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Date : 20011217

Dossier : IMM-5399-00

Référence neutre : 2001 CFPI 1401

ENTRE :

                                                    JOSEFINA ALBERTINA KRUIN

                                                                                                                                              demanderesse

                                                                                   et

                      LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                                                      défendeur

                                  MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

LE JUGE BLAIS

[1]                 Il s'agit d'une demande fondée sur le paragraphe 82.1(1) de la Loi sur l'immigration [la Loi] pour obtenir l'examen et l'annulation d'une décision dans laquelle la Section d'appel de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié [la Section d'appel] a, le 14 septembre 2000, rejeté l'appel qu'avait interjeté la demanderesse contre une mesure de renvoi.

LES FAITS

[2]         La demanderesse, Josephina Albertina Kruin, est une citoyenne du Suriname. Son mari, sa fille et elle ont immigré au Canada en tant que résidents permanents le 7 avril 1974 et se sont pleinement établis au Canada entre 1974 et 1982. Leur deuxième fille est née au Canada en 1975.


[3]         Moins d'un an après leur arrivée, la demanderesse et son époux ont acheté une maison à Hamilton (Ontario) et y ont vécu entre 1974 et 1979.

[4]         En 1979, la demanderesse et sa famille ont déménagé à Edmonton (Alberta).

[5]         Au mois d'août 1982, la demanderesse et sa famille sont partis au Suriname avec l'intention d'y prendre trois semaines de vacances.

[6]         Quand ils sont arrivés au Suriname, l'époux de la demanderesse s'est vu offrir une occasion d'affaires qu'il a acceptée. Cette décision a prolongé leur absence du Canada considérablement.

[7]         La demanderesse a vécu au Suriname avec son mari jusqu'en 1989 et un autre enfant est né pendant cette période.

[8]         Elle a par la suite divorcé d'avec son mari et, en 1993, elle a quitté le Suriname avec ses trois enfants.

[9]         La demanderesse a par la suite déménagé en Floride (États Unis) pour habiter chez un cousin puisqu'elle n'avait aucune famille au Canada. Elle a vécu là, sans statut, pendant quatre ans.


[10]       En octobre 1997, la demanderesse a essayé de revenir au Canada en se présentant au point d'entrée à Niagara Falls.

[11]       Dans une décision datée du 29 juillet 1999, on a conclu que la demanderesse avait l'intention de cesser de résider en permanence au Canada en restant à l'extérieur du pays pendant environ quatorze ans. Par conséquent, la demanderesse a cessé d'être une résidente permanente aux termes de l'alinéa 24(1)a) de la Loi sur l'immigration et n'avait donc aucunement le droit d'entrer au Canada.

[12]       La demanderesse a été jugée non admissible au Canada aux termes de l'alinéa 19(2)d) de la Loi sur l'immigration et une mesure de renvoi a été prise contre elle.

[13]       La demanderesse a interjeté appel de cette décision devant la Section d'appel.

LES DISPOSITIONS LÉGISLATIVES APPLICABLES

[14]       Le paragraphe 2(1) de la Loi sur l'immigration est rédigé comme suit :



« résident permanent » Personne qui remplit les conditions suivantes :

a) elle a obtenu le droit d'établissement;

b) elle n'a pas acquis la citoyenneté canadienne;

c) elle n'a pas perdu son statut conformément à l'article 24 ou 25.1.

Est également visée par la définition la personne qui a acquis la citoyenneté canadienne mais l'a perdue conformément au paragraphe 10(1) de la Loi sur la citoyenneté, compte non tenu du paragraphe 10(2) de cette loi.

"permanent resident" means a person who

(a) has been granted landing,

(b) has not become a Canadian citizen, and

(c) has not ceased to be a permanent resident pursuant to section 24 or 25.1,


[15]          Le paragraphe 24(2) de la Loi sur l'immigration prévoit :


24.(2) Le résident permanent qui séjourne à l'étranger plus de cent quatre-vingt-trois jours au cours d'une période de douze mois est réputé avoir cessé de résider en permanence au Canada, sauf s'il convainc un agent d'immigration ou un arbitre, selon le cas, qu'il n'avait pas cette intention.

24.(2) Where a permanent resident is outside Canada for more than one hundred and eighty-three days in any one twelve month period, that person shall be deemed to have abandoned Canada as his place of permanent residence unless that person satisfies an immigration officer or an adjudicator, as the case may be, that he did not intend to abandon Canada as his place of permanent residence.


[16]       Le paragraphe 70(1) de la Loi sur l'immigration indique :


70. (1) Sous réserve des paragraphes (4) et (5), les résidents permanents et les titulaires de permis de retour en cours de validité et conformes aux règlements peuvent faire appel devant la section d'appel d'une mesure de renvoi ou de renvoi conditionnel en invoquant les moyens suivants :

a) question de droit, de fait ou mixte;

b) le fait que, eu égard aux circonstances particulières de l'espèce, ils ne devraient pas être renvoyés du Canada.

