclu qu'étaient claires les directives énoncées dans la formule que vous avez utilisée. Plus précisément, vous deviez inscrire toutes les infractions dont vous aviez été condamné, sauf celles qui avaient déjà fait l'objet d'une réhabilitation n'ayant pas été révoquée ni n'ayant cessé d'être valide. Vous ne l'avez pas fait et la Commission estime que c'était de propos délibéré.

[...]

[15]            Le 2 octobre 2000, le demandeur a présenté une demande de contrôle judiciaire.


[16]            Il s'agit ici du contrôle judiciaire de la décision de la Commission nationale des libérations conditionnelles.

Prétentions du demandeur

[17]            Le demandeur soutient qu'une personne réhabilitée est réputée ne pas avoir fait l'objet de condamnations, ce qui fait cesser toute incapacité ou stigmatisation que celles-ci pouvaient entraîner. Selon le demandeur, l'article 7.1 de la Loi sur le casier judiciaire fait voir que le pouvoir exercé par la Commission nationale des libérations conditionnelles en cas de révocation est de nature à priver l'intéressé des droits qui découlent de la réhabilitation.

[18]            Le demandeur soutient que, bien qu'il soit en partie discrétionnaire, le pouvoir conféré à la Commission de révoquer une réhabilitation ne peut être exercé que dans les circonstances énoncées à l'article 7 de la Loi sur le casier judiciaire.

[19]            Le demandeur prétend que la Commission a commis une erreur de droit et a fondé sa décision sur des conclusions de fait erronées, tirées de façon abusive ou arbitraire sans tenir compte des éléments dont elle disposait.

[20]            Le demandeur soutient que la Commission n'a pas tenu compte valablement de l'explication qu'il a donnée quant au motif pour lequel il n'avait pas mentionné dans sa demande de réhabilitation sa condamnation en application de la Loi de l'impôt sur le revenu. Le demandeur soutient que la Commission a conclu que le demandeur savait que cette dernière condamnation en était une au criminel pour les fins de la demande, et a omis délibérément de la divulguer, en se fondant simplement sur sa perception quant à la manière dont le demandeur, qui n'avait jamais rempli précédemment une formule de demande de réhabilitation, avait rempli celle-ci.

[21]            Le demandeur soutient que, bien que la Commission lui ait donné l'occasion d'être entendu, elle n'a pris en compte les documents, reçus de la GRC, sur lesquels se fondait sa conviction.

[22]            Le demandeur prétend que son explication, étayée par des documents de la GRC, pouvait servir de fondement solide pour conclure que son défaut de mentionner sa condamnation en application de la Loi de l'impôt sur le revenu n'était pas une dissimulation délibérée, mais venait plutôt de ce qu'il croyait de bonne foi que ce n'était tout simplement pas là une condamnation au criminel.


[23]            Le demandeur soutient que le fait qu'il n'a pas écrit le détail de ses condamnations sur la formule de demande de réhabilitation, mais a plutôt joint simplement le dossier de la GRC, ne peut suffire comme preuve pour démontrer qu'il a dissimulé sciemment de l'information pertinente.

[24]            Le demandeur soutient également que la Commission a commis une erreur en concluant qu'il n'était pas admis à demander sa réhabilitation. Il soutient qu'en vertu de l'article 4 de la Loi sur le casier judiciaire, lorsque cinq années se sont écoulées depuis l'expiration de toute peine, une demande de réhabilitation peut être présentée à la Commission. Il ajoute que, puisque sa déclaration de culpabilité par procédure sommaire en application de la Loi de l'impôt sur le revenu a eu lieu plus de cinq ans après sa condamnation au criminel précédente, il était admis à demander la réhabilitation à l'égard de ses condamnations au criminel antérieures.

Prétentions du défendeur

[25]            Le défendeur soutient que, dans Banque Nationale de Grèce (Canada) c. Banque de Montréal, [2001] 2 C.F. 288, la Cour d'appel fédérale a statué que la Cour devait toujours se pencher sur la norme de contrôle judiciaire applicable avant de commencer à examiner la décision d'un tribunal administratif.


