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Date : 20221018

Dossier : IMM-3374-21

Référence : 2022 CF 1408

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Toronto (Ontario), le 18 octobre 2022

En présence de monsieur le juge Andrew D. Little

ENTRE :

SEUNGHO KIM

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

[1] Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire d’une décision rendue par la Section d’appel des réfugiés (la SAR) concernant la demande d’asile présentée par le demandeur au titre de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 (la LIPR). La SAR a conclu que le demandeur n’était pas exposé à un risque de persécution au sens de l’article 96 ou de mauvais traitement au sens du paragraphe 97(1) dans l’avenir.

[2] Pour les motifs qui suivent, la demande est rejetée.

I. Les faits et les événements à l’origine de la présente demande

[3] Le demandeur est citoyen de la République de Corée. Il a fondé sa demande d’asile présentée au titre de la LIPR sur l’intimidation dont il a été victime pendant des années à l’école en Corée du Sud, parce qu’il est né en Chine et que sa mère est originaire de la Corée du Nord.

[4] La Section de la protection des réfugiés (la SPR) a conclu qu’il n’y avait pas plus qu’une simple possibilité que le demandeur soit persécuté pour un motif prévu dans la Convention et qu’il était peu probable qu’il soit personnellement exposé à une menace à sa vie ou au risque de traitements ou peines cruels et inusités ou au risque d’être soumis à la torture.

[5] La SPR a conclu que le demandeur avait fait l’objet de discrimination, mais qu’elle n’équivalait pas à de la persécution. Le tribunal a également conclu que la discrimination avait eu une incidence sur sa qualité de vie en Corée du Sud, mais qu’elle ne menaçait pas ses droits fondamentaux.

[6] En ce qui concerne l’intimidation à l’école, la SPR a conclu que même si l’intimidation est une manifestation de la haine répandue dans le système d’éducation partout dans le monde, il s’agit d’un [traduction] « problème circonscrit dans le temps ». La SPR a conclu que le demandeur était un adulte au Canada et qu’il sera considéré comme un adulte en Corée du Sud lorsqu’il aura 19 ans. Le tribunal a conclu que le risque qu’il soit victime d’intimidation dans l’avenir n’était qu’une simple possibilité compte tenu de son âge et du fait qu’il n’était pas obligé de retourner à l’école où il a été intimidé.

[7] Le demandeur a interjeté appel auprès de la SAR. Celle-ci a rejeté l’appel, au motif que la SPR avait correctement conclu que l’appelant n’avait pas qualité de réfugié au sens de la Convention ni qualité de personne à protéger.

[8] La SAR a tiré sa conclusion en se fondant sur une analyse du risque potentiel. Elle a reconnu le désaccord du demandeur avec la SPR quant à la question de savoir si les événements passés constituaient de la persécution, mais a estimé qu’il n’était pas nécessaire qu’elle décide si ces événements passés répondaient à la définition de persécution.

[9] En ce qui concerne le risque potentiel, la SAR a conclu que, si le demandeur devait retourner en Corée du Sud, il ne serait pas exposé à plus qu’une simple possibilité d’être persécuté au sens de l’article 96 ou, selon la prépondérance des probabilités, de subir un préjudice visé à l’article 97.

[10] La SAR a conclu que le demandeur ne fréquentera plus l’école secondaire lorsqu’il retournera en Corée du Sud. Il aura plutôt terminé ses études secondaires au Canada à ce moment-là et il ne sera pas nécessaire qu’il retourne à l’école secondaire dans son pays. La SAR a conclu qu’il sera un adulte, fréquentant peut-être l’université. Elle a estimé qu’il n’y avait pas suffisamment de renseignements montrant que l’intimidation vécue à l’école se poursuit chez les adultes à l’université.

[11] À l’audience de la SPR, le demandeur a déclaré qu’il fréquentait l’école secondaire en onzième année au Canada. Au moment de l’appel, la SAR a constaté que le demandeur était en douzième année et qu’il lui restait environ deux mois pour terminer sa dernière année d’études secondaires. La SAR a compris qu’il aurait suffisamment de temps, après qu’elle aura rendu sa décision, pour terminer ses études secondaires avant de devoir retourner en Corée du Sud. Elle a tiré sa conclusion en se fondant sur sa compréhension selon laquelle, lorsque la SAR conclut qu’un demandeur d’asile n’a pas droit à l’asile, celui-ci ne doit pas obligatoirement quitter le Canada immédiatement du fait que d’autres choses pourraient survenir avant son départ, comme la présentation d’une demande d’autorisation et de contrôle judiciaire et d’une demande d’examen des risques avant renvoi. Ces procédures prennent du temps et donneraient « plus qu’amplement le temps au [demandeur] de terminer les quelques semaines restantes à sa douzième et dernière année d’études secondaires ».

