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Date: 20240510


Dossier: IMM-3832-22
IMM-3211-22

IMM-3730-22

Référence: 2024 CF 725

Ottawa, Ontario, le 10 mai, 2024

En présence de madame la juge Azmudeh

ENTRE:

HERTZIEN LEIRIS NDJABA NGOTTY

Demandeur

et

LE MINISTRE DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE ET DE LA PROTECTION CIVILE

Défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

I. Introduction

[1] En vertu de l'article 72(1) de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés [LIPR], le Demandeur, Hertzien Leiris Ndjaba Ngotty [le « Demandeur »], demande le contrôle judiciaire de ces trois dossiers :

IMM-3211-22

  • Contrôle judiciaire de la décision du 2 avril 2022 (mesure d’exclusion) émise par l’Agence des services frontaliers canadiens (ASFC) conformément à l'article 29, paragraphe 2, de la loi (IRPA).

IMM-3730-22

  • Contrôle judiciaire de la mesure d’ajournement du contrôle émise par l’ASFC pour prévoir un rendez-vous au point d’entrée le 2 avril 2022 à 10h plutôt que de continuer le contrôle le 30 mars 2022.

IMM-3832-22

  • Contrôle judiciaire du rapport 44(1) LIPR émis par le délégué du Ministre suite à l’entrevue qui a eu lieu au point d’entrée St-Bernard-de-Lacolle le 2 avril 2022.

[2] En vertu d'une ordonnance antérieure de la Cour, j'ai entendu le contrôle judiciaire des trois dossiers ensemble.

[3] Le contrôle judiciaire est rejeté pour les raisons suivantes.

II. Aperçu

[4] Le Demandeur est citoyen du Cameroun. Le 26 août 2019, un permis d’études et un permis de stage-coop ont été accordés au Demandeur pour le programme en génie du logiciel au Collège de Bois-de-Boulogne au Québec.

[5] Le 4 septembre 2019, le Demandeur est arrivé au Canada. La session ayant déjà commencé, il aurait estimé qu’il ne pouvait pas rattraper son retard et a quitté ce programme.

[6] Le 28 octobre 2019, le Demandeur a été admis au Collège CDI en gestion de réseaux. Le Demandeur a alors obtenu un nouveau certificat d’acceptation du Québec (CAQ).

[7] Le Demandeur allègue qu’il aurait étudié à temps plein par la suite; toutefois, les faits au dossier ne nous permettent pas de savoir à partir de quel moment le Demandeur a cessé d’étudier à temps plein et à partir de quand il a commencé à travailler.

[8] Le 8 janvier 2021, le Collège CDI a suspendu le Demandeur. Une responsable du collège a expliqué que sa suspension résultait du fait qu’il travaillait et ne suivait pas ses cours à temps complet. Le Demandeur allègue plutôt avoir été suspendu, car il n’aurait pas payé ses frais de scolarité, mais il n’a pas de preuve qu’il suivait ses cours à temps complet.

[9] Malgré sa suspension, le Demandeur a poursuivi sa session, puisque son accès aux cours en ligne n’avait pas été bloqué.

[10] Le 19 avril 2021, le Demandeur a accepté un emploi à temps plein chez Pro Amino International Inc., où il avait déjà travaillé en tant qu’intérimaire.

[11] Au cours de l’été 2021, le Demandeur aurait été admis pour la session d’automne, à la condition d’obtenir un CAQ, car celui-ci avait expiré. Toutefois, le 15 octobre 2021, sa demande de CAQ a été refusée et ce n’est que le 30 décembre 2021, après avoir soumis une nouvelle demande, que le Demandeur aurait obtenu un CAQ.

[12] N’ayant pas de CAQ à l’automne 2021 et ne pouvant donc pas étudier, le Demandeur a continué à travailler temps plein en attendant le traitement de sa demande.

[13] Le 12 janvier 2022, le Demandeur allègue qu’il aurait été inscrit à nouveau au Collège CDI. Malgré sa suspension depuis janvier 2021 et son défaut d’étudier à temps complet, le Demandeur allègue qu’il ne lui restait que son stage à effectuer.

[14] En janvier 2022, il aurait débuté sa recherche de stage. Le 8 mars 2022, il aurait quitté son emploi chez Pro Amino et le 17 mars 2022, il aurait été accepté pour un stage débutant le 4 avril 2022.

