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Date : 20200629


Dossier : T-648-20

Référence : 2020 CF 732

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 29 juin 2020

En présence de madame la juge en chef adjointe Gagné

ENTRE :

MARVIN YAHEY, WAYNE YAHEY ET SHERRY DOMINIC

demandeurs

et

ROBIN EWASKOW, TROY WOLF ET SHELLEY GAUTHIER

défendeurs

ORDONNANCES ET MOTIFS

[1]  VU la requête présentée par les demandeurs au titre du paragraphe 373(1) des Règles des Cours fédérales, DORS/98-106, en vue d’obtenir :

  1. une injonction interlocutoire suspendant les résolutions no 2020-012 et no 2020-013 du conseil de bande de la Première Nation de Blueberry River [PNBR] jusqu’à ce qu’une décision finale soit rendue sur le fond de la présente demande,

  2. une injonction interlocutoire interdisant aux défendeurs d’affirmer que le chef Marvin Yahey a été destitué de ses fonctions jusqu’à ce qu’une décision finale soit rendue sur le fond de la présente demande,

  3. une injonction interlocutoire interdisant aux défendeurs d’agir au nom de la PNBR ou d’affirmer qu’ils ont le pouvoir de le faire, notamment de convoquer des réunions du conseil et d’envoyer des communications arborant l’en-tête de la PNBR, et ce, jusqu’à ce qu’une décision finale soit rendue sur le fond de la présente demande,

  4. des dépens, y compris des dépens spéciaux,

e.  toute autre réparation que la Cour estimera juste;

[2]  ET VU le fait que la résolution no 2020-012 du conseil de bande vise à destituer le chef Marvin Yahey de ses fonctions et que la résolution no 2020-013 du conseil de bande ordonne à la banque de la PNBR de lui fournir les états financiers de la bande, remplace le pouvoir de signature du chef Yahey par celui du défendeur Robin Ewaskow et suspend la directrice des opérations de la PNBR;

[3]  ET VU le fait que, pour avoir gain de cause, les demandeurs devaient démontrer que leur demande soulève une question sérieuse à trancher, qu’ils subiront un préjudice irréparable si une injonction n’est pas accordée et que la prépondérance des inconvénients milite en faveur de l’octroi de l’injonction (RJR-MacDonald Inc c Canada (Procureur général), [1994] 1 RCS 311);

[4]  ET VU la conclusion selon laquelle les défendeurs n’ont pas respecté le Blueberry River Custom Election By-law [le Code coutumier], dûment adopté en 2017, lorsqu’ils ont convoqué et tenu les réunions des 10 et 17 juin, lors desquelles les deux résolutions ont été adoptées, particulièrement parce que :

  1. seul le chef peut convoquer une réunion spéciale urgente avec un préavis de 24 heures,

  2. le quorum prévu de quatre membres du conseil n’a pas été atteint à la réunion (et les défendeurs n’ont pas démontré que le manuel de gouvernance de la Première Nation de Blueberry River, sur lequel ils se sont appuyés pour tenir la réunion avec seulement trois membres du conseil, avait dûment été adopté ou qu’il n’avait pas été remplacé par le Code coutumier),

  3. la pétition signée par plus de 60 % des membres de la bande et le rapport fondé sur l’article 188 n’ont pas été présentés de façon appropriée et les requérants n’étaient pas présents, en personne, par téléconférence ou par vidéoconférence, à la réunion;

[5]  ET VU la conclusion selon laquelle les demandeurs et la PNBR dans son ensemble subiront un préjudice irréparable si une injonction n’est pas accordée « en raison de ce conflit et de l’incertitude qui règne dans la structure du pouvoir, notamment la tension et l’incertitude que suscite le fait de savoir qui détient son poste de manière valide » (Première Nation Lower Nicola c Le Conseil, 2012 CF 103, au par. 35). Je suis d’accord avec les demandeurs pour dire que le renvoi d’un chef ou d’un membre du conseil avant l’expiration de leur mandat normal constitue généralement un préjudice irréparable (Assiniboine c Meeches, 2013 CAF 114, au par. 23), surtout lorsque les règles que la Première Nation a adoptées pour elle-même et qu’elle a choisi de respecter n’ont pas été observées;

