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Date : 20240229


Dossier : IMM-3090-23

Référence : 2024 CF 341

Montréal (Québec), le 29 février 2024

En présence de monsieur le juge Gascon

ENTRE :

ANDRÉ OUEDRAOGO

demandeur

et

MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRAION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

I. Aperçu

[1] Le demandeur, M. André Ouedraogo, est un citoyen du Burkina Faso. Il sollicite le contrôle judiciaire d’une décision datée du 10 février 2023 [Décision] dans laquelle la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié du Canada [SPR] a refusé de lui reconnaître la qualité de réfugié au sens de la Convention ou celle de personne à protéger, aux termes des articles 96 et 97(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 [la LIPR]. La SPR a rejeté la demande de M. Ouadraogo en raison de son manque de crédibilité et de ses omissions et incohérences sur des points centraux de sa demande. La SPR a également conclu que la demande d’asile de M. Ouadraogo n’avait pas un minimum de fondement aux termes du paragraphe 107(2) de la LIPR.

[2] M. Ouedraogo soutient que la SPR aurait eu tort de donner autant d’importance aux incohérences entre la preuve au dossier et son témoignage, qu’elle aurait mal interprété certaines réponses fournies lors de son témoignage, et qu’elle aurait commis une erreur en concluant à l’absence de fondement minimal de sa demande d’asile.

[3] Pour les motifs qui suivent, la demande de contrôle judiciaire de M. Ouedraogo sera rejetée. Après avoir examiné les motifs et les conclusions de la SPR, la preuve dont elle disposait et le droit applicable, je ne vois aucune raison d’infirmer la Décision, car elle ne comporte aucune lacune grave qui nécessiterait l’intervention de la Cour.

II. Contexte

A. Les faits

[4] M. Ouedraogo a suivi des études de microfinance dans son pays de citoyenneté, le Burkina Faso. Suite à ses études, il a commencé à travailler comme contrôleur au sein de l’Union régionale des coopératives d’épargne et de crédit [URCBAN]. Au fil des ans, il a gravi les échelons dans cette société et, en 2011, il allègue avoir été nommé directeur de l’URCBAN.

[5] M. Ouedraogo maintient qu’en 2017, un groupe d’épargnants se serait présenté à sa résidence réclamant de l’argent qui leur était dû par l’URCBAN, mais que l’URCBAN était incapable de leur rembourser. M. Ouedraogo allègue également qu’en octobre 2017, des épargnants se seraient présentés à la succursale de l’URCBAN à Kongoussi, où il se trouvait, et l’auraient lapidé. Après cet événement, il aurait décidé d’envoyer sa famille à Ouagadougou, la capitale du Burkina Faso.

[6] Craignant pour sa vie, M. Ouedraogo aurait quitté le Burkina Faso le 19 janvier 2018 pour se rendre aux États-Unis. Plus d’un an après son arrivée aux États-Unis, soit en mars 2019, il s’est rendu au Canada et y a fait une demande d’asile.

B. La Décision de la SPR

[7] En février 2023, la SPR a rejeté la demande d’asile de M. Ouedraogo, jugeant qu’il n’était pas crédible. Vu les incohérences et les omissions dans l’ensemble de la preuve, incluant le témoignage rendu par M. Ouedraogo, la SPR a également conclu que sa demande d’asile n’avait pas un minimum de fondement aux termes du paragraphe 107(2) de la LIPR.

[8] Plus spécifiquement, la SPR a tenu compte de plusieurs incohérences quant aux pièces déposées afin de démontrer la chronologie du travail de M. Ouedraogo au sein de l’URCBAN. Par exemple, le curriculum vitae [CV] de M. Ouedraogo indiquait qu’il travaillait encore chez l’URCBAN au moment de sa demande d’asile, et le dossier ne contenait aucun autre élément de preuve pour démontrer son historique de travail auprès de l’URCBAN. De surcroît, la SPR a noté que, même si elle accordait le bénéfice du doute à M. Ouderaogo en ce qui concerne son travail à l’URCBAN après 2014, elle avait quand même des doutes sur la crédibilité de ce dernier en raison du caractère louvoyant de son témoignage.

