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Date : 20221108


Dossier : T-1337-21

Référence : 2022 CF 1516

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Toronto (Ontario), le 8 novembre 2022

En présence de madame la juge Furlanetto

ENTRE :

NICHOLAS EVANS

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE ET DE LA PROTECTION CIVILE

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

[1] La Cour est saisie d’une demande de contrôle judiciaire de la décision du 27 mai 2021 [la décision] par laquelle un représentant du ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile [le ministre] a confirmé la décision d’un agent [l’agent] de l’Agence des services frontaliers du Canada [l’ASFC] de retenir les espèces saisies à titre de confiscation en vertu de l’article 29 de la Loi sur le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes LC 2000, c 17 [la Loi].

[2] Comme je l’indiquerai plus loin, j’estime, sur la foi des éléments de preuve dont disposait le décideur, que la décision est raisonnable et que la demande doit être rejetée.

I. Contexte

(1) Régime législatif

[3] Suivant le paragraphe 12(1) de la Loi, une personne est tenue de déclarer à un agent l’exportation des espèces d’une valeur égale ou supérieure au montant réglementaire, qui est fixé dans le Règlement sur la déclaration des mouvements transfrontaliers d’espèces et d’effets (DORS/2002-412) à 10 000 dollars CAN.

[4] Lorsque l’agent a des motifs raisonnables de croire que le paragraphe 12(1) a été enfreint, il peut saisir les espèces à titre de confiscation en vertu du paragraphe 18(1) de la Loi.

[5] Le paragraphe 18(2) de la loi fixe les conditions de la restitution des espèces saisies :

[6] En vertu de l’article 25 de la Loi, la personne dont les espèces ont été saisies peut demander le contrôle judiciaire de la décision du ministre. Conformément au paragraphe 27(1) de la Loi, le ministre décide s’il y a eu infraction au paragraphe 12(1). Si le ministre estime que le paragraphe 12(1) a été enfreint, il peut, entre autres, confirmer que les espèces sont confisquées en vertu de l’alinéa 29(1)c).

(2) Faits pertinents concernant le demandeur

[7] Le 1er février 2021, le demandeur, Nicholas Evans, a été interrogé au moment de l’embarquement sur un vol à destination du Guyana à l’aéroport international Pearson de Toronto. Lors de l’interrogatoire, il a révélé qu’il était en possession de 38 500 dollars canadiens, en plus de l’argent contenu dans son portefeuille, et d’un certain nombre d’enveloppes totalisant 661 dollars canadiens, 179 dollars américains, 15 000 dollars guyaniens et 105 dollars de Trinité-et-Tobago; aucun de ces montants n’avait été déclaré à la douane avant le départ.

[8] L’agent a saisi les 38 500 dollars canadiens au motif que le demandeur ne les avait pas déclarés, suivant le paragraphe 12(1) de la Loi. L’agent a interrogé le demandeur sur la provenance des espèces. L’agent s’est fondé sur les réponses fournies pour conclure que le demandeur n’avait pas démontré que les espèces provenaient d’une source légitime claire. L’agent a maintenu la confiscation des espèces en application du paragraphe 18(2) de la Loi.

[9] Le 2 février 2021, le demandeur a demandé au ministre de réviser la mesure d’exécution prise par l’agent. Le demandeur a affirmé qu’il avait mal compris l’exigence de déclaration et qu’il pensait pouvoir déclarer les espèces à l’aide d’un formulaire remis à bord de l’avion. Il a indiqué qu’il avait travaillé dans le secteur de la construction et dirigé sa propre entreprise pendant 15 ans, qu’il avait reçu des paiements de clients en espèces, par chèque et par virement électronique et que, vers le mois d’août 2020, il avait reçu un paiement d’assurance de 14 180 dollars pour un camion de travail volé. Le demandeur a également fourni des relevés bancaires de son compte de chèques.

[10] Le 19 février 2021, le président a signifié un avis exposant les circonstances de la saisie au demandeur afin qu’il [traduction] « présente des éléments de preuve documentaire démontrant la provenance légitime de la totalité des espèces saisies ». La lettre indiquait que le demandeur devait fournir une explication détaillée accompagnée d’éléments de preuve démontrant l’absence d’autres explications pour la provenance des espèces. L’avis incluait des exemples du type d’éléments de preuve documentaire à fournir. Dans l’avis, le président a souligné que certains documents bancaires avaient déjà été fournis par le demandeur, mais il a fait remarquer que les relevés bancaires ne permettaient pas de savoir si le compte appartenait au demandeur et n’indiquaient pas quels dépôts ou retraits étaient liés au total des espèces saisies.

