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     Date :  20070122

Dossier :  IMM-2721-06

Référence :  2007 CF 54

Ottawa (Ontario), le 22 janvier 2007

En présence de Monsieur le juge Beaudry 

 

ENTRE :

RACHID BELBEY

SAMIA LAHCENE

demandeurs

et

 

MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L'IMMIGRATION

défendeur

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               Il s'agit d'une demande de contrôle judiciaire en vertu du paragraphe 72(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, c. 27 (la Loi), d'une décision rendue le 27 avril 2006 par l’agent Marjolaine Pelletier de la Commission d’immigration du Canada (le tribunal), qui a rejeté les demandes d’exemption de visa pour présenter une demande de résidence permanente en vertu du paragraphe 25(1) de la Loi.

 

 

I.          Question en litige

[2]               Le tribunal a-t-il erré en concluant que le parcours d’intégration des demandeurs au Canada n’était pas satisfaisant pour les dispenser de l’obligation de faire leur demande de résidence permanente à partir de l’étranger?

 

[3]               La réponse à cette question est négative. Par conséquent, la présente demande sera rejetée.

 

II.        Contexte factuel

[4]               Les demandeurs, Rachid Belbey et son épouse Samia Lahcene, sont des citoyens algériens arrivés au Canada le 20 avril 2001. Ils ont revendiqué le statut de réfugié le 23 avril 2001, mais cette demande a été refusée le 27 mai 2002. Le 16 novembre 2002, les demandeurs déposent une demande comme demandeurs non reconnus du statut de réfugié au Canada (DNRSRC). Le contrôle judiciaire de la décision du 27 mai 2002 est rejeté le 24 septembre 2002. Ils déposent alors des demandes de résidence permanente le 22 janvier 2003.

 

[5]               Deux enfants de ce couple sont nés au Québec : Sarah, le 30 juillet 2002, et Mouna, le 4 avril 2005. Ces deux enfants mineurs font partis des demandes de résidence permanente présentées en vertu de considérations humanitaires (CH).

 

[6]               Les demandeurs ont également déposé une demande en tant que ressortissants algériens afin de participer au programme conjoint d’Immigration Canada et d’Immigration Québec, Ministère des Relations avec les citoyens et de l’Immigration du Québec (le MRCI), mais leur demande n’a pas été retenue.

 

[7]               Les demandes CH sont rejetées le 27 avril 2006. C’est ce refus qui est l'objet de la présente demande de contrôle judiciaire.

 

III.       Décision contestée

[8]               Dans l'évaluation des considérations d'ordre humanitaire soumises, le tribunal a considéré plusieurs éléments incluant les liens que les demandeurs avaient établis avec le Canada, l’intérêt supérieur des enfants et la situation en Algérie. A cet égard, le tribunal en est arrivé aux conclusions suivantes:

L’intégration des requérants au Canada est minimale. Ils n’ont pas fait la preuve qu’il y avait un risque pour leur vie ou leur sécurité. Bien qu’ils aient des connaissances, [des] amis et qu’ils soient demeurés au Canada depuis 5 ans, je ne suis pas satisfaite qu’il existe des difficultés excessives à présenter leurs demandes de résidence permanente à l’extérieur du Canada. Je considère que le cas des requérants n’est pas méritoire et ne requiert pas une exemption à la Loi. J’ai considéré le cas des deux enfants canadiens comme étant un facteur important et ai accordé un poids important à cet élément.

 

Eu égard aux circonstances de la présente affaire, rien ne permet d’affirmer que les enfants soient exposés à des risques ou ne puissent se rétablir avec succès en Algérie. Le fait que les enfants puissent se trouver mieux au Canada sur le plan du confort en général ne saurait, à mon avis, être concluant dans une décision en matière de motifs d’ordre humanitaires qui a pour objet de voir s’il y a des difficultés excessives. Cependant, mis à part ce fait, les requérants n’ont pas démontré d’autres facteurs importants pouvant venir appuyer le fait que deux enfants sont nées de leur unions.

 

J’ai révisé l’ensemble des deux dossiers des requérants et j’en arrive à la conclusion que les difficultés à présenter, une demande à l’extérieur du Canada ne sont pas excessives, injustifiées ou inhabituelles.

 

 

IV.       Législation pertinente

[9]               Si les circonstances humanitaires le permettent, le Ministre peut, en vertu du paragraphe 25(1) de la Loi, octroyer le statut de résident permanent à un étranger lorsque ce dernier se trouve sur le territoire canadien. Cet article se lit comme suit :

Séjour pour motif d’ordre humanitaire

25. (1) Le ministre doit, sur demande d’un étranger interdit de territoire ou qui ne se conforme pas à la présente loi, et peut, de sa propre initiative, étudier le cas de cet étranger et peut lui octroyer le statut de résident permanent ou lever tout ou partie des critères et obligations applicables, s’il estime que des circonstances d’ordre humanitaire relatives à l’étranger — compte tenu de l’intérêt supérieur de l’enfant directement touché — ou l’intérêt public le justifient.

