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     Date: 20000531

     Dossier: IMM-30-99

Ottawa (Ontario), le 31 mai 2000

DEVANT : MADAME LE JUGE E. HENEGHAN

ENTRE :

VLADIMIR DOTSENKO


demandeur


et


LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L"IMMIGRATION

défendeur


MOTIFS DE L"ORDONNANCE ET ORDONNANCE

LE JUGE HENEGHAN

[1]      Il s"agit d"une demande visant au contrôle judiciaire d"une décision enjoignant à Vladimir Dotsenko (le demandeur) de se présenter à une entrevue en vue d"obtenir un visa d"immigrant, à New York.

[2]      Il importe de résumer brièvement les faits de l"affaire. Par une lettre datée du 24 septembre 1998, l"avocat du demandeur, Me Leahy, a fait renvoyer la demande de résidence permanente de Vladimir Dotsenko et d"Irina Dotsenko au consulat général du Canada, à Buffalo. Dans cette lettre, il demandait en outre que le demandeur et sa conjointe aient une entrevue à l"ambassade du Canada, à Moscou.

[3]      La lettre indiquait également que Me Leahy ne savait pas trop où les demandes devaient être présentées parce que la directive concernant les centres d"affaires inclut Moscou comme lieu d"entrevue, mais elle ne précise pas l"endroit où une demande doit être présentée afin d"être transmise à Moscou. Me Leahy déclare également qu"on lui a renvoyé la demande qu"il avait présentée à titre d"entrepreneur en l"informant que la demande devait être présentée dans un centre d"affaires.

[4]      L"avocat du demandeur parle d"une politique selon laquelle toutes les demandes concernant les entrepreneurs doivent être présentées à l"un des neuf centres d"affaires suivants : Beijing, Bonn, Buffalo, Damas, Hong Kong, Londres, Paris ou Singapour. Ces centres d"immigration peuvent transmettre les demandes présentées par des entrepreneurs après un examen initial et sans frais pour les demandeurs à Buenos Aires, Moscou, New York ou Seattle.

[5]      Il est utile de noter que, même si la lettre du 24 septembre 1998 indique que le demandeur a sollicité une entrevue à Moscou, un message électronique est inclus dans les documents, lequel montre que Me Leahy avait demandé que son client ait son entrevue à Buffalo. Ce message électronique est daté du 8 décembre 1998 et résulte d"un échange de messages électroniques entre Derek White et l"avocat du demandeur.

[6]      Par une lettre datée du 11 décembre 1998, le consulat général du Canada à Buffalo a informé le demandeur que, pour qu"une décision finale soit prise au sujet de sa demande, il devait se présenter à une entrevue. La lettre indiquait que l"entrevue devait avoir lieu à New York. Le paragraphe 3 de cette lettre disait que, si le demandeur ne pouvait pas se présenter à l"entrevue aux États-Unis, il pouvait faire transférer son dossier à un autre bureau des visas. Dans ce paragraphe, il est fait mention d"une seconde page, sur laquelle se trouve une liste de bureaux de visas situés à l"étranger et des instructions aux fins du transfert d"un dossier, mais cette seconde page n"est pas incluse.

[7]      Compte tenu de la nature de la demande, le demandeur pouvait uniquement faire transférer sa demande à certains centres. Néanmoins, selon le dossier mis à ma disposition, rien ne montre que le demandeur se soit vu refuser la demande de transfert du dossier à Moscou ou que le demandeur ait même sollicité pareil transfert. Le demandeur avait demandé une entrevue à Moscou, mais cette demande a subséquemment été suivie d"une demande en vue de l"obtention d"une entrevue à Buffalo. Lorsqu"il a été avisé que l"entrevue devait avoir lieu à New York, le demandeur n"a pas essayé de faire transférer le dossier. Il a plutôt signifié au défendeur un avis de demande en vue de la contestation de la décision de le convoquer à une entrevue à New York.

[8]      Étant donné que la preuve révèle qu"aucune décision n"a été prise, pas même une décision interlocutoire qui ne serait pas assujettie à un contrôle judiciaire, il est clair qu"il n"existe aucun fondement justifiant l"octroi de la présente demande de contrôle judiciaire.

