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Date : 20070125

Dossier : IMM-729-06

Référence : 2007 CF 86

Ottawa (Ontario), le 25 janvier 2007

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE O’KEEFE

 

 

ENTRE :

NALINI DEVIKARA SWAMINATHAN

demanderesse

et

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

 

défendeur

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

LE JUGE O’KEEFE

 

[1]               Il s’agit d’une demande présentée en vertu du paragraphe 72(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001 ch. 27 (la « LIPR ») en vue de soumettre à un contrôle judiciaire la décision datée du 16 janvier 2006 par laquelle la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié (la « Commission ») a statué que la demanderesse n’a ni la qualité de réfugié ni celle de personne à protéger.

 

[2]               La demanderesse sollicite une ordonnance annulant la décision de la Commission et renvoyant l’affaire à un tribunal différemment constitué de la Commission pour qu’il statue de nouveau sur l’affaire.

 

Contexte

 

[3]               La demanderesse, Nalini Devikara Swaminathan, est une Tamoule âgée de quarante‑neuf ans, citoyenne du Sri Lanka. Elle dit craindre d’être persécutée du fait de son appartenance à un groupe social en particulier, soit celui des femmes tamoules victimes de violence familiale et épouses d’un présumé agresseur d’enfant.

 

[4]               Dans l’exposé circonstancié contenu dans son formulaire de renseignements personnels (FRP), la demanderesse explique les circonstances qui l’ont amenée à demander l’asile. Elle s’est mariée en 1986 et a déménagé pour rejoindre son époux dans les Émirats arabes unis en 1989. Ce dernier a commencé à faire de fréquents voyages d’affaires, et elle a soupçonné que durant ceux‑ci il avait des relations homosexuelles. Lorsqu’elle s’est plainte à son époux qu’elle se sentait négligée, il a menacé de la renvoyer au Sri Lanka. Le fils de la demanderesse est né en 1992, et l’on a diagnostiqué qu’il souffrait du syndrome de Down. La demanderesse a soutenu qu’en 2003 son époux a commencé à dormir dans la même chambre que leur fils et qu’il est devenu obsédé par ce dernier. Elle a plus tard découvert que son fils présentait des signes physiques d’agression sexuelle. Elle a confronté son époux, mais celui-ci a nié les allégations.

 

[5]               La demanderesse est allée au Sri Lanka en juillet 2004 et a parlé à la famille de son époux des abus sexuels dont son fils était victime. À cause de cela, elle a été battue par son époux et a subi de la violence verbale de la part de la famille de ce dernier. On l’a accusée d’avoir des problèmes psychologiques et menée de force chez un psychiatre. Par la suite, son époux les a laissés, elle et leur fils, au Sri Lanka, mais il a gardé leurs passeports. Il a appelé le cousin de la demanderesse au Sri Lanka et lui a dit qu’il allait engager quelqu’un pour la tuer. En novembre 2004, l’époux de la demanderesse est revenu au Sri Lanka et est reparti avec leur fils à Dubaï. Il a remis à la demanderesse son passeport et lui a dit de ne pas revenir à Dubaï.

 

[6]               Les membres de la famille de la demanderesse lui ont conseillé de partir pour le Canada, et son époux lui a procuré un visa de visiteur. Le 27 novembre 2004, elle a quitté le Sri Lanka pour Dubaï, où elle est restée jusqu’au 2 décembre 2004. Elle est arrivée au Canada le même jour et a demandé l’asile le 2 mars 2005. La demanderesse a déclaré qu’il lui était impossible de retourner à Dubaï ou au Sri Lanka parce que son époux ou les frères de ce dernier lui feraient du mal. En outre, elle cherchait à obtenir un statut juridique au Canada afin de pouvoir secourir son fils.

