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Date : 20030417

Dossier : T-667-02

Référence : 2003 CFPI 461

ENTRE :

                                                               DAVID ENNIS

                                                                                                                                        demandeur

                                                                            et

                                    LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

                                                                                                                                         défendeur

                                               MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE LEMIEUX

[1]                 David Ennis (le demandeur) est détenu à l'établissement de Mission (Mission), une prison à sécurité moyenne située en Colombie-Britannique, exploitée par le Service correctionnel du Canada (le SCC). Il est un délinquant purgeant une première peine sous responsabilité fédérale et purge une peine d'emprisonnement à perpétuité pour meurtre au deuxième degré (X 6); il a commencé à purger sa peine le 19 novembre 1983.

[2]                 Dans cette demande de contrôle judiciaire, dans le cadre de laquelle il agit pour son propre compte, M. Ennis sollicite l'annulation de la décision du 12 mars 2001 du commissaire adjoint du SCC (le tribunal), cette décision ayant été rendue au troisième palier de la procédure de règlement des griefs prévue par la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition (la Loi) et son Règlement d'application. M. Ennis demande à la Cour de renvoyer l'affaire au commissaire pour qu'une nouvelle décision soit rendue conformément aux directives que la Cour pourra juger à propos.

[3]                 Dans sa décision du 12 mars 2001, le tribunal a confirmé les décisions rendues au premier et au deuxième paliers de la procédure, dans le cadre de laquelle M. Ennis présentait un grief au sujet de son inscription au Programme de traitement intensif pour les délinquants sexuels (le PTIDS) mis en oeuvre au Centre régional de santé, à Abbottsford (Colombie-Britannique), (le CRS).

[4]                 La décision rendue au troisième palier est ainsi libellée :

[TRADUCTION] Le grief que vous avez présenté au troisième palier au sujet de la disponibilité du programme a été examiné. Vous avez également allégué que le Service utilisait deux poids deux mesures en ce sens que d'autres délinquants bénéficiaient d'un traitement accéléré dans le système. Vous affirmez qu'ils ont participé au programme avant vous.

J'ai également examiné les réponses qui vous ont été fournies aux paliers inférieurs de la procédure. Je conclus que les renseignements qui vous ont été donnés sont complets et pertinents. En outre, je souscris aux décisions qui ont été rendues.

Je vous recommande de lire de nouveau les renseignements antérieurement fournis étant donné que vous y trouverez selon moi les réponses que vous cherchez à obtenir. En outre, soyez assuré que tous les délinquants sont évalués de la même façon quant à leur participation au programme.


Par conséquent, étant donné qu'il n'existe aucun renseignement à l'appui de vos allégations selon lesquelles il y a deux poids deux mesures et qu'aux paliers inférieurs les réponses étaient appropriées, votre grief est rejeté.

HISTORIQUE

[5]                 Le demandeur a participé à deux PTIDS, le premier au Centre psychiatrique régional, à Saskatoon, en 1995, et le deuxième au CRS à Abbotsford (Colombie-Britannique), en 1999. Il s'est marié en 1994.

[6]                 Lorsque le demandeur participait au PTIDS au CRS en 1999, l'examen final effectué par l'équipe multidisciplinaire traitante le 30 mars 1999 comprenait les recommandations ci-après énoncées au sujet des mesures postérieures à la participation au programme :

a)         le demandeur devait être transféré à Mission;

b)         le demandeur devait participer à un autre PTIDS au CRS au moins une année après avoir terminé le PTIDS auquel il participait alors;

c)         le demandeur devait assister à des séances de prévention des rechutes à Mission.

[7]                 M. Ennis a participé au « Programme de suivi » de faible intensité s'adressant aux délinquants sexuels à Mission jusqu'à ce que le programme soit abandonné, à l'automne 2000.