 

Humanitarian and compassionate considerations

25. (1) The Minister shall, upon request of a foreign national who is inadmissible or who does not meet the requirements of this Act, and may, on the Minister’s own initiative, examine the circumstances concerning the foreign national and may grant the foreign national permanent resident status or an exemption from any applicable criteria or obligation of this Act if the Minister is of the opinion that it is justified by humanitarian and compassionate considerations relating to them, taking into account the best interests of a child directly affected, or by public policy considerations.

 

V.        Analyse

Norme de contrôle

[10]           Dans Baker c. Canada (Le ministre de la citoyenneté et de l’immigration), [1999] 2 R.C.S. 817, la Cour suprême du Canada a établi que la norme de contrôle judiciaire applicable à l’examen de la décision de l’agent CH est celle de la décision raisonnable simpliciter. Cela signifie que je dois faire preuve de retenue à l’égard de la décision contestée à moins que les motifs de la décision ne soient pas appuyés par la preuve.

[11]           Les demandeurs prétendent que le tribunal a commis des erreurs révisables dans son appréciation des faits.

 

[12]           À l’égard des enfants, les demandeurs reprochent au tribunal de ne les avoir que mentionné  sans procéder à une analyse détaillée de leur situation. Ils citent Legault c. Canada (ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2002 CAF 125, [2002] A.C.F. no 457 (C.A.F.) (QL), paragraphe 13 :

[…] La simple mention des enfants ne suffit pas. L'intérêt des enfants est un facteur qui doit être examiné avec soin et soupesé avec d'autres facteurs. Mentionner n'est pas examiner et soupeser.

 

 

[13]           De son côté, à l'aide de la même cause, le défendeur souligne que le tribunal s'est bien acquitté de son obligation en traitant de l’intérêt supérieur des enfants. Mais dit-il, ce facteur n'est pas une garantie que la demande sous le paragraphe 25(1) de la Loi doit être accordée.

 

[14]           Je partage le point de vue du défendeur et je suis satisfait, après avoir lu la décision ainsi que l’ensemble de la preuve, que le tribunal a été réceptif, attentif et sensible au sort des enfants. Le tribunal a soupesé chaque élément, par exemple : leur jeune âge, l'absence de problèmes médicaux ainsi que le rôle que les demandeurs peuvent jouer auprès d’eux.

 

[15]           Dans Legault, ci-haut, le juge Robert Décary, s'exprime ainsi au paragraphe 12 :

Bref, l'agent d'immigration doit se montrer "réceptif, attentif et sensible à cet intérêt" (Baker, para. 75), mais une fois qu'il l'a bien identifié et défini, il lui appartient de lui accorder le poids qu'à son avis il mérite dans les circonstances de l'espèce. La présence d'enfants, contrairement à ce qu'a conclu le juge Nadon, n'appelle pas un certain résultat. Ce n'est pas parce que l'intérêt des enfants voudra qu'un parent qui se trouve illégalement au Canada puisse demeurer au Canada (ce qui, comme le constate à juste titre le juge Nadon, sera généralement le cas), que le ministre devra exercer sa discrétion en faveur de ce parent. Le Parlement n'a pas voulu, à ce jour, que la présence d'enfants au Canada constitue en elle-même un empêchement à toute mesure de refoulement d'un parent se trouvant illégalement au pays (voir Langner c. Ministre de l'Emploi et de l'Immigration (1995), 184 N.R. 230 (C.A.F.), permission d'appeler refusée, CSC 24740, 17 août 1995).

 

 

[16]           Pour ce qui est des autres « erreurs » du tribunal alléguées par les demandeurs à l’égard de leur intégration au pays, la même analyse s’applique. Le tribunal a tenu compte de leur formation, leur compétence linguistique, les lettres d’amis, ainsi que leur gestion financière. Ces derniers ont eu la chance d'avoir été évalués deux fois au sujet de leur intégration, soit par la province de Québec ainsi que par le tribunal. Malheureusement pour eux, ils ont reçu à chaque fois des réponses négatives.

 

[17]           La Cour considère que la décision contestée est détaillée, pondérée et soutenue par la preuve. Il n'y a pas de justification pour que la Cour intervienne.

 

[18]           Les parties n’ont pas soulevé de question à certifier et ce dossier n’en contient aucune.


 

JUGEMENT

 

LA COUR ORDONNE que la présente demande de contrôle judiciaire soit rejetée. Aucune question n’est certifiée.

 

« Michel Beaudry »

Juge

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                        IMM-2721-06

 

INTITULÉ :                                       RACHID BELBEY

                                                            SAMI LAHCENE c.

                                                            MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE                                                                                 L’IMMIGRATION

 

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Montréal (Québec)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               le 10 janvier 2007

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                              Le juge Beaudry

 

DATE DES MOTIFS :                      le 22 janvier 2007

 

 

 

COMPARUTIONS :                       

 

Sylvie Tardif                                                                 POUR LE DEMANDEUR

 

 

Gretchen Timmins                                                         POUR LA DÉFENDERESSE

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Sylvie Tardif                                                                 POUR LE DEMANDEUR

Montréal (Québec)

 

John Sims, c.r.                                                              POUR LA DÉFENDERESSE 

Sous-procureur général du Canada

Montréal (Québec)

 

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