 

[7]               L’avocat de la demanderesse a demandé que l’audience relative au statut de réfugié ait lieu en personne à Toronto. La demanderesse possédait une bande vidéo confirmant ses allégations d’abus sexuels, mais cette bande ne pouvait pas être utilisée dans le cadre d’une vidéoconférence. La demande a été refusée, et l’audience a été tenue par voie de vidéoconférence, le 15 novembre 2005. L’avocat de la demanderesse n’a pas présenté de requête en vue de faire modifier l’ordre des interrogatoires au début de l’audience, et c’est la Commission qui a interrogé la demanderesse en premier. Selon cette dernière, la Commission s’est comportée de façon agressive et intimidante à son égard. La Commission a rejeté la demande de la demanderesse par une décision datée du 16 janvier 2006, le motif étant que cette dernière n’avait pas fourni de preuves crédibles à l’appui de sa demande. La présente est le contrôle judiciaire de la décision de la Commission.

 

Motifs de la Commission

 

[8]               La Commission a conclu que la demanderesse ne s’était pas acquittée du fardeau d’établir, à l’aide d’éléments de preuve crédibles, qu’elle avait la qualité de réfugié ou celle de personne à protéger. La Commission a reconnu que les déclarations faites sous serment sont présumées être véridiques, sauf s’il y a des raisons de douter de leur véracité. Elle a relevé certains problèmes dans le témoignage de la demanderesse qui faisaient douter de sa crédibilité :

            - La Commission lui a demandé pourquoi son époux aurait dit au cousin de la demanderesse qu’il avait engagé un tueur à gages. Elle n’a pas donné de réponse satisfaisante et n’a pas produit de déclaration écrite de son cousin pour confirmer la conversation. Elle n’a pas établi qu’il était déraisonnable de s’attendre à ce qu’elle entre en contact avec son cousin et obtienne un document déterminant pour la crainte qu’elle disait éprouver.

 

            - La demanderesse a déclaré qu’elle craignait d’être expulsée au Sri Lanka pour avoir évoqué la question des abus sexuels dont son fils était victime. La Commission a jugé invraisemblable qu’il faille à son époux trois ans, à partir du moment où elle a commencé à l’accuser, pour mettre cette menace à exécution.

 

            - Le témoignage de la demanderesse sur le temps qu’elle a passé en 2004 auprès de la famille de son époux au Sri Lanka n’était pas clair. La Commission a relevé des incohérences à propos des dates auxquelles la demanderesse a dit avoir cessé de vivre auprès de la famille de son époux et a loué une chambre où vivre avec son fils.

 

            - La demanderesse a dit craindre la famille de son époux, mais elle a déclaré qu’entre les mois de juillet et de novembre 2004 elle n’a eu aucun contact avec elle. La Commission a conclu que la famille de son époux ne présentait pas un risque sérieux pour la demanderesse.

 

            - La demanderesse a déclaré n’avoir aucun système de soutien au Sri Lanka; cependant, elle n’a pas demandé l’aide de son frère parce que ce dernier était aux prises avec ses propres problèmes. Elle a expliqué aussi que sa propre famille n’était pas aussi puissante que celle de son époux, un fait non mentionné dans l’exposé circonstancié inclus dans son FRP.

 

            - L’explication qu’elle a donnée pour n’avoir pas sollicité la protection des autorités sri‑lankaises (parce qu’elle avait peur) était dénuée de crédibilité, car elle avait un cousin qui l’avait aidée et un frère auquel elle ne s’était pas adressée.

 

            - La demanderesse n’a pas donné de réponse satisfaisante lorsqu’on lui a demandé d’expliquer pourquoi elle n’avait pas caché son fils afin de le protéger de son époux quand ce dernier était revenu au Sri Lanka en novembre 2004.

 

            - La demanderesse a déclaré que son époux l’avait menacée de mort à son retour au Sri Lanka. Elle a déclaré aussi qu’elle avait séjourné avec son époux à Dubaï pendant quatre jours avant son arrivée au Canada, et elle a expliqué que c’était parce qu’elle voulait voir ses enfants. La Commission n’a pas jugé que ces gestes concordaient avec l’allégation selon laquelle elle avait été menacée de mort. Il n’était pas mentionné dans l’exposé circonstancié inclus dans son FRP que son époux l’avait menacée de mort en novembre 2004.