[8]                 Le 21 avril 2000, l'équipe de gestion des cas (l'EGC) du demandeur a rédigé un rapport provisoire sur le plan correctionnel concernant le demandeur, lequel comprenait le plan d'action suivant élaboré par l'EGC :

[TRADUCTION] L'équipe de gestion des cas continuera à encourager M. Ennis à faire des progrès et à participer au prochain programme intensif pour les délinquants sexuels disponible qui sera offert au CRS. [non souligné dans l'original]

[9]                 Avant que cette recommandation soit faite et par la suite, M. Ennis a fait plusieurs demandes pour être admis au PTIDS au CRS (soit une demande au mois de mars 2000 et trois demandes en 2001).

[10]            Après que le demandeur eut été interrogé par l'équipe chargée des entrevues au CRS, ses demandes ont été refusées. Ainsi, le 16 mai 2001, le thérapeute responsable du programme au CRS a informé le demandeur de ce qui suit :

[TRADUCTION] Conformément au souhait que vous avez exprimé, c'est-à-dire de participer à un autre PTIDS dans l'espoir d'être transféré dans un établissement à sécurité minimale et de préparer votre mise en liberté, votre cas sera examiné aux fins de l'admission à une date ultérieure se rapprochant davantage de votre date prévue d'admissibilité à la libération conditionnelle totale, le 19 novembre 2008. [non souligné dans l'original]

[11]            C'est à l'égard du refus qui lui a été opposé le 16 mai 2001 que M. Ennis a déposé une plainte qui a ensuite eu pour effet de déclencher la procédure de règlement des griefs.

[12]            Le 9 août 2001, la plainte a été rejetée par la psychologue principale intérimaire Lyne Piché, qui a écrit ce qui suit :

[TRADUCTION] M. Ennis a rencontré l'équipe traitante le 16 mai 2001. Il n'a pas pu désigner spontanément ses objectifs quant au traitement et les domaines nécessitant une modification du comportement. De plus, il voulait participer à un programme afin de se préparer pour la fin de sa peine et d'être transféré dans un établissement à sécurité minimale. Étant donné que ses objectifs, en ce qui concerne la modification de son comportement étaient vagues, et qu'il voulait profiter du traitement pour préparer sa mise en liberté (date prévue d'admissibilité à la libération conditionnelle totale en 2008), M. Ennis est réputé venir après les autres délinquants dont le nom figure en ce moment sur la liste d'attente. M. Ennis a de fait accès aux programmes. À l'heure actuelle, il est inscrit sur la liste d'attente et son cas sera pris en considération pour des programmes futurs. [non souligné dans l'original]

[13]            Le grief présenté au premier palier a été rejeté par le directeur du CRS le 13 septembre 2001. Le directeur souscrivait à l'évaluation de Lyne Piché et à la conclusion de l'équipe traitante selon laquelle [TRADUCTION] « la demande était réputée venir après celles d'autres délinquants dont les noms figuraient sur la liste d'attente » . Le directeur a fait savoir à M. Ennis qu'il avait accès aux programmes, à Mission, [TRADUCTION] « et [qu'il] [l']encourage[ait] à y participer » . Il ajoutait ce qui suit : [TRADUCTION] « Dans l'intervalle, vous continuez à être inscrit sur la liste d'attente du CRS et la demande sera prise en considération pour des programmes futurs. »

[14]            Le grief présenté au deuxième palier a également été rejeté par le sous-commissaire régional le 21 novembre 2001. La partie importante de cette décision est ainsi libellée :


[TRADUCTION] Monsieur, il faut tenir compte de plusieurs considérations avant qu'un délinquant soit admis au programme intensif pour les délinquants sexuels au Centre régional de santé, notamment des recommandations qui ont été faites à la suite de l'entrevue initiale ainsi que des dates d'admissibilité et de la vérification de sécurité visant à permettre de déterminer s'il y a des incompatibilités. Étant donné les dates d'admissibilité qui s'appliquent dans votre cas et les conclusions tirées à la suite de l'entrevue, vous n'êtes pas considéré, en ce moment, comme un candidat prioritaire pour ce programme.

