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Date : 20240222

Dossier : IMM-1524-22

Référence : 2024 CF 295

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 22 février 2024

En présence de madame la juge Heneghan

ENTRE :

MOHAMMED FAREED UDDIN

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

[1] M. Mohammed Fareed Uddin (le « demandeur ») demande le contrôle judiciaire de la décision par laquelle la Section d’appel des réfugiés (la « SAR ») de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié (la CISR) a rejeté l’appel qu’il avait interjeté de la décision par laquelle la Section de la protection des réfugiés (la « SPR ») de la CISR avait rejeté sa demande d’asile.

[2] Le demandeur, qui est musulman, est un citoyen de l’Inde, plus précisément de la ville d’Hyderabad. Il est arrivé au Canada le 13 mai 2019 à titre de visiteur, muni d’un visa. Il a demandé l’asile le 8 juillet 2019.

[3] Le demandeur a allégué craindre d’être persécuté par des groupes de protection des vaches, le parti politique Bharatiya Janta et la police parce que son frère avait été harcelé et accusé de vendre de la viande de vache dans sa boucherie. Il a également affirmé avoir été détenu et torturé par la police après avoir déployé des efforts pour retrouver son frère, porté disparu depuis 2018.

[4] La SPR a rejeté la demande d’asile du demandeur au motif qu’il existait des possibilités de refuge intérieur (« PRI ») dans les villes de Lucknow ou de Varanasi.

[5] Le demandeur a tenté de présenter de nouveaux éléments de preuve devant la SAR, que celle‑ci a rejetés. Le demandeur soutient maintenant que la SAR a commis une erreur susceptible de contrôle en n’acceptant pas les nouveaux éléments de preuve, en particulier l’article de Human Rights Watch de janvier 2021.

[6] Le demandeur soutient également que la SAR a mal compris la preuve contenue dans le cartable national de documentation (le « CND ») au sujet de l’existence de PRI, et qu’elle s’est fondée sur des renseignements désuets pour conclure que la police n’avait pas les moyens de le retrouver dans les villes proposées comme PRI.

[7] Enfin, le demandeur soutient que la SAR s’est livrée à des conjectures lorsqu’elle a conclu qu’il était moins exposé au risque d’être persécuté par des groupes de protection des vaches puisqu’il n’est pas lui-même boucher.

[8] Le ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration (le « défendeur ») s’oppose à l’admission de certains éléments de preuve que le demandeur a présentés dans son affidavit à l’appui de la présente demande de contrôle judiciaire. Le défendeur soutient que ces éléments de preuve sont inadmissibles parce qu’ils n’avaient pas été soumis à la SAR, et que la Cour devrait donc en faire abstraction.

[9] Le défendeur soutient également que, bien que l’article de Human Rights Watch n’ait été ajouté au CND qu’en juin 2021, il a été publié le 28 mars 2020 et était normalement accessible. La décision de la SAR de ne pas admettre cet article comme nouvel élément de preuve était raisonnable.

[10] Le défendeur soutient que le demandeur, dans les autres arguments qu’il a présentés, demande à la Cour d’apprécier à nouveau la preuve et de tirer une conclusion différente au sujet de l’existence de PRI. Le défendeur allègue que la SAR a pris acte d’éléments de preuve démontrant que des musulmans avaient subi des mauvais traitements aux mains de la police, mais qu’elle a également conclu que les mauvais traitements n’étaient pas généralisés au point de rendre les PRI non viables.

[11] Le défendeur soutient également que la SAR, s’appuyant sur le CND, a raisonnablement conclu que, en Inde, la capacité de la police pour chercher une personne dans l’ensemble du territoire était limitée.

[12] La norme de contrôle applicable au bien-fondé de la décision, c’est-à-dire aux conclusions relatives aux PRI, est celle de la décision raisonnable, conformément à ce qui est énoncé dans l’arrêt Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Vavilov, [2019] 4 RCS 653.

[13] Je ne suis pas convaincue que la SAR a commis une erreur en refusant d’admettre les nouveaux éléments de preuve que le demandeur a présentés, car ces éléments de preuve étaient accessibles avant l’audition de sa demande d’asile par la SPR.

[14] La Cour d’appel fédérale a énoncé le critère applicable à la PRI dans l’arrêt Rasaratnam c Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1992] 1 CF 706 aux pages 710 et 711 (CAF) :

[15] Après avoir pris connaissance des documents contenus dans le dossier certifié du tribunal ainsi que des observations écrites et orales des parties, je suis d’avis que la SAR a raisonnablement pris en compte et appliqué le critère à deux volets relatif à la PRI.

[16] Il ressort des motifs de la SAR que cette dernière a apprécié les éléments de preuve contenus dans le CND et a conclu que les personnes que le demandeur craignait, en particulier la police, n’auraient pas les moyens ou la motivation de le poursuivre dans les villes proposées comme PRI. La SAR a reconnu que les musulmans sont exposés à un risque, mais elle a conclu que ce risque n’était pas suffisant pour rendre les PRI non viables.

[17] Le demandeur n’a pas contesté les conclusions de la SAR quant au deuxième volet du critère.

[18] La présente demande de contrôle judiciaire sera rejetée. Il n’y a aucune question à certifier.




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