[26]            Le défendeur soutient que la norme de contrôle judiciaire applicable à la décision de la Commission nationale des libérations conditionnelles est celle de la décision manifestement déraisonnable. Le défendeur prétend que c'est là la norme qui convient, en l'absence d'une clause privative dans la Loi sur le casier judiciaire à l'égard des décisions de la Commission.

[27]            Le défendeur soutient que le demandeur ne s'est pas acquitté du fardeau qui lui incombait de démontrer que la Commission avait tiré une conclusion de fait erronée, de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments dont elle disposait.

[28]            Le défendeur soutient que la décision de la Commission est bien fondée en fait et en droit, de sorte qu'elle satisferait même à la norme du bien-fondé.

[29]            Le défendeur soutient que l'article 3 de la Loi sur le casier judiciaire a une très large portée, qui ne se restreint pas aux infractions visées au Code criminel.

[30]            Le défendeur soutient qu'est inexacte la prétention du demandeur selon laquelle, par suite d'une réhabilitation, la condamnation cesse d'exister. Le défendeur signale la déclaration du juge MacKay dans Smith c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1998] 3 C.F. 144 (1re inst.) aux paragraphes 15 et 20 :

[...] En l'espèce, si le législateur avait voulu que la Loi efface la condamnation, en ce sens que la condamnation est censée ne jamais avoir existé, il n'aurait pas eu besoin de faire état des effets particuliers d'une condamnation visée par une réhabilitation, car tous les effets potentiels disparaîtraient si la réhabilitation effaçait la condamnation du dossier. En ce cas, la révocation d'une réhabilitation et le rétablissement du dossier de la condamnation n'auraient aucun fondement logique.

[...]


Ces décisions m'amènent à conclure qu'on ne saurait affirmer que la Loi efface la condamnation, en ce sens que la condamnation est censée ne pas avoir existé. [...]

[31]            Le défendeur soutient que la Commission a appliqué correctement toutes les dispositions législatives pertinentes, particulièrement les articles 7 et 7.2 de la Loi sur le casier judiciaire.

[32]            Le défendeur soutient que la Commission a dûment pris en compte les explications du demandeur et en est venue à une claire conclusion, soit que le demandeur a sciemment dissimulé de l'information pertinente lorsqu'il a présenté sa demande de réhabilitation.

[33]            Selon le défendeur, la crédibilité est une question de fait dont l'appréciation relève exclusivement de la compétence de la Commission. Le défendeur soutient que la Cour ne peut substituer sa décision à celle de la Commission.

[34]            Selon le défendeur, si le demandeur avait divulgué sa condamnation en application de la Loi de l'impôt sur le revenu et le non-acquittement de son amende lorsqu'il a présenté sa demande de réhabilitation, cela aurait fait obstacle, en vertu de l'alinéa 4b) de la Loi sur le casier judiciaire, à l'octroi de sa réhabilitation. Le défendeur prétend qu'il en est ainsi parce que l'infraction en cause est également visée par la définition d'une infraction à l'article 3 de la Loi sur le casier judiciaire. À ce titre, le défendeur soutient-il, la condamnation du demandeur en application de la Loi de l'impôt sur le revenu et son amende impayée auraient empêché que la réhabilitation soit délivrée si elles avaient été divulguées.


[35]            Le défendeur soutient que la décision de la Commission est bien fondée en fait et en droit, et que la demande de contrôle judiciaire devrait être rejetée.

[36]            Question en litige

La décision de la Commission nationale des libérations conditionnelles de révoquer la réhabilitation du demandeur est-elle entachée d'une erreur révisable?

Dispositions législatives et réglementaires pertinentes

[37]            Voici les dispositions pertinentes de la Loi sur le casier judiciaire :

2.1 La Commission a compétence exclusive en matière d'octroi, de délivrance, de refus et de révocation des réhabilitations.

2.1 The Board has exclusive jurisdiction to grant or issue or refuse to grant or issue or to revoke a pardon.

2.2 (1) L'examen des demandes de réhabilitation pour les infractions visées au paragraphe 4.1(1) ainsi que des dossiers en vue d'une révocation de réhabilitation visée à l'article 7 est mené par un membre de la Commission.

2.2 (1) Applications for pardons referred to in subsection 4.1(1) shall be determined, and decisions whether to revoke pardons under section 7 shall be made, by a panel that consists of one member of the Board.