Demande de stage-coop au point d’entrée

[15] Le 28 mars 2022, le Demandeur aurait été avisé que son permis de stage-coop ne lui permettait pas de faire le stage envisagé dans le programme de gestion des réseaux. Le Demandeur allègue que M. Zouaoui, du service des étudiants internationaux du collège, lui aurait suggéré de se présenter à la frontière étant donné qu’une demande en ligne pouvait prendre un mois.

[16] Le Demandeur n’a pas avisé M. Zouaoui qu’il avait interrompu ses études pendant un an et travaillé à temps plein. Il soutient que cette personne aurait dû le savoir. Vu le délai pour une demande en ligne, le Demandeur a donc décidé de se rendre à la frontière afin de demander un permis de travail.

[17] Le 30 mars 2022, le Demandeur s’est présenté au point d’entrée de Lacolle.

Entrevue avec l’agente Cyr et report du contrôle

[18] Le 30 mars 2022, l’agente Cyr d’ASFC a remarqué que le programme d’études du Demandeur avait une durée de 20 mois et qu’il n’avait pas de preuve démontrant que la durée de son programme dépasserait 20 mois. Le Demandeur a déclaré qu’il avait interrompu ses études de juin 2021 à janvier 2022 et avait travaillé. Il n’avait pas de talons de paie pour démontrer qu’il avait respecté les conditions de son permis d’études.

[19] L’agente a avisé le Demandeur qu’elle voyait un relevé d’emploi à son nom en 2021. Elle a posé la question à savoir s’il avait travaillé plus de 20 heures par semaine. Le Demandeur aurait demandé de retirer sa demande, référant, semble-t-il, à sa demande de permis de travail, mais l’agente aurait refusé.

[20] L’agente a proposé au Demandeur de revenir soit le lendemain ou le 2 avril 2022 avec l’horaire de ses cours, ses relevés de paie, son contrat de travail et sa lettre de démission, documents démontrant que sa formation s’étendait au-delà de 20 mois, afin de compléter le contrôle. L’agente a également noté les coordonnées de son employeur et du collège.

[21] Le Demandeur allègue d’avoir expliqué à l'agente qu'il n'avait pas de voiture et qu'il devait coordonner son retour avec d'autres membres de sa famille. Il allègue que l'agente lui a dit de venir avant la fin de la journée du 2 avril. En tout cas, le Demandeur a signé un formulaire de contrôle complémentaire, indiquant qu’il se présenterait le 2 avril 2022 à 10h00 et qu’il comprenait les conditions de son entrée au Canada :

  • Les conditions suivantes sont imposées à votre entrée : L’obligation de se présenter en personne aux date, heure et lieu indiqués pour que soit effectué ou complété le contrôle ou l’enquête, le cas échéant.

  • (…)

  • L’obligation de se présenter à un point d’entrée, si cette personne retire sa demande d’entrée au Canada.

  • (…)

  • NOTA : L’autorisation à entrer au Canada ne confère aucun statut. En cas de non-respect des conditions imposées ci-dessous, vous pourriez faire l’objet d’un mandat d’arrestation et d’une mesure de renvoi.

  • J’ai lu le présent formulaire et j’en comprends le contenu. J’accepte et je vais me conformer aux conditions imposées.

[22] Le Demandeur allègue qu'il est arrivé à la frontière dans la soirée du 2 avril, après le départ de l'agent Cyr qui avait déjà rédigé un rapport d'admissibilité en vertu de l'article 44 de la LIPR. Il a tenté une première fois de signaler son arrivée tardive, mais ne l’a pas fait une seconde fois, après être retourné récupérer son passeport lorsqu'il a constaté à mi-chemin qu'il l’avait oublié.

[23] Le Demandeur demande un contrôle judiciaire du rapport établi en vertu de l'article 44, de l'ordonnance d'exclusion et des circonstances entourant l'ajournement de l'entretien du 30 mars au 2 avril.

III. Norme et Contrôle

[24] Les questions qui m'ont été soumises sont résumées ci-après :

  • a)Les décisions de l'ASFC d'émettre un rapport en vertu de l'article 44 et une mesure d'exclusion étaient-elles raisonnables ?

  • b)L’agent et le délégué du Ministre ont-t-ils respecté l’équité procédurale tout au long du processus décisionnel ?

