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Date : 19981202


Dossier : T-537-98

ENTRE :

     FILODORDO CALZE S.p.A.,

     appelante,

     et

     MANUFACTURIER DE BAS DE NYLON DORIS LTÉE/

     DORIS HOSIERY MILLS LTD.,

     intimée.

     MOTIFS DU JUGEMENT

     (prononcés, tels que révisés, à l'audience à Ottawa (Ontario),

     le mercredi 25 novembre 1998)

LE JUGE ROTHSTEIN

[1]      Il s'agit d'un appel fondé sur le paragraphe 56(5) de la Loi sur les marques de commerce, L.R.C. (1985), ch. T-10, à l'égard d'une décision rendue par une agente d'audience principale du registraire des marques de commerce. Les appels fondés sur le paragraphe 56(5) doivent être tranchés au moyen d'une nouvelle instruction au cours de laquelle il est permis de présenter des éléments de preuve en plus de ceux dont l'agent était saisi. Voici le texte du paragraphe 56(5) :

         (5) Lors de l'appel, il peut être apporté une preuve en plus de celle qui a été fournie devant le registraire, et le tribunal peut exercer toute discrétion dont le registraire est investi, R.S., ch. T-10, art. 56; R.S., ch. 10 (2e suppl.), art. 64.         

[2]      Bien que le juge fonde son jugement sur la preuve présentée au cours de la nouvelle instruction, il doit faire montre d'une certaine retenue à l'endroit de la décision de l'agent d'audience principal. Dans l'arrêt Saks & Co. c. Canada (registraire des marques de commerce) (1989), 24 C.P.R. (3d) 49, le juge Addy a mentionné, à la page 52, qu'il n'y a pas lieu de modifier à la légère la décision du registraire.

[3]      La question qui se pose en l'espèce est celle de savoir si l'intimée a utilisé les mots " SECRET SUMMER COOL " en liaison avec la vente de collants et de bas pour dames. L'appelante avait demandé au registraire de délivrer un avis en application de l'article 45 de la Loi sur les marques de commerce en vue de contraindre l'intimée à fournir un affidavit ou une déclaration solennelle sur la question de savoir si la marque de commerce SECRET SUMMER COOL a été employée au Canada à un moment quelconque au cours de la période de trois ans précédant juin 1996 en liaison avec les bas et les collants. Voici le texte des paragraphes 45(1) et (2) de la Loi sur les marques de commerce :

     45. (1) Le registraire peut, et doit sur demande écrite présentée après trois années à compter de la date de l'enregistrement d'une marque de commerce, par une personne qui verse les droits prescrits, à moins qu'il ne voie une raison valable à l'effet contraire, donner au propriétaire inscrit un avis lui enjoignant de fournir, dans les trois mois, un affidavit ou une déclaration solennelle indiquant, à l'égard de chacune des marchandises ou de chacun des services que spécifie l'enregistrement, si la marque de commerce a été employée au Canada à un moment quelconque au cours des trois ans précédant la date de l'avis et, dans la négative, la date où elle a été ainsi employée en dernier lieu et la raison de son défaut d'emploi depuis cette date.         
     (2) Le registraire ne peut recevoir aucune preuve autre que cet affidavit ou cette déclaration solennelle, mais il peut entendre des représentations faites par le propriétaire inscrit de la marque de commerce ou pour celui-ci ou par la personne à la demande de qui l'avis a été donné ou pour celle-ci.         

Il semble que l'appelante voulait obtenir la radiation de la marque de commerce SECRET SUMMER COOL de l'intimée parce qu'elle a elle-même présenté une demande de marque de commerce à l'égard des mots COOL SUMMER relativement à des marchandises similaires à celles de l'intimée. Le paragraphe 45(3) est ainsi libellé :

     (3) Lorsqu'il apparaît au registraire, en raison de la preuve qui lui est fournie ou du défaut de fournir une telle preuve, que la marque de commerce, soit à l'égard de la totalité des marchandises ou services spécifiés dans l'enregistrement, soit à l'égard de l'une de ces marchandises ou de l'un de ces services, n'a été employée au Canada à aucun moment au cours des trois ans précédant la date de l'avis et que le défaut d'emploi n'a pas été attribuable à des circonstances spéciales qui le justifient, l'enregistrement de cette marque de commerce est susceptible de radiation ou de modification en conséquence.         

[4]      L'intimée a déposé l'affidavit de son président, Jack Hasen. M. Hasen a déclaré que les bas et les collants sont placés dans des enveloppes de plastique transparent qui sont insérées dans un emballage de carton, ce qui permet à l'acheteur de voir le produit tout en protégeant le contenu des dommages pouvant lui être causés. Un exemple de l'emballage utilisé pour les collants est joint à l'affidavit de M. Hasen.

