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Date: 19971106


Dossier: IMM-4410-96

Entre:

     CHRISTIAN REINAL CARNAJAL RODRIGUEZ

     MARCELA CAROLIN MATURANA VASQUEZ

     NATHALIA LUZ CARVAJAL MATURANA

     Requérants

     - ET -

     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

     Intimé

     MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE RICHARD:


[1]      Il s'agit d'une demande d'autorisation de contrôle judiciaire à l'encontre de la décision d'un agent réviseur, Raymond Rheault, rendue le 8 novembre 1996, selon laquelle les requérants ne sont pas membres de la catégorie réglementaire des demandeurs non reconnus du statut de réfugié au Canada (ci-après DNRSRC).


[2]      Les requérants ont formulé leur demande sur la base de leur présumée appartenance à la catégorie des DNRSRC et des motifs humanitaires selon le paragraphe 6(5) de la Loi sur l'immigration (ci-après la Loi) et les articles 2 et 11 du Règlement sur l'immigration de 1978 (ci-après le Règlement). Ces dispositions se lisent comme suit:

     Paragraphe 6(5) de la Loi

     6(5) Sous réserve du paragraphe (8) mais par dérogation aux autres dispositions de la présente loi et aux règlements d'application de l'alinéa 114(1)(a), peuvent également obtenir le droit d'établissement pour des motifs d'ordre humanitaire ou d'intérêt public l'immigrant et, le cas échéant, toutes les personnes à sa charge, s'il appartient à l'une des catégories prévues aux règlements d'application de l'alinéa 114(1)(e) et satisfait aux exigences relatives à l'établissement visées à cet alinéa.         

     Paragraphe 6(8) de la Loi

     6(8) Si l'immigrant appartient à une catégorie pour laquelle les règlements prévoient que le cas de l'immigrant et de certaines ou toutes les personnes à la charge de celui-ci doit être examiné, l'immigrant et les personnes à sa charge ne peuvent se voir octroyer le droit d'établissement que si l'agent d'immigration est convaincu que l'immigrant et les personnes à sa charge dont le cas doit être examiné satisfont collectivement:         
     a) soit aux normes de sélection réglementaires visant à déterminer s'ils peuvent ou non réussir leur installation au Canada, au sens des règlements, et si oui, dans quelle mesure;         
     b) soit aux exigences relatives à l'établissement prévues par les règlements d'application de l'alinéa 114(1)e).         

     Article 11.2 du Règlement

     11.2 Sont des catégories réglementaires d'immigrants pour l'application des paragraphes 6(5) et (8) de la Loi:         

     (...)

     b) la catégorie des demandeurs non reconnus du statut de réfugié au Canada.         

     Paragraphe 2(1) du Règlement

     2(1) "demandeur non reconnu du statut de réfugié au Canada" Immigrant au Canada:         

     (...)

     c) dont le renvoi vers un pays dans lequel il peut être renvoyé l'expose personnellement, en tout lieu de ce pays, à l'un des risques suivants, objectivement identifiable, auquel ne sont pas généralement exposés d'autres individus provenant de ce pays ou s'y trouvant:         
         (i) sa vie est menacée pour des raisons autres que l'incapacité de ce pays de fournir des soins médicaux ou de santé adéquats,                 
         (ii) des sanctions excessives peuvent être exercées contre lui,                 
         (iii) un traitement inhumain peut lui être infligé.                 

[3]      L'agent réviseur a conclut que les requérants n'étaient pas membres de la catégorie réglementaire des DNRSRC au motif que leur renvoi du Canada ne les exposaient "à aucun des risques indiqués dans la définition de membre de la catégorie DNRSRC".

[4]      Dans sa lettre du 8 novembre 1996, l'agent réviseur conclut:

     J'ai étudié attentivement votre cas afin d'évaluer le risque auquel vous pourriez être exposés si vous aviez à quitter le Canada. J'ai conclu que vous ne seriez exposés à aucun des risques indiqués dans la définition de membre de la catégorie DNRSRC.         