[25] Les parties soutiennent, et je suis d’accord avec elles, que la norme de contrôle applicable est celle de la décision raisonnable (Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c. Vavilov, 2019 CSC 65, [2019] 4 RCS 653 [Vavilov].

[26] Pour être raisonnable, une décision « doit être fondée sur une analyse intrinsèquement cohérente et rationnelle et est justifiée au refard des contraintes juridiques et factuelles auxquelles le décideur est assujetti » (Vavilov, au para 85). La cour de révision doit s'assurer que la décision est justifiée, intelligible et transparente (Vavilov, au para 95). Les décisions justifiées et transparentes tiennent compte des questions et des préoccupations centrales soulevées dans les observations des parties à l'intention du décideur (Vavilov, au para 127).

[27] En matière d’équité procédurale, si une question d’équité procédurale est soulevée dans le cadre d’une demande de contrôle judiciaire, la Cour détermine si la procédure suivie par le décideur était équitable, compte tenu de toutes les circonstances, y compris la nature des droits substantiels en cause et les conséquences pour les personnes concernées. La question relative à l’équité procédurale doit être examinée selon la norme de la décision correcte (Établissement de Mission c. Khela, 2014 CSC 24 au para 79; Chemin de fer Canadien Pacifique Limitée c. Canada (Procureur général), 2018 CAF 69 [Chemin de fer Canadien Pacifique Limitée] aux para 37-56; Association canadienne des avocats en droit des réfugiés c. Canada (Immigration, Réfugiés et Citoyenneté), 2020 CAF 196 au para 35). La question essentielle en matière d’équité procédurale est de savoir si la procédure était équitable, compte tenu de toutes les circonstances, y compris les facteurs énumérés dans l’arrêt Baker c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1999] 2 RCS 817, 1999 CanLII 699 (CSC) aux para 21‑28, Chemin de fer Canadien Pacifique Limitée, au para 54 et Sangha c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2023 CF 1530, au para 9.

IV. Analyse

A. Cadre juridique

[28] Afin d’alléger la lecture de la présente décision, les passages pertinents de la législation citée se retrouve en Annexe A du jugement.

[29] En vertu du paragraphe 11(1) de la LIPR, un agent d’immigration a le pouvoir discrétionnaire d’émettre un visa lorsqu’un étranger n’est pas interdit de territoire et qu’il satisfait aux exigences de la loi.

[30] La catégorie des étudiants est une catégorie de résidents temporaires, comme le prévoit l’article 210 du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002-227 [RIPR].

[31] Un résident temporaire est tenu de se conformer aux conditions imposées par la LIPR et le RIPR : le défaut de s’y conformer peut entraîner son interdiction de territoire (article 29(2) LIPR).

[32] Un résident temporaire qui détient un permis d’études est tenu notamment de poursuivre activement ses études dans son programme d’études, suivant l’article 220.1(1) RIPR.

[33] Un agent peut autoriser l’entrée au Canada d’un étranger en vue d’un contrôle complémentaire, entre autres pour lui permettre de pouvoir quitter le point d’entrée et de se présenter plus tard avec les documents demandés (voir notamment l’article 23(1) LIPR et Gursimran c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2019 CF 1260 [Gursimran]).

[34] Une telle autorisation d’entrée est soumise aux conditions imposées en vertu du RIPR qui prévoit, entre autres comme conditions, que l’étranger a l’obligation de se présenter aux date, heure et lieu indiqués pour le contrôle complémentaire, ainsi que l’obligation de se présenter au point d’entrée si la personne retire sa demande d’entrée au Canada (article 43(1) RIPR).

[35] Un résident temporaire peut faire l’objet d’un rapport d’interdiction de territoire et d’une mesure d’exclusion pour son défaut de poursuivre activement ses études et de respecter les conditions de son séjour (Gursimran, aux paras 5, 9 et 17-20).

[36] Lorsqu’un résident temporaire n’étudie pas, échoue ou interrompt ses études pendant plusieurs semestres, la conclusion s’impose qu’il n’a pas respecté les conditions de son permis d’études. Cela justifie son interdiction de territoire et une mesure d’exclusion (Gursimran, aux paras 5, 9 et 17-20; El Kamel c. Canada (Sécurité publique et Protection civile), 2018 CF 730, aux paras 13-14; Kone c. Canada (Immigration, Réfugiés et Citoyenneté), 2018 CF 845, aux paras 8-11 et 59).

