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Date : 20030805

Dossier : T-1462-02

Référence : 2003 CF 952

Vancouver (Colombie-Britannique), le mardi 5 août 2003

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE CAMPBELL

ENTRE :

                                                             TYRONE BORGLUND

                                                                                                                                           demandeur

                                                                          - et -

                                                           SA MAJESTÉ LA REINE

                                                                                                                                        défenderesse

                                                                                                                           Dossier : T-1463-02

ENTRE :

                                                             SHANE PANGOWISH

                                                                                                                                           demandeur

                                                                          - et -

                                                           SA MAJESTÉ LA REINE

                                                                                                                                        défenderesse

                               MOTIFS DES ORDONNANCES ET ORDONNANCES


[1]                Le même jour, soit le 7 août 2002, à l'établissement Kent, un président indépendant (le président) a déclaré chacun des demandeurs dans les présentes demandes coupable de l'infraction disciplinaire de possession d'un objet interdit en violation de l'alinéa 40i) de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition. La question est de savoir si les décisions rendues par le président dans chacun des cas sont entachées d'une erreur de droit.           

[2]                Il est entendu que pour ce qui est de l'infraction disciplinaire de possession, on doit appliquer la norme de preuve criminelle. Des éléments de preuve qui démontrent hors de tout doute raisonnable qu'un détenu avait connaissance de la présence de l'objet interdit et qu'il avait le contrôle de l'objet en question doivent donc exister pour que la personne puisse être déclarée coupable.

[3]                Dans chacun des cas en l'espèce, les détenus concernés avouent avoir eu le contrôle d'objets contenant des objets interdits mais nient avoir eu connaissance de la présence des objets interdits. M. Borglund avoue avoir eu le contrôle d'une boîte de dentifrice contenant un pic à glace de fabrication artisanale de 7,5 pouces. En guise d'explication, M. Borglund a déclaré sous serment que la boîte de dentifrice avait été laissée dans une cellule qu'il avait occupée antérieurement par la personne avec qui il avait partagé celle-ci et qu'il l'avait emportée dans la cellule individuelle qu'il a occupée par la suite sans en vérifier le contenu. Ainsi, il reconnaît avoir eu le contrôle de la boîte de dentifrice mais nie avoir eu connaissance du contenu de celle-ci.


[4]                Pour ce qui est de M. Pangowish, une fouille de sa cellule a permis de découvrir un marqueur feutre jaune contenant une trousse hypodermique. Monsieur Pangowish reconnaît avoir eu le contrôle du marqueur feutre mais nie avoir eu connaissance de la présence de la trousse hypodermique à l'intérieur. Dans son témoignage, il a expliqué que le marqueur feutre avait été laissé dans sa cellule par l'occupant précédent.   

[5]                En statuant sur la culpabilité de M. Borglund et de M. Pangowish, le président ne s'est pas clairement prononcé sur la crédibilité des explications qu'ils avaient avancées. Toutefois, il a tiré des conclusions de droit claires dans chacun des cas. Pour ce qui est de M. Borglund, la déclaration suivante du président figure à la page 5 de la transcription :

_traduction_ Bon, je vais vous dire, pour moi, peu importe si je vous crois ou pas, c'est pas ça la question, pour moi, ce qui importe c'est simplement est-ce qu'elle était ou pas dans votre cellule, si elle y était, que vous y ayez été seul ou pas et que vous y étiez ou pas, vous savez, après qu'ils vous ont demandé de quitter la cellule et s'ils l'ont trouvée ou pas, pour moi, c'est ça la question. Par exemple, si on avait ouvert la porte de la cellule et si quelqu'un y a eu accès je pourrais, je pourrais croire qu'il est peut-être possible qu'ils l'ont introduite là, si vous étiez dans la cellule, vous êtes sorti de la cellule, ils sont entrés et ils l'ont trouvée, c'est suffisant pour moi. Je ne reviens pas sur l'ensemble de votre récit, pour moi, il s'agit simplement de savoir si elle y était à un moment précis, d'accord, et tout ce qui m'intéresse c'est si quelqu'un d'autre y a eu accès après qu'ils vous ont demandé de déménager. Si vous aviez été dans une cellule à occupation double, ça aurait pu être différent, vous étiez dans une cellule individuelle, alors je prononce un verdict de culpabilité et vous, je ne crois pas vous avoir rencontré avant, n'est-ce pas?

Pour ce qui est de M. Pangowish, la déclaration suivante du président figure à la page 8 de la transcription :

_traduction_ Monsieur Pangowish je fais mon possible, mais je ne peux pas, sans [inaudible] je vais vous dire pourquoi, en ce qui vous concerne, peu importe si vous avez avoué avoir eu possession de la trousse hypodermique ou du marqueur, que vous ayez avoué avoir eu possession de l'un ou de l'autre c'est suffisant pour moi pour croire qu'il y a eu possession et que l'accusation de possession de [inaudible] possession d'un objet interdit est le chef d'accusation.

[6]                À mon avis, le président aurait dû se prononcer d'abord sur la crédibilité de chacun des demandeurs et décider ensuite, après en être arrivé à une conclusion à ce sujet, si tous les éléments de preuve prouvaient la culpabilité hors de tout doute raisonnable. Pour pouvoir prononcer un verdict de culpabilité, le président devait déterminer clairement si la preuve appuyait une conclusion en ce sens relativement à chacun des deux éléments essentiels qui doivent être présents pour qu'une personne puisse être déclarée coupable de possession, soit la connaissance de la présence de l'objet interdit et le contrôle de l'objet interdit.

[7]                Selon moi, les deux passages précités démontrent qu'une erreur de droit a été commise parce que l'exigence fondamentale selon laquelle on doit statuer sur l'élément connaissance n'a pas été remplie. Par conséquent, je suis d'avis que les deux décisions sont entachées d'une erreur de droit.


                                        ORDONNANCE

T-1462-02

Pour ces motifs, la décision faisant l'objet du contrôle est annulée.

              « Douglas R. Campbell »              

Juge

                                        ORDONNANCE

T-1463-02

Pour ces motifs, la décision faisant l'objet du contrôle est annulée.

              « Douglas R. Campbell »              

Juge

Traduction certifiée conforme

Aleksandra Koziorowska, LL.B.


                                     COUR FÉDÉRALE

                      AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

                                                     

DOSSIER :                T-1462-02

INTITULÉ :               TYRONE BORGLUND c. SA MAJESTÉ LA REINE

DOSSIER :                T-1463-02

INTITULÉ :               SHANE PANGOWISH c. SA MAJESTÉ LA REINE

LIEU DE L'AUDIENCE :                              Vancouver (C.-B.)

DATE DE L'AUDIENCE :                            le 5 août 2003

MOTIFS DES ORDONNANCES

ET ORDONNANCES :                                              le juge Campbell

DATE DES MOTIFS :                                               le 5 août 2003

COMPARUTIONS:

Donna M. Turko                                                     POUR LES DEMANDEURS

Ward Bansley                                                          POUR LA DÉFENDERESSE

Mary Ann Barker

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER:

Donna M. Turko                                                     POUR LES DEMANDEURS

Avocate

Vancouver (C.-B.)

Morris Rosenberg                                                    POUR LA DÉFENDERESSE

Sous-procureur général du Canada


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