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Date : 20031217

 

Dossier : T-517-01

 

Référence : 2003 CF 1495

 

Ottawa (Ontario), le 17 décembre 2003

 

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE MacKAY

 

ENTRE :

 

                                                                  STEVE PRSA

 

                                                                                                                                         demandeur

 

                                                                             et

 

 

                                                       SA MAJESTÉ LA REINE

 

                                                                                                                                      défenderesse

 

 

                               MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE

 

 

[1]               Le demandeur demande le contrôle judiciaire d’une ordonnance annulant la décision rendue le 23 février 2003 pour le compte du ministre du revenu national par une agente de l’Agence des douanes et du revenu du Canada (l’Agence) de ne pas exercer le pouvoir discrétionnaire conféré au ministre par le paragraphe 152(4.2) de la Loi de l’impôt sur le revenu (la Loi) d’établir de nouvelles cotisations concernant l’impôt payé par le contribuable pour la période allant de 1985 à 1994 afin de lui accorder un crédit d’impôt pour personnes handicapées pour ces années.

 

[2]               En octobre 1982, le demandeur a subi de graves blessures à son travail. Il a cessé de travailler pendant un certain temps, puis, en 1984, il a recommencé à s’occuper de tâches légères, et ce, jusqu’en 1993, année où il a cessé de travailler sur les conseils de son médecin. En 1994, il a demandé pour la première fois un crédit d’impôt pour personnes handicapées, demande qu’il a répétée dans les années ultérieures. Par un jugement sur consentement rendu en 2000, les appels qu’il avait interjetés quant à ses cotisations d’impôt pour 1995 et 1996 ont été accueillis au motif qu’il avait droit au crédit d’impôt pour personnes handicapées pour ces années en vertu du paragraphe 18.3(1) de la Loi. Par la suite, il a demandé que le ministre exerce son pouvoir discrétionnaire conféré par le paragraphe 152(4.2) de la Loi d’établir de nouvelles cotisations à son égard pour la période allant de 1985 à 1994 et qu’il lui accorde le crédit d’impôt pour personnes handicapées pour chacune de ces années.

 

[3]               Sa demande a été refusée en mai 2000 et, dans le mois qui a suivi, son avocat a demandé un examen administratif de cette décision. Cet examen a été effectué pour le compte du ministre par une agente qui a demandé, et a reçu du demandeur, des rapports médicaux sur son état de santé. Selon le paragraphe 152(4.2), le ministre peut, sur demande du contribuable, établir de nouvelles cotisations concernant l’impôt, les intérêts ou les pénalités à un moment donné après la fin de la période normale de nouvelle cotisation. La Circulaire d’information 92‑3 de l’Agence prévoit que le ministre émettra un remboursement en vertu du paragraphe 152(4.2) « s’il est persuadé que le remboursement ou la réduction (du montant en souffrance) auraient été accordés si la déclaration ou la demande avait été soumise à temps ».


 

[4]               En l’espèce, l’agente qui a effectué l’examen administratif était saisie d’un rapport daté de février 1984 quant à un examen réalisé par le ministère de la Santé de l’Ontario, apparemment en rapport avec un appel de la Commission des accidents du travail. C’était après l’année au cours de laquelle le demandeur a subi des blessures et immédiatement avant les années pour lesquelles il cherche maintenant à obtenir des crédits d’impôt pour personnes handicapées. Ce rapport indiquait que l’état du demandeur ne le privait pas de la capacité normale pour une personne de son âge de marcher sans aide et il ne mentionnait aucun autre état parmi ceux qui étaient énumérés dans la Loi comme donnant ouverture à une allocation d’invalidité. L’agente chargée de l’examen a également été saisie de six certificats concernant sa demande de crédits d’impôt pour personnes handicapées. Ces certificats avaient trait à la période allant d’avril 1995 à octobre 1996 et indiquaient tous que, en 1982, le demandeur était devenu limité quant à sa capacité d’accomplir les activités courantes de la vie quotidienne mais chacun de ces certificats indiquait également qu’il était capable d’effectuer les sept activités courantes de la vie quotidienne mentionnées au paragraphe 118.4(l) de la Loi.

 

[5]               Les conditions d’admissibilité à la déficience sont énumérées dans cette dernière disposition, notamment l’incapacité d’accomplir une activité courante de la vie quotidienne, comme la marche, sans y consacrer un temps excessif. C’est cette activité parmi celles qui sont mentionnées dans la loi, c’est‑à‑dire la marche, que le demandeur prétend ne pouvoir accomplir qu’en y consacrant un temps excessif, et ce, en raison de l’accident qu’il a subi en 1982.


 

[6]               L’agente qui a examiné la demande de nouvelle cotisation du demandeur a conclu que, selon la preuve qui lui a été soumise, bien qu’il ait pu souffrir d’une douleur chronique à la suite de l’accident, sa capacité d’accomplir une activité courante de la vie quotidienne, telle que définie dans la loi, n’a pas été limitée de façon marquée pendant les années en litige. Cette conclusion a été acceptée et le demandeur a été informé que sa demande de nouvelle cotisation avait été refusée. C’est cette décision qui a mené à la présente demande de contrôle judiciaire.

 

[7]               Le demandeur prétend que l’agente qui a examiné sa demande de nouvelle cotisation a commis une erreur et n’a pas examiné la preuve qui lui a été soumise pour démontrer que la capacité du demandeur d’accomplir une activité courante de la vie quotidienne, notamment la marche, était limitée de façon marquée parce qu’il devait consacrer un temps excessif pour accomplir cette activité courante. Il est allégué que l’expression « un temps excessif » pour accomplir une activité courante de la vie quotidienne doit être interprétée selon le sens auquel elle est utilisée au quotidien, c’est‑à‑dire plus de temps qu’il n’en faut habituellement aux personnes normales.