[9]      En conclusion, j"aimerais également ajouter que même si les agents des visas tentent de se conformer aux demandes qui leur sont faites en ce qui concerne l"endroit où les demandes doivent être traitées et où l"entrevue doit avoir lieu, les demandeurs n"ont pas le droit de choisir un bureau particulier. Dans la décision Chen c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l"Immigration) (1999), 166 F.T.R. 78 (C.F. 1re inst.), le juge Evans (tel était alors son titre) a dit ce qui suit :

     Le deuxième argument du demandeur sur la question de compétence porte que la création du CRP n'a pas de fondement légal et que le demandeur avait le droit de voir son dossier traité par le consulat désigné dans sa demande de visa. Cet argument est aussi sans fondement, à mon avis, parce qu'il postule que toutes les décisions administratives doivent être distinctement prévues par la législation. Ceci n'est pas le cas lorsqu'il s'agit de décisions administratives qui n'ont aucun impact juridique sur les personnes et qui ne sont pas prises au détriment de leurs droits ou de leurs intérêts. Le ministre a le pouvoir discrétionnaire de décider de l'organisation du traitement des demandes de visa. De plus, comme M. Leahy l'a noté, l'alinéa 115b) de la Loi sur l'immigration, L.R.C. (1985), ch. I-2 [tel que modifié], autorise le ministre à désigner par arrêté des points d'entrée et des postes d'attente aux fins de la Loi.
     La loi ne reconnaît aucun droit aux demandeurs de visa de voir leur dossier traité par un consulat donné. Il va de soi que des efforts sont faits pour que les demandeurs soient reçus en entrevue au consulat qui leur convient, afin de maintenir les déplacements au minimum. Le fait que les demandeurs puissent préciser dans la formule de demande à quel consulat ils voudraient que celle-ci soit traitée, et qu'on leur impose des frais de traitement, ne crée aucun lien contractuel qui accorderait au demandeur le droit de voir sa demande traitée par le consulat qu'il a désigné.1

De même, dans la décision Voskanova c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l"Immigration) (1999), 167 F.T.R. 258 (C.F. 1re inst.), le juge Nadon a dit ce qui suit :

     [...] Le même raisonnement s"applique à la demande par laquelle la demanderesse cherchait à obtenir que son dossier soit transféré à Détroit. Il importe de souligner qu"il ne revient pas au demandeur de décider du lieu où il aura son entrevue. Cette décision appartient à l"agent des visas. J"imagine que les agents des visas s"efforcent sincèrement d"accommoder les demandeurs quant au lieu de leur entrevue. Ils ne font qu"agir équitablement en accommodant les demandeurs, étant donné que le lieu de l"entrevue peut, par exemple, engendrer des coûts considérables que ces derniers devront défrayer pour s"y rendre. Si l"entrevue peut avoir lieu à un endroit plus accessible pour le demandeur, l"agent des visas devrait, dans la mesure du possible, s"efforcer d"accommoder celui-ci. En fin de compte, cependant, la détermination du lieu de l"entrevue doit demeurer à la discrétion de l"agent des visas.
     Lorsque, comme c"est le cas en l"espèce, le demandeur présente une demande visant à faire transférer son dossier et dit qu"il ne pourra se présenter à l"entrevue prévue pour le lendemain, je ne vois pas pourquoi une telle demande serait examinée si le demandeur ne fournit pas d"explication pour justifier son absence ainsi que sa demande de transfert. À mon avis, l"agente des visas pouvait, dans l"exercice de son pouvoir discrétionnaire, refuser de transférer le dossier de la demanderesse de New York à Détroit. Je n"ai pas été convaincu que l"agente des visas a omis d"exercer convenablement son pouvoir discrétionnaire.2

[10]      La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

[11]      L"avocat du demandeur a demandé la certification d"une question, mais j"estime qu"aucune question ne devrait être certifiée en l"espèce.


ORDONNANCE

[12]      IL EST ORDONNÉ QUE la demande de contrôle judiciaire soit rejetée.


                             " E. Heneghan "

                         ____________________________

                             J.C.F.C.

OTTAWA (Ontario)

le 31 mai 2000.

Traduction certifiée conforme


Martine Brunet, LL.B.

COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE


AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


No DU GREFFE :      IMM-30-99

    

INTITULÉ DE LA CAUSE :      VLADIMIR DOTSENKO c. LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L"IMMIGRATION

    

LIEU DE L'AUDIENCE :      TORONTO (ONTARIO)

DATE DE L'AUDIENCE :      LE 7 MARS 2000

MOTIFS DE L"ORDONNANCE ET ORDONNANCE DU JUGE HENEGHAN EN DATE DU 31 MAI 2000


ONT COMPARU :

Timothy E. Leahy                  pour le demandeur

Ian S. Hicks                  pour le défendeur

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Timothy E. Leahy                  pour le demandeur

Morris Rosenberg

Sous-procureur général du Canada                  pour le défendeur

__________________

1 Ibid. à la p. 81.

2 Ibid. à la p. 262.

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