 

            - La demanderesse n’a pas obtenu de déclaration sous serment de la part de son cousin au Canada, sur l’aide duquel elle comptait. Elle a expliqué de façon insatisfaisante qu’elle ne voulait pas que quiconque soit impliqué.

 

 

[9]               La Commission a pris en considération la preuve documentaire concernant la protection de l’État au Sri Lanka; selon cette preuve, en 2002 la police a ouvert un bureau pour aider l’Autorité nationale pour la protection des droits de l’enfance à faire enquête sur les cas de violence faite aux enfants. En outre, la loi sri-lankaise assimile à la violence faite aux enfants tout acte de violence sexuelle commis à l’égard d’un enfant. La Commission a noté que la demanderesse détenait une bande vidéo montrant les lésions de son fils, mais elle a conclu que cette dernière n’avait pas établi qu’elle ne pouvait pas s’attendre raisonnablement à bénéficier d’une protection pour son fils au Sri Lanka. En outre, l’exposé circonstancié inclus dans son FRP ne traitait pas des liens qu’il y avait entre la famille de son époux et la police.

 

[10]           La Commission a conclu que la demanderesse n’avait pas établi qu’elle avait été menacée par son époux ou que la famille de ce dernier lui faisait courir un danger. En tout état de cause, la Commission n’a pas cru qu’il y avait plus qu’une simple possibilité d’exposition à un risque pour sa sécurité si elle retournait au Sri Lanka. La Commission a indiqué qu’elle avait pris en considération les Directives concernant la persécution fondée sur le sexe, mais elle n’a pas conclu que celles-ci changeaient l’issue de la décision, car la demanderesse n’était pas venue au Canada pour les raisons alléguées. La Commission a fait remarquer que l’époux de la demanderesse lui permettait de parler chaque semaine à ses enfants et que cela ne cadrait pas avec les allégations qu’elle avait faites contre lui. La demande a donc été rejetée.

 

Questions en litige

 

[11]           Je reformulerais comme suit les questions que la demanderesse m’a soumises :

            1)         La Commission a-t-elle manqué aux principes de l’équité procédurale?

2)         La conclusion de la Commission quant à la crédibilité était-elle manifestement déraisonnable?

 

Observations de la demanderesse

 

[12]           Selon la demanderesse, les conclusions de fait de la Commission sont susceptibles de contrôle si elles sont tirées de façon abusive ou arbitraire ou sans qu’il soit tenu compte des éléments de preuve (voir la Loi sur les Cours fédérales, L.R.C. 1985, ch. F-7, dans sa forme modifiée, au paragraphe 18.1(4)), et les erreurs de droit sont susceptibles de contrôle selon la norme de la décision correcte (voir Pushpanathan c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1998] 1 R.C.S. 982, 160 D.L.R. (4th) 193).

 

[13]           La demanderesse a soutenu qu’aux termes des Directives no 7 du président la Commission a contre‑interrogé la demanderesse avant que celle‑ci puisse présenter sa cause par l’entremise de son avocat, ce qui a pu avoir une incidence sur l’équité de l’audience. Dans la décision Thamotharem c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2006] 3 R.C.F. 168, 2006 CF 16, la Cour a statué que cette pratique constitue un manquement au droit du demandeur à une équité procédurale. La demanderesse a fait remarquer que les directives n’ont pas d’effet obligatoire et que la Commission, en s’y conformant automatiquement, abuse de son pouvoir discrétionnaire. Le fait que son avocat ne se soit pas opposé à l’ordre des interrogatoires à l’audience ne la privait pas de son droit de soulever la question au stade du contrôle judiciaire (voir Ganji c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (1997), 135 F.T.R. 283, 40 Imm. L.R. (2d) 95).

