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Date : 20031017

Dossiers : T-1470-99

T-1471-99

Référence : 2003 CF 1212

Ottawa (Ontario), le vendredi 17 octobre 2003

EN PRÉSENCE DE MADAME LA JUGE DAWSON

ENTRE :

                                                            NOVOPHARM LIMITED

                                                                                                                                              demanderesse

                                                                                   et

ASTRAZENECA AB et

LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

                                                                                                                                                     défendeurs

                                  MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

LA JUGE DAWSON


[1]                 Il s'agit d'appels interjetés par Novopharm Limited (Novopharm) en vertu de l'article 56 de la Loi sur les marques de commerce, L.R.C. 1985, ch. T-13 (la Loi) de deux décisions rendues par le registraire des marques de commerce (le registraire) le 14 juin 1999. Dans chacune de ces décisions, le registraire a rejeté l'opposition de Novopharm à la demande faite par AstraZeneca AB ou son prédécesseur (Astra) visant l'enregistrement d'une marque de commerce relativement à des comprimés contenant de la félodipine. La félodipine est une préparation pharmaceutique utilisée pour le traitement de l'hypertension. Une demande d'enregistrement visait des comprimés roses, ronds et biconvexes (dose de 5 mg) et l'autre visait des comprimés rouge-brun, ronds et biconvexes (dose de 10 mg).

[2]                 Le registraire a rejeté dans chaque casl'opposition de Novopharm, jugeant que sa déclaration d'opposition n'était pas présentée avec des détails suffisants pour permettre à Astra de répondre à l'allégation de Novopharm sur l'absence de caractère distinctif des marques de commerce d'Astra. Subsidiairement, le registraire a décidé qu' [traduction] « il n'y a pas d'éléments de preuve quantitatifs ni suffisamment d'éléments de preuve qualitatifs de vente ou d'usage de comprimés pharmaceutiques dont la combinaison de couleur et de forme ressemble à la marque faisant l'objet de la demande d'enregistrement » .

[3]                 En appel devant la Cour, les décisions du registraire ont d'abord été confirmées pour le motif principal. Voir (2001), 13 C.P.R. (4th) 61. Puis, en appel devant la Cour d'appel, les appels ont été accueillis et l'affaire a été renvoyée à la Section de première instance pour qu'elle soit tranchée au fond. Voir (2002), 21 C.P.R. (4th) 289. Dans les motifs renvoyant l'affaire à la Section de première instance, la Cour d'appel a conclu ce qui suit :


i)           Le registraire a commis une erreur susceptible de contrôle judiciaire en ne tenant pas compte de la preuve quand il a apprécié si la demanderesse était au fait de la nature de l'instance.

ii)          La preuve présentée au registraire remédiait aux lacunes des actes de procédure.

iii)          Quant au motif secondaire sur lequel s'est appuyé le registraire pour rejeter l'opposition, de nouveaux éléments de preuve ont été présentés devant la Section de première instance. Ceux-ci comprenaientdes éléments de preuve qualitatifs concernant des noms, des fabricants et des usages de produits ainsi que des éléments de preuve quantitatifs concernant le nombre de prescriptions servies par les pharmaciens déposants et les ventes annuelles de produits spécifiques roses et rouge-brun. Cette preuve aurait eu un effet sur les décisions du registraire de sorte que le contrôle dumotif secondaire de rejet des oppositions de Novopharm par le registraire devrait s'effectuer selon la norme de la décision correcte.