Votre motivation, lorsqu'il s'agit de participer aux programmes, est reconnue. À l'heure actuelle, vous n'êtes pas considéré comme un candidat ayant priorité pour ce programme précis, mais j'aimerais vous encourager à discuter de la possibilité de participer à d'autres programmes avec votre équipe de gestion des cas.

Étant donné que l'équipe traitante du Centre régional de santé a conclu qu'en ce moment, vous n'êtes pas un candidat prioritaire aux fins du programme s'adressant aux délinquants sexuels, votre grief est rejeté. [non souligné dans l'original]

[15]            Comme il en a été fait mention, le grief présenté au troisième palier a également été rejeté pour les motifs susmentionnés.

[16]            Pour compléter l'historique, j'indiquerai en outre les dates d'admissibilité qui s'appliquaient à M. Ennis :

Permission de sortir avec escorte           [PSAE]                          1984

Établissement à sécurité minimale                                                  1984

Contrôle judiciaire (article 745.6 du Code criminel)                    19-11-1998

Permission de sortir sans escorte            [PSSE]              19-11-2005

Semi-liberté                                                                                     19-11-2005

Libération conditionnelle totale                                        19-11-2008

ANALYSE

(a)        La norme de contrôle


[17]            Dans la décision Allen Tehrankari c. Canada (Service correctionnel), [2000] A.C.F. no 495, j'ai eu la possibilité d'examiner la norme de contrôle qui devrait s'appliquer à une décision relative à un grief rendue au troisième palier par le commissaire du SCC dans une demande de contrôle judiciaire présentée par un détenu au pénitencier de Kingston qui, conformément à l'article 24 de la Loi, voulait que le SCC corrige certains renseignements le concernant qui étaient consignés dans son dossier.


[18]            J'ai appliqué les quatre facteurs énoncés par la Cour suprême du Canada dans l'arrêt Pushpanathan c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1998] 1 R.C.S. 982; j'ai fait remarquer que la Loi ne renfermait aucune clause privative protégeant les décisions prises par le commissaire dans le cadre de la procédure de règlement des griefs. J'ai reconnu que, sur les questions d'administration pénitentiaire, le commissaire possède l'expertise voulue en comparaison des tribunaux, ce qui justifiait une retenue considérable à l'égard des décisions qu'il prend sur les questions relatives à la gestion pénitentiaire. Quant au troisième facteur, à savoir l'objet de la disposition en particulier et de la Loi dans son ensemble, j'ai fait remarquer que, dans ce cas-là, c'était l'application de l'article 24 de la Loi qui était en cause et que je considérais cette disposition comme faisant partie d'un « faisceau de droits » reconnus au détenu par le législateur en 1992, lorsque la Loi a été édictée en vue de moderniser la législation antérieure, c'est-à-dire la Loi sur les pénitenciers et la Loi sur la libération conditionnelle, modernisation rendue nécessaire par des décisions rendues par la Cour suprême et par des tribunaux judiciaires d'instance inférieure au sujet des droits des détenus. Quant au quatrième facteur, j'ai conclu que la nature du problème en question dépendait de l'analyse visant à permettre de déterminer s'il se rapportait au droit ou à des faits.

[19]            J'ai tiré la conclusion ci-après énoncée :

¶ 44       Pour conclure sur ce point, je suis d'avis qu'il faut appliquer la norme de la décision correcte si la question porte sur la bonne interprétation de l'article 24 de la Loi, mais la norme de la décision raisonnable simpliciter si la question porte soit sur l'application des principes juridiques appropriés aux faits soit sur le bien-fondé de la décision de refus de corriger les renseignements dans le dossier du délinquant. La norme de la décision manifestement déraisonnable s'applique aux pures questions de fait (paragraphe 18.2(4) de la Loi sur la Cour fédérale, L.R.C. (1985), ch. F-7.)

