Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Date : 20220810


Dossier : IMM-5343-22

Référence : 2022 CF 1189

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 10 août 2022

En présence de monsieur le juge Zinn

ENTRE :

SSN ET ESN

demandeurs

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

ORDONNANCE ET MOTIFS

[1] Les demandeurs, au moyen d’une lettre datée du 29 juin 2022, ont introduit la présente demande d’autorisation et de contrôle judiciaire à l’encontre d’une décision de la Section d’appel des réfugiés [la SAR] de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié [la CISR]. En l’espèce, une grande partie des documents ont été déposés sous la forme de documents confidentiels protégés par un mot de passe, et ce, conformément à la directive donnée par notre Cour sur la procédure consolidée relative à la COVID-19 du 24 juin 2022.

[2] Les demandeurs ont présenté une requête simplifiée visant à obtenir une ordonnance d’anonymat au titre du Projet pilote : Procédure de requête simplifiée. Le défendeur ne semble pas s’opposer à cette requête, et celle-ci est donc accueillie. Avec effet immédiat, les demandeurs nommés dans l’intitulé de la présente demande sont désignés par SSN et ESN. De plus, toutes les références aux demandeurs dans les documents déposés doivent être modifiées de manière à ce qu’ils soient désignés par les initiales SSN et ESN plutôt que par leurs noms complets.

[3] Les demandeurs sollicitent également une ordonnance portant que le dossier soit considéré comme confidentiel, [traduction] « qu’il soit mis sous scellé, de manière à protéger l’identité des demandeurs et les renseignements contenus dans leur demande ». Le défendeur s’oppose à cette deuxième requête.

[4] La mise sous scellé d’un dossier de la Cour est une mesure extraordinaire, et il incombe à la partie requérante de s’acquitter du très lourd fardeau d’étayer sa requête au moyen d’éléments de preuve clairs et non spéculatifs.

[5] Au paragraphe 9 de la décision Garcia Puebla c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2022 FC 879, la juge Rochester a récemment décrit ainsi le critère applicable à la délivrance d’une ordonnance de confidentialité en vertu de l’article 151 des Règles des Cours fédérales, DORS/98-106 :

[traduction]

[L]e critère relatif à la délivrance d’une ordonnance de confidentialité établi par la Cour suprême du Canada dans l’arrêt Sierra Club of Canada c Canada (Ministre des Finances), 2002 CSC 41 [Sierra Club] au para 53, et reformulé dans l’arrêt Sherman Estate c Donovan, 2021 CSC 25 [Sherman] au para 38, n’a pas été rempli. Trois conditions préalables fondamentales doivent être établies par la personne qui sollicite une exception au principe de la publicité des débats judiciaires (Sherman, au para 38). La Cour peut imposer des limites discrétionnaires à la publicité des débats judiciaires seulement si : 1) la publicité des débats judiciaires pose un risque sérieux pour un intérêt public important, 2) l’ordonnance sollicitée est nécessaire pour écarter ce risque et 3) les avantages de l’ordonnance l’emportent sur ses effets négatifs (Sherman, au para 38, citant Sierra Club, au para 53).

[6] Les demandeurs affirment, comme fondement de leur requête, que [traduction] « la divulgation de leur identité et la publicité du dossier de la Cour exposeraient les demandeurs et les membres de leur famille qui se trouvent encore en Israël à un risque accru de persécution de la part des membres de la communauté en Israël ou des membres de l’État d’Israël ».

[7] Selon eux, les renseignements qui les mettraient en danger ainsi que leur famille sont leurs noms, le fait qu’ils sont secrètement musulmans et qu’ils ont utilisé indûment la loi du retour pour entrer en Israël.

[8] Je suis d’accord avec les observations du défendeur selon lesquelles ces renseignements sont connus de l’État d’Israël depuis 2013, soit depuis l’échec des demandes d’asile des demandeurs en Suède et en Norvège. En réplique, les demandeurs affirment qu’ils ne craignent pas seulement que l’État d’Israël soit au courant de ces renseignements, mais aussi qu’il vienne à apprendre qu’ils ont présenté une demande de protection contre les services israéliens de renseignement, compte tenu de l’expérience des membres de leur famille avec cet organisme.

[9] Il n’est pas nécessaire d’examiner en détail les affirmations qui précèdent, car la CISR les a rejetées dans la décision faisant l’objet de la présente demande de contrôle judiciaire. La Cour ne dispose tout simplement d’aucun élément de preuve crédible et non spéculatif qui étaye la crainte concernant les autorités israéliennes ou la communauté en général. Pour le motif que je viens d’énoncer, la requête en confidentialité doit être rejetée.

[10] Toutefois, conformément à l’ordonnance d’anonymat qui a été accordée, la Cour ordonne que les noms des demandeurs soient remplacés par SSN et ESN dans tous les documents déjà déposés, et que le nom des membres de leur famille soit caviardé. Leurs liens de parenté doivent tout de même être conservés ou indiqués.

[11] Les demandeurs et le défendeur doivent déposer à nouveau dans le dossier public tous les documents déjà déposés, conformément à la présente ordonnance. Tous les délais commencent à courir à partir de la date du nouveau dépôt public.

 


ORDONNANCE dans le dossier IMM-5343-22

LA COUR ORDONNE :

  1. La requête visant l’obtention d’une ordonnance d’anonymat est accueillie;

  2. Les noms qui identifient les demandeurs dans l’intitulé sont remplacés par SSN et ESN, avec effet immédiat;

  3. La requête en confidentialité est rejetée;

  4. Les demandeurs doivent déposer à nouveau dans le dossier public tous les documents qu’ils ont déjà déposés dans lesquels leurs noms sont remplacés par SSN et ESN et les noms de tous les membres de leur famille sont caviardés, mais où leurs liens de parenté sont conservés ou indiqués;

  5. Le défendeur doit apporter les modifications décrites ci-dessus à tous les documents qu’il a déjà déposés et les déposer à nouveau dans le dossier public;

  6. Dorénavant, tous les documents déposés au dossier doivent être conformes au paragraphe 4 de la présente ordonnance.

« Russel W. Zinn »

Juge

Traduction certifiée conforme

Noémie Pellerin Desjarlais


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-5343-22

 

INTITULÉ :

SSN et ESN c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

REQUÊTE PRÉSENTÉE PAR ÉCRIT ET EXAMINÉE À OTTAWA (ONTARIO), SOUS LE RÉGIME DE L’ARTICLE 369 DES RÈGLES DES COURS FÉDÉRALES

ORDONNANCE ET MOTIFS :

LE JUGE ZINN

 

DATE DES MOTIFS :

LE 10 AOÛT 2022

 

OBSERVATIONS ÉCRITES :

Erin Simpson

 

POUR LES DEMANDEURS

 

John Loncar

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Landings LLP

Cabinet d’avocats

Toronto (Ontario)

 

POUR LES DEMANDEURS

 

Procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.