[12] Par conséquent, la SAR a conclu que, si le demandeur devait retourner en Corée du Sud, il sera, à son retour, un adulte de 20 ans. Même s’il s’inscrivait à l’université, il n’aurait pas droit à l’asile parce que la preuve tend à indiquer que ce sont les enfants d’âge scolaire qui sont victimes d’intimidation à l’école. La SAR s’est référée à plusieurs documents, mentionnés dans le mémoire du demandeur présenté dans le cadre de l’appel, portant sur l’intimidation dont les enfants d’âge scolaire et les adolescents sont victimes à l’école.

[13] La SAR a donc rejeté l’appel et a confirmé la décision de la SPR.

II. Les questions en litige et la norme de contrôle

[14] Le demandeur a soulevé deux questions pour contester le caractère raisonnable de la décision de la SAR.

[15] Premièrement, le demandeur a soutenu que la SAR avait mal compris le critère juridique pour évaluer le risque potentiel au sens des articles 96 et 97, qu’elle s’était livrée à des conjectures et avait adopté à tort une vision étroite du fondement de la demande d’asile du demandeur.

[16] Deuxièmement, le demandeur a soutenu que la SAR avait commis une erreur en n’effectuant pas une analyse au titre du paragraphe 108(4) de la LIPR afin de déterminer s’il y avait des « raisons impérieuses » suffisantes, tenant à des persécutions et à des traitements antérieurs dont a été victime le demandeur pour qu’il refuse de se réclamer de la protection de l’État en Corée du Sud.

[17] La norme de contrôle qui s’applique à la décision de la SAR est celle de la décision raisonnable, telle qu’elle est énoncée dans l’arrêt Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Vavilov, 2019 CSC 65, [2019] 4 RCS 653. Le contrôle selon la norme de la décision raisonnable consiste en un examen empreint de déférence et rigoureux de la question de savoir si une décision administrative est transparente, intelligible et justifiée : Vavilov, aux para 12, 13 et 15. Les motifs du décideur, qui doivent être interprétés de façon globale et contextuelle et lus en corrélation avec le dossier dont disposait ce dernier, sont le point de départ du contrôle : Vavilov, aux para 91-96, 97 et 103; Société canadienne des postes c Syndicat des travailleurs et des travailleuses des postes, 2019 CSC 67 aux para 28-33. Une décision raisonnable doit être fondée sur une analyse intrinsèquement cohérente et rationnelle et est justifiée au regard des contraintes juridiques et factuelles auxquelles le décideur est assujetti. Vavilov, en particulier aux para 85, 99, 101, 105, 106 et 194.

III. Analyse

A. Le risque potentiel

[18] Le demandeur a soutenu que la SAR avait mal compris le critère juridique permettant d’évaluer le risque potentiel au sens de l’article 96. Il a affirmé qu’au lieu d’évaluer s’il était exposé à un risque de persécution au moment de sa décision, la SAR avait évalué si le demandeur serait exposé à un risque dans l’avenir lorsqu’il ne fréquenterait plus l’école secondaire. Selon le demandeur, la décision de la SAR était inintelligible parce que le tribunal a choisi une date dans l’avenir (deux mois après la décision, lorsque le demandeur aurait terminé ses études secondaires) comme point de référence pour son évaluation du risque potentiel, contrairement à la jurisprudence qui exige que l’évaluation soit faite à la date de la décision. Le demandeur a fait valoir que l’approche qu’il convient d’adopter consiste à examiner si, au moment de l’audience ou au moment où l’on statue sur la demande d’asile, le demandeur est exposé à un risque dans son pays d’origine. Il invoque l’arrêt Yusuf c Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration) (1995), 179 NR 11 (CAF) et d’autres affaires mentionnées ci-après.