[20]            Il est intéressant de noter que, fort récemment, dans l'arrêt Canada (Commissaire à l'information) c. Canada (Commissaire de la Gendarmerie royale du Canada), [2003] R.C.S. 8, la Cour suprême du Canada a appliqué la norme de la décision correcte à l'égard d'une décision prise par le commissaire de la GRC qui se rapportait fondamentalement à une question de droit, à savoir l'interprétation à donner aux mots « renseignements personnels » tels qu'ils sont définis à l'article 3 de la Loi sur la protection des renseignements personnels, dans le contexte de la question de savoir s'il existait une exception à la communication conformément au paragraphe 19(1) de la Loi sur l'accès à l'information.


[21]            En l'espèce, je suis d'avis que la décision du tribunal devrait être examinée par rapport à la norme de la décision raisonnable parce que le tribunal était tenu de rendre une décision dans le contexte de diverses dispositions légales et réglementaires par rapport à des faits particuliers auxquels il avait conclu.

(b)        Les dispositions légales et réglementaires pertinentes

[22]            L'objet du système correctionnel fédéral est énoncé à l'article 3 de la Loi; il s'agit notamment de « contribuer au maintien d'une société juste, vivant en paix et en sécurité, [...] en aidant au moyen de programmes appropriés dans les pénitenciers ou dans la collectivité, à la réadaptation des délinquants et à leur réinsertion sociale à titre de citoyens respectueux des lois » . L'article 4 de la Loi traite des principes qui doivent guider le SCC. Notamment, les délinquants doivent « participe[r] aux programmes favorisant leur réadaptation et leur réinsertion » . L'article 5 de la Loi prévoit que les tâches suivantes incombent notamment au SCC : « [L]a mise sur pied de programmes contribuant à la réadaptation des délinquants et à leur réinsertion sociale [et] la préparation des détenus à leur libération » .

[23]            Selon l'article 76 de la Loi, le SCC « doit offrir une gamme de programmes visant à répondre aux besoins des délinquants et à contribuer à leur réinsertion sociale » , alors que l'article 86 prévoit notamment que le SCC « veille à ce que chaque détenu [...] ait accès, dans la mesure du possible, aux soins qui peuvent faciliter sa réadaptation et sa réinsertion sociale » .


(c)        Ce qui n'est pas ici en cause

[24]            La présente affaire ne se rapporte pas à une omission du SCC de s'acquitter d'une obligation prévue par la loi d'offrir un programme précis tel que le PTIDS. Ce programme est mis en oeuvre et il est offert au CRS.

[25]            La présente affaire n'a rien à voir avec l'idée selon laquelle l'accès du détenu aux programmes constitue un privilège et, par conséquent, la question de savoir qui est admis à participer à un programme précis relève du pouvoir discrétionnaire absolu du SCC. Les détenus qui sont dans des installations exploitées par le SCC ont droit à des programmes, que le SCC est tenu de fournir; en particulier, à l'alinéa 86(1)b) de la Loi, le législateur a prévu que le Service veille à ce que chaque détenu ait accès, dans la mesure du possible, aux soins qui peuvent faciliter sa réadaptation et sa réinsertion sociale.

[26]            La présente affaire ne se rapporte pas à une décision du SCC selon laquelle M. Ennis ne devrait plus avoir accès à un PTIDS au CRS, soit un programme auquel il devrait participer, selon la recommandation de son équipe d'examen, mais pas avant au moins un an après avoir mené à bonne fin le programme auquel il participait le 30 mars 1999.


(d)        Ce qui est en cause dans la présente affaire

[27]            La présente affaire se rapporte simplement à une décision du SCC relative au rang que devrait occuper M. Ennis aux fins de l'accès au PTIDS, au CRS. Le SCC a décidé que M. Ennis devait être inscrit sur une liste d'attente aux fins de l'accès à ce programme, mais il a attribué à celui-ci une faible priorité comparativement aux autres délinquants inscrits sur cette liste.

