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Date : 20030506

Dossier : IMM-2217-02

Référence : 2003 CFPI 556

Ottawa (Ontario), le 6 mai 2003

En présence de MONSIEUR LE JUGE O'REILLY                                     

ENTRE :

                                                                 NARDEEP SINGH

                                                                                                                                                     demandeur

                                                                              - et -

                      LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                                                      défendeur

                                            MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

[1]                 M. Singh est arrivé au Canada en provenance de l'Inde en février 2001 et il a revendiqué le statut de réfugié. Il a prétendu être persécuté dans la région du Pendjab, en Inde, parce qu'il est de religion sikh.


[2]                 Le demandeur a retenu les services d'un avocat en mars 2001 et il a finalement comparu devant la Commission de l'immigration et du statut de réfugié en mai 2002. L'avis de convocation qu'il a reçu un mois avant l'audience précisait que l'affaire ne devait pas être indûment retardée et qu'il devait soumettre trois copies de tous les documents dont il souhaitait l'examen par la Commission. Il avait auparavant été avisé, en janvier 2002, que certains documents étaient requis - pièces d'identité, extrait de naissance, dossiers scolaires et autres documents qui pourraient étayer sa revendication.

[3]                 Lors de sa comparution devant la Commission, le demandeur était accompagné d'un étudiant en droit qui a demandé l'ajournement de l'audience parce que M. Singh n'était pas en mesure d'obtenir des documents pour étayer sa revendication. La Commission s'est abstenue de statuer sur la question de l'ajournement jusqu'à ce que M. Singh produise des preuves relativement aux mesures qu'il avait prises pour essayer d'obtenir les documents nécessaires. Elle a conclu que M. Singh n'avait pas fait preuve de diligence en tentant d'obtenir les documents justificatifs. Elle n'a pas cru les raisons qu'il a fournies pour expliquer l'absence de documents.

[4]                 La Commission a ensuite conclu qu'il n'y avait aucune preuve crédible ou digne de foi corroborant les allégations de M. Singh qui prétendait être persécuté en Inde et elle a rejeté sa revendication du statut de réfugié. La Commission ne disposait même pas de preuves documentaires quant à l'identité de M. Singh. Ce dernier a déclaré qu'il avait un passeport en Inde, mais il a été incapable d'expliquer pourquoi il n'avait pas été produit.

Questions en litige

[5]                 M. Singh soutient que la Commission aurait dû lui accorder un ajournement afin de lui permettre de récupérer des documents pour étayer sa revendication. Subsidiairement, il fait valoir que la Commission aurait dû présumer que son témoignage de vive voix était vrai. En d'autres mots, la Commission a commis une erreur en exigeant des preuves documentaires.


[6]                 Pour ce qui est de la question de l'ajournement, le paragraphe 69(6) de la Loi sur l'immigration prévoit que la Commission ne peut ajourner une procédure « que si elle est convaincue que l'ajournement ne causera pas d'entrave sérieuse » . De plus, la Loi exige que la Commission fonctionne avec célérité (par. 68(2)). Les Règles de la Commission (DORS/93-45, par. 13(4)) lui permettent de prendre en considération divers facteurs pour décider s'il y a lieu d'accorder un ajournement, dont les « efforts déployés par les parties pour procéder avec célérité » , le « délai déjà accordé aux parties pour la préparation de l'affaire » et « les efforts déployés par les parties pour demander à la première occasion la remise ou l'ajournement de l'audience » .

[7]                 Compte tenu de ces facteurs et de la preuve dont disposait la Commission, je ne peux conclure que celle-ci a commis une erreur en n'accordant pas d'ajournement. Aucun motif raisonnable n'a été fourni pour expliquer le délai à obtenir les documents.

[8]                 En ce qui concerne le bien-fondé de la revendication de M. Singh, la Commission a tiré une conclusion défavorable de l'absence de documents qui auraient permis d'établir certains éléments essentiels, comme l'identité de M. Singh, son lieu de résidence et son état matrimonial. La Commission s'est reportée à un avis de pratique du 11 mars 1997 en vertu duquel les avocats sont informés que la Commission peut tirer des conclusions défavorables lorsqu'aucune explication raisonnable n'est fournie à l'absence de preuves documentaires ou lorsque la partie ne fait pas preuve de diligence raisonnable pour obtenir ce genre de preuve.

[9]                 La jurisprudence de notre Cour insiste sur l'importance des preuves documentaires relativement à l'identité : Husein c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1998] A.C.F. no 726 (QL) (1re inst.); Bhuiyan c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2003 CFPI 290 (QL) (1re inst.), [2003] A.C.F. no 406 (QL) (1re inst.); Elazi c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2000] A.C.F. no 212 (QL) (1re inst.). Il est vrai que, de façon générale, la Commission ne peut pas discréditer le témoignage d'un demandeur simplement parce qu'il n'y a pas de preuve documentaire, notamment dans les cas où il ne serait pas raisonnable de s'attendre à ce que le demandeur puisse en avoir à sa disposition : Miral c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1999] A.C.F. no 254 (QL) (1re inst.), Ahortor c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1993] A.C.F. no 705 (QL) (1re inst.). Toutefois, ce n'est pas en raison seulement de l'absence de documents que la Commission a rejeté la revendication de M. Singh. Elle l'a fait aussi parce qu'il avait eu amplement l'occasion de demander des documents au soutien de sa revendication et parce qu'elle n'a pas accepté les motifs qu'il a invoqués pour expliquer pourquoi il n'avait pas produit cette preuve. En fin de compte, la Commission a conclu que la preuve dont elle avait été saisie était insuffisante pour étayer la revendication de M. Singh.

[10]            Encore une fois, je conclus que la Commission n'a commis aucune erreur ni injustice. Par conséquent, la demande de contrôle judiciaire est rejetée. Aucune question d'importance générale n'a été proposée en vue de sa certification et aucune n'est formulée.


                                                                        JUGEMENT

LA COUR ORDONNE :

1.          La demande de contrôle judiciaire est rejetée. Aucune question d'importance générale n'est formulée.

                                                                                                                                   « James W. O'Reilly »      

                                                                                                                                                         J.F.C.C.            

Traduction certifiée conforme :

Suzanne Bolduc, LL.B.


                                                        COUR FÉDÉ RALE DU CANADA

                                              SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

                                                 AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                           IMM-2217-02

INTITULÉ :                                        NARDEEP SINGH

                                                                                                                                                      demandeur

- et -

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                                                        défendeur

LIEU DE L'AUDIENCE :                 TORONTO (ONTARIO)

DATE DE L'AUDIENCE :              LE MERCREDI 30 AVRIL 2003

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                              MONSIEUR LE JUGE O'REILLY

DATE DES MOTIFS :                     6 mai 2003                     

COMPARUTIONS:

M. Ricardo Aguirre                                POUR LE DEMANDEUR

Mme Alexis Singer                                   POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER:                                

M. Ricardo Aguirre

Avocat

281 Eglinton Ave. E.

Toronto (Ontario) M4P 1L3              POUR LE DEMANDEUR

Morris Rosenberg

Sous-procureur général du Canada

Ottawa (Ontario)                                  POUR LE DÉFENDEUR

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