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Date : 20000828

Dossier : IMM-2821-99

Toronto (Ontario), le lundi 28 août 2000

En présence de Monsieur le juge McKeown

Entre :

LUIS MIGUEL CASTANEDA ORDONEZ

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L'IMMIGRATION

défendeur

O R D O N N A N C E

La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

     « W. P. McKeown »     

    J.C.F.C.

Traduction certifiée conforme

Bernard Olivier, B.A., LL.B.


Date : 20000828

Dossier : IMM-2821-99

ENTRE :

LUIS MIGUEL CASTANEDA ORDONEZ

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L'IMMIGRATION

défendeur

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

(Exposés à l'audition à Toronto (Ontario),

le lundi 28 août 2000)

LE JUGE MCKEOWN

[1]         Le demandeur cherche à obtenir le contrôle judiciaire d'une décision, datée du 10 mai 1999, dans laquelle la Section du statut de réfugié (la Commission) a conclu qu'il ntait pas un réfugié au sens de la Convention.

[2]         La question litigieuse est de savoir si la Commission disposait ou non dléments de preuve qui lui auraient permis de conclure que le demandeur aurait dû être exclu en vertu de l'article 1Fa) à titre de personne ayant commis un crime contre la paix, un crime de guerre ou un crime contre l'humanité.


[3]         La norme de contrôle qu'il convient d'appliquer est de savoir si la Commission avait manifestement tort (voir Cihal c. Canada (M.C.I.) 2000 A.C.F. 5 77, au paragraphe 18, C.A.F., 4 mai 2000.

[4]         Voici la partie pertinente de l'alinéa F de l'article premier de la Convention, tel qu'il est reproduit à l'annexe de la Loi :

F. Les dispositions de cette Convention ne seront pas applicables aux personnes dont on aura des raisons sérieuses de penser :

a) qu'elles ont commis un crime contre la paix, un crime de guerre ou un crime contre l'humanité, au sens des instruments internationaux élaborés pour prévoir des dispositions relatives à ces crimes;

[5]         Dans l'arrêt Ramirez c. Canada, [1992] 2 C.F. 306, le juge MacGuigan a conclu, à la p. 311, que l'expression « raisons sérieuses de penser » qui se trouve à l'article 1Fa) sous-entend une norme de preuve moins exigeante que celle de la prépondérance des probabilités.

[6]         La présente affaire est inhabituelle dans la mesure où peu dléments de preuve documentaire établissent que l'armée de l'air du Guatemala a bombardé des civils sans faire de distinctions. Cependant, le témoignage du demandeur lui-même a fourni à la Commission de sérieuses raisons de penser qu'il avait commis une infraction internationale. Voici ce qu'elle a dit:

[TRADUCTION] L'infraction internationale en cause est la suivante. La formation estime que le revendicateur a participé à des crimes de guerre pendant la période au cours de laquelle il a fait partie de l'armée de l'air du Guatemala, en entretenant sciemment des avions qui bombardaient des civils et en étant personnellement responsable du manège militaire et du chargement d'armes de guerre (roquettes, bombes et mitrailleuses) dans les avions qui bombardaient les civils. Il a témoigné oralement à cet effet.

[Voir les pages 6 et 7 des motifs]


[7]         À mon avis, la Commission pouvait inférer, sur la base du témoignage du demandeur, qu'il avait satisfait au critère énoncé dans l'arrêt Ramirez c. Canada, précité, dans lequel le juge MacGuigan a dit, à la page 317 :

De la même façon, la simple présence d'une personne sur les lieux d'une infraction ne permet pas d'établir sa participation personnelle et consciente (pas plus qu'elle n'entraînerait sa responsabilité pénale aux termes de l'article 21 du Code criminel du Canada), bien que, encore une fois, la présence jointe à d'autres faits, puisse faire conclure à une telle participation. Selon moi, le simple fait de regarder, comme c'est le cas, par exemple, lors d'exécutions publiques, sans entretenir de rapports intrinsèques avec le groupe se livrant aux actes de persécution, ne peut jamais, quelque humainement répugnant qu'il nous paraisse, constituer une forme de participation personnelle. Cependant, un associé des auteurs principaux ne pourrait jamais, à mon avis, être qualifié de simple spectateur. Les membres d'un groupe peuvent à bon droit être considérés comme des participants personnels et conscients, suivant les faits.

Je crois que, dans de tels cas, la complicité dépend essentiellement de l'existence d'une intention commune et de la connaissance que toutes les parties en cause en ont. Ce principe est conforme au droit interne (p. ex. le par. 21(2) du Code criminel) et, selon moi, il constitue la meilleure interprétation possible du droit international.

[8]         En outre, le demandeur n'a pas quitté l'armée de l'air du Guatemala à la première occasion, comme il devait le faire selon ce que le juge Reed a conclu dans la décision Penate c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration), [1994] 2 C.F. 79 (1re inst.), dans laquelle elle a dit, à la page 84 :

Selon mon interprétation de la jurisprudence, sera considéré comme complice quiconque fait partie du groupe persécuteur, qui a connaissance des actes accomplis par ce groupe, et qui ne prend pas de mesures pour les empêcher (s'il peut le faire) ni ne se dissocie du groupe à la première occasion (compte tenu de sa propre sécurité), mais qui l'appuie activement. On voit là une intention commune. Je fais remarquer que la jurisprudence susmentionnée ne vise pas les infractions internationales isolées, mais la situation où la perpétration de ces infractions fait continûment et régulièrement partie de l'opération.

[9]         Il partageait un objectif commun avec les pilotes. La Commission pouvait conclure que le demandeur [TRADUCTION] « avait participé, en tant que complice, à des crimes contre l'humanité aux termes de l'alinéa Fa) de l'article premier de la Convention » (voir page 9 des motifs).


[10]       La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

     « W. P. McKeown »     

J.C.F.C.

Toronto (Ontario)

Le 30 août 2000.

Traduction certifiée conforme

Bernard Olivier, B.A., LL.B.


COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

NO DU GREFFE :                              IMM-2821-99

INTITULÉ DE LA CAUSE :               LUIS MIGUEL CASTANEDA ORDONEZ

- c. -

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE                                                                   L'IMMIGRATION

DATE DE L'AUDIENCE :                 LE LUNDI 28 AOÛT 2000

LIEU DE L'AUDIENCE :                   TORONTO (ONTARIO)

MOTIFS D'ORDONNANCE EXPOSÉS PAR MONSIEUR LE JUGE MCKEOWN

Motifs exposés à Toronto (Ontario), le lundi 28 août 2000

ONT COMPARU :

M. Shane Watson                                                                  Pour le demandeur

M. Greg George                                                                     Pour le défendeur

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Shane Watson

Barrister & Solicitor

760, rue Brant, pièce 18B

Burlington (Ontario)

L7R 4B7                                                                                  Pour le demandeur

Morris Rosenberg

Sous-procureur général du Canada                                                 Pour le défendeur

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