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Date : 20020806

Dossier : IMM-583-01

Toronto (Ontario), le mardi 6 août 2002

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE GIBSON

ENTRE :

                                                            LUBOVA BATMANOVA

                                                                                                                                                  demanderesse

                                                                              - et -

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L'IMMIGRATION

défendeur

ORDONNANCE

La présente demande de contrôle judiciaire est rejetée.

Aucune question n'est certifiée.

« Frederick E. Gibson »        

ligne

Juge                       

Traduction certifiée conforme

Martine Guay, LL. L.


Date : 20020806

Dossier : IMM-583-01

Référence neutre : 2002 CFPI 841

ENTRE :

                                                            LUBOVA BATMANOVA

                                                                                                                                                  demanderesse

                                                                              - et -

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L'IMMIGRATION

défendeur

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE GIBSON

Introduction

[1]                 Ces motifs résultent d'une demande de contrôle judiciaire d'une décision d'une agente d'immigration désignée (l'agente) au Haut-commissariat du Canada à Londres, en Angleterre, dans laquelle l'agente a rejeté la demande de résidence permanente au Canada faite par le conjoint de la demanderesse. La décision faisant l'objet du contrôle est datée du 21 décembre 2000.


[2]                 La demanderesse a été inscrite comme personne à charge de son conjoint dans la demande de résidence permanente de celui-ci. J'ai certains doutes au sujet de la qualité pour agir de la demanderesse pour déposer la présente demande au lieu d'une demande de contrôle judiciaire relativement au défaut du défendeur de s'occuper de la demande de résidence permanente au Canada qui a été déposée pour elle en même temps que celle de son conjoint. Cependant, comme cette question n'a été ni soulevée par l'avocat du défendeur, ni poursuivie lors de l'audience quand j'ai évoqué ma préoccupation, je ne m'en occuperai pas davantage.

Contexte

[3]                 La demanderesse et son conjoint sont apparemment résidents de Lettonie. Dans l'affidavit de l'agente, le conjoint de la demanderesse est décrit comme [Traduction] « apatride » . Chacun d'eux a formulé une demande de résidence permanente au Canada, dans la catégorie des indépendants. Le conjoint de la demanderesse a indiqué comme profession projetée au Canada [Traduction] « programmeur d'ordinateur » . La demanderesse a indiqué [Traduction] « programmeuse-analyste » comme profession projetée au Canada. Les deux demandes ont été transmises ensemble au Haut-commissariat du Canada à Londres accompagnées d'une simple lettre provenant de conseillers en immigration au Canada indiquant que chacun faisait une demande en tant que [Traduction] « demandeur principal » . Dans chacun des cas, le demandeur principal prétendait avoir son conjoint et leurs deux enfants en tant que personnes à charge. Un droit de demande a été payé.


[4]                 Le conjoint de la demanderesse a été invité à une entrevue. La demanderesse, dans son affidavit déposé dans la présente cause, atteste de ce qui suit :

[Traduction]

À un moment donné à la mi-novembre 2000, notre représentante, Jane Katkova, nous a avisés de la date d'entrevue, fixée par le Haut-commissariat du Canada pour mon mari au 7 décembre 2000; on m'a demandé d'accompagner mon mari à l'entrevue comme accompagnant le membre à charge de la famille de mon mari [sic] de plus de 19 ans.

Le 7 décembre 2000, nous nous sommes rendus à l'entrevue personnelle à Riga, en Lettonie avec l'agente d'immigration désignée du Haut-commissariat du Canada à Londres, J. P. Montgomery.

Au cours de l'entrevue, j'ai clairement indiqué à l'agente qui conduisait l'entrevue que je demandais la résidence permanente au Canada en tant que demanderesse principale [...]                                        [Non souligné dans l'original.]

[5]                 Par contre, en réponse à la dernière déclaration citée de l'affidavit de la demanderesse, l'agente, dans son affidavit déposé dans la présente cause, a attesté :

[TRADUCTION]

[...] la présente demanderesse ne m'a jamais indiqué qu'elle faisait une demande en tant que demanderesse principale.

La demanderesse [...] a eu l'occasion, durant l'entrevue, d'indiquer qu'elle devait être évaluée en tant que demanderesse principale. Cependant, ni elle ni son mari (qui a également eu le choix de l'indiquer) n'ont demandé que je le fasse.

