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Date : 20030516

Dossier : T-180-02

Référence : 2003 CFPI 621

ENTRE :

                                                    ALLAN ARTHUR CRAWSHAW

                                                                                                                                                     demandeur

                                                                                   et

                                           LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

                                                                                                                                                      défendeur

                                                    MOTIFS DE L'ORDONNANCE

MADAME LE JUGE SIMPSON

[1]                 Allan Arthur Crawshaw (demandeur) purge actuellement une peine d'emprisonnement à vie pour un meurtre au premier degré. Suite à sa condamnation le 17 mai 1993, il a été incarcéré au pénitencier à sécurité moyenne de Mission. En décembre 2000, il a été transféré à l'établissement à sécurité minimale de Elbow Lake et, peu après, au début de 2001, à celui de Ferndale, lui aussi à sécurité minimale, où il se trouve encore aujourd'hui.

[2]                 La présente demande de contrôle judiciaire porte sur une décision prise le 31 décembre 2001 en réponse à un grief au troisième palier, objet du dossier numéro V80A00000095/V80A00000700.

[3]                 Le grief en question, dont la teneur suit, portait la date du 28 août 2001 :

1.              [TRADUCTION] J'ai dit par le passé - et redirai sans doute à l'avenir - aux juges de la Cour fédérale que JE NE DISPOSE PAS au sein du Service correctionnel du Canada, d'une procédure de grief digne de ce nom, comme le garantit l'article 90 de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition, du fait que cette procédure, qui est inopportune, n'est pas conforme à la loi et qu'elle ne répond ni effectivement ni équitablement à une enquête adéquate, ce qui est une violation de la loi.

2.              Le fait que vos employés contreviennent avec préméditation et de façon suivie à la loi n'a rien de surprenant - toutefois, le fait que votre bureau cautionne ces procédures illégales est très répréhensible - et illégal.

3.             Pourquoi a-t-on attribué au grief le numéro V80A00000700 en remplacement du numéro V80A00000095 qu'il portait à l'origine?

4.              Encore une fois, le grief contrevient à l'article 7 de la directive du commissaire n ° 081 lequel s'énonce comme suit - « Le SCC doit veiller à ce que les délinquants reçoivent par écrit, une réponse complète aux questions soulevées dans les plaintes et les griefs, dans les 15 jours ouvrables suivant la réception par le répondant, lorsqu'il s'agit d'un cas jugé prioritaire, et dans les 25 jours ouvrables suivant leur réception par le répondant dans tous les autres cas. » Pourquoi a-t-il fallu huit mois depuis lors pour que le présent grief parvienne à ce palier-ci?

5.              Je voudrais attirer l'attention du commissaire sur l'article 337 du Code criminel du Canada concernant un employé public qui refuse de remettre des biens.

337. Est coupable d'un acte criminel et passible d'un emprisonnement maximal de quatorze ans quiconque, étant ou ayant été employé au service de Sa Majesté du chef du Canada ou d'une province, ou au service d'une municipalité, et chargé, en vertu de cet emploi de la réception, de la garde, de la gestion ou du contrôle d'une chose, refuse ou omet de remettre cette chose à une personne qui est autorisée à la réclamer et qui, effectivement, la réclame.

Lois révisées, chapitre C-34, article 297.


                                                           MESURE REQUISE

Vos employés ont en leur possession mes documents ORIGINAUX relatifs à l'achat de mon ordinateur - qui a été endommagé sous leur garde - et je réclame que ces documents ORIGINAUX me soient retournés. Ils ont été illégalement envoyés de Ferndale à l'établissement de Mission.

[4]                 Voici la décision que le défendeur a rédigée :

[Traduction] Votre grief au troisième palier auquel vous vous référez ci-dessus a été réexaminé.

Vous n'êtes pas satisfait des explications que vous ont données les paliers précédents au sujet des délais que vous avez subis, du changement du numéro de grief et de l'absence de documents originaux relatifs à l'achat de votre ordinateur.

J'admets qu'il est déconcertant que les services n'aient pas été en mesure de répondre à ces questions dans des délais appropriés, mais vous avez reçu des excuses à ce sujet de la part des responsables du deuxième palier de la procédure de grief.

Au sujet de votre insistance à savoir ce qui a motivé le changement de numéro de votre grief, j'ai obtenu la copie d'une note rédigée par le chef des Services administratifs de l'établissement de Mission en date du 24-05-2001. Bien qu'on vous ait envoyé l'original de cette note, je vous en adresse ci-joint une copie. Elle se passe de commentaires.

En ce qui a trait aux documents originaux manquants, vous avez été informé qu'on n'arrive pas à mettre la main sur les documents relatifs à l'achat de votre ordinateur. Bien que ces documents ne soient pas nécessaires pour régler les problèmes que peut éventuellement présenter votre ordinateur, vous avez été informé que le personnel affecté à l'admission et à l'élargissement au pénitencier de Ferndale pourrait faciliter vos relations avec le fournisseur de votre appareil. Je m'excuse de tout inconvénient que la perte de vos documents a pu vous causer.