B. Question : Les décision de l’ASFC sont-elles raisonnables ?

[37] Le Demandeur a admis que lorsqu'il s'est présenté à la frontière le 30 mars, il n'avait pas respecté les conditions de son visa. Cela s'explique par le fait qu'il y avait une interruption dans ses études. Il a également admis avoir travaillé à temps complet. Là encore, il affirme que l'interruption de ses études et le fait qu'il travaillait à temps plein étaient dus à ses besoins financiers.

[38] Quelles que soient les raisons qui expliquent l'interruption de ses études ou la poursuite d’un emploi à temps plein, il ne fait aucun doute que le Demandeur n'a pas respecté les conditions de son permis d'études. Celles-ci comprenaient l'obligation de poursuivre ses études et de ne pas travailler plus de 20 heures par semaine.

[39] L'agente et le délégué du Ministre ont mené une enquête diligente et ont pris une décision fondée sur des preuves incontestées que le Demandeur, en tant que résident temporaire, n'avait pas respecté les conditions imposées par le RIPR, en contravention avec l'article 29(2) de la LIPR. Par conséquent, une mesure d’exclusion a été prononcée contre le Demandeur, conformément à l'article 228 RIPR.

[40] La décision d'émettre le rapport en vertu de l'article 44 et le rapport d'exclusion était fondée sur les preuves incontestées de la violation des conditions du permis d’étude du Demandeur et des conséquences juridiques qui en découlent. Les motifs de l'agente et du délégué du Ministre reflètent une chaîne de raisonnement claire. Leur décision est donc raisonnable.

C. Équité procédurale: Les décisions ont-elles été rendues dans le respect de l’équité procédurale?

[41] Dans le cadre de ce contrôle judiciaire, le Demandeur s'est concentré exclusivement sur la violation de l'équité procédurale. Il s'est appuyé sur les points suivants :

  • a)L'incompétence de l'avocat du Collège CDI qui a conseillé au Demandeur de se rendre au point d'entrée plutôt que de faire sa demande en ligne.

  • b)L'omission de l'agente d'ajourner la suite de l'entretien et de l'obliger à se présenter le 2 avril.

  • c)Le fait que l'agente n'ait pas permis au Demandeur de retirer sa demande.

(1) L’incompétence de l’avocat du Collège CDI

[42] Le Demandeur a fait savoir au Collège CDI qu'il alléguait l'incompétence de l'avocat qui lui avait conseillé de se rendre au point d'entrée plutôt que d'effectuer sa demande en ligne. Lors de l'audience en contrôle judiciaire, j'ai demandé à la partie demanderesse d'expliquer en quoi ce conseil avait entraîné une violation de l'équité procédurale ou, en d'autres termes, en quoi une demande en ligne aurait vraisemblablement abouti à un résultat différent. L'avocate du Demandeur n'a pas expliqué comment la demande au point d'entrée aurait pu avoir un effet préjudiciable pour le Demandeur. Elle a plutôt déclaré qu'il s'agissait d'un argument de principe.

[43] Je considère que cet argument n'est pas suffisant pour entacher la décision de l'agente et ne soutient pas non plus l'allégation selon laquelle cette décision aurait affecté l'impartialité de l'agente ou du délégué du Ministre.

(2) L'omission de l'agente d'ajourner la suite de l'entretien et de l'obliger à se présenter le 2 avril.

[44] Au cours de l'entretien du 30 mars, le Demandeur a admis qu'il ne poursuivait pas de manière continue ses études et qu'il travaillait sans autorisation à plein temps. L'agente avait la possibilité de traiter la demande immédiatement ou de lui donner l'occasion de fournir des documents supplémentaires, tels qu'une fiche de paie, afin d'établir les heures travaillées. L'agente a choisi de lui donner une autre opportunité et l'a contraint à revenir quelques jours plus tard, soit le 2 avril. Bien que le Demandeur ait exprimé des difficultés à revenir en raison du manque de moyens de transport, il a signé un accord pour revenir à 10 heures. Il a reconnu qu'un mandat d'arrêt serait émis contre lui s'il ne se présentait pas.

[45] Je considère que la décision de l’agente de lui accorder la possibilité d'être réexaminé est équitable. J'estime également que les événements qui se sont déroulés le 2 avril était équitables.

