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Date : 20220214


Dossier : IMM-73-21

Référence : 2022 CF 189

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 14 février 2022

En présence de madame la juge Strickland

ENTRE :

IRFAN SAFDAR

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

[1] La Cour est saisie d’une demande de contrôle judiciaire visant la décision par laquelle un agent de la section des visas [l’agent] de l’ambassade du Canada en Pologne, à Varsovie, a rejeté la demande de permis de travail temporaire du demandeur.

Contexte

[2] Le demandeur est un citoyen du Pakistan. En juin 2020, il a présenté une demande de permis de travail d’une durée de deux ans en tant que modérateur religieux ou éducateur religieux en lien avec une étude d’impact sur le marché du travail [l’EIMT] favorable obtenue par la société King Travel Can Ltd. [King Travel], avec laquelle il travaillait à temps partiel depuis 2012. Il a présenté les documents suivants à l’appui de sa demande : son curriculum vitae; une confirmation de son emploi antérieur de consultant Omra pour King Travel; un document sur sa formation faisant état de l’obtention d’un baccalauréat en commerce de l’Université du Pendjab en 2006; une confirmation d’admission au programme de certification européenne des professions de l’informatique au College of Computer Training [le CCT] en Irlande et de l’obtention de son diplôme (de mai 2007 à 2008); un document faisant état de l’obtention d’un diplôme d’études supérieures en gestion des technologies des communications et de l’information (les TCI) au CCT (de mai 2008 à juin 2009); une confirmation d’admission au programme de soutien des systèmes de TCI au CCT et de l’obtention de son diplôme (de mai 2009 à 2010); un document indiquant son résultat d’examen de l’IELTS (International English Language Testing System ou Système international de tests de la langue anglaise) obtenu en décembre 2006, soit une note globale de 5,0.

[3] La demande du demandeur a été rejetée le 18 novembre 2020.

La décision à l’examen

[4] La lettre de refus du 18 novembre 2020 est un document type. Il y est indiqué que la demande est rejetée conformément au paragraphe 200(1) du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002-227 [le Règlement], car l’agent n’est pas convaincu que le demandeur quitterait le Canada à la fin de son séjour compte tenu : du but de sa visite; des faibles perspectives d’emploi dans son pays de résidence; de sa situation d’emploi actuelle; de ses biens personnels et de sa situation financière. Il y est également indiqué que le demandeur n’a pas démontré qu’il était en mesure d’exercer adéquatement l’emploi pour lequel le permis avait été demandé, car il n’a pas fourni de preuve permettant d’établir qu’il connaissait l’anglais (une exigence indiquée dans l’EIMT), comme des résultats obtenus à un examen d’une organisation d’évaluation autorisée. Dans la lettre, il est en outre écrit que le demandeur est invité à présenter une nouvelle demande s’il estime qu’il peut répondre à ces réserves et démontrer que sa situation répond aux exigences.

[5] Il est bien établi que les notes qu’un agent a consignées dans le Système mondial de gestion des cas [le SMGC] font partie de ses motifs. En l’espèce, les notes consignées dans le SMGC, qui figurent au dossier certifié du tribunal [le DCT], indiquent ce qui suit :

[traduction]

[…] Le DP [le demandeur principal] a une EIMT pour travailler comme modérateur religieux ou éducateur religieux pour King Travel. L’EIMT exige la connaissance de l’anglais. La preuve que le DP a fournie à l’appui de sa demande ne permettait pas de démontrer qu’il avait les connaissances voulues en anglais; il a fourni des résultats de l’IELTS obtenus en 2006 et des certificats d’études. Compte tenu des renseignements au dossier, je ne suis pas convaincu que le DP ait les connaissances requises en anglais et, après examen, je ne suis pas convaincu que le demandeur a démontré de manière satisfaisante qu’il est en mesure d’exercer l’emploi offert au Canada. J’ai également constaté que la conjointe du DP au Pakistan ne travaillait pas et que le DP avait aussi deux enfants à sa charge. Le revenu du DP au Pakistan est de 200 $ par mois, ce qui est très peu pour une famille de quatre personnes. Je ne suis donc pas convaincu que les liens financiers du DP au Pakistan sont suffisants pour l’obliger à quitter le Canada à l’expiration du statut qui lui serait accordé. Demande rejetée.

