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Date : 20030507

Dossier : IMM-3270-02

Référence : 2003 CFPI 561

Entre :

                        WENDY GRACIELA DIAZ

                                                Partie demanderesse

Et :

        LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉET DE L'IMMIGRATION

                                                Partie défenderesse

                        MOTIFS D'ORDONNANCE

LE JUGE ROULEAU


[1]                 Il s'agit d'une demande de contrôle judiciaire à l'encontre d'une décision de la Section du statut de réfugié de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié ("la Section du statut") datée du 17 juin 2002, selon laquelle la demanderesse n'était pas une réfugiée au sens de la Convention. Celle-ci demande à la Cour d'infirmer cette décision et d'ordonner le renvoi de la présente affaire pour jugement devant un tribunal reconstitué.

[2]                 La demanderesse, une citoyenne du Honduras âgée de 31 ans, allègue une crainte bien fondée de persécution en raison de ses opinions politiques imputées et de son appartenance à un groupe social particulier.

[3]                 La demanderesse aurait quitté son domicile le 12 octobre 2001 pour faire un dépôt d'argent pour les parents de son conjoint de fait. À son retour, elle aurait été témoin de l'enlèvement des fils de sa marraine par trois agents du Département des enquêtes criminelles (DIC). Elle allègue que ce jour-là, les fils de sa marraine, accompagnés de leur ami, revenaient d'une manifestation du jour de la race dans laquelle participèrent plusieurs personnes. À l'audience devant la Section du statut, le demanderesse a témoigné que les deux enfants de sa marraine et leur ami auraient été arrêtés par les membres de la DIC parce qu'ils auraient participé à cette manifestation qui était contre le gouvernement.


[4]                 La demanderesse allègue que les agents de sécurité de la DIC auraient battu et insulté les enfants de sa marraine âgés de 12 et 13 ans avant l'enlèvement; ils lui auraient dit par ailleurs de continuer son chemin et qu'elle n'avait rien vu. Elle allègue aussi dans son Formulaire de Renseignements Personnels (FRP) qu'elle aurait vu les policiers forcer les trois enfants à monter dans une voiture de police et qu'ils seraient partis avec eux.

[5]                 La demanderesse allègue que nerveuse et stressée, elle serait allée tout raconter à sa marraine. Par la suite, elle serait allée à une clinique où elle aurait passé trois jours sous médication à cause de sa nervosité.

[6]                 La nuit du 17 octobre 2001, la demanderesse aurait été obligée de quitter sa maison par l'arrière parce que vers 9h00 p.m. des membres de la DIC seraient allés chez elle à sa recherche. Elle affirme s'être cachée et avoir passé la nuit dans la brousse; le lendemain, elle serait allée chez sa mère qui lui aurait dit que trois membres de la DIC étaient allés s'enquérir auprès d'elle et qu'ils avaient fouillé sa maison.

[7]                 Par la suite, la demanderesse serait allée à San Perdo Sula avec l'aide de son oncle, un endroit où elle se serait cachée avant son départ définitif du pays. Le 26 octobre 2001, son mari l'aurait informé que leur maison avait été surveillée et qu'elle était recherchée et accusée d'être contre les autorités de son pays. Grâce au concours des membres de sa famille, la demanderesse a quitté son pays le 5 novembre 2001 pour les États-Unis où elle a passé une semaine et demie sans y revendiquer toutefois le statut de réfugié. Elle arriva au Canada le 3 décembre 2001 et revendiqua le statut de réfugié le même jour.


[8]                 La demanderesse aurait été informée au Canada qu'un montant d'argent avait été payé pour la libération des fils de sa marraine et que le troisième enfant serait mort; son corps aurait été retrouvé le 15 octobre 2001. La demanderesse allègue que les journaux auraient parlé de la manifestation à laquelle les enfants avaient participé mais que seule sa mère aurait réussi à avoir une copie du journal parlant de cette manifestation.

[9]                 La demanderesse allègue également n'avoir pas porté plainte concernant le fait qu'elle aurait été témoin de l'enlèvement des trois enfants, de peur d'être tuée par la police ou les membres de la DIC. Elle affirme qu'elle n'a aucun document pour attester de la mort du troisième enfant, mais que ceci aurait été publié dans les journaux.