[46] Le 2 avril à 10 heures, le Demandeur ne s'est pas présenté à la convocation et n'a pas appelé pour fournir des explications. C'est l'agente qui a appelé sa sœur à 13 h 15 puisque les coordonnées du Demandeur étaient celles du Cameroun. L'agente l'a informé qu'un mandat d'arrestation pourrait être émis contre lui et que le Demandeur avait une heure de plus pour remédier à la situation et se présenter à la convocation.

[47] Le Demandeur a appelé le port d'entrée à 14h30 et s'est entretenu avec l'agent Wallace, le délégué du Ministre. Il a dit à l'agent qu'il ne pouvait pas se présenter. L'agent lui a expliqué que cela entraînerait une décision d'interdiction de territoire et une arrestation. Il a alors donné au Demandeur jusqu'à 16 heures pour se présenter.

[48] À 16h30, le Demandeur ne s'était toujours pas présenté. Le Demandeur a expliqué plus tard qu'une fois en route, il s'était rendu compte qu'il avait oublié son passeport et qu'il devait retourner chez lui pour le récupérer. Cependant, il n'avait pas appelé les agents pour les informer de son retard. À 17 h 30, sans signe du Demandeur ni nouvelles de sa part, et après lui avoir donné de nombreuses chances de se présenter, l'agent a pris la décision, en vertu de l'article 41 de la LIPR, de déclarer le Demandeur interdit de territoire pour non-conformité.

[49] Le Demandeur est arrivé au point d'entrée à 18h20 et a dit au délégué du Ministre Wallace qu'il était en retard parce qu'il n'avait pas de moyen de transport et que son beau-frère l'avait conduit. Le délégué du Ministre est ensuite allé demander au beau-frère quand le Demandeur lui avait demandé de le conduire et il a répondu que c'était à 14h le jour même. Le délégué du Ministre a examiné les documents dont il disposait et a pris une décision indépendante selon laquelle le Demandeur avait effectivement omis de se présenter à son contrôle complémentaire et a confirmé la mesure d'exclusion en vertu de l'article 228(1)(c)(i) RIPR.

[50] Le Demandeur a également fait valoir que le lendemain de son premier entretien, il a sollicité un avis juridique et que son avocat lui a dit qu'il devait déposer sa demande en ligne. Il a fait sa demande en ligne et son avocat l'a informé que du fait de sa demande en ligne, son obligation de se présenter à l'entretien au point d'entrée le 2 avril était annulée. À aucun moment le Demandeur n'a communiqué cet avis à l'agent ou au délégué du Ministre lorsqu'ils ont essayé à plusieurs reprises de le joindre et de savoir pourquoi il ne s'était pas présenté comme prescrit.

[51] J'estime que l'agent et le délégué du Ministre ont agi avec diligence et de manière équitable. En fait, ils ont outrepassé leur devoir en n'émettant pas la mesure d'exclusion ou le mandat d'arrestation immédiatement après 10 h. Ils ont donné au Demandeur de multiples opportunités de se présenter et de se justifier, et ont cherché à confirmer ses explications. Ils ont pris une décision raisonnable après avoir offert toutes les chances au Demandeur de s'expliquer. Ils n'ont donc commis aucune violation aux règles d'équité procédurale.

(3) Le fait que l'agente n'ait pas permis au Demandeur de retirer sa demande.

[52] Le Demandeur a également fait valoir que l'agent n'avait pas respecté l'équité procédurale en lui refusant de retirer sa demande le 30 mars.

[53] Le Demandeur s'est présenté devant l’agent en tant qu'étranger ayant admis ne pas avoir respecté les conditions de son visa. Si l'agent acceptait le retrait de la demande, il aurait dû demander au Demandeur de quitter le Canada en vertu de l'article 42 RIPR:

Retrait de la demande

42 (1) Sous réserve du paragraphe (2), l’agent qui effectue le contrôle d’un étranger cherchant à entrer au Canada et à qui ce dernier fait savoir qu’il désire retirer sa demande d’entrée lui permet de la retirer et de quitter le Canada.

Exception — rapport

(2) Si un rapport est en cours d’établissement ou a été établi en application du paragraphe 44(1) de la Loi à l’égard de l’étranger qui fait savoir qu’il désire retirer sa demande d’entrée au Canada, l’agent ne lui permet ni de la retirer ni de quitter le Canada, sauf si le ministre décide de ne pas prendre de mesure de renvoi ou de ne pas déférer l’affaire à la Section de l’immigration pour enquête.