Les dispositions législatives

Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS 2002-227

200 (1) Sous réserve des paragraphes (2) et (3), et de l’article 87.3 de la Loi dans le cas de l’étranger qui fait la demande préalablement à son entrée au Canada, l’agent délivre un permis de travail à l’étranger si, à l’issue d’un contrôle, les éléments ci-après sont établis :

[…]

b) il quittera le Canada à la fin de la période de séjour qui lui est applicable au titre de la section 2 de la partie 9;

[…]

(3) Le permis de travail ne peut être délivré à l’étranger dans les cas suivants :

a) l’agent a des motifs raisonnables de croire que l’étranger est incapable d’exercer l’emploi pour lequel le permis de travail est demandé;

Les questions en litige et la norme de contrôle

[6] Le demandeur allègue essentiellement que l’agent n’a pas tenu compte de certains aspects de sa preuve. La question soulevée est donc celle de savoir si la décision de l’agent est raisonnable. Les parties soutiennent, et je suis d’accord avec elles, que la norme de contrôle applicable est celle de la décision raisonnable (Canada (Citoyenneté et Immigration) c Vavilov, 2019 CSC 65 [Vavilov] aux para 10, 23 et 25).

[7] Dans le cadre d’un contrôle judiciaire, la cour de révision se demande si la décision possède les caractéristiques d’une décision raisonnable, soit la justification, la transparence et l’intelligibilité et si la décision est justifiée au regard des contraintes factuelles et juridiques pertinentes qui ont une incidence sur celle-ci (Vavilov, au para 99).

Analyse

Connaissance de l’anglais

[8] Le demandeur soutient que l’agent a commis une erreur en ne tenant pas compte de la preuve ou en rendant une décision abusive ou illogique, à savoir le rejet de sa demande au motif qu’il n’avait pas fait la preuve de ses compétences en anglais. Il fait valoir qu’il a fourni ses résultats à l’examen de l’IELTS, soit une note globale de 5,0, un élément de preuve qui démontrait qu’il avait obtenu trois diplômes d’études postsecondaires liés à des programmes d’un an suivis entre 2007 et 2010 au CCT à Dublin, en Irlande, où la langue d’enseignement est l’anglais, et une lettre de King Travel qui confirmait qu’il assumait déjà la plupart des fonctions indiquées dans l’offre d’emploi, à l’extérieur du Canada, depuis 2012. Il affirme que, combinés, les documents présentés constituaient une preuve solide selon laquelle sa formation en anglais était adéquate et qu’il était en mesure d’exercer l’emploi offert au Canada. Il ajoute que l’agent n’a ni évalué ses compétences linguistiques ni expliqué pourquoi il ne pourrait pas exercer l’emploi prévu, ce qui est contraire à la politique d’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (IRCC) énoncée dans le bulletin opérationnel Travailleurs étrangers : Évaluation du respect des exigences linguistiques [le bulletin opérationnel] et la jurisprudence de la Cour.

[9] Le défendeur soutient que, selon l’EIMT, la connaissance de l’anglais à l’oral et à l’écrit était requise pour exercer l’emploi prévu. Le demandeur a fourni un élément de preuve concernant ses compétences linguistiques, mais il n’était pas récent. Ses résultats à l’examen de l’IELTS dataient de 2006, et le rapport d’examen indiquait explicitement qu’une réévaluation des capacités linguistiques indiquées dans le formulaire de rapport d’examen était recommandée deux ans après la date de l’examen. Comme le demandeur a ensuite poursuivi ses études en Irlande, il y a lieu de croire qu’il a amélioré sa connaissance de l’anglais, mais ses cours se sont terminés en 2010, soit dix ans avant qu’il présente sa demande de permis de travail. Ses documents confirment qu’il a ensuite travaillé à temps partiel en tant que consultant Omra, mais ils n’indiquent pas quelle était sa langue de travail. Par conséquent, en l’absence d’un élément de preuve récent concernant les compétences linguistiques du demandeur, l’agent a raisonnablement conclu qu’il ne possédait pas une connaissance suffisante de l’anglais pour exercer l’emploi pour lequel le permis était demandé, et il a rejeté la demande. Le défendeur fait remarquer que le demandeur peut présenter des résultats à l’examen de l’IELTS récents à l’appui d’une nouvelle demande.