[4]                 Les parties ont déposé des mémoires additionnels lors de la nouvelle audition devant la Section de première instance. Alors qu'Astra a reconnu dans ses observations écrites que la Cour d'appel avait conclu que Novopharm s'était acquittée du fardeau de la preuve qui lui incombait, Astra a soutenu dans sa plaidoirie dans l'affaire « rouge-brun » que si Novopharm n'est autorisée à s'appuyer que sur les comprimés invoqués dans sa déclaration d'opposition, il n'y avait aucune preuve concernant les ventes du seul médicament mentionné dans la déclaration d'opposition (apo-indapamide). On a donc dit que la Cour d'appel a omis d'examiner [traduction] « si les éléments de preuve quantitatifs étaient suffisants » . En réponse, Novopharm a présenté une copie du mémoire déposé par Astra dans l'appel interjeté en Cour d'appel. Dans ce mémoire, Astra a fait valoir à la Cour d'appel le même argument qu'en l'espèce selon lequel Novopharm ne s'était pas acquittée du fardeau de la preuve qui lui incombait dans l'affaire « rouge-brun » . Dans cette situation, la conclusion de la Cour d'appel voulant que Novopharm se soit acquittée du fardeau de la preuve qui lui incombait dans l'affaire « rouge-brun » tranche la question.

[5]                 Il s'ensuit que ce qu'il faut décider en l'espèce est la question de savoir si Astra s'est acquittée du fardeau qui lui incombait d'établir que les marques de commerce projetées étaient distinctives à la date de l'opposition. Il s'agit de répondre à la question factuelle de savoir si, à la date de l'opposition, des comprimés commercialisés sous une apparence similaire à celle des comprimés de 5 mg et de 10 mg d'Astra rendent non distinctives les marques d'Astra et empêchent par conséquent l'enregistrement de la marque de commerce.

[6]                 Le mot « distinctive » est défini comme suit à l'article 2 de la Loi :



« distinctive » Relativement à une marque de commerce, celle qui distingue véritablement les marchandises ou services en liaison avec lesquels elle est employée par son propriétaire, des marchandises ou services d'autres propriétaires, ou qui est adaptée à les distinguer ainsi.

"distinctive", in relation to a trade-mark, means a trade-mark that actually distinguishes the wares or services in association with which it is used by its owner from the wares or services of others or is adapted so to distinguish them.


[7]                 Comme l'a énoncé la Cour d'appel dans l'arrêt AstraZeneca AB c. Novopharm Ltd., 2003 CAF 57 au paragraphe 16 :

[traduction] Une marque distingue véritablement en acquérant le caractère distinctif par l'emploi, ce qui lui confère un caractère distinctif en fait. Une marque qui est « adaptée à les distinguer ainsi » est une marque qui ne dépend pas de l'emploi pour son caractère distinctif, parce qu'elle possède un caractère distinctif inhérent. Une marque se composant d'un mot forgé ou inventé entre dans cette catégorie : Standard Coil Products (Canada) Ltd. c. Standard Radio Corp., [1971] C.F. 106 (1re inst.), à la page 115; The Molson Companies Limited c. Les Brasseries Carling O'Keefe du Canada Limitée, [1982] 1 C.F. 175 (1re inst.), aux pages 278 et 279.

[8]                 Les principes qui doivent être appliqués à l'examen de cette question sont les suivants :

1.          Le requérant de l'enregistrement de la marque de commerce doit satisfaire au critère à trois volets formulé par le juge Rouleau dans la décision Phillip Morris c. Imperial Tobacco Ltd. (1985), 7 C.P.R. (3d) 254 (C.F. 1re inst.), à la page 270. Voir l'arrêt AstraZeneca AB c. Novopharm, précité, au paragraphe 19. La troisième partie du critère à trois volets exige que la liaison entre la marque et le produit permette au propriétaire de la marque de distinguer son produit de celui des autres.

2.          La couleur seule n'a pas été jugée comme ayant un caractère distinctif inhérent. Voir l'arrêt AstraZeneca AB c. Novopharm, paragraphe 18.

3.          La preuve que la marque distingue véritablement n'est pas un fardeau aisé. Voir l'arrêt AstraZeneca AB c. Novopharm, paragraphe 20.


