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Date : 20001213

Dossier : T-1080-00

ENTRE :

                 AFFAIRE INTÉRESSANT LA LOI DE L'IMPÔT SUR LE REVENU

                                                                    - et -

AFFAIRE INTÉRESSANT UNE OU DES COTISATIONS ÉTABLIES

PAR LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL EN VERTU DE

L'UNE OU L'AUTRE DES DISPOSITIONS DE LA

LOI DE L'IMPÔT SUR LE REVENU, DU RÉGIME DE PENSIONS DU CANADA

OU DE LA LOI SUR L'ASSURANCE-EMPLOI,

                                                          SANDRA STEIN

                                                                                                                           demanderesse

                                                                     ET :

                                                    SA MAJESTÉ LA REINE

                                                                                                                            défenderesse

                                               MOTIFS D'ORDONNANCE

LE JUGE LEMIEUX

A. Introduction

[1]         Sandra Stein (la demanderesse) cherche à obtenir, conformément au paragraphe 225.2(9) de la Loi de l'impôt sur le revenu (la Loi), un examen de l'autorisation ex parte que le juge Pelletier de notre Cour a donnée à la défenderesse le 23 juin 2000.


[2]         Le juge Pelletier a donné cette autorisation en vertu du paragraphe 225.2(2) de la Loi, dont voici le libellé :

(2) Recouvrement compromis. Malgré l'article 225.1, sur requête ex parte du ministre, le juge saisi autorise le ministre à prendre immédiatement des mesures visées aux alinéas 225.1(1)a) à g) à l'égard du montant d'une cotisation établie relativement à un contribuable, aux conditions qu'il estime raisonnables dans les circonstances, s'il est convaincu qu'il existe des motifs raisonnables de croire que l'octroi à ce contribuable d'un délai pour payer le montant compromettrait le recouvrement de tout ou partie de ce montant.

[3]         Les mesures que la défenderesse était autorisée à prendre sont énoncées aux alinéas 225.1a) à g), qui prévoient :

a)          entamer une poursuite devant un tribunal;

b)          attester le montant, conformément à l'article 223;

c)          obliger une personne à faire un paiement, conformément au paragraphe 224(1);

d)          obliger une institution ou une personne visée au paragraphe 224(1.1) à faire un paiement, conformément à ce paragraphe;

e)          exiger la retenue du montant par déduction ou compensation, conformément à l'article 224.1;

f)           obliger une personne à remettre des fonds, conformément au paragraphe 224.3(1);

g)          donner un avis, délivrer un certificat ou donner un ordre, conformément au paragraphe 225(1).

[4]         En particulier, la demanderesse cherche à obtenir une ordonnance en annulation de l'ordonnance du juge Pelletier.

[5]         Le paragraphe 225.2(11) de la Loi décrit le pouvoir du juge qui procède à l'examen :


(11) Ordonnance. Dans le cas d'une requête visée au paragraphe (8), le juge statue sur la question de façon sommaire et peut confirmer, annuler ou modifier l'autorisation et rendre toute autre ordonnance qu'il juge indiquée.

B. Les faits

[6]         Le 16 juin 2000, l'Agence canadienne des douanes et du revenu (l'Agence) a établi à l'égard de la demanderesse une cotisation de 155 245,82 $ en vertu de l'article 160 de la Loi relativement à une opération qui a eu lieu entre celle-ci et son époux le 8 novembre 1995. Le 20 juin 2000, l'Agence a demandé l'autorisation ex parte en vue d'entamer immédiatement des procédures d'exécution afin de percevoir le montant de la cotisation.