3. (1) Toute personne condamnée pour une infraction à une loi fédérale ou à ses règlements peut présenter une demande de réhabilitation à la Commission à l'égard de cette infraction et un délinquant canadien - au sens de la Loi sur le transfèrement des délinquants - transféré au Canada par application de cette loi peut présenter une demande de réhabilitation à l'égard de l'infraction dont il a été déclaré coupable.

3. (1) A person who has been convicted of an offence under an Act of Parliament or a regulation made under an Act of Parliament may apply to the Board for a pardon in respect of that offence and a Canadian offender within the meaning of the Transfer of Offenders Act who has been transferred to Canada under that Act may apply to the Board for a pardon in respect of the offence of which the offender has been found guilty.

4. La période consécutive à l'expiration légale de la peine, notamment une peine d'emprisonnement, une période de probation ou le paiement d'une amende, pendant laquelle la demande de réhabilitation ne peut être examinée est de :

4. Before an application for a pardon may be considered, the following period must have elapsed after the expiration according to law of any sentence, including a sentence of imprisonment, a period of probation and the payment of any fine, imposed for an offence, namely,

a) cinq ans pour les infractions punissables par voie de mise en accusation et pour les infractions d'ordre militaire au sens de la Loi sur la défense nationale en cas de condamnation à une amende de plus de deux mille dollars, à une peine de détention de plus de six mois, à la destitution du service de Sa Majesté, à l'emprisonnement de plus de six mois ou à une peine plus lourde que l'emprisonnement pour moins de deux ans selon l'échelle des peines établie au paragraphe 139(1) de cette loi;

(a) five years, in the case of

(i) an offence prosecuted by indictment, or

(ii) a service offence within the meaning of the National Defence Act for which the offender was punished by a fine of more than two thousand dollars, detention for more than six months, dismissal from Her Majesty's service, imprisonment for more than six months or a punishment that is greater than imprisonment for less than two years in the scale of punishments set out in subsection 139(1) of that Act; or

b) trois ans pour les infractions punissables sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire et pour les infractions d'ordre militaire au sens de la Loi sur la défense nationale autres que celles visées à l'alinéa a).

(b) three years, in the case of

(i) an offence punishable on summary conviction, or

(ii) a service offence within the meaning of the National Defence Act, other than a service offence referred to in subparagraph (a)(ii).

5. La réhabilitation a les effets suivants :

5. The pardon

a) d'une part, elle sert de preuve des faits suivants :

(a) is evidence of the fact

(i) dans le cas d'une réhabilitation octroyée pour une infraction visée à l'alinéa 4a), la Commission, après avoir mené les enquêtes, a été convaincue que le demandeur s'est bien conduit,

(i) that, in the case of a pardon for an offence referred to in paragraph 4(a), the Board, after making inquiries, was satisfied that the applicant for the pardon was of good conduct, and

(ii) dans le cas de toute réhabilitation, la condamnation en cause ne devrait plus ternir la réputation du demandeur;

(ii) that, in the case of any pardon, the conviction in respect of which the pardon is granted or issued should no longer reflect adversely on the applicant's character; and

b) d'autre part, sauf cas de révocation ultérieure ou de nullité, elle entraîne le classement du dossier ou du relevé de la condamnation à part des autres dossiers judiciaires et fait cesser toute incapacité - autre que celles imposées au titre des articles 109, 110, 161 et 259 du Code criminel ou du paragraphe 147.1(1) de la Loi sur la défense nationale - que la condamnation pouvait entraîner aux termes d'une loi fédérale ou de ses règlements.

(b) unless the pardon is subsequently revoked or ceases to have effect, requires the judicial record of the conviction to be kept separate and apart from other criminal records and removes any disqualification to which the person so convicted is, by reason of the conviction, subject by virtue of the provisions of any Act of Parliament, other than section 109, 110, 161 or 259 of the Criminal Code or subsection 147.1(1) of the National Defence Act, or of a regulation made under an Act of Parliament.