70. (1) Subject to subsections (4) and (5), where a removal order or conditional removal order is made against a permanent resident or against a person lawfully in possession of a valid returning resident permit issued to that person pursuant to the regulations, that person may appeal to the Appeal Division on either or both of the following grounds, namely,

(a) on any ground of appeal that involves a question of law or fact, or mixed law and fact; and

(b) on the ground that, having regard to all the circumstances of the case, the person should not be removed from Canada.


QUESTION LITIGIEUSE

[17]       La Section d'appel a-t-elle fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance?

ANALYSE

La norme de contrôle


[18]       La première question soulevée dans le présent appel porte sur la norme de contrôle applicable à l'égard des décisions de la Section d'appel. La Cour suprême du Canada a examiné cette question dans Boulis c. Canada (Ministre de la Main d'oeuvre et de l'Immigration), [1974] R.C.S. 875, où le juge Abbott, citant lord MacMillan dans D.R.Fraser and Co. Ltd. v. Minister of National Revenue, [1949] A.C. 24, à la page 36, a dit :

Les critères selon lesquels il faut juger l'exercice d'un pouvoir discrétionnaire conféré par une loi ont été définis dans plusieurs arrêts qui font jurisprudence et il est admis que si le pouvoir discrétionnaire a été exercé de bonne foi, sans influence d'aucune considération étrangère, ni de façon arbitraire ou illégale, aucune cour n'a le droit d'intervenir, même si cette cour eût peut-être exercé ce pouvoir discrétionnaire autrement s'il lui avait appartenu.

[19]       La Cour n'interviendra donc pas à la légère à l'égard des conclusions de la Section d'appel.

La Section d'appel a-t-elle fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance?

[20]       Non, la Section d'appel n'a pas fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire.

[21]       La Section d'appel a tiré des conclusions en se fondant uniquement sur les faits, notamment en ce qui a trait aux intentions de la demanderesse quant à son absence du Canada. Il est communément reconnu que la Cour doit appliquer une norme de contrôle élevée à l'égard des conclusions de fait tirées par la Section d'appel. Dans Facchino c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (1995), 90 F.T.R 196, le juge Rouleau a conclu au paragraphe 5 :

Sur ce point, il est évident que la Section d'appel est maître des faits.


[22]       La demanderesse est d'avis que le commissaire de la Section d'appel a commis une erreur susceptible de contrôle en ne tenant aucun compte d'éléments de preuve qu'elle avait soumis, et plus particulièrement en ne tenant aucun compte du contexte de la présente demande et du fait que la demanderesse était chef de famille monoparentale et qu'elle avait besoin de temps pour amasser assez d'argent pour revenir au Canada.

[23]       Encore une fois, les arguments de la demanderesse pour ce qui est de la conclusion du commissaire de la Section d'appel ne peuvent être retenus compte tenu de la norme de contrôle applicable. Dans Hoang c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration), [1990] A.C.F. no 1096 (C.A.F.), la Cour d'appel fédérale (le juge MacGuigan) a conclu :

C'est à la Commission qu'il appartient de décider de la valeur probante qu'il y a lieu d'accorder à la preuve et cette décision n'est pas susceptible de révision par cette Cour.

[24]       À mon avis, la Cour doit appliquer une norme de contrôle stricte dans le cadre d'une demande de contrôle judiciaire d'une décision rendue par la Section d'appel. La demanderesse n'a donc pas établi que la Section d'appel avait fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[25]       À mon avis, la Commission a examiné tous ces faits ainsi que le contexte de la présente demande.

[26]       La demanderesse n'a soumis aucun élément de preuve indiquant que la Commission avait commis une erreur susceptible contrôle.


                                                               O R D O N N A N C E

EN CONSÉQUENCE, LA COUR ORDONNE QUE la présente demande de contrôle judiciaire soit rejetée.

Il n'y a aucune question à certifier.

« Pierre BLAIS »

Juge

OTTAWA (ONTARIO)

Le 17 décembre 2001

Traduction certifiée conforme

Julie Boulanger, LL.M.


COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

NO DU GREFFE :                                 IMM-5399-00

INTITULÉ :                                          Josefina Albertina Kruin c. MCI

LIEU DE L'AUDIENCE :                  Toronto (Ontario)

DATE DE L'AUDIENCE :                 Le 13 décembre 2001

MOTIFS DE L'ORDONNANCE : monsieur le juge Blais

DATE DES MOTIFS :                        Le 17 décembre 2001

COMPARUTIONS:

Mme Barbara Jackman                                                     POUR LA DEMANDERESSE

Mme Angel Marinos                                                                       POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER:

Jackman, Waldman & Associates                                                 POUR LA DEMANDERESSE

Toronto (Ontario)

M. Morris Rosenberg                                                                     POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada

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