[5]      Les requérants soutiennent d'abord qu'ils ont le droit d'obtenir des motifs écrits énonçant les raisons pour lesquelles leur demande a été rejetée. Ni la Loi, ni le Règlement imposent à l'agent réviseur l'obligation de motiver sa décision. Les requérants n'ont pas justifié l'intervention de cette Cour pour ce motif.


[6]      Les requérants, à l'audience de leur requête, ont soutenu que l'agent réviseur n'avait pas tenu compte d'un renseignement pertinent en arrivant à sa décision le 8 novembre 1996.

[7]      Les notes de l'agent réviseur du 8 novembre 1996 ont été produites par le tribunal. Ce sont les notes de M. Rheault préparées par lui alors qu'il évaluait les risques de retour des requérants.

[8]      Ces notes attestent qu'il n'y a pas de faits nouveaux qui puissent attester d'un risque objectivement identifiable pour monsieur Rodriguez. Pour ce qui est de madame Rodriguez, l'agent réviseur atteste qu'il n'existe aucun fait concret à l'appui de ses assertions et qu'elle ne dit pas en quoi personnellement elle serait à risque.

[9]      Or, le dossier du tribunal révèle que l'avocat des requérants a remis à l'agent réviseur dans la journée du 8 novembre 1996 une documentation sous forme d'un affidavit avec pièces à l'appui de madame Rodriguez. Dans cet affidavit, elle déclare qu'elle a reçu des menaces par téléphone le 15 juin 1995.

[10]      Dans une lettre en date du 12 novembre 1996, produite par le tribunal comme faisant partie de son dossier concernant la décision négative de monsieur Rheault, l'agent réviseur informe les requérants comme suit:

     La présente confirme ma lettre du 8 novembre dernier dans laquelle je vous avisais qu'après étude de vos dossiers, j'avais conclu que vous ne seriez exposés à aucun des risques indiqués dans la définition de membre de la catégorie DNRSRC. J'en suis venu à cette conclusion après étude de la documentation complémentaire produite par votre avocat le 8 novembre 1996.         

[11]      Cette lettre reconnaît que la documentation supplémentaire a été produite le 8 novembre 1996. Bien que les notes de l'agent réviseur affirment qu'aucun fait nouveau a été présenté à l'agent réviseur le 8 novembre 1996, cette lettre affirme qu'on en a tenu compte en arrivant à la décision négative.

[12]      Cette lettre a été produite et versée au dossier du tribunal après la prise de décision. Elle n'est pas accompagnée par un affidavit expliquant les circonstances.

[13]      J'accepte que les notes de l'agent ne sont pas une transcription du processus d'évaluation et ne sont pas des motifs. Toutefois, il en demeure que l'agent, alors qu'il faisait son analyse du risque, a noté catégoriquement qu'aucun nouveau fait lui a été présenté.

[14]      Dans ces circonstances, la demande des requérants est accueillie, la décision de l'agent réviseur est annulée et il est ordonné qu'une nouvelle évaluation de risque, comme prévu par la Loi, soit tenue par un autre agent réviseur.


[15]      Aucune question ne sera certifiée.

     __________________________

     Juge

Ottawa (Ontario)

Le 6 novembre 1997


COUR FEDERALE DU CANADA SECTION DE PREMIERE INSTANCE

NOMS DES AVOCATS ET DES AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

N º DE LA COUR : IMM-4410-96

INTITULE : CHRISTIAN REINAL CARNAJAL RODRIGUEZ ET AL C. MCI

LIEU DE L'AUDIENCE : MONTREAL (QUEBEC)

DATE DE L'AUDIENCE : LE 14 OCTOBRE 1997

MOTIFS DE L'ORDONNANCE DE L'HONORABLE JUGE RICHARD EN DATE DU 6 NOVEMBRE 1997

COMPARUTIONS

MICHEL LE BRUN POUR LA PARTIE REQUERANTE

JOSEE PAQUIN POUR LA PARTIE INTIMEE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

M. George Thomson POUR LA PARTIE INTIMEE Sous-procureur general du Canada

MICHEL LE BRUN POUR LA PARTIE REQUERANTE MONTREAL (QUEBEC)

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