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     Date: 20001205

     Dossier: IMM-6233-99


Entre :

     LAURENT KOULADOUMNGAR

     Demandeur

     - et -


     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

     ET DE L'IMMIGRATION

     Défendeur



     MOTIFS DE L'ORDONNANCE


LE JUGE PINARD :

[1]      La demande de contrôle judiciaire vise une décision rendue le 12 novembre 1999 par la Section du statut de réfugié de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié (la « SSR » ) statuant que le demandeur n'est pas un réfugié au sens de la Convention, tel que défini au paragraphe 2(1) de la Loi sur l'immigration, L.R.C. (1985), ch. I-2.

[2]      Le demandeur est citoyen du Tchad et est âgé de 27 ans. Il allègue avoir une crainte bien fondée de persécution s'il retourne dans son pays en raison de ses opinions politiques, son origine ethnique (Sara) et sa religion (chrétienne).

[3]      La SSR a refusé de reconnaître au demandeur le statut de réfugié en raison de son manque de crédibilité. Elle a cité notamment les contradictions et invraisemblances suivantes à l'appui de cette conclusion :

[-]      La SSR remarque que dans son Formulaire de renseignements personnels (FRP), le demandeur raconte son histoire sous forme d'un essai socio-politique, racontant plus la situation au Tchad que ses expériences personnelles. Elle semble déterminer que cette façon d'écrire relève plus d'un essai socio-politique que d'une histoire vécue.
[-]      Au cours de son témoignage, le demandeur a indiqué que le bureau exécutif de l'Association jeunesse anti-clivage (l'AJAC) comportait 11 membres et il a pu énumérer le titre de chacun des 11 postes sans défaut. Cependant, il s'est contredit de façon importante sur les fonctions de ces 11 membres avec lesquels il aurait été associé pendant plusieurs années.
[-]      Lorsque la SSR a tenté d'établir le rôle exact du demandeur au sein de l'AJAC, il a été vague et imprécis. Il a répété à plusieurs reprises : « tout reposait sur moi » sans pouvoir expliquer pourquoi. Vu que l'exécutif comportait un président, un vice-président et un secrétaire général, la SSR a trouvé improbable que tout repose sur un simple porte-parole.
[-]      La SSR a aussi trouvé très improbable le fait que seul le demandeur aurait été ciblé par les autorités tandis que tout l'exécutif demeure toujours au Tchad, sans avoir été inquiété ou interpellé.
[-]      Le demandeur a dit que la troisième fois qu'il a été interpellé, ce fut à 6 heures du matin et qu'il fut détenu pendant trois heures. Dans son FRP, il indique qu'une grande mobilisation d'organismes non gouvernementaux chrétiens, de députés et de militants de l'AJAC ont enfin réussi à obtenir sa libération au bout de trois heures. La SSR a trouvé invraisemblable que tant de personnes aient été contactées et mobilisées en si peu de temps aux petites heures du matin.
[-]      La SSR note que l'origine ethnique et la religion n'ont pas été mentionnées au cours du témoignage. Lorsqu'elle a demandé au demandeur ce qu'il craignait, il a répondu qu'il serait arrêté et tué; il a aussi indiqué que s'il retournait, il serait moralement obligé de retourner à ses fonctions au sein de l'AJAC; cependant la SSR note qu'il a pu effectivement s'écarter de l'AJAC, puisqu'il est rendu au Canada aujourd'hui. Enfin, le demandeur a cité plusieurs pétitions, mais la SSR n'en a vu aucune trace.

[4]      Or, on sait qu'en matière de crédibilité et d'appréciation des faits, il n'appartient pas à cette Cour de se substituer au tribunal spécialisé que constitue la SSR lorsque, comme en l'espèce, la personne revendiquant le statut de réfugié fait défaut d'établir que la décision attaquée est fondée sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments disponibles. Il m'apparaît de façon générale, après révision de la preuve, que les inférences tirées par le tribunal pouvaient raisonnablement l'être (voir Aguebor c. Canada (M.E.I.), 160 N.R. 315 (C.F., Appel)).

[5]      Comme la perception de la SSR que le demandeur n'est pas crédible équivaut en fait, dans les circonstances particulières du présent cas, à la conclusion qu'il n'existe aucun élément crédible pouvant justifier sa revendication du statut de réfugié (voir l'arrêt Sheikh c. Canada (M.E.I.), [1990] 3 C.F. 238, à la page 244), la demande de contrôle judiciaire doit être rejetée.





                            

                                     JUGE

OTTAWA (ONTARIO)

Le 5 décembre 2000


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