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Date : 20030507

Dossier : ITA-749-03

                                                       Référence neutre : 2003 CFPI 568

ENTRE :

SA MAJESTÉ LA REINE DU CHEF DU CANADA

REPRÉSENTÉE PAR L'AGENCE DES DOUANES ET DU REVENU DU CANADA ( « ADRC » )

                                                                                              demanderesse

                                                    - et -

                                           JUDI JOHNSON

                                                                                               défenderesse

                          MOTIFS DE L'ORDONNANCE

                                      (Prononcés à l'audience

                     à Calgary (Alberta), le mercredi 7 mai 2003)

LE JUGE LAYDEN-STEVENSON


[1]    La défenderesse sollicite une injonction interlocutoire qui interdirait le dépôt d'autres actes de procédure relativement au « dépôt ex parte d'un bref de saisie-exécution » contre les biens réels et personnels de Judi D. Johnson. Comme question préliminaire, la défenderesse sollicite l'autorisation de se faire représenter par son mari, B.T.J. Johnson, comme conseil.

[2]    J'examinerai en premier lieu la demande de la défenderesse de se faire représenter par son mari aux fins de la présente requête. L'article 119 des Règles de la Cour fédérale (1998) prévoit qu'une personne physique peut agir seule ou se faire représenter par un avocat à la Cour fédérale du Canada. Aucun texte ne permet à un non-juriste de représenter une partie qui est une personne physique. L'avis de requête affirme que le fondement de la présente demande est que [TRADUCTION] « [...] elle est originaire du Québec et n'a pas le sentiment qu'elle s'exprime assez bien pour faire des exposés et s'adresser à des représentants de l'Agence des douanes et du revenu du Canada en Cour etc... » .


[3]                 Il n'y a aucune référence, dans l'affidavit de Mme Johnson à l'appui de sa demande, aux motifs avancés relativement à la présente demande. En l'absence de preuve, je ne sais absolument pas quel sens doit être donné à l'affirmation que la défenderesse est « originaire du Québec » . Le dossier de requête et l'affidavit à l'appui sont en anglais et révèlent, à première vue, une maîtrise de la langue anglaise. Si la langue maternelle de la défenderesse est le français (un fait qui n'est pas attesté) et qu'elle est plus à l'aise en présentant sa cause dans cette langue, l'article 31 prévoit une demande en vertu de la Loi sur les langues officielles, L.R.C. 1985, ch. 31 (1er suppl.). Une telle demande ne paraît pas avoir été faite.

[4]                 Une personne n'a pas le droit, inhérent ou autre, de représenter son épouse ou son époux devant la Cour : Giagnocavo c. Ministre du Revenu national (1995), 189 N.R. 225 (C.A.F.). La question de savoir si la Cour possède la compétence inhérente, dans les circonstances appropriées, d'autoriser la représentation par un non-juriste, si les intérêts de la justice l'imposent, n'a pas été tranchée : Erdmann c. Canada, [2001] 3 C.T.C. 111 (C.A.F.). Je n'ai pas besoin de trancher la question car si la compétence existe effectivement, je ne l'exercerai pas dans la présente affaire. La demande de la défenderesse en vue d'être représentée par son mari est rejetée.


[5]                 Passons maintenant à la requête en injonction interlocutoire. Un bref résumé des faits est nécessaire pour servir de fondement contextuel. Le 9 mai 2002, l'Agence des douanes et du revenu du Canada (ADRC) a adressé à la défenderesse une cotisation relative à l'impôt sur le revenu pour les années d'imposition 1997, 1998, 1999 et 2000. La dette fiscale à la date du 9 mai était de 37 363,53 $. Mme Johnson n'a pas déposé d'avis d'opposition relativement aux cotisations établies. Elle n'a pas non plus interjeté appel auprès de la Cour canadienne de l'impôt. Plutôt, le 5 novembre 2002, un « comptable indépendant » a fait parvenir une lettre à l'ADRC au nom de la défenderesse, demandant à l'ADRC de répondre à 7 questions et avertissant que l'omission de répondre serait considérée, par la défenderesse, comme la reconnaissance que les cotisations étaient [TRADUCTION] « sans fondement juridique. »