[10]            Quant à sa crainte de retour, la demanderesse allègue qu'elle craint de témoigner contre ces trois policiers de la DIC car après son témoignage, ceux-ci seraient accusés d'avoir enlevé trois mineurs et tué l'un d'entre eux. Elle allègue également que ces trois policiers seraient mis en prison après son témoignage et qu'elle craint donc leur vengeance.


[11]            Dans sa décision rejetant la revendication de la demanderesse, la Section du statut a tout d'abord déterminé que celle-ci avait été témoin d'un acte criminel. Elle a par la suite déterminé que l'absence de documents corroborant les allégations de la demanderesse l'amène à conclure que celle-ci n'a pas établi à sa satisfaction que les manifestations, l'enlèvement des enfants et la mort de l'un d'entre eux ont véritablement eu lieu. Puis, citant un extrait de la preuve documentaire à l'effet que le gouvernement hondurien a destitué plus d'une centaine de membres des forces de sécurité, de la police ainsi que des enquêteurs et juges pour corruption et autres accusations, elle conclut que le crime dont la demanderesse allègue avoir été témoin aurait été commis par des officiers malveillants qui n'auraient pas agi au nom de l'État.

[12]            Par ailleurs, la Section du statut conclut que le comportement de la demanderesse aux États-Unis n'était pas celui d'une personne ayant une crainte subjective de persécution. Enfin, le tribunal affirma que même si la demanderesse avait été trouvée crédible, sa crainte telle qu'exprimée n'avait aucun lien avec l'un ou l'autres des cinq motifs prévus à la Convention pour le statut de réfugié.


[13]            Il m'apparaît que la Section du statut a conclu avec raison que la demanderesse avait été témoin d'un acte criminel et, à ce titre, était victime d'agissement criminels. Or, la crainte qu'a une personne d'être persécutée par des criminels ne peut servir de fondement à une revendication du statut de réfugié et que le tribunal a eu raison de conclure que les allégations de la demanderesse n'ont aucun lien avec l'un ou l'autre des cinq motifs prévus à la définition de réfugié dans la Convention.

[14]            De plus, la Section du statut était justifiée de conclure, suite à son analyse de la preuve documentaire, que "[...] le crime auquel la demanderesse allègue avoir été témoin aurait été commis par des officiers malveillants qui n'auraient pas agi au nom de l'État hondurien". À cet effet, il était loisible au tribunal de préférer la preuve documentaire au témoignage de la demanderesse. De plus, contrairement aux arguments de la demanderesse à l'effet que les agents de l'ordre agissent toujours au nom de l'État qui les engage et qu'ils représentent, cette Cour a reconnu à plusieurs reprises que des actes ne deviennent pas des actes de persécution du simple fait que leur auteur est un fonctionnaire du gouvernement.

[15]            L'évaluation négative de crédibilité faite par la Section du statut était justifiée et celle-ci pouvait tirer une inférence négative de l'absence de corroboration de la tenue de la manifestation du jour de la race, de la contre-manifestation, de l'enlèvement des trois enfants par la police de la DIR et de la mort alléguée de l'un des enfants suite à l'enlèvement.


[16]            Par conséquent, la demande de contrôle judiciaire est rejetée.

      JUGE

OTTAWA, Ontario

Le 7 mai 2003


                        COUR FÉDÉ RALE DU CANADA

                     SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

                      AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

                                     

DOSSIER :                  IMM-3270-02

INTITULÉ:                 WENDY GRACIELA DIAZ c. MCI

LIEU DE L'AUDIENCE :      Montréal

DATE DE L'AUDIENCE :      1er mai 2003

DATE DES MOTIFS :        Le 7 mai 2003

COMPARUTIONS:

Me Oscar Fernando Rodas                        POUR LE DEMANDEUR

Me Caroline Cloutier                           POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER:

Me Oscar Fernando Rodas                        POUR LE DEMANDEUR

6502, Boul. Saint-Laurent, Suite #6

Montréal, Québec

H2S 3C6

Ministère fédéral de la Justice              POUR LE DÉFENDEUR

Complexe Guy-Favreau

200 ouest, Boul. René- Lévesque

Tour Est, 5e étage

Montréal, Québec

H2Z 1X4                                       

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