[19] Je ne suis pas d’accord avec la thèse du demandeur. La SAR n’a pas commis d’erreur de droit comme il est allégué. La question dont la SAR était saisie était de savoir si le demandeur serait exposé à un risque potentiel s’il retournait dans son pays d’origine. Elle n’a pas commis d’erreur dans l’application du droit. Fondamentalement, sa décision comportait une évaluation visant à déterminer si le demandeur, à son retour en Corée du Sud après le prononcé de la décision de la SAR, subirait de la persécution ou des traitements contre lesquels il devrait être protégé par la LIPR. La SAR n’a pas commis d’erreur en concluant qu’en raison de l’écoulement du temps, le demandeur ne fréquenterait plus l’école secondaire à son retour en Corée du Sud. En fait, la SPR a tiré la même conclusion. Le demandeur n’a signalé aucun élément de preuve contradictoire concernant sa situation scolaire dans le dossier dont disposait la SAR ou la SPR.

[20] Les observations du demandeur reposaient en partie sur une nuance linguistique. Dans certaines décisions, la Cour a déclaré que l’évaluation d’un risque potentiel doit être effectuée à la date de la décision, à la date de l’audience ou « aujourd’hui » : voir, par exemple, Pazmandi c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2020 CF 1094 au para 38, citant la décision Mileva c Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1991] 3 CF 398 (CAF); Barrios Trigoso c (Citoyenneté et Immigration), 2011 CF 991 aux para 14 et 40; Nzayisenga c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2012 CF 1103 au para 29. Sur ce fondement, le demandeur a soutenu que s’il avait été en Corée du Sud à la date de la décision de la SAR, il aurait tout de même fréquenté l’école secondaire pendant deux mois de plus. Dans cet esprit, il a fait valoir qu’il est inadmissible que de la persécution soit exercée pendant deux mois. En fait, par cet argument, le demandeur a soutenu qu’il devait être traité comme s’il était en Corée du Sud à la date de la décision. Cependant, dans certaines décisions, la Cour a fait référence à l’analyse prospective pour déterminer si le demandeur d’asile subirait de la persécution s’il devait retourner dans son pays d’origine. Cette phraséologie tient compte de la possibilité que le demandeur n’y soit pas retourné à la date de la décision, mais qu’il y retourne (ou pourrait y retourner) un certain temps après la décision.

[21] À mon avis, les erreurs de droit susceptibles de révision ou erreurs de droit alléguées doivent être considérées comme des questions de fond et ne doivent pas reposer sur une tournure de phrase employée dans une décision ou une autre. La Cour d’appel fédérale a déclaré dans l’arrêt Mileva :

La question que soulève la revendication du statut de réfugié, en effet, n’est pas celle de savoir si le revendicateur a déjà eu, dans le passé, des motifs de craindre la persécution, mais bien celle de savoir s’il a aujourd’hui, au moment où l’on statue sur sa revendication, des motifs sérieux de craindre d’être persécuté dans l’avenir.

[22] Essentiellement, la Cour doit déterminer si, dans sa décision, la SAR a tranché légitimement la question de savoir si le demandeur avait des motifs de craindre d’être persécuté dans l’avenir s’il retournait en Corée du Sud. À mon avis, la SAR n’a pas commis d’erreur susceptible de révision. Elle n’a pas commis d’erreur dans la façon dont elle a appliqué le droit et je ne peux pas non plus conclure qu’elle a commis une erreur susceptible de contrôle dans la façon dont elle a appliqué le critère permettant d’évaluer le risque potentiel au temps écoulé jusqu’à ce que le demandeur ait terminé ses études secondaires. Sa compréhension des éléments de preuve ne supposait pas de prédiction ou de conjecture inappropriée. Il s’agissait d’une conclusion que la SAR pouvait tirer des éléments de preuve au dossier et de l’écoulement normal du temps. Bien que je ne rejette pas catégoriquement la thèse du demandeur selon laquelle la SAR n’aurait pas dû prendre en compte le fait qu’il pouvait demander le contrôle judiciaire de sa propre décision ou un examen des risques avant renvoi, je conclus que cela n’a pas vicié sa conclusion relative au risque potentiel comme l’a allégué le demandeur.