 

[14]           La demanderesse a soutenu que le commissaire a manqué à son serment d’office et qu’il a enfreint la règle no 8 du Code de déontologie de la CISR en la contre-interrogeant en premier et en omettant de lui poser des questions de façon neutre. Il a été allégué qu’aux termes de cette règle les commissaires qui posent au demandeur des questions autrement qu’à des fins d’éclaircissement manquent à leur serment et que leurs décisions sont nulles ab initio. La demanderesse a soutenu que, en raison de la conduite abusive de la Commission, elle a été privée d’une audience équitable. Selon son affidavit, la Commission l’a interrogée de façon agressive et intimidante. Dans la décision Ritchie c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (2006), 146 A.C.W.S. (3d) 331, 2006 CF 99, la Cour a décrété que le fait de poser des questions de façon peu délicate, d’utiliser des termes inappropriés et de poser des questions auxquelles il est impossible de répondre équivaut à un déni de justice naturelle.

 

[15]           La demanderesse a fait valoir que l’absence de prise en considération par la Commission des Directives relatives à la persécution fondée sur le sexe (les « Directives ») constitue un manquement à la justice naturelle. La Commission aurait commis une erreur tautologique en concluant que les préoccupations relatives à la crédibilité ont préséance sur l’application des Directives. Dans la décision Ritchie, précitée, la Cour a déclaré que les Directives ne sont pas juridiquement contraignantes, mais qu’il convient de s’y conformer pour que les demandes de protection fondées sur des motifs liés au sexe soient examinées de façon équitable. Elle a ajouté que la Commission a commis un manquement à la justice naturelle en négligeant de mentionner ou d’appliquer les Directives.

 

[16]           Selon la demanderesse, la Commission a commis une erreur susceptible de contrôle en omettant de prendre en considération les observations qu’elle a présentées après l’audience (voir Avci c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (2003), 313 N.R. 307, 2003 CAF 359), dont de la jurisprudence pertinente qui, si elle avait été prise en considération, aurait fourni à la Commission le juste contexte dans lequel rendre la décision.

 

[17]           La demanderesse a fait valoir que la décision défavorable de la Commission quant à la crédibilité reposait sur deux conclusions : 1) l’invraisemblance du délai de trois ans avant que son époux mette à exécution sa menace de l’envoyer au Sri Lanka pour l’avoir accusé de violence sexuelle; 2) son incapacité à produire une preuve corroborante selon laquelle son époux voulait lui faire du mal. Il a été allégué que la Commission n’a pas tiré une conclusion claire au sujet de la crédibilité. La demanderesse a fait valoir que la conclusion d’invraisemblance de la Commission était axée sur le comportement de son époux, et non sur le sien. Selon elle, le temps qui s’était écoulé après l’accusation initiale rendait les gestes de son époux vraisemblables.

 

[18]           La demanderesse a soutenu que la Commission ne l’a pas informée qu’elle devait produire à l’audience une preuve corroborante. La Commission aurait pu la prévenir de la possibilité d’avoir à produire une telle preuve au moyen du formulaire d’examen initial. Il a été signalé qu’une preuve par affidavit est généralement considérée comme intéressée lorsqu’elle est produite dans le cadre d’une audience relative au statut de réfugié. La demanderesse a fait valoir que la bande vidéo – son meilleur élément de preuve – a été rejetée au début de l’audience. Il était donc déraisonnable de lui reprocher de ne pas avoir présenté d’affidavits additionnels, car elle n’aurait pas pu en prévoir la nécessité sans un avis approprié (voir T. A. c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (2006), 53 Imm. L.R.  (3d) 132, 2006 CF 212). Elle a soutenu que la conclusion de la Commission au sujet de la crédibilité est donc susceptible de contrôle par la Cour.