[7]         En vertu de l'autorisation, l'Agence a pris les mesures suivantes :

(a) En vertu de l'article 223 de la Loi, elle a certifié, le 27 juin 2000, que la somme de 155 245,82 $ représentait une somme payable qui n'avait pas été payée; la même journée, elle a obtenu un bref de saisie et vente;

(b) Le 11 juillet 2000, elle a enregistré une hypothèque à l'égard de la résidence principale de la demanderesse, qui en est la propriétaire inscrite;

(c) Le 15 août 2000, conformément au bref de saisie et vente, le huissier a saisi les oeuvres d'art de la résidence de la demanderesse;


(d) Au début du mois de juillet 2000, elle a émis des ordres de payer demandant à diverses institutions financières de saisir les REER de la demanderesse.

[8]         Dans l'affidavit qu'elle a produit au soutien du présent examen, la demanderesse a déclaré ce qui suit, aux paragraphes 7, 8 et 9 :

[TRADUCTION]

7.          Je n'ai pas l'intention de quitter le Canada ou de liquider mes éléments d'actif;

8.          À titre de femme d'affaires, je ne peux gérer mes affaires dans le contexte où la défenderesse est susceptible d'intenter une action contre moi en cour, saisir mes éléments d'actif ou faire des saisies touchant des tiers.

9.          La défenderesse a manifestement l'intention de vendre mes éléments d'actif bien que la cotisation établie soit susceptible d'être annulée, comme il ressort plus clairement de la pièce P-2, à l'ensemble de laquelle je renvoie.

[9]         La demanderesse a également produit, pour étayer sa demande d'examen, l'affidavit d'un évaluateur agréé qui a donné un « avis préliminaire » , par suite d'une « inspection rapide » , selon lequel la résidence principale de la demanderesse valait plus de 750 000 $.


[10]       La défenderesse a répondu en déposant un extrait du registre des biens immobiliers concernant la résidence de la demanderesse, qui démontrait que Revenu Québec avait récemment, soit le 4 décembre 2000, enregistré une importante hypothèque dont le montant était approximativement celui de la valeur estimative de la résidence; le montant total de cette hypothèque et des autres hypothèques enregistrées à valeur nominale dépasse la valeur estimative de plusieurs centaines de milliers de dollars.

[11]       Aucune estimation de la valeur des oeuvres d'art n'a été produite par la demanderesse dans le cadre du présent examen. Cependant, il ressort du dossier qu'elles ont une valeur considérable, compte tenu de la valeur assurée.

C. L'analyse

[12]       L'avocat de la demanderesse n'a pas, en bout de ligne, insisté en vue d'obtenir la réparation qu'il avait originalement demandée, soit l'annulation de l'autorisation donnée par le juge Pelletier. Il m'a plutôt demandé de modifier l'ordonnance afin d'approuver ce que l'Agence avait déjà saisi, tout en interdisant à celle-ci de faire d'autres efforts de recouvrement.


[13]       À cet égard, il s'est fondé sur la déclaration de l'avocat de la défenderesse, qui a dit que conformément à sa politique générale, l'Agence ne chercherait pas à obtenir la vente de la résidence principale et des oeuvres d'art de la demanderesse jusqu'à ce que l'opposition de la demanderesse à la cotisation de 155 245,82 $ n'ait été tranchée, soulignant au passage qu'il doutait que l'Agence puisse réaliser les REER, et ce en raison de restrictions sur le plan juridique.

[14]       Les parties ne s'entendent pas au sujet de la modification de l'ordonnance que la demanderesse cherche à obtenir, c'est-à-dire qu'il soit interdit à l'Agence de faire d'autres efforts de recouvrement compte tenu de la théorie voulant que « trop, c'est trop » , la demanderesse faisant valoir que la valeur des biens saisis dépasse largement celle du montant de la cotisation.

[15]       L'avocat de la défenderesse conteste la restriction que la demanderesse cherche à obtenir en invoquant l'incertitude qui entoure l'estimation de la valeur de la résidence principale, la valeur des oeuvres d'art, et la disponibilité des REER, dont la réalisation ne pourrait être faite avant que la validité de la cotisation n'ait été confirmée.