[9] De plus, lorsque la SPR lui a fait remarquer que son comportement n’était pas celui d’une personne qui craint pour sa vie, M. Ouedraogo a répondu que sa façon de cacher sa crainte était de continuer de travailler auprès de l’URCBAN. La SPR a également observé que M. Ouedraogo est demeuré aux États-Unis pendant plus d’une année après avoir quitté le Burkina Faso, sans y demander la protection, ce qui ne reflète pas la situation de quelqu’un qui craint pour sa vie. Enfin, la SPR a noté que, lorsqu’elle a demandé à M. Ouedraogo s’il était venu au Canada pour travailler dans les finances, il a répondu spontanément « oui, tout à fait », ajoutant « vu que je travaille dans la microfinance, c’est ce qui a motivé mon arrivée [sic] au Canada ». La SPR a ainsi conclu de son témoignage que M. Ouedraogo n’était pas venu au Canada pour protéger sa vie, mais pour y travailler en microfinance.

C. La norme de contrôle

[10] Il ne fait pas de doute que la norme de la décision raisonnable s’applique en ce qui regarde les conclusions de la SPR en matière de crédibilité et d’absence d’éléments de preuve suffisants pour établir le fondement d’une demande d’asile (Regala c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2020 CF 192 au para 5; Janvier c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2020 CF 142 au para 17; Yuan c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2018 CF 755 au para 13; Warsame c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2016 CF 596 au para 25).

[11] D’ailleurs, le cadre d’analyse relatif au contrôle judiciaire du mérite d’une décision administrative est maintenant celui établi par la Cour suprême du Canada dans l’arrêt Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Vavilov, 2019 CSC 65 [Vavilov] (Mason c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2023 CSC 21 au para 7 [Mason]). Ce cadre d’analyse repose sur la présomption voulant que la norme de la décision raisonnable soit désormais la norme applicable dans tous les cas.

[12] Lorsque la norme de contrôle applicable est celle de la décision raisonnable, le rôle d’une cour de révision est d’examiner les motifs qu’a donnés le décideur administratif et de déterminer si la décision est fondée sur « une analyse intrinsèquement cohérente et rationnelle » et est « justifiée au regard des contraintes juridiques et factuelles auxquelles le décideur est assujetti » (Mason au para 64; Vavilov au para 85). La cour de révision doit donc se demander « si la décision possède les caractéristiques d’une décision raisonnable, soit la justification, la transparence et l’intelligibilité » (Vavilov au para 99, citant notamment Dunsmuir c Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9 aux para 47, 74).

[13] Il ne suffit pas que la décision soit justifiable. Dans les cas où des motifs s’imposent, le décideur administratif « doit également, au moyen de ceux-ci, justifier sa décision auprès des personnes auxquelles elle s’applique » [en italique dans l’original] (Vavilov au para 86). Ainsi, le contrôle en fonction de la norme de la décision raisonnable s’intéresse tant au résultat de la décision qu’au raisonnement suivi (Vavilov au para 87). L’exercice du contrôle selon la norme de la décision raisonnable doit comporter une évaluation rigoureuse des décisions administratives. Toutefois, dans le cadre de son analyse du caractère raisonnable d’une décision, la cour de révision doit adopter une méthode qui « s’intéresse avant tout aux motifs de la décision », examiner les motifs donnés avec « une attention respectueuse », et chercher à comprendre le fil du raisonnement suivi par le décideur pour en arriver à sa conclusion (Mason aux para 58, 60; Vavilov au para 84). La cour de révision doit adopter une attitude de retenue et n’intervenir que « lorsque cela est vraiment nécessaire pour préserver la légitimité, la rationalité et l’équité du processus administratif » (Vavilov au para 13). La norme de la décision raisonnable, je le souligne, tire toujours son origine du principe de la retenue judiciaire et de la déférence, et exige que les cours de révision fassent preuve de respect envers le rôle distinct que le législateur a choisi de conférer aux décideurs administratifs plutôt qu’aux cours de justice (Mason au para 57; Vavilov aux para 13, 46, 75).

[14] Il incombe à la partie qui conteste une décision de prouver qu’elle est déraisonnable. Pour annuler une décision administrative, la cour de révision doit être convaincue qu’il existe des lacunes suffisamment graves pour rendre la décision déraisonnable (Vavilov au para 100).