 

Observations du défendeur

 

[19]           La Commission a conclu que le récit de la demanderesse comportait plusieurs incohérences et invraisemblances, et que cette dernière n’avait pas fourni d’éléments de preuve crédibles à l’appui de sa demande. Le défendeur a fait valoir que la Commission possède l’expertise voulue pour trancher les questions de fait, et que la Cour n’a pas à modifier les conclusions de la Commission juste parce qu’elle n’est pas d’accord (voir Aguebor c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration) (1993), 160 N.R. 315, 42 A.C.W.S. (3d) 886 (C.A.F.)). En outre, les demandeurs d’asile doivent fournir à l’appui de leur demande des éléments de preuve crédibles, y compris des documents corroborants (voir Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration) c. Obstoj, [1992] 2 C.F. 739, 93 D.L.R. (4th) 144 (C.A.F.)). Selon le défendeur, la norme de contrôle applicable est la décision manifestement déraisonnable, et la demanderesse n’a pas fait ressortir une conclusion de la Commission que la preuve n’étayait pas (voir Sinan c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (2004), 128 A.C.W.S. (3d) 1173, 2004 CF 87).

 

[20]           Au vu de la preuve documentaire portant sur les efforts faits au Sri Lanka au chapitre de la protection de l’enfance, la Commission a conclu que l’explication donnée par la demanderesse pour ne pas s’être adressée aux autorités était objectivement déraisonnable. Il a été soutenu que, en raison du manque d’éléments de preuve dignes de foi et objectifs à l’appui de la crainte alléguée de la demanderesse, la Commission a décidé avec raison que la demande de cette dernière n’était pas fondée.

 

[21]           Le défendeur a fait valoir que la demanderesse n’a pas établi que l’audience n’était pas conforme à la justice naturelle. L’avocat de cette dernière ne s’est pas opposé officiellement à l’ordre des interrogatoires à l’audience et il ne peut donc pas alléguer que la Commission a abusé de son pouvoir discrétionnaire (voir les articles 43 et 44 des Règles de la Section de la protection des réfugiés, DORS/2002-228). Selon le défendeur, dans la décision Thamotharem, précitée, la Cour a conclu que les principes de justice naturelle n’exigent pas que l’avocat procède à un interrogatoire principal. En outre, il existe des éléments jurisprudentiels qui indiquent que les Directives no 7 permettent une certaine flexibilité (voir Benitez c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (2006), 40 Admin. L.R. (4th) 159, 2006 CF 461). Il a néanmoins été allégué que la demanderesse ne pouvait pas contester l’ordre des interrogatoires car son avocat n’avait pas présenté une requête officielle devant la Commission et qu’il y avait donc eu renonciation au droit de soulever la question dans le cadre d’un contrôle judiciaire (voir Yassine c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (1994), 172 N.R. 308, 27 Imm. L.R. (2d) 135 (C.A.F.)).

 

[22]           Selon le défendeur, la Commission a pris en considération les Directives concernant la persécution fondée sur le sexe et a conclu avec raison que ces dernières n’auraient pas changé l’issue de la décision, car la demanderesse n’était pas venue au Canada pour les raisons indiquées. Par ailleurs, toujours selon le défendeur, les Directives ne sont destinées ni à combler les lacunes que comporte une demande ni à créer de nouveaux motifs pour considérer qu’une personne est victime de persécution (voir Newton c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (2000), 182 F.T.R. 294, 97 A.C.W.S. (3d) 736).

 

[23]           Le défendeur a fait remarquer que la Commission a jugé que, en raison de conclusions défavorables au sujet de la crédibilité, il était inutile de prendre en considération les Directives. Dans la décision Gunel c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), dossier IMM-8526-03, daté du 6 octobre 2004, la Cour a statué qu’il n’était pas nécessaire de prendre en considération les Directives quand le demandeur n’était pas parvenu à faire ressortir une conclusion que la Commission avait tirée et qui était contraire à ces dernières. Ce raisonnement s’appliquerait à la présente espèce. Selon les Directives, un demandeur d’asile de sexe féminin doit montrer que le préjudice qu’il craint équivaut à de la persécution. Au dire du défendeur, la demanderesse n’est pas parvenue à prouver de manière crédible les accusations de pédophilie censément portées contre son époux.