[23] Pour appuyer sa thèse sur le risque potentiel, le demandeur a également soutenu que la SAR n’avait examiné que de façon restrictive le risque de persécution lié à l’intimidation à l’école auquel il serait exposé, alors que le dossier de preuve étayait une approche plus large. Il affirme que le dossier contenait des éléments de preuve sur les conditions dans le pays qui indiquaient que, dans la société sud-coréenne en général, les personnes présentant les caractéristiques du demandeur, à savoir une personne née en Chine et ayant un parent nord-coréen, faisaient l’objet de mauvais traitements et de discrimination généralisés. Le demandeur a également fait remarquer qu’il avait déclaré à l’audience de la SPR qu’il craignait que les gens en général le traitent de façon discriminatoire en Corée du Sud, et pas seulement les jeunes d’âge scolaire.

[24] Le défendeur a soutenu que les arguments présentés par le demandeur à la SAR et à la SPR étaient axés sur l’intimidation à l’école. Sa demande d’asile était fondée sur les mauvais traitements qu’il a subis auparavant quand il était étudiant en Corée du Sud, de la troisième année à la deuxième année environ, et sur les effets que ces mauvais traitements et cette intimidation ont produits sur lui (notamment, des problèmes importants de santé mentale). De plus, le défendeur a soutenu que les éléments de preuve relatifs aux conditions dans le pays ne portaient que sur la discrimination, qui est une réalité distincte de la persécution. Aussi répréhensible et regrettable que soit cette discrimination, le défendeur a soutenu qu’il ne s’agit pas de persécution sur le plan juridique et qu’elle n’était donc pas importante pour la décision relative à l’appel.

[25] À mon avis, le défendeur a raison de dire que la thèse du demandeur était fondée sur le fait qu’il a été victime d’intimidation et de mauvais traitements de la part d’autres élèves. Bien qu’il ait été question d’un traitement discriminatoire plus général dans la société sud-coréenne, ce n’était pas le fondement de son appel devant la SAR. En l’espèce, je ne relève aucune erreur susceptible de contrôle dans la décision de la SAR.

B. Le paragraphe 108(4) de la LIPR

[26] Dans un deuxième argument, le demandeur a fait valoir que la SAR avait commis une erreur susceptible de révision en n’effectuant pas une évaluation des « raisons impérieuses » visées au paragraphe 108(4) de la LIPR. Il a soutenu que la SAR était tenue d’effectuer cette évaluation, qu’il ait ou non explicitement invoqué cette disposition. Il a également soutenu que la SAR avait implicitement reconnu qu’il avait été maltraité et persécuté.

[27] Le demandeur n’a pas soulevé de question concernant le paragraphe 108(4) devant la SAR. Dans ses observations écrites, le défendeur a mentionné que cette question n’avait pas été soulevée comme motif d’appel. Le dossier indique que le demandeur n’a présenté aucune observation à la SAR sur cette question. Le défendeur a invoqué la décision Ogunjinmi c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2021 CF 109 au para 21. Le demandeur a fait valoir que la question ne pouvait pas être soulevée devant la SAR parce que la SPR avait conclu qu’il n’y avait pas eu de persécution par le passé, et que la SAR avait l’obligation de tenir compte du paragraphe 108(4).

[28] Bien que je trouve la thèse du défendeur plus intéressante que celle du demandeur sur cette question, je ne ferai pas d’autres commentaires à ce sujet. La thèse du demandeur n’est pas défendable sur le fond.

[29] L’article 108 de la LIPR porte sur la perte du statut de réfugié : voir Canada (Ministère de l’Emploi et de l’Immigration)c Obstoj, [1992] 2 CF 739 (CA). L’alinéa 108(1)e) dispose que la demande d’asile d’un réfugié est rejetée si les raisons qui lui ont fait demander l’asile n’existent plus. Le paragraphe 108(4) prévoit une exception à cet alinéa lorsque des « raisons impérieuses » amènent le demandeur d’asile à ne pas réclamer la protection de son pays malgré ce changement de circonstances.

[30] Dans l’arrêt Yamba, la Cour d’appel fédérale a conclu qu’il faut se demander s’il existe des raisons impérieuses « lorsqu’elle conclut qu’un demandeur de statut a déjà été persécuté, mais qu’il y a eu un changement de situation dans le pays en question » : Yamba c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), (2000), 254 NT 388 (CAF) au para 6. La Cour a déclaré que, pour qu’il y ait application du paragraphe 108(4), il faut (s’agissant d’une exigence ou condition préalable) que le demandeur d’asile ait eu la qualité de réfugié au sens de la Convention ou de personne à protéger : Lozano Caceres c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2022 CF 179 au para 34; Pazmand, aux para 48-50; Krishan c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2018 CF 1203 aux para 76, 77; Castillo Mendoza c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2010 CF 648 aux para 27, 28. Obstoj, au para 14.