[11] En réponse à l’avis, le demandeur a présenté un chèque annulé associé à son compte bancaire, une copie du chèque d’assurance pour le véhicule de travail volé et trois factures de Benjamin Moore totalisant 800 dollars pour des fournitures qui, selon lui, ont été utilisées antérieurement pour des projets reliés au travail.

[12] Le 4 mars 2021, le demandeur a présenté des relevés bancaires supplémentaires pour un compte ouvert dans une autre banque.

[13] Le 27 mai 2021, le ministre a rendu sa décision suivant laquelle il a maintenu la mesure d’exécution pour défaut de déclaration des espèces et il a confirmé la confiscation des espèces saisies en vertu de l’article 29 de la Loi.

[14] Le ministre a conclu que la preuve du demandeur ne démontrait pas de lien avec les espèces saisies ou leur provenance légitime. La décision indique qu’en dépit de l’affirmation du demandeur selon laquelle une partie des espèces saisies provenait des revenus de son entreprise de construction, ce dernier n’a fourni aucun document confirmant l’existence de l’entreprise en question ni aucune preuve de son exploitation légitime. Les renseignements bancaires n’indiquaient pas la provenance des nombreux dépôts par virement électronique. De plus, bien que le demandeur ait identifié un dépôt effectué le 19 septembre 2020 associé au paiement de l’assurance du camion volé, il n’a pas identifié de retrait ultérieur permettant d’établir un lien entre le paiement de l’assurance et les espèces saisies. Compte tenu de l’absence d’éléments de preuve démontrant la provenance légitime de l’argent, le ministre a décidé que les espèces saisies seraient confisquées en vertu de l’article 29 de la Loi.

II. Questions en litige et norme de contrôle

[15] Le demandeur soulève les questions suivantes :

  1. La décision contestée était-elle raisonnable?

  2. Y a-t-il eu manquement à l’équité procédurale?

[16] Le défendeur a également soulevé deux questions préliminaires concernant la portée du contrôle judiciaire et la question de savoir si la Cour devait accepter l’affidavit présenté par le demandeur conjointement à la demande de contrôle judiciaire, car il comprenait des informations dont le décideur n’avait pas eu connaissance.

[17] La Cour d’appel fédérale a conclu que les décisions prises par le ministre sur le fondement de l’article 27 (le non-respect de l’exigence de déclaration) et de l’article 29 (la confiscation des espèces) de la Loi sont des décisions distinctes qui sont soumises à des mécanismes de contrôle distincts : Tourki c Canada (Sécurité publique et Protection civile), 2007 CAF 186 [Tourki] aux para 16-18.

[18] En vertu du paragraphe 30(1) de la Loi, une personne peut faire appel d’une décision concernant le non-respect de l’exigence de déclaration par voie d’action à la Cour fédérale. Inversement, une personne peut contester les conditions de la confiscation d’espèces confirmée en vertu de l’article 29 de la Loi par voie de demande de contrôle judiciaire sur le fondement du paragraphe 18.1(1) de la Loi sur les Cours fédérales, LRC 1985, c F-7.

[19] Pendant l’audition de la demande, le demandeur a admis que la seule décision visée par la présente demande de contrôle judiciaire est la confiscation des espèces par le ministre en vertu de l’article 29 de la Loi. Par conséquent, la seule question préliminaire qui subsiste est celle de l’admissibilité des nouveaux éléments de preuve déposés par le demandeur.

[20] Les parties conviennent que la norme de contrôle applicable à la décision du ministre prise en vertu de l’article 29 est celle de la décision raisonnable. Aucune des situations permettant de réfuter la présomption d’application de la norme de la décision raisonnable à une décision administrative n’est présente en l’espèce : Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Vavilov, 2019 CSC 65 [Vavilov] aux para 16-17.

[21] Lorsqu’elle applique cette norme, la Cour doit déterminer si la décision est « fondée sur une analyse intrinsèquement cohérente et rationnelle » et est « justifiée au regard des contraintes juridiques et factuelles auxquelles le décideur est assujetti »; Vavilov, aux para 83, 85-86; Société canadienne des postes c Syndicat des travailleuses et travailleurs des postes, 2019 CSC 67 aux para 2 et 31. Une décision raisonnable doit en posséder les caractéristiques, soit la justification, la transparence et l’intelligibilité : Vavilov, au para 99.