 

[24]           Le défendeur soutient que la demanderesse n’est pas parvenue à montrer que les questions de la Commission ont indûment entravé l’instance ou qu’elles étaient empreintes de partialité. Il a fait remarquer que la Commission a le droit de poser des questions au cours de l’audience (voir Quiroa c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (2005), 30 Admin. L.R. (4th) 316, 2005 CF 271). Les notes sténographiques de l’audience n’étayaient pas l’allégation selon laquelle l’interrogatoire de la Commission avait été agressif, mais plutôt que l’on avait posé des questions pour éclaircir les réponses évasives de la demanderesse (voir Mahendran c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration) (1991), 14 Imm. L.R. (2d) 30, 134 N.R. 316 (C.A.F.)).

 

[25]           En réponse à l’allégation de l’avocat au sujet de sa partialité, la Commission a expliqué que son attitude reflétait son agacement face au témoignage déroutant de la demanderesse, et que cette dernière n’avait pas paru intimidée par son attitude. Le défendeur a soutenu que la Commission avait posé des questions afin de donner à la demanderesse l’occasion de répondre à des points préoccupants, et qu’il n’y avait pas eu manquement à la justice naturelle. Par ailleurs, la demanderesse n’a pas fourni de motifs sérieux pour établir une crainte de partialité de la part de la Commission (voir R. c. R.D.S., [1997] 3 R.C.S. 484, 151 D.L.R. (4th) 193).

 

[26]           Le défendeur a soutenu qu’à moins d’une preuve contraire la Commission est présumée avoir pris en considération la totalité des éléments de preuve qui lui sont soumis, que cela soit indiqué ou non dans ses motifs (voir Hassan c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration) (1992), 147 N.R. 317, 36 A.C.W.S. (3d) 635 (C.A.F.)). En outre, la Commission avait des motifs valables de refuser de prendre en considération la preuve enregistrée sur bande vidéo, car celle-ci n’avait pas été soumise à la Commission, et sa fiabilité et sa valeur probante étaient douteuses.

 

Analyse et décision

 

Norme de contrôle

[27]           La norme de contrôle qui s’applique à un éventuel manquement à l’équité procédurale est la décision correcte. Les conclusions de la Commission en matière de crédibilité sont contrôlées selon la norme de la décision manifestement déraisonnable et elles appellent donc un degré élevé de retenue (voir Juan c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2006 CF 809, au paragraphe 2).

 

[28]           Question no 1

            La Commission a-t-elle manqué aux principes de l’équité procédurale?

 

Interrogatoire agressif

 

[29]           La demanderesse a fait valoir que l’interrogatoire agressif de la Commission était intimidant et que, à cause de cela, l’audience avait été inéquitable. D’après le défendeur, la Commission était en droit de poser des questions, et la conduite de cette dernière n’avait pas donné lieu à une crainte raisonnable de partialité ou à un manquement à la justice naturelle. J’ai passé en revue les notes sténographiques de l’audience et je crois qu’à l’occasion la Commission a posé des questions sous une forme antagoniste. Par exemple, aux pages 22 à 24 des notes sténographiques :

[traduction

 

LE PRÉSIDENT (à la personne concernée)

 

[…]

 

- Madame, je parle de votre fils. Je parle du contraste entre les portraits tracés ici par différents éléments de preuve. Vous dites dans votre témoignage qu’à toutes fins pratiques il n’y a pas eu de mariage. Pendant dix-huit ans, vous avez vécu un mensonge.

 

[…]

 

- En ensuite, il y a trois ans de cela, vous l’avez accusé de pédophilie, et maintenant il va venir passer des vacances au Canada avec vous. Cela n’a pas de sens, madame.

 

R. Je ne savais pas qu’il allait voyager. Je ne savais pas…

 

- Eh bien, même si je croyais…

 

R. …jusqu’à ce que j’obtienne le passeport.

 

Q. Même si je le croyais, et je ne suis pas sûr que ce soit le cas, mais, même si je le croyais, quelle raison logique y a‑t‑il à vous amener au Canada alors qu’il ne souhaite pas du tout vivre avec vous? Il vous a amenée [inaudible] au Sri Lanka, pourquoi diable demanderait-il un visa de visiteur pour que vous puissiez venir au Canada?