[28]            Comme Monsieur le juge Joyal l'a dit dans la décision Beaulieu c. Établissement Leclerc, [1987] A.C.F. no 1122, la Cour n'interviendra probablement pas dans une décision de ce genre, se rapportant à la gestion interne du système pénitentiaire, et ce, à cause de la retenue dont font preuve les tribunaux judiciaires envers le SCC.

[29]            Dans l'affaire Beaulieu, précitée, le SCC avait annulé l'accès du détenu à trois programmes de réadaptation parce qu'il avait été conclu que le détenu était coupable, sous trois chefs, d'infractions à certaines règles disciplinaires. Le juge Joyal a noté que ce type de décision était assujetti au contrôle; il a ajouté ce qui suit :

[...] Le tribunal, cependant, n'est pas muni des pouvoirs d'une Cour d'appel qui lui permettrait d'infirmer la décision en y substituant la sienne. Le tribunal est sujet à des contraintes que la jurisprudence a manifestées maintes et maintes fois. À moins de découvrir des vices de forme, un manquement à la justice naturelle, un excès de juridiction ou une conclusion tirée de façon absurde ou vexatoire, une décision administrative est incontestable même si le tribunal ne partage pas le bien-fondé de celle-ci. [non souligné dans l'original]

[30]            À la fin des motifs de jugement qu'il a rendus par écrit, le juge Joyal a fait les remarques suivantes :

La loi accorde aux autorités de nos pénitenciers une mesure de discrétion pour bien assurer le bon fonctionnement de ces institutions et permettre en même temps que les personnes incarcérées puissent profiter de certains programmes de réadaptation ou de réhabilitation. Pour ce faire, les autorités doivent être guidées par une multitude de disciplines intellectuelles, chacune d'elles renfermant les données essentielles au meilleur exercice possible de leur discrétion. La tâche que la loi leur impose n'est pas toujours facile. Il se peut fort bien qu'au cours de toute cette expérience, certaines décisions ont moins de mérite que d'autres ou que, sur les faits, une autre personne aurait tiré des conclusions différentes, ou aurait imposé des sanctions plus légères. La responsabilité de toutes ces décisions ne relève pas cependant de l'observateur qui se trouve à l'extérieur du milieu du requérant. Elle ne relève pas non plus d'un tribunal qui doit s'abstenir de toute intervention judiciaire dont l'effet serait de s'arroger un pouvoir discrétionnaire que la Loi aurait accordé à d'autres.

CONCLUSIONS

[31]            Le demandeur n'a pas réussi à me convaincre que la décision du tribunal devrait être infirmée. Il faut se rappeler que le tribunal a fondé sa décision sur deux motifs : en premier lieu, à son avis, le demandeur n'avait pas fourni de renseignements tendant à démontrer que le SCC avait utilisé deux poids deux mesures comme il l'alléguait, à savoir que certains délinquants, indépendamment de leur crime ou du nombre d'infractions qu'ils ont commises, bénéficient d'un traitement accéléré dans le système et aboutissent dans un établissement à sécurité minimale bien avant leurs dates d'admissibilité et, en second lieu, le tribunal souscrivait aux réponses fournies au demandeur à des paliers inférieurs de la procédure de règlement des griefs.

[32]            Dans les plaidoiries qu'il nous a soumises, M. Ennis n'a pas insisté sur l'allégation selon laquelle il y avait deux poids deux mesures. Quoi qu'il en soit, je ne puis rien voir dans le dossier qui corrobore de quelque façon cette allégation.

[33]            M. Ennis a reproché au tribunal de ne pas lui avoir accordé un accès immédiat au PTIDS parce que les décisions rendues aux paliers inférieurs sur lesquelles il s'était fondé comportaient des erreurs.

