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Date : 20000517


Dossier : IMM-1162-99

OTTAWA (ONTARIO), LE 17 MAI 2000

DEVANT : MONSIEUR LE JUGE PINARD

ENTRE :


SAM RACK KIM


demandeur


et


LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L"IMMIGRATION


défendeur



ORDONNANCE


     La demande de contrôle judiciaire de la décision en date du 22 février 1999 de Mme S. M. Lopez, agente des visas au consulat général du Canada, à Detroit (Michigan), est rejetée.


                             Yvon Pinard                                          Juge


Traduction certifiée conforme

Martine Brunet, LL.B.





Date : 20000517


Dossier : IMM-1162-99


ENTRE :



SAM RACK KIM



demandeur



et



LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L"IMMIGRATION



défendeur



MOTIFS DE L"ORDONNANCE


LE JUGE PINARD

[1]      Le demandeur sollicite le contrôle judiciaire d"une décision par laquelle Mme S.M. Lopez, agente des visas au consulat général du Canada à Detroit (Michigan), a refusé le 22 février 1999 la demande qu"il avait présentée en vue de résider en permanence au Canada.

[2]      Le demandeur a sollicité le droit d"établissement au Canada dans la catégorie des travailleurs autonomes au consulat général du Canada, à Detroit, par l"entremise du Service de traitement centralisé, au consulat du Canada, à Buffalo. Sa demande comprenait sa conjointe et trois enfants à titre de personnes à sa charge.

[3]      Le demandeur a été interrogé au consulat du Canada, à Detroit, le 19 février 1997. Au moment de l"entrevue, il tenait deux commerces au Canada, une buanderette et un mini-marché. En 1997, le demandeur a vendu ces entreprises et a investi ses capitaux dans un dépanneur, à Kitchener (Ontario). Il est propriétaire du magasin, où il travaille avec sa conjointe.

[4]      Le 18 décembre 1998, l"agente des visas a reçu un document montrant que le demandeur et sa conjointe faisaient l"objet d"accusations criminelles en Corée. De plus, selon les notes du 7 octobre 1998 inscrites dans le CAIPS, l"agente des visas a été mise au courant d"accusations en instance qui avaient été portées contre la conjointe du demandeur au Canada. L"agente des visas n"a pas transmis ces renseignements au demandeur ou à son avocat.

[5]      Dans sa lettre du 22 février 1999, l"agente des visas a énoncé les motifs sur lesquels elle se fondait pour refuser la demande de résidence permanente du demandeur :

[TRADUCTION]
     [...]
     Conformément au paragraphe 9(3) de la Loi sur l"immigration de 1978, on vous a demandé de fournir un relevé de la valeur nette de toutes provenances lors de l"entrevue du 19 février 1997 et subséquemment lors d"une conversation téléphonique avec votre représentant le 13 mai 1997.
     Dans ma lettre du 20 janvier 1999, j"ai de nouveau demandé ce document, puisque vous n"aviez pas répondu. À ce jour, vous ne vous êtes pas conformé à mes demandes. Ce relevé aurait indiqué vos qualités aux fins de la sélection à titre d"immigrant au Canada. La télécopie que votre représentant a envoyée le 19 février 1999 n"est pas conforme à ma demande car il n"y est pas fait état de vos dettes de toutes provenances. Il n"y est pas non plus fait état de vos actifs de toutes provenances. Dans ma lettre du 20 janvier 1999, je vous ai informé que ces documents étaient nécessaires et que votre demande serait refusée si je ne les recevais pas avant le 20 février 1999.

     Étant donné que vous n"avez pas observé les dispositions du paragraphe 9(3) de la Loi, vous appartenez à la catégorie non admissible visée à l"alinéa 19(2)d ) de la Loi en ce sens que vous ne vous êtes pas conformé aux dispositions de la Loi et du Règlement.

     J"ai donc refusé votre demande. Dans l"avenir, si vous voulez présenter une nouvelle demande, vous serez tenu de payer de nouveaux frais de traitement. Toute nouvelle demande sera examinée conformément à la Loi sur l"immigration et aux règlements en vigueur au moment de sa présentation.

     [...]