III. Analyse

[15] M. Ouedraogo soutient que la SPR aurait eu tort de donner autant d’importance aux incohérences entre la preuve au dossier et son témoignage ainsi qu’au fait que les dates rapportées ne s’arrimaient pas pour démontrer la durée de son travail pour l’URCBAN. Il affirme également être venu au Canada pour protéger sa vie, et non pour travailler en microfinance, et que la SPR aurait mal interprété sa réponse à cet effet. Enfin, M. Ouedraogo soumet que la SPR peut seulement conclure à une absence de minimum de fondement lorsqu’une demande d’asile est totalement dépourvue d’éléments de preuve crédibles ou dignes de foi — ce qu’il estime ne pas être le cas en l’espèce.

[16] Avec égards, les arguments de M. Ouedraogo ne me convainquent pas.

[17] Comme le fait bien valoir le défendeur, le ministre de la Citoyenneté et l’Immigration [Ministre], les pièces soumises au soutien de la demande d’asile de M. Ouedraogo n’appuient aucunement sa demande et il était raisonnable pour la SPR de tirer les conclusions qui apparaissent dans sa Décision. Il était aussi tout à fait loisible pour la SPR, dans son évaluation de la crédibilité de M. Ouedraogo, de l’interroger sur son long séjour aux États-Unis sans y faire de démarches pour assurer sa protection. Par ailleurs, M. Ouedraogo n’a pas prouvé devant la SPR les éléments au cœur même de sa demande d’asile, ce qui a négativement affecté sa crédibilité et suffisait pour conclure à une absence de minimum de fondement.

A. La Décision de la SPR est raisonnable

[18] M. Ouedraogo prétend que la SPR aurait erré en s’attardant aux incohérences entre la preuve au dossier et son témoignage, qu’elle aurait mal interprété certaines réponses qu’il avait données lors de son témoignage et qu’elle n’aurait pas considéré l’ensemble de la preuve devant elle.

[19] Avec égards, ces arguments ne tiennent pas la route.

[20] Premièrement, la SPR a raisonnablement conclu que la preuve et le témoignage de M. Ouedraogo ne prouvent pas qu’il aurait travaillé pour l’URCBAN jusqu’à 2018. Selon M, Ouedraogo, puisque son attestation de travail soumise en preuve était datée du 26 juin 2014, elle ne démontre pas qu’il n’a pas continué à travailler pour l’URCBAN après 2014. De plus, il soutient que son CV mentionne qu’il a travaillé pour l’URCBAN « de 2011 à nos jours », sans spécifier la date à laquelle il aurait quitté. M. Ouedraogo allègue que cela ne démontre pas qu’il n’aurait pas travaillé auprès de l’URCBAN jusqu’à 2018.

[21] Comme le note le Ministre, ces explications ne sont pas appuyées par la preuve. En effet, la déclaration assermentée de M. Ouedraogo est entièrement silencieuse sur ce point. De surcroît, même si l’on accepte que M. Ouedraogo n’ait pas pu obtenir une attestation de travail plus récente ou une mise à jour pour démontrer qu’il travaillait pour l’URCBAN, il n’était pas déraisonnable de s’attendre à ce qu’il ait mis à jour son CV afin de refléter dans sa demande d’asile le portrait le plus récent des lieux où il a travaillé — et, plus précisément, jusqu’à quand il aurait travaillé pour l’URCBAN. Ceci est d’autant plus vrai que le CV était le seul élément de preuve qui aurait pu attester de l’implication de M. Ouedraogo auprès de cette société. En l’espèce, considérant que les faits au soutien de sa demande d’asile concernent la période postérieure à 2014, et que cette période n’était pas couverte par l’attestation de travail qu’il avait déposée, une telle mise à jour de son CV aurait été appropriée. Ainsi, il était tout à fait raisonnable pour la SPR de conclure que les incohérences dans le témoignage de M. Ouedraogo et la preuve, ainsi que l’absence d’une explication satisfaisante par rapport aux dates, minaient la crédibilité de ce dernier.