7. La Commission peut révoquer la réhabilitation dans l'un ou l'autre des cas suivants :

7. A pardon may be revoked by the Board

a) le réhabilité est condamné pour une nouvelle infraction à une loi fédérale ou à ses règlements punissable sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire;

(a) if the person to whom it is granted or issued is subsequently convicted of an offence punishable on summary conviction under an Act of Parliament or a regulation made under an Act of Parliament;

b) il existe des preuves convaincantes, selon elle, du fait que le réhabilité a cessé de bien se conduire;

(b) on evidence establishing to the satisfaction of the Board that the person to whom it was granted or issued is no longer of good conduct; or

c) il existe des preuves convaincantes, selon elle, que le réhabilité avait délibérément, à l'occasion de sa demande de réhabilitation, fait une déclaration inexacte ou trompeuse, ou dissimulé un point important.

(c) on evidence establishing to the satisfaction of the Board that the person to whom it was granted or issued knowingly made a false or deceptive statement in relation to the application for the pardon, or knowingly concealed some material particular in relation to that application.



7.1 (1) Si elle se propose de révoquer la réhabilitation, la Commission en avise par écrit le réhabilité et lui fait part de son droit de présenter ou de faire présenter pour son compte les observations qu'il estime utiles soit par écrit soit, dans le cas où elle l'y autorise, oralement dans le cadre d'une audience tenue à cette fin.

7.1 (1) If the Board proposes to revoke a pardon, it shall notify the person to whom the pardon was granted or issued of its proposal in writing and advise that person that he or she is entitled to make, or have made on his or her behalf, any representations to the Board that he or she believes relevant either in writing or, if the Board so authorizes, orally at a hearing held for that purpose.

(2) Avant de rendre sa décision, la Commission examine les observations qui lui sont présentées dans un délai raisonnable suivant l'avis.

(2) The Board shall, before making its decision, consider any representations made to it within a reasonable time after the notification is given to a person pursuant to subsection (1).

7.2 Les faits suivants entraînent la nullité de la réhabilitation :

7.2 A pardon granted or issued to a person ceases to have effect if

a) le réhabilité est condamné :

(a) the person is subsequently convicted of

(i) soit pour une infraction à une loi fédérale ou à ses règlements punissable sur déclaration de culpabilité par mise en accusation,

(i) an indictable offence under an Act of Parliament or a regulation made under an Act of Parliament,

(ii) soit pour une infraction - punissable sur déclaration de culpabilité par mise en accusation ou par procédure sommaire - au Code criminel, à l'exception de l'infraction prévue au paragraphe 255(1) de cette loi, à la Loi réglementant certaines drogues et autres substances, à la Loi sur les armes à feu, aux parties III ou IV de la Loi sur les aliments et drogues ou à la Loi sur les stupéfiants, chapitre N-1 des Lois révisées du Canada (1985),

(ii) an offence under the Criminal Code, except subsection 255(1), or under the Controlled Drugs and Substances Act, the Firearms Act, Part III or IV of the Food and Drugs Act or the Narcotic Control Act, chapter N-1 of the Revised Statutes of Canada, 1985, that is punishable either on conviction on indictment or on summary conviction, or

(iii) une infraction d'ordre militaire visée à l'alinéa 4a);

(iii) a service offence referred to in subparagraph 4(a)(ii); or

b) la Commission est convaincue, à la lumière de renseignements nouveaux, que le réhabilité n'était pas admissible à la réhabilitation à la date à laquelle elle lui a été octroyée ou délivrée.

(b) the Board is convinced by new information that the person was not eligible for a pardon at the time it was granted or issued.


Analyse et décision

[38]            Question en litige

La décision de la Commission nationale des libérations conditionnelles de révoquer la réhabilitation du demandeur est-elle entachée d'une erreur révisable?

Il n'est pas contesté que le demandeur n'a pas mentionné dans sa formule de demande sa condamnation le 24 septembre 1993 en application du paragraphe 239(1) de la Loi de l'impôt sur le revenu, pour laquelle il s'est vu infliger le 1er mars 1994 une amende de 100 000 $. Il s'agit d'une infraction punissable par procédure sommaire.