Obligation de confirmer son départ

(3) L’étranger auquel la permission de retirer sa demande d’entrée au Canada a été accordée doit comparaître sans délai devant un agent à un point d’entrée pour confirmer son départ du Canada.

 

Withdrawing application

42 (1) Subject to subsection (2), an officer who examines a foreign national who is seeking to enter Canada and who has indicated that they want to withdraw their application to enter Canada shall allow the foreign national to withdraw their application and leave Canada.

Exception — report

(2) If a report is being prepared or has been prepared under subsection 44(1) of the Act in respect of a foreign national who indicates that they want to withdraw their application to enter Canada, the officer shall not allow the foreign national to withdraw their application or leave Canada unless the Minister decides either not to make a removal order or not to refer the report to the Immigration Division for an admissibility hearing.

Obligation to confirm departure

(3) A foreign national who is allowed to withdraw their application to enter Canada must appear without delay before an officer at a port of entry to confirm their departure from Canada.

[54] J'estime donc que la décision de l'agent de ne pas autoriser le retrait de la Demande et d'ajourner l'examen à une date ultérieure tout en autorisant la réadmission au Canada était procéduralement équitable et correcte.

V. Conclusions

  • a)Le contrôle judiciaire est rejeté.

  • b)Aucune des parties n'a proposé de question certifiée et je conviens que cette affaire n'en soulève pas.


 

ANNEXE A

Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 [LIPR]

Contrôle complémentaire ou enquête

23 L’entrée peut aussi être autorisée en vue du contrôle complémentaire ou de l’enquête prévus par la présente partie.

 

Entry to complete examination or hearing

23 An officer may authorize a person to enter Canada for the purpose of further examination or an admissibility hearing under this Part.

Droit du résident temporaire

29 (1) Le résident temporaire a, sous réserve des autres dispositions de la présente loi, l’autorisation d’entrer au Canada et d’y séjourner à titre temporaire comme visiteur ou titulaire d’un permis de séjour temporaire.

Obligation du résident temporaire

(2) Le résident temporaire est assujetti aux conditions imposées par les règlements et doit se conformer à la présente loi et avoir quitté le pays à la fin de la période de séjour autorisée. Il ne peut y rentrer que si l’autorisation le prévoit.

[…]

Right of temporary residents

29 (1) A temporary resident is, subject to the other provisions of this Act, authorized to enter and remain in Canada on a temporary basis as a visitor or as a holder of a temporary resident permit.

Obligation — temporary resident

(2) A temporary resident must comply with any conditions imposed under the regulations and with any requirements under this Act, must leave Canada by the end of the period authorized for their stay and may re-enter Canada only if their authorization provides for re-entry.

[…]

Manquement à la loi

41 S’agissant de l’étranger, emportent interdiction de territoire pour manquement à la présente loi tout fait — acte ou omission — commis directement ou indirectement en contravention avec la présente loi et, s’agissant du résident permanent, le manquement à l’obligation de résidence et aux conditions imposées.

 

Non-compliance with Act

41 A person is inadmissible for failing to comply with this Act

(a) in the case of a foreign national, through an act or omission which contravenes, directly or indirectly, a provision of this Act; and

(b) in the case of a permanent resident, through failing to comply with subsection 27(2) or section 28.

Rapport d’interdiction de territoire

44 (1) S’il estime que le résident permanent ou l’étranger qui se trouve au Canada est interdit de territoire, l’agent peut établir un rapport circonstancié, qu’il transmet au ministre.

Suivi

(2) S’il estime le rapport bien fondé, le ministre peut déférer l’affaire à la Section de l’immigration pour enquête, sauf s’il s’agit d’un résident permanent interdit de territoire pour le seul motif qu’il n’a pas respecté l’obligation de résidence ou, dans les circonstances visées par les règlements, d’un étranger; il peut alors prendre une mesure de renvoi.

Conditions

(3) L’agent ou la Section de l’immigration peut imposer les conditions qu’il estime nécessaires, notamment la remise d’une garantie d’exécution, au résident permanent ou à l’étranger qui fait l’objet d’un rapport ou d’une enquête ou, étant au Canada, d’une mesure de renvoi.