[22] La SPR a également souligné plusieurs autres occasions où le témoignage de M. Ouedraogo était incohérent. Plus précisément, la SPR a déterminé que la réponse de M. Ouedraogo eu égard à la date à laquelle l’événement où il aurait été lapidé était vague et imprécise. Ainsi, M. Ouedraogo a d’abord dit de ne pas se rappeler la date puis, après que son avocat lui ait posé la question une deuxième fois, il a répondu « après 2017 ». Puisque cet épisode, selon son récit, constituait l’événement déclencheur de sa crainte pour sa vie et de sa décision de quitter le Burkina Faso, la SPR a raisonnablement jugé insatisfaisants le doute et le manque de précision dans sa réponse. Je souligne que le fait invoqué par M. Ouedraogo, soit de se faire lapider par des épargnants mécontents, n’était tout de même pas anodin, et il apparaît pour le moins invraisemblable que M. Ouedraogo n’ait pas été en mesure de se rappeler de la date d’un tel événement.

[23] Qui plus est, lors de l’audition devant la SPR, M. Ouedraogo a déclaré qu’il était allé se réfugier à Ouagadougou, alors que, dans son récit, il avait plutôt mentionné avoir habité à Kongoussi jusqu’à janvier 2018. Lorsque confronté par la SPR, cette dernière a noté que M. Ouedraogo était visiblement très inconfortable et a dit s’être caché « de temps en temps » à Ouagadougou.

[24] Selon la jurisprudence de cette Cour, « l’incapacité de se rappeler certains détails – en particulier dans des circonstances où le demandeur aurait dû s’en souvenir – donne à un tribunal un motif raisonnable de rejeter le témoignage » (Su c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2013 CF 518 au para 8, citant Ma c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2011 CF 417 aux para 31–33; Pjetri c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2013 CF 376 au para 43; Li c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2012 CF 998 au para 18). De plus, cette Cour a établi à plusieurs reprises que, « même si elles peuvent être insuffisantes lorsqu’elles sont examinées une à une ou isolément, l’accumulation de contradictions, d’incohérences et d’omissions concernant des éléments cruciaux d’une demande d’asile peut appuyer une conclusion négative sur la crédibilité d’un demandeur » (Paulo c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2020 CF 990 au para 56 [Paulo], citant Sary c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2016 FC 178 au para 19; Quintero Cienfuegos c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2009 CF 1262 au para 1). C’est le cas ici. L’accumulation d’incohérences et d’omissions dans le récit et le témoignage de M. Ouedraogo font en sorte qu’il était raisonnable pour la SPR de conclure que ce dernier n’était pas crédible.

[25] Je souligne que les trois éléments sur lesquels la preuve de M. Ouedraogo était boiteuse, à savoir son travail à l’URCBAN, l’événement de lapidation et son déplacement à Ouagadougou, constituaient l’essence et les points d’ancrage de sa demande d’asile. Dans de telles circonstances, il était entièrement raisonnable pour la SPR d’en tirer des inférences négatives sur la crédibilité de M. Ouedraogo.

[26] Contrairement à ce que M. Ouedraogo allègue, il ressort de la Décision que la SPR a bel et bien analysé les pièces qu’il avait déposées lors de l’audition, mais ne leur a accordé aucune valeur probante. Comme le constate le Ministre, il était loisible pour la SPR de conclure à l’absence de valeur probante de ces pièces. Ainsi, comme l’a noté le juge de Montigny dans l’affaire Linares Morales c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2011 CF 1496 [Linares Morales] :

[21] Compte tenu des nombreuses incohérences et contradictions dans le témoignage du demandeur relevées plus haut, il était loisible au tribunal de ne pas lui accorder le bénéfice du doute. Partant, le tribunal pouvait également à bon droit accorder peu de valeur probante aux documents produits en preuve par le demandeur. Une conclusion d’absence de crédibilité relativement aux éléments centraux d’une revendication peut s’étendre aux autres éléments de celle-ci, comme l’a reconnu la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Sheikh c. Canada (M.E.I.), 1990 CanLII 13057 (CAF), [1990] 3 C.F. 238 aux paragraphes 7 à 9.

Linares Morales au para 21.

[27] Aucun des arguments avancés par M. Ouedraogo ne démontre une erreur révisable commise par la SPR par rapport à son analyse sur la crédibilité. La SPR a analysé l’ensemble de la preuve devant elle et a constaté que M. Ouedraogo a ajusté, tant bien que mal, son témoignage pour les besoins de sa demande d’asile et qu’il improvisait des réponses. Compte tenu de l’accumulation d’incohérences non expliquées de manière satisfaisante et des omissions, la SPR a raisonnablement soutenu une conclusion négative quant à la crédibilité de M. Ouedraogo (Paulo au para 56).