[39]            L'article 7 de la Loi sur le casier judiciaire prévoit, une fois la réhabilitation octroyée, certaines circonstances dans lesquelles elle peut être révoquée. Par souci de commodité, voici le libellé de l'article 7 :

7. La Commission peut révoquer la réhabilitation dans l'un ou l'autre des cas suivants :

7. A pardon may be revoked by the Board

a) le réhabilité est condamné pour une nouvelle infraction à une loi fédérale ou à ses règlements punissable sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire;

(a) if the person to whom it is granted or issued is subsequently convicted of an offence punishable on summary conviction under an Act of Parliament or a regulation made under an Act of Parliament;

b) il existe des preuves convaincantes, selon elle, du fait que le réhabilité a cessé de bien se conduire;

(b) on evidence establishing to the satisfaction of the Board that the person to whom it was granted or issued is no longer of good conduct; or



c) il existe des preuves convaincantes, selon elle, que le réhabilité avait délibérément, à l'occasion de sa demande de réhabilitation, fait une déclaration inexacte ou trompeuse, ou dissimulé un point important.

(c) on evidence establishing to the satisfaction of the Board that the person to whom it was granted or issued knowingly made a false or deceptive statement in relation to the application for the pardon, or knowingly concealed some material particular in relation to that application.

[40]            La révocation se fondait en l'espèce sur l'alinéa 7c) de la Loi sur le casier judiciaire. On a allégué que le demandeur avait dissimulé délibérément le fait qu'il avait été reconnu coupable d'une infraction visée au paragraphe 239(1) de la Loi de l'impôt sur le revenu, et s'était fait infliger en conséquence une amende de 100 000 $. L'amende n'a été payée que le 14 avril 2000.

Norme de contrôle judiciaire

[41]            La norme de contrôle judiciaire à appliquer en l'espèce à une conclusion de fait est celle de la décision manifestement déraisonnable, et à une conclusion de droit celle du fien-fondé. La norme de contrôle judiciaire applicable à une question mixte de fait et de droit est celle de la décision raisonnable simpliciter. Le défendeur soutient que la norme de contrôle judiciaire applicable en l'espèce est celle de la décision manifestement déraisonnable. Le demandeur semble s'objecter au recours à cette norme.


[42]            La Commission nationale des libérations conditionnelles ne s'est pas fait octroyer le pouvoir général de révoquer les réhabilitations. La Commission a plutôt compétence pour révoquer des réhabilitations dans les circonstances énumérées à l'article 7 de la Loi sur le casier judiciaire.

[43]            En l'espèce, la Commission a révoqué la réhabilitation du demandeur en vertu de l'alinéa 7c) de la Loi sur le casier judiciaire. Dans ses motifs, la Commission a déclaré ce qui suit :

[traduction]

La Commission a décidé de révoquer la réhabilitation qui vous avait été octroyée le 17 juin 1999. Nous avons conclu que vous avez dissimulé délibérément de l'information pertinente lorsque vous avez présenté une demande de réhabilitation le 2 avril 1998. L'information en cause, c'était que vous aviez été reconnu coupable d'une infraction punissable par procédure sommaire en application du paragraphe 239(1) de la Loi de l'impôt sur le revenu le 24 septembre 1993, la sentence ayant été prononcée le 1er mars 1994. Lorsque vous avez rempli la demande de réhabilitation, vous avez omis sciemment de divulguer cette information, de même que le fait que la sentence comportait l'infliction d'une amende de 100 000 $, que vous n'aviez pas payée. Ainsi, lorsque vous avez demandé votre réhabilitation, vous n'étiez pas admis à le faire. Nous relevons toutefois, pour les fins du dossier, que l'amende a été acquittée le 14 avril 2000.

La Commission en est arrivée à cette décision après avoir conclu qu'étaient claires les directives énoncées dans la formule que vous avez utilisée. Plus précisément, vous deviez inscrire toutes les infractions dont vous aviez été condamné, sauf celles qui avaient déjà fait l'objet d'une réhabilitation n'ayant pas été révoquée ni n'ayant cessé d'être valide. Vous ne l'avez pas fait et la Commission estime que c'était de propos délibéré.