[6]      Il s"agit uniquement de savoir si, en prenant sa décision, l"agente des visas s"est fondée sur la preuve extrinsèque d"accusations criminelles portées contre le demandeur et sa conjointe. Dans l"affirmative, l"omission d"informer le demandeur de l"existence de cette preuve violerait l"obligation d"équité qui existe envers le demandeur.

[7]      Aux fins de cette demande, les dispositions suivantes de la Loi sur l"immigration, L.R.C. (1985), ch. I-2, (la Loi), sont particulièrement pertinentes :

9. (3) Every person shall answer truthfully all questions put to that person by a visa officer and shall produce such documentation as may be required by the visa officer for the purpose of establishing that his admission would not be contrary to this Act or the regulations.


19. (1) No person shall be granted admission who is a member of any of the following classes:

[. . .]

(c.1) persons who there are reasonable grounds to believe

     (i) have been convicted outside Canada of an offence that, if committed in Canada, would constitute an offence that may be punishable under any Act of Parliament by a maximum term of imprisonment of ten years or more, or
     (ii) have committed outside Canada an act or omission that constitutes an offence under the laws of the place where the act or omission occurred and that, if committed in Canada, would constitute an offence that may be punishable under any Act of Parliament by a maximum term of imprisonment of ten years or more,

except persons who have satisfied the Minister that they have rehabilitated themselves and that at least five years have elapsed since the expiration of any sentence imposed for the offence or since the commission of the act or omission, as the case may be.

[. . .]

(2) No immigrant and, except as provided in subsection (3), no visitor shall be granted admission if the immigrant or visitor is a member of any of the following classes:

[. . .]

(d) persons who cannot or do not fulfil or comply with any of the conditions or requirements of this Act or the regulations or any orders or directions lawfully made or given under this Act or the regulations.

9. (3) Toute personne doit répondre franchement aux questions de l'agent des visas et produire toutes les pièces qu'exige celui-ci pour établir que son admission ne contreviendrait pas à la présente loi ni à ses règlements.



19. (1) Les personnes suivantes appartiennent à une catégorie non admissible :

[. . .]

c.1) celles dont il y a des motifs raisonnables de croire qu'elles ont, à l'étranger :

     (i) soit été déclarées coupables d'une infraction qui, si elle était commise au Canada, constituerait une infraction qui pourrait être punissable, aux termes d'une loi fédérale, d'un emprisonnement maximal égal ou supérieur à dix ans, sauf si elles peuvent justifier auprès du ministre de leur réadaptation et du fait qu'au moins cinq ans se sont écoulés depuis l'expiration de toute peine leur ayant été infligée pour l'infraction,
     (ii) soit commis un fait - acte ou omission - qui constitue une infraction dans le pays où il a été commis et qui, s'il était commis au Canada, constituerait une infraction qui pourrait être punissable, aux termes d'une loi fédérale, d'un emprisonnement maximal égal ou supérieur à dix ans, sauf si elles peuvent justifier auprès du ministre de leur réadaptation et du fait qu'au moins cinq ans se sont écoulés depuis la commission du fait;

(2) Appartiennent à une catégorie non admissible les immigrants et, sous réserve du paragraphe (3), les visiteurs qui :

[. . .]

d) soit ne se conforment pas aux conditions prévues à la présente loi et à ses règlements ou aux mesures ou instructions qui en procèdent, soit ne peuvent le faire.

[8]      Les notes du 19 janvier 1999 inscrites dans le CAIPS se lisent comme suit :

[TRADUCTION]

IL M"EST IMPOSSIBLE DE SAVOIR SI LES DETTES ONT ÉTÉ ACQUITTÉES EN CORÉE, COMPTE TENU EN PARTICULIER DES ACCUSATIONS DONT ILS FONT L"OBJET.

Les notes inscrites dans le CAIPS le 20 janvier 1999 disent ce qui suit :

[TRADUCTION]

J"AI REFUSÉ LA DEMANDE AUJOURD"HUI POUR INOBSERVATION. DANS LE DERNIER ÉTAT FINANCIER DU 11 FÉVRIER 1999, IL N"EST PAS FAIT MENTION DES DETTES OU OBLIGATIONS DE TOUTES PROVENANCES.