 

R. Je ne sais pas. Je ne sais pas pourquoi, pour quelle raison, et je ne suis jamais venue au Canada avec lui. Jamais nous ne sommes venus ensemble au Canada.

 

- Ce n’est pas cela que je vous demande.

 

[…]

 

Q. Je vous demande de me dire, madame, ce qui s’est passé en novembre 2004.

 

[…]

 

R. Il est venu. Il est venu, il a pris mon fils, il a donné le passeport et il m’a dit : tu ne reviens pas à Dubaï. Tu vas au Canada, et tu reviens au Sri Lanka. Ce n’est qu’au moment où il m’a donné le passeport que j’ai su que j’avais un visa pour le Canada. Avant cela, je ne le savais pas.

 

- Madame, je suis désolé mais je ne comprends pas. Le type revient. Il vous donne son passeport, vous donne votre passeport, il dit que vous ne revenez pas à Dubaï. Vous devez aller au Canada et revenir au Sri Lanka.

 

Q. Qu’est-ce que cela veut dire? De quoi s’agit-il exactement?

 

R. J’ignore quel était, quel est, son motif.

 

- Madame, vous allez devoir être plus claire que cela, parce que… vous allez devoir me donner des explications parce que, d’après moi, rien de tout cela n’a du sens. Vous ne pouvez pas tout mettre sur les épaules de votre époux, madame. Vous allez devoir me dire ce qui se passe exactement.

 

Et à la page 27 des notes sténographiques :

[traduction

- Madame, il n’est pas question des communications entre vous et votre époux, il est question de vous; ce que je veux dire, c’est que vous avez, madame, un certain niveau d’instruction.

 

R. Oui.

 

Q. Et, avec ce niveau d’instruction – vous avez suivi des études secondaires –, vous n’avez pas demandé : tu m’envoies au Canada, qu’est-ce que je suis supposée faire là-bas? Pourquoi dois-je aller là-bas et revenir? Vous me dites que vous n’avez même pas posé cette question, madame. Pour moi, cela n’a aucun sens.

 

R. Je ne l’ai pas, non. Je ne lui ai pas posé la question comme cela.

 

Q. Vous avez donc pris l’avion, vous avez fait dix mille milles autour du monde, et vous ne saviez pas pourquoi?

 

R. Mon état d’esprit était comme cela, à cause des souffrances et du stress que j’ai endurés.

 

Et encore, à la page 35 des notes sténographiques :

[traduction

Q. Qu’avez-vous peur qu’il vous arrive au Sri Lanka?

 

R. Je n’ai aucune aide là‑bas. Il n’y a personne pour me protéger. J’ai besoin d’aide et de protection.

 

- Madame, ce n’est pas… cela ressemble davantage à une réponse qu’on vous a suggéré de dire. Cela ressemble à une réponse toute prête.

 

[30]           Je signale que l’avocat a évoqué à l’audience la question du ton intimidant des questions que posait la Commission. La Commission y a répondu comme suit (voir les pages 39 à 41 des notes sténographiques) :

[traduction

[…] Je suis conscient d’avoir posé certaines questions d’un ton catégorique. Vous savez, je… bien, cela fait un certain temps que nous travaillons aujourd’hui, mais je vous rappelle que je ne suis pas un joueur de poker, que, si je ressens quelque chose, il faut que je le dise parce que je veux que la demandeure ait la possibilité d’en parler. Mon intention n’est pas d’intimider qui que ce soit. Mon intention consiste essentiellement à dire à la demandeure : écoutez, ce point-là me pose des difficultés. Il y a devant moi des preuves contradictoires, et vous devez me donner une explication parce que, manifestement, l’affaire n’est pas très limpide.