4.          Lorsque l'ingrédient actif du produit pharmaceutique n'est pas demandé comme marque de commerce et que la marque de commerce dont l'enregistrement est demandé se compose de la couleur et de la forme du comprimé, le requérant doit démontrer que la couleur et la forme distinguent le comprimé des comprimés d'autres fabricants. Voir l'arrêt AstraZeneca AB c. Novopharm, paragraphe 22.

5.          Il incombe au requérant de l'enregistrement d'une marque de commerce de démontrer que médecins, pharmaciens ou patients peuvent employer et emploient en fait la marque de commerce projetée pour choisir de prescrire, délivrer ou demander le produit. Voir Novopharm Ltd. c. Astra Aktiebolag (2000), 6 C.P.R. (4th) 16 (C.F. 1re inst.); conf. par (2001) 15 C.P.R. (4th) 327 (C.A.F.).

6.          Il n'est pas fatal à une demande que les consommateurs puissent aussi avoir recours à d'autres moyens que la marque pour identifier le produit à une seule source. Comme l'a écrit le juge Evans (maintenant juge à la Cour d'appel) dans la décision Novopharm Ltd. c. Bayer Inc. (1999), 3 C.P.R. (4th) 305 au paragraphe 79, confirmée par (2000) 9 C.P.R. (4th) 304 (C.A.F.) :

[traduction] Ainsi, bien que les pharmaciens se fient principalement au nom de marque et à d'autres indices d'identification apparaissant sur les bouteilles et l'emballage contenant le produit, ou à l'inscription sur les comprimés, laquelle ne fait pas partie de la marque, s'il ressort, selon certains éléments de preuve, qu'ils reconnaissent aussi, d'une manière significative, le produit par son apparence (à l'exception des marques inscrites sur le comprimé, parce qu'elles ne font pas partie de la marque), cette preuve peut suffire à établir le caractère distinctif de la marque.


[9]                 En l'espèce, Astra fait valoir que la couleur et la forme de ses comprimés distinguent véritablement les marchandises de celles d'autres fabricants (c'est-à-dire que la marque projetée a acquis un caractère distinctif), et aussi que la couleur et la forme sont adaptées pour distinguer les marchandises (c'est-à-dire que les marques projetées ont un caractère distinctif inhérent).

[10]            Étant donné que l'enregistrement des marques a été demandé sur la base de l'emploi projeté et qu'il n'existe pas de preuve d'emploi des comprimés roses à la date de l'opposition, Astra ne peut pas affirmer que la marque de commerce projetée relativement aux comprimés roses a acquis un caractère distinctif. En conséquence, la demande relativement aux comprimés roses repose sur la question de savoir si cette marque projetée possède un caractère distinctif inhérent.

[11]            En appliquant les principes dégagés précédemment et en étudiant avec attention la preuve qui m'a été présentée, je suis incapable de conclure que la couleur et la forme des comprimés de félodipine d'Astra de 5 mg et de 10 mg ont un caractère distinctif inhérent, ou que la marque rouge-brun a acquis un caractère distinctif de manière à distinguer les marchandises de celles des autres.


i) Caractère distinctif inhérent

[12]            En soutenant que la couleur et la forme des marques projetées ont un caractère distinctif inhérent, Astra fait valoir que ses marques sont arbitraires et que les marques arbitraires ont un caractère distinctif inhérent. Les marques sont dites arbitraires parce que la couleur et la forme ne dépendent pas de l'ingrédient actif contenu dans les comprimés et que la couleur et la forme ont été choisies pour des raisons de marketing et pour être distinctives.