Conditions — interdiction de territoire pour raison de sécurité

(4) Si l’affaire relative à un rapport d’interdiction de territoire pour raison de sécurité est déférée à la Section de l’immigration et que le résident permanent ou l’étranger qui fait l’objet du rapport n’est pas détenu, l’agent impose également à celui-ci les conditions réglementaires.

Durée des conditions

(5) Les conditions réglementaires imposées en vertu du paragraphe (4) ne cessent de s’appliquer que lorsque survient l’un ou l’autre des événements suivants :

a) la détention de l’intéressé;

b) le retrait du rapport d’interdiction de territoire pour raison de sécurité;

c) la décision, en dernier ressort, selon laquelle n’est prise contre l’intéressé aucune mesure de renvoi pour interdiction de territoire pour raison de sécurité;

d) la déclaration du ministre faite à l’égard de l’intéressé en vertu des paragraphes 42.1(1) ou (2);

e) l’exécution de la mesure de renvoi visant l’intéressé conformément aux règlements.

 

Preparation of report

44 (1) An officer who is of the opinion that a permanent resident or a foreign national who is in Canada is inadmissible may prepare a report setting out the relevant facts, which report shall be transmitted to the Minister.

Referral or removal order

(2) If the Minister is of the opinion that the report is well-founded, the Minister may refer the report to the Immigration Division for an admissibility hearing, except in the case of a permanent resident who is inadmissible solely on the grounds that they have failed to comply with the residency obligation under section 28 and except, in the circumstances prescribed by the regulations, in the case of a foreign national. In those cases, the Minister may make a removal order.

Conditions

(3) An officer or the Immigration Division may impose any conditions, including the payment of a deposit or the posting of a guarantee for compliance with the conditions, that the officer or the Division considers necessary on a permanent resident or a foreign national who is the subject of a report, an admissibility hearing or, being in Canada, a removal order.

Conditions — inadmissibility on grounds of security

(4) If a report on inadmissibility on grounds of security is referred to the Immigration Division and the permanent resident or the foreign national who is the subject of the report is not detained, an officer shall also impose the prescribed conditions on the person.

Duration of conditions

(5) The prescribed conditions imposed under subsection (4) cease to apply only when

(a) the person is detained;

(b) the report on inadmissibility on grounds of security is withdrawn;

(c) a final determination is made not to make a removal order against the person for inadmissibility on grounds of security;

(d) the Minister makes a declaration under subsection 42.1(1) or (2) in relation to the person; or

(e) a removal order is enforced against the person in accordance with the regulations.

 

Règlement sur l'immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002-227 [RIPR]

Retrait de la demande

42 (1) Sous réserve du paragraphe (2), l’agent qui effectue le contrôle d’un étranger cherchant à entrer au Canada et à qui ce dernier fait savoir qu’il désire retirer sa demande d’entrée lui permet de la retirer et de quitter le Canada.

Exception — rapport

(2) Si un rapport est en cours d’établissement ou a été établi en application du paragraphe 44(1) de la Loi à l’égard de l’étranger qui fait savoir qu’il désire retirer sa demande d’entrée au Canada, l’agent ne lui permet ni de la retirer ni de quitter le Canada, sauf si le ministre décide de ne pas prendre de mesure de renvoi ou de ne pas déférer l’affaire à la Section de l’immigration pour enquête.

Obligation de confirmer son départ

(3) L’étranger auquel la permission de retirer sa demande d’entrée au Canada a été accordée doit comparaître sans délai devant un agent à un point d’entrée pour confirmer son départ du Canada.

 

Withdrawing application

42 (1) Subject to subsection (2), an officer who examines a foreign national who is seeking to enter Canada and who has indicated that they want to withdraw their application to enter Canada shall allow the foreign national to withdraw their application and leave Canada.

Exception — report

(2) If a report is being prepared or has been prepared under subsection 44(1) of the Act in respect of a foreign national who indicates that they want to withdraw their application to enter Canada, the officer shall not allow the foreign national to withdraw their application or leave Canada unless the Minister decides either not to make a removal order or not to refer the report to the Immigration Division for an admissibility hearing.

Obligation to confirm departure

(3) A foreign national who is allowed to withdraw their application to enter Canada must appear without delay before an officer at a port of entry to confirm their departure from Canada.