[44]            Il ressort clairement du libellé de l'alinéa 7c) que le demandeur doit avoir « délibérément, à l'occasion de sa demande de réhabilitation, fait une déclaration inexacte ou trompeuse, ou dissimulé un point important » . L'information pertinente qui aurait été dissimulée en l'espèce, c'était la condamnation pour une question d'impôt sur le revenu et l'amende infligée en conséquence. Le législateur a choisi de conférer, en vertu de l'alinéa 7c), le pouvoir à la Commission nationale des libérations conditionnelles de révoquer la réhabilitation lorsqu'un demandeur a « délibérément, à l'occasion de sa demande de réhabilitation, [...] dissimulé un point important » . Le législateur n'a pas déclaré qu'il pouvait y avoir révocation lorsqu'un demandeur avait « dissimulé » un point, mais plutôt lorsqu'il l'avait « délibérément [...] dissimulé » . Il faut donc analyser la preuve dont la Commission était saisie, pour établir si elle démontre que le demandeur avait « délibérément » dissimulé une information importante.

[45]            Le paragraphe 12 de l'affidavit du demandeur s'énonce comme suit :

[traduction]

Que, lors de l'entrevue avec l'arbitre, ce dernier a concédé qu'on pouvait expliquer de deux manières l'absence dans la liste de la condamnation pour fraude fiscale, soit selon ses termes « son explication » et « mon explication » . Selon ce que j'en ai compris, « mon explication » c'était que je n'avais pas mentionné cette condamnation, punissable par procédure sommaire, parce que je ne croyais pas la réhabilitation requise pour celle-ci, tandis que « son explication » c'était que j'avais agi ainsi intentionnellement pour tromper la Commission.

Il n'apparaît pas à la lecture du dossier qu'on a contre-interrogé le demandeur au sujet de son affidavit.

[46]            Le demandeur a déclaré qu'à l'occasion de sa demande de réhabilitation, il avait sollicité et reçu de la GRC la liste détaillée de ses condamnations au criminel, libérations conditionnelles et inconditionnelles et renseignements connexes. Sa condamnation en application de la Loi de l'impôt sur le revenu ne figurait pas dans cette liste.

[47]            Le demandeur ne croyait pas que la condamnation en application de la Loi de l'impôt sur le revenu constituait une condamnation au criminel à laquelle pouvant faire l'objet d'une demande de réhabilitation. Il a ajouté qu'il avait été conforté dans sa conviction par l'absence de mention de cette condamnation dans la liste de la GRC.

[48]            Le demandeur a déclaré ce qui suit au paragraphe 15 de son affidavit :

[traduction]

[...] l'arbitre a mentionné verbalement qu'il avait tiré une déduction défavorable du fait que, tandis qu'on sollicitait dans la demande une liste d'infractions, j'avais écrit « Voir la liste jointe » pour faire référence au relevé des condamnations au criminel fourni par la GRC. L'arbitre a fait observer que « la plupart des gens » dressaient cette liste à la main.

J'ai examiné la liste et l'espace fourni dans la formule de demande et j'ai tenu compte du fait qu'on mentionne dans la formule : « Joindre une liste au besoin » . J'estime qu'il n'y a pas matière à tirer de déduction défavorable au demandeur parce qu'il a joint une liste de ses condamnations que la GRC lui avait fournie.

[49]            Le juge MacKay a traité de l'importance du recours à l'expression « délibérément » dans Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) c. Odynsky, (2001) Imm.L.R. (3d) 3, à la page 54 (1re inst.) :


L'adverbe « knowingly » modifiant le verbe « concealing » , qui est employé dans la version anglaise, signifie [traduction] dissimuler « sciemment, en connaissance de cause, consciemment, intentionnellement » . Dans l'affaire Canada (Ministre du Multiculturalisme et de la Citoyenneté) c. Minhas, le juge en chef adjoint Jerome (tel était alors son titre), à propos de la formulation « par fraude ou au moyen d'une fausse déclaration ou de la dissimulation intentionnelle de faits essentiels » au paragraphe 10(1), a dit :

Pour avoir gain de cause, le ministre doit faire mieux que de démontrer que l'intimé a matériellement enfreint la Loi. Les termes du paragraphe 10(1) ne désignent pas une infraction mettant en jeu la norme rigoureuse de la preuve « sans l'ombre d'un doute raisonnable » du droit pénal, mais ont plutôt pour effet d'épargner les fausses déclarations innocentes de la sanction sévère qu'est la perte de citoyenneté. Une déclaration innocente, même si elle est fausse ou trompeuse, ne suffit pas pour déclencher ou justifier cette sanction. Un autre élément de preuve, concernant l'état d'esprit de l'intimé, est requis et il incombe au ministre de le faire valoir. Ce qui est nécessaire, donc, c'est de prouver que l'intimé a déformé les faits pertinents dans l'intention d'induire en erreur et d'obtenir la citoyenneté sur la foi de ces fausses déclarations.