[10] D’abord, je souligne qu’un agent, suivant le paragraphe 200(3)a) du Règlement, ne peut délivrer un permis de travail s’il a des motifs raisonnables de croire que le demandeur serait incapable d’exercer l’emploi pour lequel le permis de travail est demandé. Il incombe au demandeur de produire des documents qui démontrent qu’il satisfait aux exigences du Règlement (Patel c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2021 CF 483 [Patel] au para 30), y compris qu’il possède les compétences linguistiques requises pour exercer l’emploi pour lequel le permis est demandé lorsqu’il existe des motifs raisonnables de croire que ces compétences sont nécessaires pour exercer l’emploi en question (Sun c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2019 CF 1548 au para 34). Les conclusions concernant les compétences linguistiques d’une personne qui demande un visa sont « à la fois fondées sur les faits et discrétionnaires » (Brar c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2020 CF 70 au para 13; Sulce c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 CF 1132 au para 8).

[11] Toutefois, « un agent des visas doit expliquer, en s’appuyant sur les éléments de preuve disponibles, en quoi un demandeur ne respecte pas la norme linguistique » (Bano c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2020 CF 568 [Bano] au para 24). Autrement dit, bien qu’il incombe au demandeur de produire une preuve suffisante pour remplir les conditions d’admissibilité, il demeure que l’agent doit apprécier la preuve qui lui a été présentée et expliquer en quoi elle ne remplit pas les conditions d’admissibilité pour lesquelles il rejette la demande (Lakhanpal c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2021 CF 694).

[12] À mon avis, en l’espèce, l’agent n’a pas expliqué pourquoi et comment il était parvenu à la conclusion que le demandeur n’avait pas la connaissance de l’anglais requise pour exercer l’emploi.

[13] Le bulletin opérationnel indique qu’un agent doit « faire référence aux exigences prévues dans l’EIMT, aux conditions de travail décrites dans l’offre d’emploi et aux exigences établies dans la CNP [la Classification nationale des professions] pour le type de poste précis, dans la détermination du niveau exact des compétences linguistiques nécessaires pour effectuer le travail prévu ».

[14] Comme il est indiqué dans la décision Kaur c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2017 CF 782 [Kaur] :

[24] Bien qu’il s’agisse uniquement de lignes directrices et non d’exigences juridiques, le défaut de présenter clairement une analyse détaillée de la manière dont le demandeur n’a pas réussi à convaincre l’agent qu’il serait capable d’effectuer le travail demandé est manifeste, en ce sens que la décision n’est ni justifiée, ni transparente, ni intelligible sur ce plan, de sorte qu’elle n’est ni raisonnable ni correcte.

[15] En l’espèce, l’EIMT indique, dans les renseignements sur l’emploi, que le code et le titre de la CNP sont 4217 – Autre personnel relié à la religion, modérateur religieux ou éducateur religieux. L’EIMT indique également que la connaissance de l’anglais est exigée pour occuper le poste, mais le niveau de connaissance n’y est pas précisé.

[16] L’offre d’emploi de King Travel décrit les tâches de l’emploi offert ainsi : accompagner des particuliers et des groupes lors de la Omra ou du Hajj (des pèlerinages islamiques) à La Mecque et de visites guidées à Médine; aider à l’accomplissement des rites religieux lors de ces pèlerinages; offrir de l’enseignement religieux en expliquant et en accomplissant tous les rites requis lors du Hajj ou de la Omra; visiter et décrire les lieux d’intérêt, et planifier et réaliser des activités de pèlerinage vers ces sites historiques; répondre aux demandes de renseignements. Il n’y a nulle mention d’exigences linguistiques ou d’un niveau de connaissance de l’anglais requis.

