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Date : 19990401


Dossier : IMM-723-98

ENTRE :


VITALI KOULKOV,


demandeur,


et


LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION,


défendeur.


MOTIFS DE L"ORDONNANCE

                     Énoncé des motifs déposé, conformément à l'article 51 de la Loi sur la Cour fédérale, à l'appui de l'ordonnance que j'ai prononcée au terme de l'audience tenue le 23 mars 1999 dans la présente affaire.                     

LE JUGE PINARD

[1]      Il s'agit d'une demande de contrôle judiciaire d'une décision de la Section du statut de réfugié de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié (la Commission), datée du 26 janvier 1998, selon laquelle la Commission a conclu qu'il y avait eu désistement de la revendication du statut de réfugié le 5 janvier 1998.

[2]      Le 5 janvier 1998, le demandeur et son avocat ont assisté à une audience de désistement tenue par la Commission. À la suite de cette audience, la Commission a déclaré, par un avis daté du 26 janvier 1998, que le demandeur n'avait pas comparu à l'audience prévue et qu'il était réputé s'être désisté de sa revendication du statut de réfugié. Le demandeur a reçu cette décision par lettre le 6 février 1998 et, en raison de l'erreur manifeste, il a déposé le 20 février 1998 une demande d'autorisation et de contrôle judiciaire de la décision. Il y a indiqué que la Commission avait commis une erreur en déterminant qu'il n'avait pas comparu à l'audience alors qu'il y était bien présent.

[3]      Le 27 février 1998, une semaine après la signification au ministre de la demande d'autorisation et de contrôle judiciaire, la Commission a rendu une seconde décision " modifiée " dans laquelle elle concluait que le demandeur et son avocat étaient bien présents à l'audience, mais qu'ils n'avaient pas réussi à convaincre la Commission des raisons pour lesquelles il ne devrait pas y avoir désistement présumé de la revendication. Il est à noter que la décision modifiée est également datée du 26 janvier 1998.

[4]      Dans l'affaire M.E.I. c. Restrepo (1989), 8 Imm.L.R. (2d) 161, devant la Cour d'appel fédérale, la Commission d'appel de l'immigration avait rendu une décision le 7 avril 1987 qui, selon ce qu'il appert, avait été rendue par écrit et versée au dossier. La partie déboutée demanda l'autorisation d'en appeler de la décision. Avant que cette autorisation ne soit accordée, la Commission d'appel de l'immigration avait, en réponse à une demande de la partie déboutée, produit un exposé des motifs et le greffier de la Commission avait signé une décision " modifiée " qui s'écartait substantiellement de la décision originale. Le juge Pratte écrit à la page 163 :

                 Il nous paraît certain que ce dernier appel est bien fondé. Le 1er septembre 1987, en effet, la Commission était désaisie de cette affaire qu'elle avait déjà jugée le 7 avril en rendant une décision qu'elle n'avait plus le pouvoir de modifier. Il en aurait été autrement, bien sûr, si la décision du 1er septembre avait seulement voulu corriger une erreur matérielle dans la décision du 7 avril. Mais tel n'était pas le cas. La seconde décision est substantiellement différente de la première et l'on ne trouve rien dans les motifs de la Commission qui permette de dire que l'erreur que l'on voulait corriger n'était qu'une erreur matérielle. L'appel interjeté contre cette seconde décision sera donc accueilli et cette décision sera cassée.                 
                          (Non souligné dans l'original.)                 

[5]      Il est évident en l'espèce que la première décision n'est pas fondée parce qu'elle indique que le demandeur n'était pas présent à l'audience du 5 janvier 1998. En fait, le demandeur et son avocat, Me Michael Dorey, ont assisté à l'audience et la transcription versée au dossier de la Cour (pages 143 à 162) indique qu'ils ont tenté de faire valoir les raisons pour lesquelles il ne devrait pas y avoir désistement de la demande. En effet, comme il est indiqué aux pages 161 et 162 de la transcription, le président de l'audience a déclaré que le tribunal était prêt à rendre la décision et précisa les raisons pour lesquelles la Commission avait conclu au désistement de la revendication du demandeur :