[22] La norme de contrôle applicable à l’équité procédurale est particulièrement bien reflétée dans la norme de la décision correcte, même si à proprement parler aucune norme de contrôle n’est appliquée : Chemin de fer Canadien Pacifique Limitée c Canada (Procureur général), 2018 CAF 69 [Chemin de fer Canadien Pacifique Limitée] aux para 54‑55. La cour qui apprécie un argument relatif à l’équité procédurale doit se demander si la procédure était équitable eu égard à l’ensemble des circonstances, en mettant nettement l’accent sur la nature des droits substantiels concernés et les conséquences pour la personne : Chemin de fer Canadien Pacifique Limitée, au para 54. La question fondamentale demeure celle de savoir si le demandeur connaissait la preuve à réfuter et s’il a eu une possibilité complète et équitable d’y répondre : Chemin de fer Canadien Pacifique Limitée, au para 56.

III. Analyse

(1) Nouveaux éléments de preuve du demandeur

[23] Dans le cadre de la preuve qu’il a présentée à l’appui de sa demande, le demandeur a présenté de nouvelles informations, y compris des documents relatifs à un prêt qui aurait été accordé dans le cadre du Régime d’aide financière aux étudiantes et étudiants de l’Ontario, ainsi que des documents bancaires supplémentaires. Il est admis que ces informations n’ont pas été communiquées au ministre. Dans ce contexte, elles n’auraient pas pu être examinées aux fins de la décision.

[24] Le rôle de la Cour dans le cadre d’un contrôle judiciaire n’est pas d’examiner à nouveau le fond de la décision, mais de déterminer si la décision faisant l’objet du contrôle était raisonnable. Il est bien établi en droit que sous réserve de quelques exceptions limitées, seul le dossier de preuve soumis au décideur administratif est admissible en preuve aux fins du contrôle judiciaire : Tsleil-Waututh Nation c Canada (Procureur général), 2017 CAF 128 [Tsleil-Waututh] aux paras 86, 98; Association des universités et collèges du Canada c. Canadian Copyright Licensing Agency (Access Copyright), 2012 CAF 22 aux para 18-19. Les exceptions reconnues incluent ce qui suit : 1) des renseignements généraux qui se limitent à de simples observations susceptibles d’aider la Cour à comprendre l’affaire dont elle est saisie, mais qui ne portent pas sur le fond du litige; 2) un document démontrant l’absence totale de preuve dont disposait le tribunal au moment de rendre sa décision; 3) un élément de preuve portant sur une question de justice naturelle, d’équité procédurale, de but illégitime ou de fraude dont le décideur n’aurait pas pu être saisi et qui n’intervient pas dans le rôle du décideur administratif : Tsleil-Waututh, au para 98; Bernard c Canada (Agence du revenu), 2015 CAF 263 aux para 20-25.

[25] Il est clair que la preuve présentée en l’espèce ne correspond pas à l’une des exceptions reconnues. Plutôt, comme dans l’affaire Sandidi c Canada (Sécurité publique et Protection civile), 2020 CF 995 [Sandidi] au para 41, le demandeur cherche à combler ce qu’il croit être des vides dans sa preuve après avoir pris connaissance de la décision dont le contrôle judiciaire est demandé. La Loi ne permet pas au demandeur d’améliorer ou de compléter sa preuve après que la décision a été rendue. L’examen des décisions de l’agent a été fait par le ministre. Le ministre ne peut être blâmé pour des éléments de preuve qui n’ont pas été portés à sa connaissance et il n’appartient pas à la Cour d’examiner de nouveaux éléments de preuve dans le cadre du processus visant à déterminer si la décision était raisonnable.

[26] Par ailleurs, comme dans l’affaire Sandidi, le demandeur ne peut pas invoquer le manquement à l’équité procédurale pour justifier le dépôt de nouveaux éléments de preuve. Le demandeur a eu de multiples occasions de présenter des documents à l’appui de la légitimité des espèces. Dans l’avis exposant les circonstances de la saisie, le président a détaillé le type de documents attendus et a indiqué en quoi les éléments de preuve déjà fournis comportaient des lacunes. Le ministre a accepté et examiné les documents présentés avant et après la délivrance de l’avis exposant les circonstances de la saisie. Aucun manquement à l’équité procédurale ne découle de la demande, de la réception et de l’examen des éléments de preuve.

[27] Les nouveaux éléments de preuve n’ont pas été dûment présentés, et notre Cour n’en tiendra pas compte.

(2) La décision contestée était-elle raisonnable?