[17] Il est vrai que la preuve du demandeur concernant sa connaissance de l’anglais n’est pas récente. Par contre, il ne s’agit pas d’un cas où aucune preuve objective n’a été fournie. Le demandeur a fourni ses résultats à l’examen de l’IELTS ainsi qu’une preuve selon laquelle il a vécu en Irlande et qu’il y a réussi trois programmes d’études d’un an chacun entre 2007 et 2010. Dans la lettre d’admission au programme suivi en 2007 figure la mention suivante : [traduction] « Vous avez satisfait aux exigences minimales de connaissance de l’anglais pour ce cours. Note de 5,0 ou plus à l’examen de l’IELTS […] » Selon son curriculum vitae, le demandeur a travaillé à temps partiel pendant deux ans comme superviseur adjoint au restaurant Little Caesars, à Dublin, ce qui exigeait une très bonne connaissance de l’anglais à l’oral et à l’écrit. La preuve du demandeur démontrait également qu’il avait essentiellement effectué les mêmes tâches pour King Travel au cours des huit dernières années.

[18] L’agent n’a pas expliqué pourquoi la preuve ne suffisait pas à démontrer que la connaissance de l’anglais du demandeur ne satisfaisait pas à l’exigence de l’EIMT. L’agent a affirmé que l’EIMT exigeait [TRADUCTION] « des compétences en anglais », et, « selon les renseignements au dossier », il n’était pas convaincu que le demandeur « poss[édait] les compétences en anglais requises » et, « après une évaluation », il a conclu que le demandeur n’avait pas établi qu’il « [était] en mesure d’exercer l’emploi offert au Canada ». En l’espèce, contrairement à ce qui s’est passé dans l’affaire Patel c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2021 CF 573 (voir para 27), citée par le défendeur, la description et les exigences du poste indiquées dans la CNP n’ont pas été mentionnées par l’agent et ne figuraient pas dans le DCT. L’agent n’a pas décrit les tâches auxquelles le demandeur serait affecté, n’a pas indiqué de norme selon laquelle les compétences linguistiques du demandeur seraient évaluées pour juger de sa capacité d’accomplir ces tâches, et n’a pas expliqué pourquoi la preuve ne démontrait pas que les compétences du demandeur satisfaisaient à cette norme. Il n’a fourni aucun motif à l’appui de sa conclusion implicite selon laquelle les connaissances du demandeur en anglais n’avaient jamais satisfait à une norme quelconque non précisée ou qu’elles avaient régressé en deçà de cette norme après les trois années pendant lesquelles il avait vécu et étudié en Irlande. La conclusion de l’agent selon laquelle, d’après les documents fournis, le demandeur ne satisfaisait pas à l’exigence linguistique n’est ni intelligible ni justifiée.

[19] De plus, bien que le défendeur soutienne, par exemple, que King Travel n’a pas affirmé que la langue de travail du demandeur était l’anglais et que la Cour peut prendre connaissance d’office de ce que représente une note à l’examen de l’IELTS, l’agent, dans ses motifs, n’a traité ni de la lettre ni de la note du demandeur dans le contexte des fonctions de l’emploi offert, voire pas du tout.

[20] Dans l’arrêt Vavilov, la Cour suprême du Canada a souligné que « [l]orsque le décideur omet de justifier, dans les motifs, un élément essentiel de sa décision, et que cette justification ne saurait être déduite du dossier de l’instance, la décision ne satisfait pas, en règle générale, à la norme de justification, de transparence et d’intelligibilité » (Vavilov, au para 98). En l’espèce, ni les motifs de l’agent ni le dossier n’indiquent pourquoi, si ce n’est qu’elle n’était pas récente, la preuve documentaire du demandeur concernant sa connaissance de l’anglais ne suffisait pas à lui permettre d’exercer l’emploi pour lequel la demande avait été présentée.

Possibilité de prolongation du séjour sans autorisation

[21] Le demandeur soutient que l’agent a commis une erreur en se concentrant sur les raisons économiques le motivant à vouloir travailler au Canada, au détriment de nombreux facteurs qui le liaient au Pakistan et l’inciteraient probablement à quitter le Canada avant l’expiration de son visa. De plus, l’agent a commis une erreur en ne tenant pas compte du fait que le demandeur s’est conformé aux lois sur l’immigration dans le passé.

[22] Le défendeur ne présente aucune observation sur ces questions. Lorsqu’il a comparu devant moi, l’avocat a expliqué que la position du défendeur était que, même s’il ne concédait pas le point des raisons économiques, il ne présenterait aucune observation à cet égard et que la question de la connaissance de la langue était déterminante.