 

[8]               La défenderesse prétend que la norme de contrôle qui doit être appliquée à l’examen de l’exercice du pouvoir discrétionnaire du ministre en vertu des paragraphes de la Loi est celle du caractère manifestement déraisonnable.

 

[9]               La défenderesse prétend qu’il est clair que la décision qui fait l’objet du contrôle n’est de toute évidence pas manifestement déraisonnable. De plus, la défenderesse prétend que le ministre a observé les principes de l’équité procédurale et n’a pas commis d’erreur de droit aux termes du paragraphe 18.1(4) de la Loi sur la Cour fédérale en rendant sa décision.

 

[10]           La défenderesse souligne le fait que, lors de deux examens effectués par le ministre, le demandeur a eu l’occasion de présenter des observations et de soumettre les documents pertinents. L’Agence a examiné attentivement l’ensemble des faits dont le décideur a été saisi ainsi que les lignes directrices formulées pour le guider dans l’exercice du pouvoir discrétionnaire du ministre prévu au paragraphe 152(4.2) de la Loi avant qu’il n’exerce le pouvoir discrétionnaire de refuser le redressement recherché par le demandeur. Par conséquent, la défenderesse prétend que le demandeur n’a mentionné aucun motif qui justifierait l’intervention de la Cour.

 

[11]           Il est bien établi que lorsque le pouvoir discrétionnaire du ministre a été exercé de bonne foi, en conformité avec les principes de la justice naturelle et que l’on ne s’est fondé sur aucune considération non pertinente ou étrangère à l’objet de ce pouvoir discrétionnaire accordé par la loi, la Cour ne doit pas intervenir dans l’exercice de ce pouvoir discrétionnaire même si elle aurait exercé ce pouvoir discrétionnaire d’une manière différente si la responsabilité lui en avait incombé. En d’autres mots, sauf si la Cour est convaincue que la décision est manifestement déraisonnable, elle n’interviendra pas.


 

[12]           Lorsque la présente affaire a été entendue à Toronto le 10 juin 2003, la Cour, après avoir entendu les avocats des deux parties, dans l’intérêt de la justice, a ajourné les procédures afin de permettre au nouvel avocat représentant le demandeur de recueillir des éléments de preuve supplémentaires à l’appui de la prétention du demandeur et que ces renseignements soient appréciés dans un délai fixe et afin de permettre que des observations supplémentaires soient par la suite présentées par les parties. Cette mesure inhabituelle a été prise compte tenu de la valeur limitée de la demande pendante du demandeur et de sa demande que du temps supplémentaire lui soit accordé afin qu’il puisse recueillir des éléments de preuve auprès de médecins qui ne pratiquent plus mais qui étaient au courant de son état dans les années 80 et au début des années 90.

 

[13]           L’avocat du procureur général a reconnu que si de nouveaux éléments de preuve concernant l’état du demandeur dans les années en litige étaient disponibles, ceux‑ci pourraient être appréciés et sa demande pourrait être réévaluée. Dans les circonstances, il me semble qu’il était plus économique pour tout le monde que l’on donne l’occasion d’apporter de nouveaux éléments de preuve et, dans le cas où il y en aurait, que l’on donne à la Cour l’occasion d’examiner les observations supplémentaires présentées par les parties si cela s’avérait nécessaire. Par conséquent, une ordonnance en ce sens a été délivrée le 10 juin 2003 et celle‑ci prévoyait que tout élément de preuve supplémentaire devrait être présenté avant la fin d’octobre 2003.


 

[14]           Par lettre datée du 5 novembre 2003, l’avocat de la défenderesse a fait savoir que ni la défenderesse, ni l’Agence n’avait reçu d’éléments de preuve supplémentaires de la part du demandeur. En l’absence d’éléments de preuve supplémentaires, la Cour conclut que le demandeur n’a pas établi que la décision en question était manifestement déraisonnable.

 

[15]           Dans les circonstances, la demande de contrôle judiciaire présentée par M. Prsa est rejetée.

 

ORDONNANCE

 

[16]           LA COUR ORDONNE que la demande de contrôle judiciaire soit rejetée.

 

 

                                                                                                                    « W. Andrew MacKay »          

Juge

 

 

OTTAWA (ONTARIO)

Le 17 décembre 2003

 

 

Traduction certifiée conforme

 

Claude Leclerc, LL.B., trad. a.

 


                                                            COUR FÉDÉRALE

                                                                             

                                             AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

DOSSIER :                                                               T-517-01

 

INTITULÉ :                                                            STEVE PRSA

et

SA MAJESTÉ LA REINE

                                                                             

LIEU DE L’AUDIENCE :                                     TORONTO (ONTARIO)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                                   LE 10 JUIN 2003

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE                         LE JUGE MACKAY

ET ORDONNANCE :                                           

 

DATE DES MOTIFS :                                           LE 17 DÉCEMBRE 2003

 

 

COMPARUTIONS :

 

Michael F. O’Connor                                                POUR LE DEMANDEUR                

Kevin Dias                                                                 POUR LA DÉFENDERESSE                       

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

O’Connor, Zanardo                                                   POUR LE DEMANDEUR

Mississauga (Ontario)

 

Morris Rosenberg, c.r.

Sous‑procureur général du Canada                           POUR LA DÉFENDERESSE

 

 

 

                                                                             


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