  

[6]                 Ni la demanderesse ni l'agente n'ont été contre-interrogées concernant leurs affidavits respectifs.


[7]                 La lettre de la décision rejetant la demande de résidence permanente au Canada du conjoint de la demanderesse, la décision faisant l'objet du contrôle, est datée de deux semaines suivant la date de l'entrevue.

Les questions en litige

[8]                 Les questions en litige concernant la présente demande de contrôle judiciaire sont identifiées dans le mémoire des faits et du droit déposé au nom de la demanderesse dans les termes suivants :

[Traduction]

Est-ce que l'agente des visas a commis une erreur en raison du fait qu'elle n'a pas évalué la demanderesse [...] en tant que demanderesse principale en dépit du fait qu'il était évident, à partir des documents présentés par la demanderesse, qu'elle en avait précisément fait la demande?

Est-ce que l'agente des visas a contrevenu à son devoir d'agir équitablement envers la demanderesse en raison du fait que, au cours de l'entrevue, [l'agente des visas a été mise au courant que] la demanderesse [...] demandait la résidence permanente au Canada en tant que demanderesse principale dans la profession de programmeuse d'ordinateur, mais qu'elle n'a pas effectué pleinement [une évaluation appropriée de la demande de la demanderesse en tant que demanderesse principale]? De plus, une fois qu'on lui a demandé que les deux demandeurs adultes soient évalués en tant que demandeurs principaux, le devoir d'agir équitablement exigeait-il que l'agente des visas effectue les évaluations telles que demandées?

Analyse

[9]                 Je suis convaincu que l'on devrait répondre à toutes les questions en litige par la négative.


[10]            Comme je l'ai mentionné précédemment, les affidavits de la demanderesse et de l'agente sont contradictoires quant à savoir si l'on avait demandé précisément à l'agente, lors de l'entrevue, d'évaluer la demanderesse en tant que demanderesse principale. Comme je l'ai également mentionné précédemment, ni la demanderesse ni l'agente n'avaient été contre-interrogées. Dans la décision Hannan c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration)[1], Madame le juge Reed, faisant des commentaires concernant une contradiction semblable dans un témoignage sous serment, a écrit :

Lorsque de telles divergences se présentent, en particulier lorsque la description de chacun doit être appréciée sur la base de transcriptions de contre-interrogatoires, il faut chercher à obtenir des éléments de preuve antérieurs au litige qui oppose les parties pour déterminer s'ils étayent l'une ou l'autre version de ce qui s'est produit.

Je suis convaincu que les commentaires du juge Reed s'appliquent, avec même plus de force, lorsqu'on n'a pas l'avantage d'avoir des transcriptions de contre-interrogatoires afin de nous aider dans l'appréciation de la contradiction.

[11]            Je suis convaincu que la version des événements de l'agente est plus compatible avec les notes du STIDI relatives à l'entrevue qui se retrouvent dans le dossier du tribunal. L'agente atteste dans son affidavit :

[Traduction]


J'ai examiné les notes du STIDI que j'ai inscrites dans cette affaire et qui sont contenues dans le dossier certifié du tribunal et je confirme qu'elles reflètent franchement et avec exactitude mon souvenir de la demande, de l'entrevue, de mes préoccupations et de mon raisonnement à cette époque. Les entrées dans le système du STIDI sont irréversibles une fois qu'elles sont enregistrées et elles sont suivies par la date de l'entrée et les initiales de la personne faisant l'entrée.

[12]            On ne m'a présenté aucun soutien équivalent en rapport avec la position de la demanderesse.

[13]            Je préfère la version des événements attestée par l'agente. Bien que les documents déposés par la demanderesse aient fait clairement ressortir qu'elle, tout comme son conjoint, formulait une demande en tant que demanderesse principale, la demanderesse était au courant que l'entrevue à laquelle elle s'est rendue concernait la demande de son conjoint et qu'elle n'y allait qu'en tant que personne à charge. En l'absence d'une insistance précise de la part de la demanderesse ou de son conjoint ou des deux lors de l'entrevue afin que sa portée soit étendue pour inclure l'examen de la demande de la demanderesse en tant que demanderesse principale, je suis convaincu que l'agente n'était pas tenue d'étendre ainsi la portée de l'entrevue. En fait, même si on avait insisté pour qu'elle le fasse, je suis convaincu que l'agente avait le pouvoir discrétionnaire de le faire ou de ne pas le faire. Elle aurait eu tout à fait le loisir de réserver pour une entrevue séparée l'examen de la demande de la demanderesse en tant que demanderesse principale.