Permis non exigé

186 L’étranger peut travailler au Canada sans permis de travail :

[…]

v) s’il est titulaire d’un permis d’études et si, à la fois :

(i) il est un étudiant à temps plein inscrit dans un établissement d’enseignement désigné au sens de l’article 211.1,

(ii) il est inscrit à un programme postsecondaire de formation générale, théorique ou professionnelle ou à un programme de formation professionnelle de niveau secondaire offert dans la province de Québec, chacun d’une durée d’au moins six mois, menant à un diplôme ou à un certificat,

(iii) il travaille au plus vingt heures par semaine au cours d’un semestre régulier de cours, bien qu’il puisse travailler à temps plein pendant les congés scolaires prévus au calendrier;

[…]

No permit required

186 A foreign national may work in Canada without a work permit

[…]

(v) if they are the holder of a study permit and

(i) they are a full-time student enrolled at a designated learning institution as defined in section 211.1,

(ii) the program in which they are enrolled is a post-secondary academic, vocational or professional training program, or a vocational training program at the secondary level offered in Quebec, in each case, of a duration of six months or more that leads to a degree, diploma or certificate, and

(iii) although they are permitted to engage in full-time work during a regularly scheduled break between academic sessions, they work no more than 20 hours per week during a regular academic session;

[…]

Catégorie

210 La catégorie des étudiants est une catégorie réglementaire de personnes qui peuvent devenir résidents temporaires.

 

Class

210 The student class is prescribed as a class of persons who may become temporary residents.

Conditions — titulaire du permis d’études

220.1 (1) Le titulaire d’un permis d’études au Canada est assujetti aux conditions suivantes :

a) il est inscrit dans un établissement d’enseignement désigné et demeure inscrit dans un tel établissement jusqu’à ce qu’il termine ses études;

b) il suit activement un cours ou son programme d’études.

[…]

Conditions — study permit holder

220.1 (1) The holder of a study permit in Canada is subject to the following conditions:

(a) they shall enroll at a designated learning institution and remain enrolled at a designated learning institution until they complete their studies; and

(b) they shall actively pursue their course or program of study.

[…]

Application du paragraphe 44(2) de la Loi : étrangers

228 (1) Pour l’application du paragraphe 44(2) de la Loi, mais sous réserve des paragraphes (3) et (4), dans le cas où elle ne comporte pas de motif d’interdiction de territoire autre que ceux prévus dans l’une des circonstances ci-après, l’affaire n’est pas déférée à la Section de l’immigration et la mesure de renvoi à prendre est celle indiquée en regard du motif en cause :

[…]

c) en cas d’interdiction de territoire de l’étranger au titre de l’article 41 de la Loi pour manquement à :

(i) l’obligation prévue à la partie 1 de la Loi de se présenter au contrôle complémentaire ou à l’enquête, l’exclusion,

[…]

Subsection 44(2) of the Act — foreign nationals

228 (1) For the purposes of subsection 44(2) of the Act, and subject to subsections (3) and (4), if a report in respect of a foreign national does not include any grounds of inadmissibility other than those set out in the following circumstances, the report shall not be referred to the Immigration Division and any removal order made shall be

[…]

(c) if the foreign national is inadmissible under section 41 of the Act on grounds of

(i) failing to appear for further examination or an admissibility hearing under Part 1 of the Act, an exclusion order,

[…]

 

 


JUGEMENT dans les dossiers IMM-3832-22, IMM-3211-22, IMM-3730-22

LA COUR REND LE JUGEMENT suivant :

  1. Le contrôle judiciaire est rejeté.

  2. Il n'y a aucune question certifiée.

"Negar Azmudeh"

Judge

 


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIERS :

IMM-3832-22, IMM-3211-22, IMM-3730-22

INTITULÉ :

HERTZIEN LEIRIS NDJABA NGOTTY c. MSPPC

LIEU DE L’AUDIENCE :

MONTRÉAL (QUÉBEC)

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 15 avril 2024

JUGEMENT ET MOTIFS :

LA JUGE AzMUDEH

DATE DES MOTIFS :

Le 10 mai 2024

COMPARUTIONS :

Me Rose-Mie Léonard

Pour le demandeur

Me Larissa Foucault

Pour le défendeur

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Rose-Mie Léonard

Cabinet Me Hugues Langlais, avocats Inc.

Montréal (Québec)

Pour le demandeur

Procureur général du Canada

Montréal (Québec)

 

Pour le défendeur

 

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