[34]            Premièrement, M. Ennis a affirmé qu'il n'avait pas accès au programme de réadaptation pour délinquants sexuels, à Mission, parce qu'il avait été mis fin à ce programme. Je ne suis pas convaincu que le fait qu'il ait été mis fin à ce programme soit pertinent en ce qui concerne les décisions contestées.

[35]            Deuxièmement, M. Ennis a déclaré que les décisions rendues aux paliers inférieurs de la procédure ne tenaient nullement compte de son plan correctionnel comme l'exige l'article 102 du Règlement sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition.


[36]            Troisièmement, M. Ennis s'est plaint d'une violation de l'article 27 de la Loi, qui prévoit que le délinquant qui a le droit de présenter des observations au sujet d'une décision le concernant devant être rendue par le Service, doit se voir communiquer tous les renseignements dans un délai raisonnable avant la prise de décision. Il a signalé la feuille d'entrevue relative au programme en date du 24 août 2001 et il a affirmé qu'on la lui avait remise trop tard.

[37]            Quatrièmement, M. Ennis a déclaré que les décisions rendues aux paliers inférieurs tenaient compte d'une considération non pertinente. Il a parlé du Programme intensif pour les délinquants sexuels; il a signalé les critères d'admission et il a soutenu que la capacité d'énoncer l'objectif du traitement n'était pas un critère d'admission désigné.

[38]            À mon avis, les arguments invoqués par M. Ennis sont à côté de la question. Ils auraient peut-être été dans une certaine mesure fondés si M. Ennis s'était vu refuser l'accès au PTIDS, mais tel n'est pas le cas.

[39]            À mon avis, M. Ennis n'a pas réellement compris le fondement du rejet de son grief. Il est inscrit sur la liste d'attente d'un PTIDS mais, au moment où les décisions ont été rendues, il venait après d'autres délinquants qui attendaient de participer au programme.


[40]            Je reconnais que M. Ennis attend depuis 1999 pour participer au PTIDS nécessaire et que cela peut lui sembler bien long. Toutefois, le SCC peut à bon droit établir l'ordre de priorité aux fins de l'accès aux programmes et il n'a pas été démontré à ma satisfaction que le SCC ait agi de mauvaise foi en accordant la priorité à d'autres détenus ou en différant le traitement de M. Ennis pour des motifs secrets, par exemple pour lui refuser l'accès, de façon qu'il ne mène pas à bonne fin son plan correctionnel et qu'il ne puisse donc pas se prévaloir de ses dates d'admissibilité.

[41]            Plus précisément, M. Ennis a la faculté de demander des PSAE ou un transfèrement à un établissement à sécurité minimale et il peut présenter un grief à l'encontre du refus. Quant au contrôle judiciaire fondé sur le Code criminel, M. Ennis n'est pas admissible à cause des multiples meurtres qu'il a commis.

[42]            Pour ces motifs, la demande de contrôle judiciaire est rejetée.

                                 « François Lemieux »                   

                                                                                                                        JUGE                               

OTTAWA (ONTARIO)

LE 17 AVRIL 2003

Traduction certifiée conforme

Martine Guay, LL. L.


                                 COUR FÉDÉRALE DU CANADA

                          SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

                              AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                     T-667-02

INTITULÉ :                                    DAVID ENNIS

c.

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

LIEU DE L'AUDIENCE :            VANCOUVER (COLOMBIE-BRITANNIQUE)

DATE DE L'AUDIENCE :          LE 20 FÉVRIER 2003

MOTIFS DE L'ORDONNANCE :                     MONSIEUR LE JUGE LEMIEUX

DATE DES MOTIFS :                  LE 17 AVRIL 2003

COMPARUTIONS :

M. DAVID ENNIS                                              POUR SON PROPRE COMPTE

Mme MARYANN BARKER                               POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER:

M. MORRIS ROSENBERG                               POUR LE DÉFENDEUR

SOUS-PROCUREUR GÉNÉRAL

DU CANADA

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