[13]            Un argument similaire a été rejeté par la Cour d'appel dans l'arrêt AstraZeneca AB c. Novopharm, précité, relativement à la marque de commerce projetée d'Astra pour des comprimés jaunes de 2,5 mg contenant de la félodipine. Bien que la question de savoir si une marque possède un caractère distinctif inhérent soit une question de fait, je suis de même convaincue en l'espèce que la preuve ne parvient pas à établir que les marques projetées ont un caractère distinctif inhérent. La couleur rouge-brun et la couleur rose ainsi que la forme ronde biconvexe ne sont ni uniques ni inhabituelles. L'apparence des comprimés n'a rien d'original ou de singulier au sens où, comme un mot inventé, la marque a un caractère distinctif inhérent. Il ne suffit pas à Astra de démontrer que la marque de commerce est indépendante de l'ingrédient actif et qu'elle a été choisie pour des raisons de marketing. Cette preuve n'établit pas en soi que la marque est distinctive de par sa nature même.

[14]            Sur la foi de la preuve, je conclus donc qu'Astra n'a pas établi, suivant la prépondérance de la preuve, que la couleur et la forme de ses comprimés ont l'effet de distinguer les comprimés d'Astra des comprimés d'autres fabricants.

ii) Caractère distinctif acquis

[15]            Il est d'abord nécessaire d'examiner la question de savoir si la marque de commerce doit distinguer la félodipine de 10 mg d'Astra de :

i)           la félodipine de ses concurrents qui est interchangeable avec la félodipine d'Astra;

ii)          tous les médicaments de la même catégorie thérapeutique, c'est-à-dire tous les comprimés utilisés pour le traitement de l'hypertension;

iii)          tous les ingrédients actifs sur le marché, même ceux qui ne sont pas concurrents.

[16]            Astra soutient que le marché pertinent se limite à celui des comprimés contenant de la félodipine et qui sont interchangeables avec la félodipine d'Astra.

[17]            Cette question a été examinée par la Cour d'appel dans l'arrêt AstraZeneca AB c. Novopharm, précité, dans lequel la Cour d'appel a rejeté l'argument d'Astra voulant que le marché pertinent soit celui des comprimés de félodipine. Au paragraphe 22, le juge Stone a écrit au nom de la Cour :

[traduction] La preuve ne semble pas non plus établir que la combinaison de couleur et de forme des comprimés de l'appelante avait l'effet de « distinguer véritablement » les marchandises de l'appelante de celles d'autres fabricants. L'avocat signale que, comme les comprimés de l'appelante constituaient le seul médicament antihypertenseur délivré sur ordonnance sur le marché canadien qui contenait de la « félodipine » comme ingrédient actif, cela distingue aisément ce médicament des autres médicaments délivrés sur ordonnance puisqu'aucun des autres médicaments invoqués ne contenait cet ingrédient actif. Il n'y avait donc pas de possibilité qu'un autre médicament soit substitué au comprimé de 2,5 mg de PLENDIL. La « félodipine » est même identifiée dans la demande d'enregistrement comme les « marchandises » en liaison avec lesquelles la marque de commerce a été employée au Canada depuis 1994. L'appelante soutient, sur ce fondement, que le registraire et le juge Kelen ont tous deux commis une erreur à cet égard en étendant le marché pertinent à tous les comprimés ronds et jaunes servant au traitement de l'hypertension au lieu de le restreindre aux marchandises indiquées, soit la « félodipine » . En fait, l'intimée a présenté certains éléments de preuve au sujet d'autres comprimés antihypertenseurs jaunes et ronds sur le marché pharmaceutique canadien et fait valoir que le marché de comparaison pertinent est celui de toutes les pilules pharmaceutiques, qui comprend notamment d'autres comprimés antihypertenseurs jaunes et ronds. Cependant, il faut relever que l'ingrédient actif en tant que tel n'est pas demandé par l'appelante comme marque de commerce. La marque de commerce dont l'enregistrement est demandé se compose de la couleur et de la forme, ou de l'apparence, des comprimés de 2,5 mg qui se trouvent à contenir l'ingrédient actif. Pour que la marque dont l'enregistrement est demandé satisfasse à ce volet de la définition du terme « distinctive » à l'article 2, l'appelante devait donc démontrer que, par suite de l'emploi sur une période de temps, la couleur et la forme distinguent véritablement ses comprimés de ceux d'autres fabricants.