[5]      Se fondant sur l'utilisation des mots SECRET SUMMER COOL à l'endos de l'emballage de l'intimée, l'agente d'audience principale a conclu qu'il y avait emploi aux fins de l'article 45. Voici comment elle s'exprime à ce sujet (page 4) :

     [TRADUCTION] Je ne suis pas convaincue que les mots SECRET et SUMMER COOL qui figurent à l'endos de l'emballage ne seraient pas perçus comme des mots désignant l'emploi de la marque de commerce globale SECRET SUMMER COOL. À mon avis, c'est un cas limite, mais ma conclusion repose sur le fait que l'expression SUMMER COOL n'est pas à ce point éloignée du mot SECRET ni n'est séparée de celui-ci par un autre élément. Par conséquent, le public pourrait penser que la marque de commerce SECRET SUMMER COOL en soi est employée. Dans les circonstances, j'en arrive à la conclusion que l'utilisation des mots SECRET et SUMMER COOL à l'endos de l'emballage constitue un emploi de la marque de commerce SECRET SUMMER COOL en soi (Honey Dew Ltd. v. Rudd, [1929] RCÉ 83, et Promafil Canada Ltée c. Munsingwear Inc. (1992), 44 C.P.R. (3d) 59).         

[6]      Compte tenu de la preuve présentée devant moi et des arguments exposés par les avocats, j'en arrive à la même conclusion. Il est vrai que le dessin des lettres du mot SECRET et celui des mots SUMMER COOL figurant au recto de l'emballage sont un tant soit peu différents. Toutefois, à l'endos de l'emballage, les mots sont suffisamment près l'un de l'autre sans être séparés par un mot étranger pour inciter un acheteur à croire que la marque de commerce SECRET SUMMER COOL en soi est employée. À mon avis, cette preuve suffit à démontrer l'emploi de la marque de commerce aux fins de l'article 45.

[7]      L'appelante admet que, si les mots sont considérés comme des mots utilisés aux fins de la marque de commerce, cet emploi concerne les collants pour dames et non les bas. Elle invoque l'arrêt Saks, précité, à la page 50, pour soutenir qu'il ne suffit pas pour le titulaire d'une marque enregistrée de déclarer simplement que la marque était employée à la date pertinente. Les pièces jointes aux affidavits démontrent que les mots SECRET SUMMER COOL étaient employés en liaison avec les collants pour dames. L'affidavit de l'intimée indique clairement qu'un emballage semblable est applicable aux collants pour dames et à d'autres types de bas pour dames. Compte tenu du lien étroit existant entre les collants et les bas pour dames, je ne crois pas que l'intimée soit tenue de présenter des exemples d'emballage de bas pour prouver l'emploi des mots en liaison avec les bas.

[8]      L'intimée a démontré, comme elle devait le faire, que les mots SECRET SUMMER COOL ont été employés comme marque de commerce tant en liaison avec les collants qu'avec les bas pour dames.

[9]      L'appel est rejeté.

[10]      L'intimée a droit à des frais totalisant 1 500 $, y compris les débours.

                             Marshall Rothstein

                                     Juge

Toronto (Ontario)

Le 2 décembre 1998

Traduction certifiée conforme

Martine Guay, LL.L.

     COUR FÉDÉRALE DU CANADA

     AVOCATS ET PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER

No DU GREFFE :                      T-537-98

INTITULÉ DE LA CAUSE :              FILODORDO CALZE S.p.A.

                             c.

                             MANUFACTURIER DE BAS DE NYLON DORIS LTÉE/DORIS HOSIERY MILLS LTD.

DATE DE L'AUDIENCE :              LE MERCREDI 25 NOVEMBRE 1998

LIEU DE L'AUDIENCE :              OTTAWA (ONTARIO)

MOTIFS DU JUGEMENT DU JUGE ROTHSTEIN

EN DATE DU :                      MERCREDI 2 DÉCEMBRE 1998

ONT COMPARU :                  M e Elizabeth G. Elliott

                             M e Barry Hutsel

                                 Pour l'appelante

                             M e John H. Scott

                             M e Geneviève Bergeron

                                 Pour l'intimée

PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER :      Macera & Jarzyna, avocats

                             B.P. 2088, Succ. D

                             Ottawa (Ontario) K1P 5W3

                                 Pour l'appelante

                             McMaster Gervais, avocats

                             1000, rue de La Gauchetière ouest, b. 900                              Montréal (Qc) H3B 5H4

                                 Pour l'intimée


                                              COUR FÉDÉRALE DU CANADA
                                              Date : 19981202
                                              Dossier : T-537-98
                                         ENTRE :
                                         FILODORDO CALZE S.p.A.,
                                              appelante,
                                         et
                                         MANUFACTURIER DE BAS DE NYLON DORIS LTÉE/
                                         DORIS HOSIERY MILLS LTD.,
                                              intimée.


MOTIFS DU JUGEMENT



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