[6]                 Au 14 janvier 2003, la dette fiscale de la défenderesse pour les années d'imposition 1997 à 2000 s'élevait à 39 135,07 $. En vertu du paragraphe 223(2) de la Loi de l'impôt sur le revenu, l'ADRC a déposé un certificat et une réquisition devant la Cour fédérale pour un bref de saisie-exécution. Le bref de saisie-exécution a été décerné le 28 janvier 2003 et enregistré le 21 mars 2003 au district du Bureau des titres de bien-fonds pour la circonscription d'enregistrement du sud de l'Alberta, sous le numéro d'enregistrement 031 093 127. Le certificat de titre 991 126 956 confirme l'enregistrement du bref de saisie-exécution décerné contre la propriété foncière de Bud T.J. Johnson et Judi D. Johnson, tenants conjoints. Le 28 janvier 2003, l'ADRC a fait une demande de paiement à la Banque HSBC relativement à la dette fiscale. La Banque HSBC a répondu le 30 janvier en faisant savoir qu'elle n'enverrait aucune somme d'argent parce qu'elle n'avait aucune dette envers la défenderesse. L'ADRC n'a entamé aucune autre procédure de recouvrement contre la défenderesse.

[7]                 Le 8 mars 2003, le « comptable public indépendant » a envoyé une autre lettre à l'ADRC l'informant que les déclarations de revenus de la défenderesse pour les années d'imposition 1997 à 2000 ont été déposées et reçues au Bureau des services fiscaux de l'Intérieur-Sud, le 8 août 2002. Chaque déclaration comportait la mention suivante :


[TRADUCTION] « aucun revenu imposable et aucun impôt dû » . La lettre alléguait un refus délibéré d'établir correctement la cotisation et offrait une dernière occasion à l'ADRC afin qu'elle corrige [TRADUCTION] ses « fautes, ses erreurs dans le jugement (sic) et ses erreurs de droit [...] » . Un addendum à cette lettre, daté du 9 mars 2003, émanant du même auteur, citait l'article 337 du Code criminel et menaçait de poursuites judiciaires si l'ADRC ne fournissait pas l'information demandée dans les 72 heures. D'autres lettres de même teneur, en date des 14, 19 et 23 avril ont été envoyées par la défenderesse à l'ADRC. Le 15 avril 2003, l'ADRC a accusé réception de la lettre du 14 avril, informé la défenderesse que sa lettre ne constituait pas une demande formelle d'information et joint des brochures sur l'accès à l'information.


[8]                 L'affidavit de la défenderesse, à l'appui de la requête en redressement interlocutoire, comprend huit paragraphes. Chacun d'eux commence par [TRADUCTION] « Je crois que [...] » et est suivi d'une allégation. Voici le résumé des allégations : les cotisations sont fausses et frauduleuses; l'ADRC n'a pas répondu aux demandes d'information parce que l'information n'existait pas; l'ADRC a établi des cotisations fausses et frauduleuses en vue d'obtenir un bref de saisie-exécution; des dispositions du Code criminel définissent les infractions criminelles dont peuvent être déclarés coupables les employés de l'ADRC; les dirigeants, les agents et les employés de l'ADRC ont prêté un serment d'allégeance à Sa Majesté et, par leurs agissements, ils ont trahi leur serment et travaillent au déshonneur de Sa Majesté; la Loi de l'impôt sur le revenu ne supplante pas le Code criminel, et l'ADRC agit comme si elle était au-dessus de la loi et elle utilise la conspiration et les faux prétextes pour intimider et escroquer des sommes d'argent et d'autres éléments d'actifs à des personnes considérées comme [TRADUCTION] « des contestataires d'impôt » .

[9]                 Les arrêts Manitoba (PG) c. Metropolitan Stores (MTS) Ltd., [1987] 1 R.C.S 110 et RJR-MacDonald Inc c. Canada, [1994] 1 R.C.S. 311, demeurent les arrêts de principe en ce qui concerne le critère que doit respecter toute personne qui sollicite un redressement interlocutoire. Il y a trois éléments, qui sont conjonctifs, à respecter. Par conséquent, pour avoir gain de cause, la défenderesse doit respecter ces trois éléments. Ces éléments sont : une question sérieuse à juger, un préjudice irréparable en cas de refus de redressement et une prépondérance des inconvénients favorable au redressement.