[28] Il faut enfin souligner que les conclusions d’absence de crédibilité relèvent de l’expertise de la SPR. Comme cette Cour l’a réitéré maintes fois, la crédibilité est « une question de fait au cœur de l’expertise de la SPR » et « les conclusions de crédibilité formulées par la SPR attirent une déférence considérable » (Mbuyamba c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2020 CF 918 au para 28, citant Kahumba c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2018 CF 551 aux para 31–32 et Lunda c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2020 CF 704 au para 36).

B. La SPR a raisonnablement conclu que la demande d’asile n’avait pas un minimum de fondement

[29] En vertu du paragraphe 107(2) de la LIPR, lorsqu’un demandeur ne présente aucun élément de preuve crédible ou digne de foi qui aurait pu fonder une décision favorable, la SPR doit conclure à l’absence de minimum de fondement de la demande (Aboubeck c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2019 CF 370 au para 15, citant Rahaman c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2002 CAF 89 au para 51; Ramón Levario c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2012 CF 314 au para 19). C’est le cas ici.

[30] M. Ouedraogo n’a pas été en mesure de prouver devant la SPR les éléments se situant au cœur de sa demande d’asile, ce qui a négativement affecté sa crédibilité. En outre, il n’a soumis aucune preuve crédible et digne de foi qui permettrait d’établir les éléments au soutien de sa demande d’asile, que ce soit sur son travail, son allégation de lapidation ou son déplacement à Ouagadougou. De plus, il a été incapable d’expliquer pourquoi il était demeuré si longtemps aux États-Unis sans y formuler de demande d’asile. Il était donc tout à fait raisonnable pour la SPR de conclure que sa demande d’asile n’avait pas un minimum de fondement aux termes du paragraphe 107(2) de la LIPR. M. Ouedraogo n’a tout simplement fait valoir aucun argument ou preuve solide permettant de contester le caractère raisonnable des conclusions de la SPR à cet égard.

[31] Comme l’a bien fait valoir l’avocate du Ministre lors de l’audience devant la Cour, le paragraphe 107(2) de la LIPR a une double dimension, soit la présence d’éléments de preuve qui soient crédibles d’une part et capables de fonder une décision favorable d’autre part. Il est manifeste que le dossier de M. Ouedraogo ne satisfait ni l’une ni l’autre de ces exigences. Les preuves soumises étaient laconiques et se limitaient à une poignée de documents et à un témoignage louvoyant quant au récit à la source de sa demande.

IV. Conclusion

[32] Pour les motifs qui précèdent, la demande de contrôle judiciaire de M. Ouedraogo est rejetée. La Décision possède les attributs d’intelligibilité, de transparence et de justification requis en vertu de la norme de la décision raisonnable, et il n’y a aucune raison qui pourrait justifier la Cour de substituer son opinion à celle de la SPR.

[33] L’intitulé est modifié pour refléter le nom juridique adéquat du défendeur devant la Cour, soit le « Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration ».

[34] Aucune partie n’a proposé de question de portée générale aux fins de certification, et je suis d’accord qu’il n’y en a aucune.

 


JUGEMENT au dossier IMM-3090-23

LA COUR STATUE que :

  1. La demande de contrôle judiciaire est rejetée, sans dépens.

  2. L’intitulé de la cause est modifié pour que le Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration soit désigné comme défendeur.

  3. Il n’y a aucune question de portée générale à certifier.

« Denis Gascon »

Juge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-3090-23

INTITULÉ :

ANDRÉ OUEDRAOGO c MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

LIEU DE L’AUDIENCE :

MONTRÉAL (QUÉBEC)

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 15 FÉVRIER 2024

JUGEMENT ET MOTIFS :

GASCON J.

DATE DES MOTIFS

LE 29 FÉVRIER 2024

COMPARUTIONS :

Me Clémence Chevalier

POUR LE DEMANDEUR

Me Maria Rodriguez

POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Clémence Chevalier

Montréal (Québec)

POUR LE DEMANDEUR

Procureur général du Canada

Montréal (Québec)

POUR LE DÉFENDEUR

 

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