[18]            Astra fait valoir qu'il faudrait tirer une conclusion différente en l'espèce parce que le caractère distinctif est une question de fait et que l'analyse faite par la Cour d'appel [traduction] « était déficiente en ce qu'elle confondait les "marchandises" avec la "marque de commerce" » . Je ne suis pas disposée à écarter la conclusion de la Cour d'appel. Bien que le caractère distinctif soit fondamentalement une question de fait, la conclusion de la Cour d'appel au paragraphe précité n'est pas, à mon avis, simplement une conclusion de fait. Lorsque la demande d'enregistrement de la marque de commerce ne porte pas sur l'ingrédient actif comme tel, la Cour d'appel a décidé que le requérant doit démontrer que, par suite de l'emploi sur une période de temps, la couleur et la forme de ses comprimés les distinguent véritablement de ceux d'autres fabricants. Je m'estime liée par cette conclusion.

[19]            Quant à la preuve, aucun élément de preuve n'a été produit par des patients et Astra a reconnu que les médecins ne portent que peu d'attention, sinon aucune, à la couleur et à la forme des pilules en prescrivant des médicaments. Astra a cependant invoqué la preuve selon laquelle des pharmaciens ont recours à la couleur et à la forme des pilules rouge-brun lorsqu'ils choisissent de délivrer les comprimés de félodipine de 10 mg d'Astra. Spécifiquement, Astra a invoqué la preuve voulant que les pharmaciens connaissent la couleur et la forme d'un produit et qu'ils s'appuient sur la couleur, la forme ou la taille pour s'assurer de délivrer la bonne marque. Par exemple, à la vue d'un comprimé vert, un pharmacien ou une pharmacienne saurait que ce comprimé ne peut pas être la félodipine d'Astra. Bien que les comprimés de félodipine d'Astra soient distribués dans une boîte sous plaquettes alvéolaires, le pharmacien doit vérifier le nombre de comprimés délivrés. La preuve démontre qu'en ce faisant, le pharmacien [traduction] « ne peut s'empêcher de voir de quelle couleur et de quelle forme sont les comprimés Plendil » .


[20]            À mon avis, la preuve déposée devant la Cour établit toutefois qu'il y avait, à la période pertinente, un grand nombre de pilules rouge-brun sur le marché. Un pharmacien a confirmé lors de son réinterrogatoire que la félodipine de 10 mg d'Astra est de la même couleur que le comprimé LOSEC de 20 mg, au point qu'il faisait la différence entre les deux pilules par leur marquage. Il y a d'autres pilules rouge-brun (ou rose foncé) sur le marché, notamment :

Adalat - XL - (rose foncé et ronde - mise sur le marché en 1992) - ventes d'août 1993 à juillet 1994 : 34 500 000 $

Novo-Ferrosulfate ETC - (rose foncé et ronde - mise sur le marché en 1966) - ventes d'août 1993 à juillet 1994 : 200 000 $

Premarin ,625 mg - (rouge-brun et plutôt ronde - mise sur le marché en 1942) - ventes d'août 1993 à juillet 1994 : 10 700 000 $

Voltaren SR 100 mg - (rouge-brun et ronde - mise sur le marché en 1985) - ventes d'août 1993 à juillet 1994 : 21 700 000 $

Zestril 10 mg et 20 mg (rose foncé et ronde - mise sur le marché en 1990) - ventes d'août 1993 à juillet 1994 : 14 700 000 $

[21]            Bien qu'Astra se soit opposée à ce qu'on se reporte à cette preuve, je suis convaincue que la Cour en est régulièrement saisie. La déclaration d'opposition de Novopharm était explicite sur le fait que son opposition ne se limitait pas aux comprimés des trois fabricants qui y étaient spécifiquement nommés. Compte tenu de la preuve produite par Novopharm, Astra était en tout temps au fait de la nature de l'instance.