[6]  ET VU la conclusion selon laquelle, en fin de compte et sous réserve de ce qui suit, la prépondérance des inconvénients favorise le statu quo, car cela est dans l’intérêt supérieur de la PNBR qui, tout comme les tiers qui interagissent avec elle, a besoin de certitude et de prévisibilité dans sa gouvernance;

[7]  ET VU, toutefois, le fait que des allégations graves ont été formulées contre le chef Marvin Yahey par des membres de la PNBR dans une pétition, qui aurait été signée par plus de 60 % des membres de la PNBR, dans un rapport fondé sur l’article 188 contre le chef Marvin Yahey, ainsi que dans le cadre d’une enquête policière en cours concernant certaines inconduites du chef et de la directrice des opérations de la PNBR;

[8]  ET VU le fait que la Cour a été informée que, depuis avril 2020, le conseil de bande n’a pas respecté son Code coutumier en tenant deux réunions régulières par mois;

[9]  ET VU la conclusion selon laquelle, dans ces circonstances, il est impératif qu’une réunion régulière du conseil de bande soit tenue dans les 30 jours suivant la présente ordonnance, que les six membres du conseil de bande reçoivent l’ordre d’y participer, et que la pétition et le rapport fondé sur l’article 188 soient correctement inscrits à l’ordre du jour de la réunion.

 


ORDONNANCE dans le dossier T-648-20

LA COUR ORDONNE :

  1. Les résolutions no 2020-012 et no 2020-013 du conseil de bande sont suspendues jusqu’à ce qu’une décision finale soit rendue sur le fond de la présente demande.

  2. Il est interdit aux défendeurs d’affirmer que le chef Marvin Yahey a été destitué de ses fonctions jusqu’à ce qu’une décision finale soit rendue sur le fond de la présente demande.

  3. Il est interdit aux défendeurs d’agir au nom de la Première Nation de Blueberry River, ou d’affirmer qu’ils ont le pouvoir de le faire, notamment de convoquer des réunions du conseil et d’envoyer de communications arborant l’en-tête de la Première Nation de Blueberry River, et ce, jusqu’à ce qu’une décision finale soit rendue sur le fond de la présente demande.

  4. Le chef Marvin Yahey doit convoquer une réunion du conseil de bande, ou ordonner à la directrice des opérations de convoquer une réunion, qui devra avoir lieu dans les 30 jours suivant la présente ordonnance, et inscrire à l’ordre du jour de la réunion la pétition des membres de la bande et le rapport fondé sur l’article 188, qui seront dûment traités conformément au Blueberry River Custom Election By-law.

  5. Il est interdit aux deux parties de menacer ou d’intimider les membres de la bande qui ont signé la pétition pendant le processus de vérification prévu à la partie 22 du Blueberry River Custom Election By-law.

  6. La soussignée demeure saisie de l’affaire jusqu’à la tenue de la prochaine réunion du conseil de bande ou jusqu’à ce que cette affaire soit réglée par la médiation ou autrement, selon la première éventualité.

  7. Les défendeurs doivent payer immédiatement aux demandeurs un montant total de 3 000 $ à titre de dépens.

« Jocelyne Gagné »

Juge en chef adjointe

Traduction certifiée conforme

Ce 15e jour de juillet 2020

Julie Blain McIntosh, LL.B., trad. a.


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

T-648-20

 

INTITULÉ :

MARVIN YAHEY, WAYNE YAHEY ET SHERRY DOMINIC c ROBIN EWASKOW, TROY WOLF ET SHELLEY GAUTHIER

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

AUDIENCE TENUE PAR VIDÉOCONFÉRENCE ENTRE VANCOUVER (COLOMBIE-BRITANNIQUE) ET OTTAWA (ONTARIO)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 26 juin 2020

 

ORDONNANCE ET MOTIFS :

LA JUGE EN CHEF ADJOINTE GAGNÉ

 

DATE DES MOTIFS :

LE 29 JUIN 2020

 

COMPARUTIONS­ :

Georges Rivard

 

POUR LES DEMANDEURS

 

Mark Underhill

 

POUR LES DÉFENDEURS

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Arvay Finlay LLP

Vancouver (Colombie-Britannique)

 

POUR LES DEMANDEURS

 

Rivard Law

Fort St. John (Colombie-Britannique)

 

POUR LES DÉFENDEURS

 

 

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