[31] Au paragraphe 49 de la décision Pazmandi, le juge McHaffie a fait référence, en semblant l’approuver, au passage suivant de la décision Contreras Martinez c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2006 CF 343 au paragraphe 21 :

Le libellé du par. 108(4) indique clairement qu’il n’a pas pour but d’imposer à la SPR une large obligation d’examiner l’existence de « raisons impérieuses » dans chaque demande d’asile. Lorsqu’un demandeur d’asile n’est ni un réfugié ni une personne à protéger parce que les conditions exposées dans la définition générale figurant aux articles 96 et 97 de la LIPR ne sont pas remplies, la SPR n’est aucunement tenue de procéder à un examen des « raisons impérieuses ». Cela n’est nécessaire que lorsque la demande est rejetée aux termes de l’al. 108(1)e).

[32] En l’espèce, la SPR a conclu que la demande d’asile du demandeur ne remplissait pas les conditions lui permettant de bénéficier de la protection prévue à l’article 96 et au paragraphe 97(1) de la LIPR. Elle a conclu que le demandeur avait subi un traitement en Corée du Sud qui équivalait à de la discrimination, mais non à de la persécution. De son côté, la SAR a reconnu que le demandeur ne souscrivait pas aux conclusions de la SPR, mais a estimé qu’il n’était pas nécessaire d’établir si les événements passés dont le demandeur a souffert répondaient à la définition de persécution, en raison de sa conclusion concernant l’absence de risque potentiel. Par conséquent, la SAR n’a pas tiré de conclusion implicite selon laquelle le demandeur était persécuté, comme il le faisait valoir, et n’a pas modifié la conclusion de la SPR sur cette question. Le demandeur ne remplit donc pas une condition préalable à l’application du paragraphe 108(4). De plus, il convient de souligner que la SAR n’a pas fait référence à l’article 108 et n’a pas rejeté la demande du demandeur au motif que les raisons pour lesquelles il avait demandé l’asile n’existaient plus, au titre de l’alinéa 108(1)e). En fait, cette allégation aurait été incompatible avec la thèse sur le risque potentiel avancée devant la SAR.

[33] Enfin, le demandeur a soutenu que les éléments de preuve permettaient d’établir qu’il avait déjà été victime de persécution, en particulier compte tenu des huit années durant lesquelles il a été victime d’intimidation. Toutefois, la question dont la Cour est saisie dans le cadre du contrôle judiciaire n’est pas de savoir si les éléments de preuve permettraient d’arriver à une conclusion de persécution. Il s’agit de savoir si la SAR a commis une erreur susceptible de contrôle en omettant complètement d’effectuer un examen visant à déterminer s’il existait des raisons impérieuses au titre du paragraphe 108(4). Compte tenu de la conclusion de la SPR selon laquelle la situation du demandeur n’équivalait pas à de la persécution et de l’absence de toute conclusion explicite ou implicite de la SAR, je conclus que l’omission par la SAR d’effectuer l’examen fondé sur le paragraphe 108(4) respectait les contraintes juridiques et factuelles qui avaient une incidence sur sa décision.

[34] Par conséquent, la SAR n’a pas commis d’erreur susceptible de contrôle en omettant de considérer l’application du paragraphe 108(4).

IV. Conclusion

[35] La demande est donc rejetée. Aucune des parties n’a proposé de question à certifier.


JUGEMENT dans le dossier IMM-3374-21

LA COUR STATUE :

  1. La demande est rejetée.

  2. Aucune question n’est certifiée au titre de l’alinéa 74d) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés.

« Andrew D. Little »

Juge

Traduction certifiée conforme

Lyne Paquette, traductrice


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-3374-21

 

INTITULÉ :

SEUNGHO KIM c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

TORONTO (ONTARIO)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 10 MARS 2022

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LE JUGE A. D. LITTLE

 

DATE DES MOTIFS ET DU JUGEMENT :

LE 18 OCTOBRE 2022

 

COMPARUTIONS :

Annie O’Dell

 

POUR LE DEMANDEUR

 

Sally Thomas

Pour le défendeur

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Soo‑Jin Lee

Avocate

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DEMANDEUR

 

Sally Thomas

Procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

 

Pour le défendeur

 

 

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