JE N"AI PAS MENTIONNÉ LES ACCUSATIONS CRIMINELLES DONT LES DEMANDEURS FAISAIENT L"OBJET CAR JE N"AI PAS EU LA POSSIBILITÉ DE LEUR EN PARLER, MAIS J"AI ÉGALEMENT DES MOTIFS RAISONNABLES DE CROIRE QU"ILS AURAIENT PEUT-ÊTRE COMMIS DES INFRACTIONS AU SENS DE L"ALINÉA 19(1)c. 1).

Cependant, l"agente des visas déclare, au paragraphe 14 de son affidavit, qu"elle n"a pas tenu compte de la preuve des accusations criminelles :

[TRADUCTION]

[...] Les renseignements sur la criminalité possible n"ont pas servi de fondement à ma décision puisque, à ce moment-là, je cherchais uniquement à déterminer si le demandeur satisfaisait aux critères de sélection applicables aux demandeurs travaillant à leur compte. Je n"ai pas encore déterminé si le demandeur était peut-être inadmissible par suite de la perpétration d"une infraction. J"aurais uniquement abordé la question si le demandeur avait passé l"étape de la sélection et après lui avoir donné la possibilité de réfuter les renseignements que j"avais reçus.

[9]      Dans l"arrêt Chiu Chee To c. Ministre de l"Emploi et de l"Immigration (22 mai 1996), A-172-93, la Cour d"appel fédérale a énoncé la norme de contrôle à appliquer aux décisions discrétionnaires prises par les agents des visas à l"égard des demandes d"immigration. Cette norme est la même que celle qui a été adoptée par la Cour suprême du Canada dans l"arrêt Maple Lodge Farms c. Gouvernement du Canada , [1982] 2 R.C.S. 2, où le juge MacIntyre a dit ceci, aux pages 7 et 8 :

[...] C"est aussi une règle bien établie que les cours ne doivent pas s"ingérer dans l"exercice qu"un organisme désigné par la loi fait d"un pouvoir discrétionnaire simplement parce que la cour aurait exercé ce pouvoir différemment si la responsabilité lui en avait incombé. Lorsque le pouvoir discrétionnaire accordé par la loi a été exercé de bonne foi et, si nécessaire, conformément aux principes de justice naturelle, si on ne s"est pas fondé sur des considérations inappropriées ou étrangères à l"objet de la loi, les cours ne devraient pas modifier la décision. [...]

[10]      J"ai tenu compte de la déclaration claire et catégorique précitée que l"agente des visas a faite dans son affidavit, du fait que l"agente des visas n"a pas été contre-interrogée au sujet de cette déclaration, du fait que sa décision indique clairement que la demande a été rejetée parce que le demandeur avait omis de fournir les documents qu"elle avait demandés, de sorte qu"il ne se conformait pas aux dispositions du paragraphe 9(3) de la Loi, et par conséquent, du fait que le demandeur n"a pas satisfait à l"obligation qui lui incombait d"établir que l"agente des visas s"était fondée sur la preuve des accusations criminelles en prenant sa décision; la demande de contrôle judiciaire est rejetée.





                             Yvon Pinard                                          Juge


OTTAWA (ONTARIO)

Le 17 mai 2000


Traduction certifiée conforme

Martine Brunet, LL.B.

COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE


AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


No DU DOSSIER :                  IMM-1162-99

INTITULÉ DE LA CAUSE :          SAM RACK KIM c. LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L"IMMIGRATION

LIEU DE L"AUDIENCE :              TORONTO (ONTARIO)


DATE DE L"AUDIENCE :              LE 4 AVRIL 2000

MOTIFS DE L"ORDONNANCE DU JUGE PINARD EN DATE DU 17 MAI 2000.


ONT COMPARU :

BARBARA JACKMAN                      POUR LE DEMANDEUR
GODWIN FRIDAY                          POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

JACKMAN, WALDMAN ET ASSOCIÉS              POUR LE DEMANDEUR

TORONTO (ONTARIO)

MORRIS ROSENBERG                      POUR LE DÉFENDEUR

SOUS-PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA


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