[14]            Je suis convaincu que la très brève analyse qui précède est suffisante pour répondre aux deux questions en litige et, comme je l'ai indiqué précédemment, pour justifier des réponses négatives auxdites questions.


[15]            L'avocat de la demanderesse insiste pour que je suive la décision de mon collègue, Monsieur le juge O'Keefe, dans la décision Rozario c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration)[2]. Je suis convaincu que l'on peut distinguer cette décision d'après les faits qui lui sont propres. Aux paragraphes 13 et 14 de ses motifs, le juge O'Keefe écrit en partie :

Notre Cour a déjà décidé que, si un agent des visas assume la responsabilité d'apprécier un immigrant, l'équité procédurale exige qu'il effectue une « appréciation complète et non pas une appréciation sommaire » : [...]

Je suis d'accord avec cette approche. [...]                                           [référence omise]

Le juge O'Keefe a ensuite conclu que, sur les faits qui lui avaient été présentés, l'agente avait entrepris une évaluation d'un conjoint, dans le cadre de deux demandes de la part de conjoints dans un contexte semblable à l'espèce et qu'elle n'avait pas effectué une évaluation complète. Il a, par conséquent, accueilli la demande de contrôle judiciaire dont il était saisi. Des documents qui m'ont été présentés, je conclus qu'aucune évaluation de la demande de la demanderesse en tant que demanderesse principale n'a jamais été entreprise par l'agente dont la décision fait l'objet du contrôle. De ce fait, la question du caractère complet de l'évaluation de l'agente ne se pose pas.

Conclusion

[16]            Par conséquent, la présente demande de contrôle judiciaire sera rejetée.


Certification d'une question

[17]            L'avocat de la demanderesse a insisté pour que la question suivante soit certifiée :

[Traduction]

Est-ce que le paragraphe 8(1) du Règlement sur l'immigration de 1978 interdit à un agent des visas d'évaluer à la fois l'immigrant et le conjoint de l'immigrant, lorsque l'immigrant a demandé précisément à l'agent des visas d'évaluer à la fois l'immigrant et le conjoint de l'immigrant?

L'avocat du défendeur s'est insurgé contre la certification d'une question. La question posée au nom de la demanderesse en vue d'une certification n'est tout simplement pas soulevée par les faits de la présente affaire, comme je l'ai déjà déterminé. Il n'y a certainement pas eu de « demande précise » faite à l'agente au cours de l'entrevue et toute « demande précise » implicite dans les demandes et la documentation connexe déposées à l'origine pouvait être traitée dans des entrevues séparées. Bien sûr, la lettre convoquant l'entrevue a clairement fait ressortir que l'entrevue prévue était en rapport avec la demande du conjoint de la demanderesse et non avec la propre demande de la demanderesse.

[18]            Aucune question ne sera certifiée.

      « Frederick E. Gibson »      

Juge                       

Toronto (Ontario)

Le 6 août 2002

Traduction certifiée conforme

Martine Guay, LL. L.


COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                            IMM-583-01

INTITULÉ :                                           LUBOVA BATMANOVA

demanderesse

- et -

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

défendeur

LIEU DE L'AUDIENCE :                   TORONTO (ONTARIO)

DATE DE L'AUDIENCE :                 LE JEUDI 1er AOÛT 2002

MOTIFS DE L'ORDONNANCE PAR MONSIEUR LE JUGE GIBSON

DATE DES MOTIFS :                        LE MARDI 6 AOÛT 2002

COMPARUTIONS :

Hart Kaminker                                     Pour la demanderesse

Brad Gotkin                                        Pour le défendeur

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Kranc & Associates                           Pour la demanderesse

Avocats

425, avenue University

Bureau 500

Toronto (Ontario)

M5G 1T6

Morris Rosenberg                                 Pour le défendeur

Sous-procureur général du Canada


COUR FÉDÉRALE DU CANADA

                                   Date : 20020806

             Dossier : IMM-583-01

ENTRE :

LUBOVA BATMANOVA

demanderesse

- et -

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

                                                défendeur

                                                              

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

                                                              



1. [2000] A.C.F. no 151 (C.F. 1re inst.).

2. [2000] A.C.F. no 1261 (C.F. 1re inst.).

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