Les répondants précédents ayant, à mon avis, traité ces questions de façon satisfaisante, aucune autre mesure ne sera prise à ce palier-ci.

Analyse

[5]                 La note dont il est question au quatrième paragraphe de la décision, informait le demandeur que sa plainte V80A00000095 a été traitée, en premier lieu, par l'établissement de Elbow Lake. Toutefois, on a clos ce dossier du fait que l'ordinateur du demandeur a été entreposé à l'établissement de Mission qui l'a ensuite expédié; c'est pourquoi, la plainte a porté le nouveau numéro V80A0000070 et a été soumise ensuite au gouverneur de l'établissement de Mission.

[6]                 Il est clair que les documents originaux relatifs à l'achat de l'ordinateur ont été égarés ou n'ont jamais été reçus. De toute façon, personne ne les a en mains.

[7]                 Le traitement du grief du demandeur au troisième palier (le grief) a accusé un retard. Il est daté du 28 août 2001, mais semble être parvenu à destination le 6 septembre 2001. Cependant, la décision n'a pas été rendue avant fin décembre 2001, ce qui dépasse de loin le délai imparti au paragraphe 7 de la directive du commissaire en matière de politique n ° 081 (la directive). Cette directive enjoint au Service correctionnel du Canada (SCC) de veiller à ce que les délinquants reçoivent, dans les cas jugés non prioritaires, une réponse par écrit dans les vingt-cinq jours ouvrables suivant la réception de leur plainte par le répondant. Cette directive se rapporte à l'article 90 de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition, L.C. 1992, ch. 20 (la Loi), laquelle établit une procédure de règlement juste et expéditif des griefs des délinquants.

[8]                 Le 18 octobre 2001, le demandeur a reçu des excuses pour le retard comme il en est fait mention au troisième paragraphe de la décision en ces termes :

[Traduction] Je me réfère à ma précédente lettre du 19 septembre 2001 concernant votre grief au troisième palier.

Comme je l'ai dit dans cette lettre, nous avions prévu de répondre à votre grief le 25 octobre 2001. Je regrette que nous n'ayons pu le faire dans les délais prescrits en raison du grand nombre inattendu de griefs que nous avons reçus. Nous espérons vous donner une réponse au plus tard le 30 novembre 2001.

Encore une fois, veuillez accepter nos excuses pour ce retard.

[9]                 En vertu du paragraphe 18.1(2) de la Loi sur la Cour fédérale, L.R.C. (1985), ch. F-7, le demandeur peut présenter une demande de contrôle judiciaire d'une décision ou d'une ordonnance d'un office fédéral. Le demandeur n'allègue pas, en l'espèce, que la directive comporte des erreurs susceptibles de contrôle, mais il soutient, à la page 92 de son dossier, que son grief n'a pas été traité de façon expéditive et, partant, qu'il veut obtenir :

[Traduction] Une ordonnance de mandamus enjoignant au Service correctionnel du Canada de traiter les griefs de façon juste et expéditive en application de l'article 90 de la LSCMLC.

[10]            Au soutien de sa demande, l'intéressé a fourni, à titre d'exemple, des cas où la SCC a omis de répondre en temps voulu à des griefs présentés par des délinquants, ainsi que des copies de rapports annuels de l'enquêteur correctionnel critiquant la procédure de règlement des griefs. Ces éléments de preuve ne sont toutefois pas recevables au regard de la présente demande. Dans le cadre du contrôle judiciaire, la compétence de la Cour se limite à étudier la décision et toute autre documentation sur laquelle le décideur s'est appuyé.


Conclusion

[11]            On ne m'a pas convaincue de l'existence d'erreurs susceptibles de contrôle ni fourni une justification quelconque à l'adjudication de frais au demandeur. La présente demande est, par conséquent, rejetée sans frais.

                « Sandra J. Simpson »         

JUGE

Ottawa (Ontario)

Le 16 mai 2003

Traduction certifiée conforme

Martine Guay, LL. L.


                          COUR FÉDÉRALE DU CANADA

                     SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

                       AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :     T-180-02

INTITULÉ :    ALLAN ARTHUR CRAWSHAW c.

PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

REQUÊTE JUGÉE SUR DOSSIER SANS COMPARUTION DES PARTIES

MOTIFS DE L'ORDONNANCE PAR MADAME LE JUGE SIMPSON

DATE DES MOTIFS :          Le 16 MAI 2003

COMPARUTIONS :

ALLAN ARTHUR CRAWSHAW                   POUR LE DEMANDEUR

KEN MANNING                     POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

ALLAN ARTHUR CRAWSHAW                   POUR LE DEMANDEUR

MORRIS ROSENBERG                     

SOUS-PROCUREUR GÉNÉRAL

MINISTÈRE DE LA JUSTICE                        POUR LE DÉFENDEUR


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