[10]            En ce qui concerne la question sérieuse, il suffit que la défenderesse démontre que sa revendication n'est ni futile ni vexatoire pour respecter cet élément. La défenderesse n'a pas établi une question sérieuse. En premier lieu, il n'y a aucune demande sous-jacente déposée relativement à la présente affaire. Il est évident, vu la preuve écrite et les plaidoiries, que Mme Johnson conteste les cotisations et la dette fiscale qui en a découlé. Elle a tout à fait le droit de le faire. Elle insiste sur le fait qu'au cours des années d'imposition 1997 à 2000, elle était sans emploi, n'a gagné aucune somme d'argent et que les cotisations sont erronées. Le problème est qu'elle n'a pas contesté les cotisations dans l'enceinte appropriée. Notre Cour est liée par le paragraphe 152(8) de la Loi de l'impôt sur le revenu qui dispose que les cotisations sont réputées valides à moins et jusqu'à ce qu'elles soient modifiées par voie d'opposition ou d'appel. Les contestations des cotisations doivent se faire par voie d'opposition en vertu de l'article 164 de la Loi de l'impôt sur le revenu et par voie d'appel devant la Cour canadienne de l'impôt en vertu de l'article 169 de la Loi de l'impôt sur le revenu. Dans l'arrêt Ministre du Revenu national c. Parsons, [1984] 2 C.F. 331, la Cour d'appel fédérale a décidé que la Section de première instance de la Cour fédérale n'a pas la compétence de statuer sur la validité des cotisations en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu. Je n'ai pas compétence en ce qui concerne les plaintes de la demanderesse. En conséquence, aux fins de la présente requête, il n'y a aucune question sérieuse à juger.

[11]            Vu que le premier élément du critère du redressement interlocutoire n'a pas été établi, je n'ai pas besoin de statuer sur les éléments préjudice irréparable et prépondérance des inconvénients. La requête est rejetée, mais dans l'exercice de mon pouvoir discrétionnaire, sans frais.

« Carolyn Layden-Stevenson »

Juge

Calgary (Alberta)

Le 7 mai 2003

Traduction certifiée conforme

Jean Maurice Djossou, LL.D.


                          COUR FÉDÉRALE DU CANADA

                     SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

                       AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                                         ITA-749-03

INTITULÉ :                                                     SA MAJESTÉ LA REINE DU CHEF DU CANADA

REPRÉSENTÉE PAR L'AGENCE DES DOUANES ET DU REVENU DU CANADA (ADRC)

c.

JUDI JOHNSON

                                                         

LIEU DE L'AUDIENCE :                                             CALGARY (Alberta)

DATE DE L'AUDIENCE :                                           le mercredi 7 mai 2003

MOTIFS DE

L'ORDONNANCE

PRONONCÉS À

L'AUDIENCE :                                               LE JUGE LAYDEN-STEVENSON

DATE DES MOTIFS :                                                  le mercredi 7 mai 2003

COMPARUTIONS :

Kerry Boyd                                                           POUR LA DEMANDERESSE

Judi D. Johnson                                                    POUR LA DÉFENDERESSE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Morris A. Rosenberg

Sous-procureur général du Canada                     POUR LA DEMANDERESSE

Judi D. Johnson

Calgary (Alberta)                                                  POUR LA DÉFENDERESSE


Date : 20030507

Dossier : ITA-749-03

Calgary (Alberta), le mercredi 7 mai 2003

EN PRÉSENCE DE MADAME LE JUGE LAYDEN-STEVENSON

ENTRE :

SA MAJESTÉ LA REINE DU CHEF DU CANADA

REPRÉSENTÉE PAR L'AGENCE DES DOUANES ET DU REVENU

DU CANADA ( « ADRC » )

                                                         

                                                                                              demanderesse

                                                    - et -

                                           JUDI JOHNSON

                                                                                               défenderesse

                                           ORDONNANCE

VU LA REQUÊTE au nom de la défenderesse (demanderesse dans la requête) sollicitant une injonction interlocutoire qui interdirait le dépôt d'autres actes de procédure dans l'action relativement au dépôt ex parte d'un bref de saisie-exécution contre les biens, réels et personnels, et les fonds de Judi D. Johnson;

LA COUR ORDONNE que

La requête soit rejetée.

« Carolyn Layden-Stevenson »

Juge

                                                                                                                   

Traduction certifiée conforme

Jean Maurice Djossou, LL.D.

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