[23] Comme le souligne le demandeur, la Cour a reconnu que les personnes qui demandent un permis de travail temporaire au Canada le font parce qu’elles peuvent gagner plus d’argent ici que dans leur pays d’origine. Pour cette raison, toute personne qui demande ou obtient un permis de travail temporaire a des raisons financières de demeurer au Canada au-delà de la durée de séjour fixée : « Par conséquent, l’existence d’une motivation financière à rester au Canada ne peut, à elle seule, justifier le refus d’une demande. Autrement, aucune demande ne pourrait aboutir » (Rengasamy c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2009 CF 1229 au para 14).

[24] En effet, ce raisonnement est étayé par une jurisprudence bien établie (voir Ul Zaman c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2020 CF 268 au para 53 [Ul Zaman], citant Rengasamy au para 14; Cao c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2010 CF 941 [Cao] aux para 7-11; Dhanoa c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2009 CF 729 au para 18); Kindie c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2011 CF 850 au para 13; Chhetri c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2011 CF 872 aux para 12-14 [Chhetri]).

[25] Dans la décision Ul Zaman, le juge Pamel a conclu que l’agent avait commis une erreur en se concentrant sur les raisons économiques au détriment d’autres éléments de preuve. Dans cette affaire, au lieu d’apprécier la solidité des liens du demandeur avec le pays d’origine par rapport aux autres éléments de preuve, l’agent des visas a accordé beaucoup trop d’importance aux raisons économiques qui incitaient fortement le demandeur à rester au Canada et à ses intentions déclarées de demander un jour la résidence permanente (Ul Zaman, au para 51, citant Chhetri, au para 14).

[26] De même, en l’espèce, l’agent semble n’avoir pas tenu compte du fait que, dans sa demande de permis de travail, le demandeur avait indiqué que, bien qu’il ait l’espoir de devenir un jour un résident permanent du Canada par l’intermédiaire du Programme ontarien des candidats à l’immigration, il retournerait auprès de sa famille, soit sa femme, ses deux jeunes enfants ainsi que sa mère et sa fratrie qui résident tous au Pakistan, si cet objectif n’était pas atteint pendant son séjour autorisé d’une durée de deux ans. Aucun élément de preuve au dossier n’indique que le demandeur a de la famille au Canada, mais l’agent n’a pas examiné cet aspect. L’agent ne semble pas non plus avoir tenu compte du fait que le demandeur s’était conformé aux exigences liées au visa lors de ses études en Irlande (Calaunan c Canada (Citoyenneté et de l’Immigration), 2011 CF 1494 au para 28; Murai c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2006 CF 186; Momi c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2013 CF 162 au para 20), ou que le demandeur avait démontré qu’il travaillait comme consultant Omra au Pakistan de façon continue depuis 2011, y compris pour King Travel.

[27] À mon avis, l’agent a commis une erreur en ne tenant compte que du faible revenu du demandeur au Pakistan et de l’attrait financier du Canada qui en résulte, et ce, sans apprécier cet aspect au regard des facteurs d’« attirance » qui incitaient le demandeur à retourner au Pakistan.

[28] Par conséquent, la décision de l’agent n’est pas raisonnable.

 


JUGEMENT dans le dossier IMM-73-21

LA COUR STATUE que :

  1. La demande de contrôle judiciaire est accueillie;

  2. La décision est annulée, et l’affaire est renvoyée à un autre agent pour qu’une nouvelle décision soit rendue;

  3. Aucuns dépens ne sont adjugés;

  4. Aucune question de portée générale n’a été proposée aux fins de la certification, et aucune n’est soulevée.

« Cecily Y. Strickland »

Juge

Traduction certifiée conforme

N. Belhumeur


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-73-21

 

INTITULÉ :

IRFAN SAFDAR c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Tenue par vidéoconférence au moyen de Zoom

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 9 FÉVRIER 2022

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LA JUGE STRICKLAND

 

DATE DES MOTIFS :

LE 14 FÉVRIER 2022

 

COMPARUTIONS :

David Orman

 

POUR LE DEMANDEUR

 

Christopher Ezrin

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Avocat

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DEMANDEUR

 

Ministère de la Justice Canada

Toronto (Ontario)

 

Pour le défendeur

 

 

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