[28] Le demandeur soutient que la décision est déraisonnable; il allègue qu’il est inéquitable que les éléments de preuve qu’il a présentés (et qui ont été communiqués au ministre) ne soient pas pris en compte, et que cela l’empêche de satisfaire au fardeau de preuve qui lui est imposé. Le demandeur s’interroge sur les éléments de preuve supplémentaires qu’il aurait pu présenter pour convaincre le ministre de la légitimité des espèces. Il demande également pourquoi le ministre ne l’a pas autorisé à payer une pénalité pour régler l’affaire au lieu de maintenir la confiscation des espèces. Il soutient que rien ne prouve que les espèces sont issues des produits de la criminalité et que le demandeur n’a pas été accusé de l’infraction de recyclage des produits de la criminalité prévue au paragraphe 462.31(1) du Code criminel, LRC 1985, c C-46 [le Code criminel].

[29] Comme l’a fait remarquer le défendeur, le pouvoir discrétionnaire conféré au ministre en vertu de l’article 29 est limité. Il n’inclut pas le contrôle de la mesure d’exécution prise par l’agent. Au contraire, la seule question à trancher est de savoir si les éléments de preuve présentés quant aux espèces confisquées démontrent de manière satisfaisante qu’elles ne sont pas issues

des produits de la criminalité : Bouloud c Canada (Sécurité publique et Protection civile), 2016 CAF 41 au para 3. Comme le résume l’arrêt Sellathurai c Canada (Ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile), 2008 CAF 255 [Sellathurai] au para 36 :

[36] la conclusion de l’agent des douanes suivant laquelle il a des motifs raisonnables de soupçonner que les devises saisies sont des produits de la criminalité devient caduque dès que le ministre confirme qu’il y a eu contravention à l’article 12. La confiscation est complète et les devises sont la propriété de l’État. La seule question qu’il reste à trancher pour l’application de l’article 29 est celle de savoir si le ministre exercera son pouvoir discrétionnaire pour annuler la confiscation soit en restituant les espèces confisquées elles-mêmes soit en remboursant la pénalité prévue par la loi qui a été versée pour obtenir la restitution des espèces saisies.

[30] Il incombe au demandeur d’établir que la provenance des espèces est légitime : Sandidi, au para 63. Contrairement à ce que fait valoir le demandeur, la question à trancher n’est pas celle de savoir si le ministre peut démontrer qu’il existe des motifs raisonnables de soupçonner que les fonds saisis sont des produits de la criminalité : Sellathurai au para 50. Le ministre n’est pas astreint à un tel fardeau.

[31] De plus, le paragraphe 462.3(1) du Code criminel ne s’applique pas à l’article 29 de la Loi. Le mécanisme de confiscation n’est pas de nature pénale; il s’agit plutôt d’un mécanisme de recouvrement civil : Tourki, au para 43. Il n’est pas nécessaire que le demandeur soit accusé ou reconnu coupable d’une infraction criminelle, et l’ASFC ou le ministre n’est pas tenu d’établir hors de tout doute raisonnable que les espèces proviennent d’une source illégitime.

[32] Dans la présente affaire, le ministre n’était pas convaincu que le demandeur avait démontré que les espèces confisquées provenaient d’une source légitime. Bien que le relevé bancaire du demandeur montre que de l’argent entre et sort de son compte, il n’y a pas de lien direct avec les 38 500 dollars confisqués et, à quelques exceptions près, il n’y a pas non plus d’indication de la source des fonds dans le compte. Le relevé bancaire montrait le paiement d’assurance de 14 180 dollars à titre de dépôt, mais le retrait n’y figurait pas. De plus, aucune explication n’a été fournie pour les 38 500 dollars trouvés sur le demandeur. Il n’y avait aucun lien entre cet argent ou tout autre dépôt sur le compte et les espèces confisquées.

[33] Le demandeur a également allégué qu’une partie des espèces saisies provenait des revenus de son entreprise de construction. Cependant, le seul élément de preuve soumis au ministre était un groupe de trois factures totalisant 800 dollars pour de la peinture achetée chez Benjamin Moore, qui, selon le demandeur, a servi a réalisé ses travaux de construction. Je conviens que cet élément de preuve est insuffisant. Comme l’agent l’a indiqué dans sa décision, le demandeur n’a présenté aucun document confirmant l’existence de l’entreprise ou de son exploitation légitime. Il n’est pas permis non plus de supposer que le revenu tiré de l’entreprise était lié aux 38 500 dollars confisqués.