[16]       Je ne suis pas disposé à modifier l'autorisation en interdisant à la défenderesse de faire d'autres efforts de recouvrement. Je suis convaincu que l'autorisation se fondait sur des motifs raisonnables, et, comme je suis de cet avis, j'estime qu'il faudrait qu'il y ait des circonstances exceptionnelles pour restreindre les efforts de recouvrement menacés. Or, je ne suis pas convaincu qu'il y ait de telles circonstances dans la présente affaire.


[17]       Il est vrai que l'Agence paraît avoir saisi des éléments d'actif de la demanderesse dont la valeur estimative dépasse largement le montant de la cotisation. Cependant, plusieurs hypothèques grèvent la résidence de la demanderesse, la valeur des oeuvres d'art n'a pas été déterminée, et l'accès à ses REER est limitée. En outre, il paraît y avoir confusion des éléments d'actif de la demanderesse et de ceux de son époux, ce qui fait l'objet d'une question grandement contestée. En outre, les inconvénients que la demanderesse pourrait subir par suite d'autres efforts de recouvrement ne constituent pas un motif pour les interdire. Il existe une réparation que la demanderesse peut chercher à obtenir si l'Agence agi de façon abusive.

[18]       Pour ces motifs, l'autorisation donnée par le juge Pelletier est confirmée.

                                                                                                                « François Lemieux »          

                                                                                                                                   J.C.F.C.                    

Montréal (Québec)

Le 13 décembre 2000.

Traduction certifiée conforme

Bernard Olivier, B.A., LL.B.


                                               

                   COUR FÉDÉRALE DU CANADA

              SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

Date : 20001213

Dossier : T-1080-00

ENTRE :

AFFAIRE INTÉRESSANT LA LOI DE L'IMPÔT SUR LE REVENU

- et -

AFFAIRE INTÉRESSANT UNE OU DES COTISATIONS ÉTABLIES

PAR LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL EN VERTU DE

L'UNE OU L'AUTRE DES DISPOSITIONS DE LA

LOI DE L'IMPÔT SUR LE REVENU, DU RÉGIME DE PENSIONS DU CANADA

OU DE LA LOI SUR L'ASSURANCE-EMPLOI,

                                  SANDRA STEIN

                                                                           demanderesse

                                             ET :

                            SA MAJESTÉ LA REINE

                                                                            défenderesse

                       MOTIFS D'ORDONNANCE


                                                             COUR FÉDÉRALE DU CANADA

                                                        SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

                                                          AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

NO DU GREFFE :                                         T-1080-00

INTITULÉ DE LA CAUSE :                       

AFFAIRE INTÉRESSANT LA LOI DE L'IMPÔT SUR LE REVENU

- et -

AFFAIRE INTÉRESSANT UNE OU DES COTISATIONS ÉTABLIES

PAR LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL EN VERTU DE

L'UNE OU L'AUTRE DES DISPOSITIONS DE LA

LOI DE L'IMPÔT SUR LE REVENU, DU RÉGIME DE PENSIONS DU CANADA

OU DE LA LOI SUR L'ASSURANCE-EMPLOI,

                                                                              SANDRA STEIN

                                                                                                                                                                demanderesse

                                                                                       ET :

                                                                        SA MAJESTÉ LA REINE

défenderesse

LIEU DE L'AUDIENCE :                            Montréal, (Québec)

DATE DE L'AUDIENCE :                           Le 11 décembre 2000

MOTIFS D'ORDONNANCE PRONONCÉS PAR MONSIEUR LE JUGE LEMIEUX

EN DATE DU :                                             13 décembre 2000

ONT COMPARU:

M. Louis-Frédérick Côté                                                                       POUR LA DEMANDERESSE

M. Pierre Lamothe                                                                                POUR LA DÉFENDERESSE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Mendelsohn Rosentzveig Shacter                                                           POUR LA DEMANDERESSE

Montréal (Québec)

Ministère de la Justice du Canada                                                          POUR LA DÉFENDERESSE

Montréal (Québec)

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