Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Date : 20240510


Dossier : IMM-3376-23

Référence : 2024 CF 728

Ottawa (Ontario), le 10 mai, 2024

En présence de la juge en chef adjointe Gagné

ENTRE :

NAA ADOLEY ANKRAH

NELLWYN OWUSUA BOAMAH

NICOLE ADOM BOAMAH

demandeurs

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

[1] Mme Naa Adoley Ankrah, citoyenne du Ghana, et ses deux enfants mineurs américains, demandent le contrôle judiciaire d’une décision de la Section d’appel des réfugiés [SAR], par laquelle leur demande d’asile est rejetée en raison d’une absence de preuve crédible d’un risque prospectif ou d’une possibilité sérieuse de persécution advenant leur retour au Ghana.

[2] Mme Ankrah dit craindre un individu ghanéen avec qui elle a été mariée pour une période de 6 ans, il y a de cela près de 17 ans.

[3] Pour les motifs qui suivent, la demande de contrôle judiciaire est rejetée.

I. Les faits

[4] D’après son récit, la demanderesse a subi un mariage forcé avec un homme violent de 2001 à 2007.

[5] En 2007, elle se rend aux États-Unis pour fuir cette relation et obtient un divorce ghanéen en 2009.

[6] Elle demeure aux États-Unis de 2009 à 2018, période au cours de laquelle elle a deux conjoints consécutifs et donne naissance à ses deux enfants.

[7] Suite à l’échec d’une demande de parrainage par son conjoint de l’époque en raison de son divorce, la demanderesse dépose une demande d’asile aux États-Unis en 2010. Craignant un renvoi au Ghana après le rejet de cette dernière demande, les demandeurs traversent la frontière canadienne et demandent l’asile le 18 mai 2018.

II. Décision de la Section de la protection des réfugiés (SPR)

[8] La SPR rejette la demande aux motifs que les demanderesses n’établissent pas plus qu’une simple possibilité de persécution ou d’un risque prospectif advenant leur retour dans leur pays de citoyenneté. La SPR rejette les arguments des demanderesses fondés sur des motifs d’ordre humanitaire, n’étant pas compétente pour en disposer.

III. Décision sous étude

[9] La SAR est d’avis que la question déterminante pour disposer de la demande d’asile est celle de la crédibilité de la demanderesse principale à l’égard de sa crainte prospective alléguée.

[10] Après son analyse indépendante de l’ensemble de la preuve et considérant les Directives numéro 4, la SAR confirme la conclusion de la SPR à l’effet que la partie demanderesse principale n’a pas démontré de façon crédible l’existence de menaces postérieures à 2007. Elle confirme également que la demanderesse principale n’établit pas l’existence d’une possibilité sérieuse de persécution en raison de son statut de mère célibataire divorcée.

IV. Question en litige et norme de contrôle

[11] Cette demande de contrôle judiciaire ne soulève que la question à savoir si la SAR a commis une erreur révisable en n’évaluant pas la disponibilité de la protection de l’état ghanéen.

[12] La norme de contrôle applicable à l’analyse de la Cour est celle de la décision raisonnable : (Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Vavilov, 2019 SCC 65.

V. Analyse

[13] Les demandeurs plaident que la SAR se devait d’examiner la disponibilité de la protection de l’état ghanéen afin de déterminer si leur crainte de persécution est objectivement fondée (Aviles Yanez c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2010 CF 1059 au para 31); son défaut de le faire, ajoutent les demandeurs, rend la décision déraisonnable.

[14] Les demandeurs font également valoir que la SAR a non seulement négligé de tenir compte de la documentation pertinente sur le Ghana, mais qu’elle a également fait défaut de reconnaître la gravité de la situation des demandeurs.

[15] Je ne peux retenir les arguments des demandeurs.

[16] La SAR a fait une analyse indépendante et détaillée de l’ensemble de la preuve et elle résume plusieurs éléments qui minent la crédibilité de la demanderesse principale, incluant son témoignage vague, évasif, et variable et les nombreuses contradictions entre son témoignage et les déclarations faites au soutien de sa demande d’asile américaine. Les demandeurs ne contestent pas cette analyse, ni les conclusions qu’en a tirées la SAR. Il était donc raisonnable pour cette dernière de conclure que les demandeurs n’avaient pas établi une crainte prospective de persécution ou l’existence d’un risque prospectif advenant leur retour au Ghana.

[17] Il est bien établi que la SAR, et la SPR avant elle, n’ont pas l’obligation d’examiner la question de la protection étatique lorsqu’elles concluent en un manque de crédibilité des allégations au soutien de la demande d’asile.

[18] La question de la protection de l’État a un caractère accessoire lorsque la SPR et la SAR concluent au manque de crédibilité d’une demande d’asile (Gomez Florez c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2016 CF 659 au para 39), ou lorsqu’elles concluent en une absence de crainte prospective de persécution ou en une absence d’une possibilité sérieuse de persécution en raison de son statut de mère célibataire divorcée.

[19] Un demandeur d’asile qui n’a pas démontré qu’il encourt un risque advenant un retour dans son pays n’a pas besoin de la protection de ce pays (Muotoh c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2005 CF 1599 au para 13).

VI. Conclusion

[20] Puisque les demandeurs ne présentent aucune preuve qu’ils subiront plus qu’une simple possibilité de persécution advenant leur retour au Ghana, ils n’ont pas démontré que l’intervention de la Cour est requise en l’instance. Les parties n’ont proposé aucune question d’importance générale pour fin de certification et aucune telle question n’émane des faits de cette cause.

[21] Finalement, l’intitulé de la cause est amendé afin de nommer correctement le défendeur comme étant le Ministre de la citoyenneté et de l’immigration.


JUGEMENT dans IMM-3376-23

LA COUR STATUE que :

  1. La demande de contrôle judiciaire est rejetée;

  2. Aucune question d’importance générale n’est certifiée;

  3. L’intitulé de la cause est amendé afin de désigner leMinistre de la citoyenneté et de l’immigration comme défendeur.

« Jocelyne Gagné »

Juge en chef adjointe

 


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-3376-23

 

INTITULÉ :

NAA ADOLEY ANKRAH, NELLWYN OWUSUA BOAMAH, NICOLE ADOM BOAMAH c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

tenue par vidéoconférence

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 7 mai 2024

 

JUGEMENT ET motifs :

LA JUGE EN CHEF ADJOINTE GAGNÉ

 

DATE DES MOTIFS :

LE 10 mai 2024

 

COMPARUTIONS :

Jugauce Murhula Mweze

 

Pour les demandeurs

 

Sarah Sbeiti

 

Pour le défendeur

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Jugauce Murhula Mweze

Aboubakar Ouedraogo

Montréal (Québec)

 

Pour les demandeurs

 

Procureur général du Canada

Montréal (Québec)

 

Pour le défendeur

 

 

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.