[34] Comme l’a souligné la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Docherty c Canada (Sécurité publique et Protection civile) , 2013 CAF 89 au para 19, et à laquelle se réfère le représentant du ministre dans la décision :

[19] Chacun est libre d’organiser ses affaires de manière à laisser la plus petite trace financière permise par les lois fiscales fédérales et provinciales. Le désavantage en est que si quelqu’un est trouvé en possession d’un montant d’argent important dont la source est remise en question, cette personne a bien peu de moyens pour établir la légitimité de ces fonds. Dans le cas des questions que la Loi vise à régler — le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes — l’État a le droit de demander aux personnes qui quittent le Canada une explication raisonnable quant à la source des espèces qui dépassent le montant maximal autorisé.

[35] Sur le fondement des éléments de preuve dont il disposait, le ministre a raisonnablement conclu que la preuve du demandeur n’établissait pas de lien entre les revenus figurant dans son compte bancaire ou ceux provenant de l’assurance et les espèces saisies. Les éléments de preuve n’ont pas non plus permis d’établir la provenance légitime des espèces.

[36] Le demandeur soutient que le ministre a approché l’appel avec un esprit fermé. Toutefois, au regard de la décision, rien ne démontre que le ministre n’a pas tenu compte des éléments de preuve dont il disposait. Bien que le demandeur affirme que le manquement à l’exigence de déclaration découle d’un malentendu involontaire, cela n’est pas pertinent en ce qui concerne la décision ou la provenance et la légitimité des espèces.

[37] De plus, je ne suis pas convaincu par l’argument du demandeur selon lequel les motifs sont insuffisants. Dans sa décision, le ministre a fait état du fardeau de la preuve qui incombait au demandeur, a résumé et examiné les éléments de preuve du demandeur et a indiqué pourquoi il a estimé qu’ils étaient insuffisants. Le demandeur n’est pas d’accord avec les conclusions tirées, mais cela ne rend pas la décision déraisonnable.

[38] À mon avis, la décision était transparente, intelligible et ses conclusions étaient justifiées. Il n’y a pas d’erreur susceptible de contrôle.

(3) Y a-t-il eu manquement à l’équité procédurale?

[39] L’argument supplémentaire du demandeur selon lequel le ministre ne lui a pas donné une possibilité réelle et équitable d’expliquer la provenance des espèces et de répondre aux préoccupations n’est pas non plus convaincant.

[40] Dans l’avis exposant les circonstances de la saisie signifié au demandeur, le président a indiqué les éléments de preuve à présenter et les lacunes dans la preuve qui avait été produite à cette date; le demandeur a eu la possibilité de répondre en soumettant des documents supplémentaires à l’examen du ministre. Le demandeur a tiré parti de ces possibilités et le ministre a examiné l’ensemble des documents fournis.

[41] Le demandeur ne précise pas en quoi il n’a pas eu la possibilité d’expliquer la provenance des espèces ou de répondre aux réserves du ministre. Le principal différend entre les parties semble porter sur l’issue du litige.

[42] À mon avis, le demandeur connaissait la preuve présentée contre lui et il a eu la possibilité d’y répondre. Dans l’avis exposant les circonstances de la saisie, le président a signifié au demandeur qu’il devrait démontrer la provenance légitime des espèces en appel. Le fait que le demandeur n’ait pas été en mesure de s’acquitter de ce fardeau ne signifie pas que la décision était inéquitable sur le plan procédural.

IV. Conclusion

[43] Pour ces motifs, la demande de contrôle est rejetée.

[44] Le défendeur a réclamé un montant de 2500 dollars au titre des dépens. Le demandeur a fait valoir qu’aucuns dépens ne devraient être adjugés. J’estime que les dépens devraient suivre l’issue de la demande. Toutefois, j’exercerai mon pouvoir discrétionnaire et fixerai le montant des dépens à 1500 dollars, ce que je considère comme approprié.

 


JUGEMENT DANS LE DOSSIER T-1337-21

LA COUR REND LE JUGEMENT QUI SUIT :

  1. La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

  2. Un montant de 1500 dollars est adjugé au défendeur au titre des dépens.

« Angela Furlanetto »

Juge

Traduction certifiée conforme

Claude Leclerc

 


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

T-1337-21

 

INTITULÉ :

NICHOLAS EVANS c LE MINISTRE DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE ET DE LA PROTECTION CIVILE

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 1er NOVEMBRE 2022

 

JUGEMENT ET MOTIFS

LA JUGE FURLANETTO

 

DATE DES MOTIFS :

LE 8 NOVEMBRE 2022

 

COMPARUTIONS :

Godwin Oware

 

POUR LE DEMANDEUR

 

Rebecca Sewell

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Godwin Oware Law Office

Avocats

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DEMANDEUR

 

Procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

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