                 LE PRÉSIDENT DE L'AUDIENCE                 
                 -      [TRADUCTION] Le tribunal est prêt à rendre sa décision.                 
                      Après discussion, mon collègue et moi décidons de conclure au désistement de la revendication, pour les motifs suivants :                 
                      Nous estimons que le demandeur a été négligent à deux égards. D'abord il a reçu, à son arrivée au Canada, de la documentation lui expliquant toutes les procédures, y compris la nécessité d'aviser la Commission de l'immigration et du statut de réfugié de tout changement d'adresse. Le demandeur a omis d'aviser la Commission de sa nouvelle adresse.                 
                      Il nous a dit qu'il a rencontré son avocat au début de [...], qu'il a emménagé à sa nouvelle adresse sur le chemin Walkley au début de novembre 1997. Il a précisé qu'au début de décembre il a rencontré son avocat qui l'a avisé que la date de l'audience était fixée au 15 décembre. Il a néanmoins attendu jusqu'au 19 décembre pour aviser la Commission de son changement d'adresse.                 
                      Si l'on s'en tient au témoignage du demandeur, il nous a dit qu'il avait appris de son avocat que la date de son audience était le 15 décembre. Toutefois, il ne s'est pas présenté à l'audience à cette date. Il avait été convoqué pour 8 h 30, mais l'audience ne commença qu'à 9 h, une demi-heure plus tard.                 
                      Ce jour-là, son avocat, Me Michael Dorey, nous informa qu'il n'avait pas eu de nouvelles de son client depuis les trois dernières semaines, ce qui contredit le témoignage du demandeur qui nous a dit avoir rencontré l'avocat au début de décembre.                 
                      Nous ne pouvons accepter l'explication du demandeur selon laquelle il s'est couché tard, était sous tension et n'a donc pu se lever à temps. Nous estimons que le défaut de comparaître constitue une négligence grave de sa part, parce que l'audience devrait, à notre sens, être d'une importance capitale pour lui du fait qu'il soutient que sa sécurité en dépend.                 
                      Pour ces raisons, mon collègue et moi concluons au désistement de la revendication de M. Vitali Koulkov.                 

[6]      Par conséquent, il est évident que l'envoi de la première décision était une simple erreur administrative et ne correspondait aucunement à l'intention de la Commission. Je n'arrive pas à comprendre pourquoi l'avocat du demandeur a prétendu devant moi que son client avait été en quelque sorte victime de manipulation, alors qu'ils étaient tous deux présents à l'audience au moment où la Commission a exposé les motifs véritables à l'appui de sa décision de conclure au désistement de la demande.

[7]      En outre, contrairement à la situation dans l'affaire Restrepo, précitée, la demande d'autorisation et de contrôle judiciaire, qui a été déposée une semaine avant que la décision modifiée soit envoyée et qui n'a jamais été modifiée, ne vise que la première décision, et non la seconde décision ou décision modifiée.

[8]      Par conséquent, même si la première décision était manifestement erronée, je conclus qu'elle a été dûment modifiée par une seconde décision valide. Le demandeur ne peut donc obtenir de réparation utile dans la présente procédure et sa demande est rejetée.


" Yvon Pinard "

                                         JUGE

OTTAWA (ONTARIO)

Le 1er avril 1999.

Traduction certifiée conforme

Bernard Olivier, B.A., LL.B.

COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE


AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

NO DU GREFFE :              IMM-723-98

INTITULÉ DE LA CAUSE :      VITALI KOULKOV
                     - c.-
                     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L"IMMIGRATION
LIEU DE L"AUDIENCE :          Montréal (Québec)
DATE DE L"AUDIENCE :          Le 23 mars 1999

MOTIFS D"ORDONNANCE EXPOSÉS PAR LE JUGE PINARD

EN DATE DU :              1 er AVRIL 1999

ONT COMPARU :

Me Michael Dorey                          POUR LE DEMANDEUR

Me Daniel Latulippe                          POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Me Michael Dorey                          POUR LE DEMANDEUR

Montréal (Québec)

Morris Rosenberg                          POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada

                             COUR FÉDÉRALE DU CANADA

                                 Date: 19990401

                        

         Dossier : IMM-723-98

                             Entre :

                             VITALI KOULKOV,

     demandeur,

                             - et -

                             LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ
                             ET DE L'IMMIGRATION,

                    

     défendeur.

                    

                            

            

                                                                                 MOTIFS DE L'ORDONNANCE

                            

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