En somme, je suis d'avis que la formulation « dissimulation intentionnelle de faits essentiels » employée aux articles 10 et 18 exige que la Cour conclue sur le fondement de la preuve ou par déduction raisonnable à partir de la preuve, que la personne intéressée a dissimulé des faits essentiels à la décision, qu'elle ait su ou non que ces faits étaient essentiels, avec l'intention d'induire en erreur le décideur.

Je souscris aux commentaires du juge MacKay.


[50]            Il ne fait pas de doute qu'un arbitre peut tirer des déductions, mais une preuve doit exister qui permette de les tirer. Comme nous l'avons dit précédemment, rien ne permettait de déduire que le demandeur avait intentionnellement trompé la Commission nationale des libérations conditionnelles. Parmi les éléments de preuve, on compte : (1) la déclaration de l'arbitre selon laquelle on pouvait expliquer de deux manières l'absence de mention de la condamnation en application de la Loi de l'impôt sur le revenu, soit l'explication du demandeur et celle de l'arbitre; (2) l'explication du demandeur portant qu'il ne croyait pas la réhabilitation requise pour la condamnation en application de la Loi de l'impôt sur le revenu, et que sa conviction s'est trouvée renforcée lorsqu'il a constaté que cette condamnation ne figurait pas dans la liste « Condamnations au criminel - Libérations conditionnelles et inconditionnelles et Renseignements connexes » fournie par la GRC.

[51]            Je ne suis pas convaincu, sur la foi de la preuve, que le demandeur a dissimulé délibérément le fait qu'il avait été reconnu coupable d'une infraction visée à la Loi de l'impôt sur le revenu et qu'il lui restait une amende à payer. Il n'y avait pas de preuve permettant à la Commission de tirer cette conclusion. La Commission a par conséquent commis une erreur révisable.

[52]            Par conséquent, j'accueillerais la demande de contrôle judiciaire et j'annulerais la décision de la Commission nationale des libérations conditionnelles datée du 21 août 2000, par laquelle la réhabilitation octroyée au demandeur par la Commission le 18 juin 1999 a été révoquée. Il en résulterait le maintien en vigueur de la réhabilitation octroyée.


ORDONNANCE

LA COUR ORDONNE QUE la demande de contrôle judiciaire soit accueillie et que soit annulée la décision datée du 21 août 2000 par laquelle la Commission nationale des libérations conditionnelles a révoqué la réhabilitation octroyée au demandeur le 18 juin 1999. Il en résulte le maintien en vigueur de la réhabilitation octroyée.

                                                                              « John. A. O'Keefe »             

                                                                                                             Juge                         

Vancouver (C-B)

Le 3 mars 2003

Traduction certifiée conforme

Suzanne M. Gauthier, trad. a., LL.L.


                          COUR FÉDÉRALE DU CANADA

                     SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

                       AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                 T-1833-00

INTITULÉ :              BLAINE TANNER

- et -

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

LIEU DE L'AUDIENCE :                                Toronto (Ontario)

DATE DE L'AUDIENCE :                              Le mardi 24 septembre 2002

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

ET ORDONNANCE :                                      LE JUGE O'KEEFE

DATE DES MOTIFS ET DE

L'ORDONNANCE :                                        Le lundi 3 mars 2003

COMPARUTIONS :

M. Brian Greenspan                                POUR LE DEMANDEUR

Mme Charleen H. Brenzall                       POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Greenspan Humphrey Lavine                  POUR LE DEMANDEUR

15, chemin Bedford

Toronto (Ontario)

M5R 2J7

M. Morris Rosenberg                              POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada

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