[22]            Selon la preuve, j'ai de plus la conviction que les pharmaciens ne délivrent pas la félodipine en se fondant dans une large mesure sur la couleur ou la forme. L'apparence de couleur et de forme n'est qu'un élément, une vérification secondaire, dont tiendra compte le pharmacien. J'accepte la preuve voulant que les pharmaciens identifient principalement les comprimés par l'identification numérique, le marquage et les étiquettes sur l'emballage. J'accepte l'argument de Novopharm qu'il ne suffit pas pour un pharmacien de savoir que les comprimés de félodipine d'Astra ne sont pas verts. La bonne question est celle de savoir ce que signifie pour un pharmacien une pilule rouge-brun.

[23]            Je conclus en somme que la preuve ne démontre pas, selon la prépondérance de la preuve, que la forme et la couleur du comprimé rouge-brun distinguent véritablement les comprimés d'Astra des comprimés d'autres fabricants.

CONCLUSION ET DÉPENS

[24]            Ayant conclu qu'Astra n'a pas réussi à établir que médecins, pharmaciens ou patients peuvent employer et emploient en fait les marques de commerce projetées pour choisir de prescrire, délivrer ou demander les comprimés de félodipine de 5 ou 10 mg d'Astra, il s'ensuit que les appels seront accueillis.


[25]            Il s'ensuit de plus qu'il n'est pas nécessaire de répondre à l'argument avancé par Novopharm dans l'affaire des comprimés rouge-brun selon lequel Astra ne peut pas invoquer une licence écrite datée de 1995 afin d'établir que Hoechst-Roussel Canada Inc. est titulaire d'une licence pour la marque de commerce projetée relativement au produit RENEDIL de Hoechst. En supposant toutefois, sans en décider, que Novopharm soulève la question à bon droit, je suis convaincue, pour les motifs avancés par Astra, que la preuve produite par cette dernière établit que tous les comprimés de félodipine vendus au Canada par Hoechst ont été fabriqués par Astra en vertu d'un contrat de licence de marque de commerce.

[26]            Novopharm a droit à ses dépens en Section de première instance. À défaut d'entente, ceux-ci devront être taxés selon la valeur la plus élevée de la colonne III du tarif B des Règles de la Cour fédérale (1998).

ORDONNANCE

[27]            LA COUR ORDONNE :

1.          que les appels des décisions du registraire soient accueillis et que les oppositions soient retenues;

2.          que les demandes d'enregistrement des marques de commerce no 699 917 et no 699 918 soient rejetées;


3.          que la défenderesse AstraZeneca verse à la demanderesse ses dépens pour toutes les procédures en Section de première instance. À défaut d'entente, ces dépens devront être taxés selon la valeur la plus élevée de la colonne III du tarif B des Règles de la Cour fédérale (1998).

                 « Eleanor R. Dawson »                                                                                                                                          Juge

Traduction certifiée conforme

Nicole Michaud, LL. L., M. Trad.


COUR FÉDÉRALE

SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIERS :                                        T-1470-99 et T-1471-99

INTITULÉ:                                            NOVOPHARM LIMITED C. ASTRAZENECA AB ET

LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

LIEU DE L'AUDIENCE :                  TORONTO (ONTARIO)

DATE DE L'AUDIENCE :              LE LUNDI 9 JUIN 2003

MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE DE LA JUGE DAWSON

DATE DES MOTIFS :                       LE 17 OCTOBRE 2003

COMPARUTIONS :

Warren Sprigings                                 DEMANDERESSE

Lilly Sormaz

Gunars A. Gaikis                                  DÉFENDERESSE (AstraZeneca AB)

Nancy P. Pei

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER:

Hitchman & Sprigings                        DEMANDERESSE

Avocats

Toronto (Ontario)

Smart & Biggar                                    DÉFENDERESSE (AstraZeneca AB)

Avocats

Toronto (Ontario)

Morris Rosenberg                                DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada                                

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