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                                                                 Date : 20031107

                                                             Dossier : IMM-5013-02

                                                          Référence : 2003 CF 1289

Entre :

                         Kally KALAMBAY ILUNGA

                                                                Demandeur

                                  - et -

                     Le Ministre de la Citoyenneté

                          et de l'Immigration

                                                                Défendeur

                         MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE PINARD :

[1]    Il s'agit ici d'une demande de contrôle judiciaire d'une décision de la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié (la « CISR » ) rendue le 20 septembre 2002, statuant que le demandeur n'est pas un « réfugié » au sens de la Convention, ni une « personne à protéger » tel que défini aux paragraphes 96 et 97 respectivement de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, c. 27.


[2]    Le demandeur est citoyen de la République démocratique du Congo (la « RDC » ). Il allègue avoir une crainte bien fondée de persécution advenant son retour dans son pays de citoyenneté du fait d'opinions politiques qui lui sont imputées et en raison de sa nationalité. Le demandeur allègue aussi être une personne à protéger parce qu'il risque dtre soumis à la torture, à une menace à sa vie ou de subir des traitements ou des peines cruelles ou inusitées s'il retourne en RDC.

[3]    La CISR conclut que le demandeur n'est pas un réfugié ni une personne à protéger, au motif que le témoignage du demandeur n'est pas crédible. La CISR fournit les motifs suivants à l'appui de sa décision :

-     les notes au point d'entrée et la déclaration olographe du demandeur ne mentionnent pas qu'il est condamné à mort. Cependant, la condamnation à mort est clairement détaillée dans le Formulaire de renseignements personnels ( « FRP » ) du demandeur. Cette contradiction démontre une exagération qui porte irrévocablement atteinte à la crédibilité de ce dernier;

-     suite à la première arrestation du 8 janvier, le demandeur allègue que son patron a obtenu la mainlevée du camion saisi. Selon la CISR, il est invraisemblable que le camion ait été retourné au patron lorsqu'on sait que l'armée avait un grand besoin de camions et que cette saisie était appuyée par un décret loi;

-     jusqu'au 15 mars 2001, le demandeur a pu vivre en toute liberté et exercer son travail sans être incommodé en raison de sa physionomie rwandaise, et ce, malgré le fait que le président Kabila invitait la population congolaise à chasser les Rwandais du pays dès le mois d'août 1998;

-      lvasion du demandeur de la prison de Dilala à Kolwezi 21 et du pays avec l'aide du « fameux blanc » est invraisemblable. Il est aussi invraisemblable que cet homme ait entrepris les démarches nécessaires afin de renouveler le permis de conduire du demandeur;

-     le demandeur n'a produit aucune preuve matérielle qui témoignerait de son voyage et de l'exactitude de ses prétentions. Selon la CISR, l'absence de cette preuve « n'est pas sans conséquence sur une crédibilité déjà lourdement hypothéquée » ;


-     la CISR n'accorde aucune crédibilité à un avis de recherche au sujet du demandeur parce que ce document aurait été signifié à la famille de ce dernier, ce qui aurait incitécelle-ci à l'avertir qu'il est recherché.

[4]    Dans la mesure où les arguments du demandeur portent sur l'appréciation des faits et de sa crédibilité par le tribunal, il importe de rappeler qu'il n'appartient pas à cette Cour de se substituer à la CISR lorsque, comme en l'espèce, la personne revendiquant le statut de réfugié fait défaut dtablir que la décision est fondée sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments mis en preuve. Ici, le tribunal a retenu une omission majeure dans la déclaration du demandeur faite au point d'entrée, a noté des invraisemblances significatives et a constaté une absence de preuve matérielle pertinente. À mon avis, ces circonstances permettaient à ce tribunal spécialisé de raisonnablement conclure comme il l'a fait (voir Aguebor c. Canada (M.C.I.) (1993), 160 N.R. 315 (C.A.F.)).

[5]    Quant à l'argument du demandeur soulevant la partialité du tribunal, il ne tient pas pour les raisons suivantes :

a)    une lecture attentive des notes de l'audition devant le tribunal ne montre en rien que le tribunal avait l'intention de se venger du comportement du procureur du demandeur;

b)    l'expression « le fameux blanc » qu'utilise la CISR dans sa décision ne démontre aucunement « une attitude dénigrante » ou « un état d'esprit se rapprochant du racisme pur et simple » , le tribunal ne faisant que reprendre l'expression utilisée par le demandeur lui-même dans ses déclarations;

c)    le demandeur n'a pas soulevé la question de partialité à la première opportunité raisonnable, soit lors de l'audition devant la CISR (voir par exemple Nartey c. ministre de l'Emploi et de l'Immigration (20 janvier 1994), A-83-93, [1994] A.C.F. no 120 (QL)); et


d)    rien, tant dans la preuve que dans le libellé de la décision attaquée, permettrait à une personne bien renseignée, qui étudierait la question en profondeur, de façon réaliste et pratique, d'arriver à la conclusion que le tribunal était partial (voir Committee for Justice and Liberty et al. c. L'Office national de lnergie, [1978] 1 R.C.S. 369, à la page 394, juge de Grandpré).

[6]    Pour toutes ces raisons, la demande de contrôle judiciaire est rejetée.

                                                                         

       JUGE

OTTAWA (ONTARIO)

Le 7 novembre 2003


                                  COUR FÉDÉRALE

             NOMS DES AVOCATS ET PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                              IMM-5013-02

INTITULÉ :                           Kally KALAMBAY ILUNGA c. Le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration

LIEU DE L'AUDIENCE :                  Montréal (Québec)

DATE DE L'AUDIENCE :                   Le 7 octobre 2003

MOTIFS DE L'ORDONNANCE DE :     L'honorable juge Pinard

EN DATE DU :                    7 novembre 2003             

ONT COMPARU :

Me Martin Forget                      POUR LE DEMANDEUR

Me Suzon Létourneau                          POUR LE DÉFENDEUR

PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER :

M. Martin Forget                      POUR LE DEMANDEUR

Montréal (Québec)

M. Morris Rosenberg                         POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada

Ottawa (Ontario)

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