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Date : 20220502


Dossier : IMM‑3006‑20

Référence : 2022 CF 634

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 2 mai 2022

En présence de madame la juge Simpson

ENTRE :

MONIQUE MELEISHA ANDERSON

demanderesse

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

[1] La Cour est saisie d’une demande de contrôle judiciaire de la décision rendue le 8 juillet 2020 [la décision contestée], par laquelle un agent des visas [l’agent] a rejeté la demande de résidence permanente fondée sur des considérations d’ordre humanitaire qu’avait présentée la demanderesse.

[2] La demanderesse est née le 4 février 1991 à Montego Bay, en Jamaïque. Le 12 juin 2017, elle a rendu visite à sa sœur à Leamington, en Ontario. Elle était alors enceinte de trois mois. Le 20 septembre 2017, elle a donné naissance prématurément à sa fille, Drayanna. Cette dernière a été hospitalisée à l’unité néonatale de soins intensifs pendant 65 jours. Elle était sous assistance respiratoire pendant une partie de cette période, et le manque d’oxygène était un problème préoccupant. Après sa sortie de l’hôpital, elle a été suivie et a reçu des soins constants d’un pédiatre, le Dr Kassas.

I. La décision contestée

[3] Lorsque l’agent a rendu sa décision sur la demande fondée sur des considérations d’ordre humanitaire, Drayanna était âgée de deux ans et huit mois. Elle bénéficiait d’un suivi et se portait très bien. Dans une lettre datée du 9 avril 2018, le Dr Kassas a écrit que Drayanna, qui était alors âgée de près de sept mois, était en bonne santé et se développait bien. Il a également précisé que son état de santé ne le préoccupait pas et qu’elle ne prenait aucun médicament. Aucune autre lettre du Dr Kassas n’a été soumise à l’agent.

[4] Dans sa lettre, le Dr Kassas a également indiqué que Drayanna devrait faire l’objet d’un suivi constant jusqu’à l’âge d’au moins cinq ans pour évaluer son développement neurologique, car elle présente un risque élevé de retard global du développement, de paralysie cérébrale, de difficultés d’apprentissage, de trouble déficitaire de l’attention avec hyperactivité et d’autres troubles. Cependant, elle ne souffrait d’aucun de ces problèmes lorsque la décision contestée a été rendue.

[5] Un autre document versé au dossier certifié du tribunal – le rapport final du groupe de travail de la clinique de soins néonatals daté du 21 mai 2015 [le rapport] – indiquait qu’un suivi devrait être effectué de 4 à 8 semaines après la sortie de l’hôpital de Drayanna, puis 4, 8, 12, 18 et 36 mois après son congé. Un dernier rendez‑vous devrait avoir lieu lorsqu’elle aurait six ou sept ans. Comme Drayanna avait presque trois ans au moment où la décision contestée a été rendue, l’agent a, en pratique, tenu compte du fait qu’elle aurait peut‑être besoin d’un suivi à l’âge de cinq ans, puis à l’âge de six ou sept ans.

[6] L’agent avait bien compris qu’il devait tenir compte du suivi dont devait faire l’objet Drayanna. Dans sa décision, il a déclaré que [traduction] « la demanderesse soutient qu’il est dans l’intérêt supérieur de l’enfant que celle‑ci reste au Canada afin qu’un suivi de sa croissance, de son développement et de sa santé puisse être effectué ». L’agent a souligné que le suivi à la clinique de soins néonatals visait à s’assurer que Drayanna se développait normalement par rapport aux courbes de croissance de l’enfant, et que, comme il a été mentionné précédemment, son pédiatre n’avait aucune inquiétude à cet égard. La demanderesse n’a pas fourni à l’agent une lettre mise à jour du Dr Kassas, ce qui donne à penser que, au moment où la décision contestée a été rendue, Drayanna était encore en bonne santé.

[7] Une interprétation juste de la décision contestée tend à démontrer que, lorsqu’il a parlé de [traduction] « traitement », l’agent faisait référence aux exercices d’élocution à domicile, aux conseils nutritionnels et au suivi dont avait besoin Drayanna. L’agent a exprimé des réserves parce que la demanderesse ne lui avait fourni aucune information qu’auraient pu recueillir le père, les grands‑parents ou d’autres membres de la famille de Drayanna en Jamaïque au sujet de la disponibilité ou de la non‑disponibilité de soins de suivi pour les enfants d’âge scolaire nés prématurément. L’agent n’avait reçu que des renseignements génériques sur l’insuffisance de fonds et le manque d’équipement du système de soins de santé jamaïcain. Dans ces circonstances, l’agent a conclu que la preuve dont il disposait n’était pas suffisante pour établir qu’un déménagement en Jamaïque compromettrait les soins de santé de Drayanna.

[8] Outre les questions de santé, l’agent a tenu compte de l’intérêt supérieur de Drayanna en ce qui a trait à ses conditions de vie. Elle vivait avec la demanderesse à Windsor dans un refuge pour les femmes enceintes et les nouvelles mères qui n’ont nulle part où aller. La demanderesse n’avait aucun lien familial ni aucun ami et son degré d’établissement était minime. Par contre, le père de Drayanna habitait en Jamaïque et il avait exprimé le souhait de tisser des liens avec elle. D’autres membres de la famille de Drayanna vivaient aussi dans ce pays.

II. La question en litige

[9] La demanderesse a déclaré que l’agent n’avait pas tenu compte du fait que Drayanna avait besoin d’un suivi pour détecter l’apparition de toute maladie ou affection causée par les lésions cérébrales qu’elle aurait pu avoir subies en raison de sa naissance prématurée.

III. Analyse

[10] À mon avis, l’agent avait compris que Drayanna avait besoin d’un suivi pour détecter tout problème de santé possible et que la disponibilité de soins de suivi posait problème. Ce point avait été clairement exprimé dans la lettre du Dr Kassas et dans le rapport précité. J’estime donc qu’en l’absence de toute preuve attestant que Drayanna ne pourrait pas avoir un rendez‑vous de suivi à l’âge de cinq, six ou sept ans en Jamaïque, l’agent a raisonnablement conclu qu’il était dans son intérêt supérieur de quitter le refuge où elle vivait pour se rendre en Jamaïque, où elle avait un père aimant et bénéficierait du soutien de ses deux parents.

IV. La certification d’une question

[11] Aucune question n’a été proposée aux fins de certification en vue d’un appel.

V. Conclusion

[12] Une ordonnance rejetant la demande sera rendue.

 


JUGEMENT DANS LE DOSSIER IMM‑3006‑20

LA COUR STATUE que la présente demande de contrôle judiciaire est rejetée.

« Sandra J. Simpson »

Juge

Traduction certifiée conforme

Manon Pouliot, traductrice


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM‑3006‑20

 

INTITULÉ :

MONIQUE MELEISHA ANDERSON c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

AUDIENCE TENUE PAR TÉLÉCONFÉRENCE AU MOYEN DE ZOOM

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 6 AVRIL 2022

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LA JUGE SIMPSON

 

DATE DES MOTIFS :

LE 2 MAI 2022

 

COMPARUTIONS :

Mary Jane Campigotto

 

POUR LA DEMANDERESSE

 

Asha Gafar

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Campigotto Law Firm

Windsor (Ontario)

 

POUR LA DEMANDERESSE

 

Procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

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