 

[…]

 

Très bien. Elle ne m’a pas paru trop intimidée. Elle s’est montrée agacée parce qu’il y a eu quelques réponses qui n’ont pas été données et qu’elle ne veut probablement pas entendre le commissaire dire : cela n’a pas de sens à mes yeux. Je sais que ce n’est pas agréable à entendre. J’aurais préféré ne pas le dire. J’aurais souhaité que tout soit parfaitement clair. La journée aurait été bien plus agréable. Mais, quand ce n’est pas le cas, je préfère le dire. Certains de mes collègues ont une approche nettement meilleure ou différente. Ils ne disent peut-être pas ce qu’ils pensent. J’ai décidé de jouer cartes sur table. Si j’y vais un peu fort, vous avez parfaitement le droit de me rappeler que je ne devrais pas agir ainsi. Je préfère quand même jouer cartes sur table et dire qu’il y a des questions qui… doivent être clarifiées. […]

 

[31]           Dans son affidavit, la demanderesse a dit avoir été intimidée par la manière agressive dont le commissaire posait ses questions. Elle a déclaré que ce dernier criait fort et qu’il lui faisait peur. Elle a aussi fourni une preuve par affidavit de Bahee Sriskanda, qui a écouté un enregistrement audio de l’audience et a fait remarquer ce qui suit :

[traduction

Comme en témoigne l’enregistrement audio, les questions que le commissaire a posées étaient fort agressives, brutales et parfois hors de propos. L’enregistrement montre qu’il criait parfois très fort. Le commissaire a semblé avoir une attitude antagoniste, et son ton a intimidé la demandeure […]

 

L’avocat m’a informé qu’à quelques reprises le commissaire, assis sur sa chaise, s’est brusquement rapproché de la table, s’est gonflé la poitrine et a lancé ses questions d’une voix forte. Ces fois-là, la réponse de la demandeure était à peine audible car elle a paru effrayée par le ton qu’employait le commissaire. À plusieurs reprises, la demandeure a soupiré : « Oh, mon Dieu ».

 

[32]           Je signale que, bien que l’affidavit de Bahee Sriskanda renferme effectivement un certain nombre d’opinions, il contient aussi des descriptions de la façon dont le commissaire posait ses questions.

 

[33]           Le défendeur a fait valoir que les questions du commissaire étaient dues aux réponses vagues et contradictoires de la demanderesse. Ayant parcouru les notes sténographiques, je ne suis pas d’accord.

 

[34]           Selon moi, le type d’interrogatoire qui s’est déroulé en l’espèce est semblable à celui dont parle le juge Campbell dans la décision Ritchie, précitée.

 

[35]           Je suis d’avis que le type d’interrogatoire auquel s’est livré le commissaire dans cette affaire a donné lieu à une audience inéquitable ainsi qu’à un déni de justice naturelle pour la demanderesse.

 

[36]           Par conséquent, la demande de contrôle judiciaire est accueillie, et l’affaire est renvoyée à un tribunal différemment constitué de la Commission pour qu’il statue de nouveau sur l’affaire.

 

[37]           Compte tenu de ma conclusion sur cette question, il n’est pas nécessaire que je traite des autres questions que la demanderesse a soulevées.

 

[38]           Ni l’une ni l’autre des parties n’a voulu soumettre à mon examen une question grave de portée générale à certifier.


 

JUGEMENT

 

[39]           LA COUR ORDONNE que la demande de contrôle judiciaire soit accueillie, la décision de la Commission annulée, et l’affaire renvoyée à un tribunal différemment constitué de la Commission pour qu’il statue de nouveau sur l’affaire.

 

 

« John A. O’Keefe »

Juge

 

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Michèle Ledecq, B. trad.

 


ANNEXE

 

Les dispositions applicables

 

 

            Les dispositions applicables de la Loi sur les Cours fédérales, L.R.C. 1985, ch. F-7, dans sa forme modifiée, sont les suivantes :

 

18.1 . . .

 

18.1 . . .

 

(4) Les mesures prévues au paragraphe (3) sont prises si la Cour fédérale est convaincue que l’office fédéral, selon le cas  :

 

(4) The Federal Court may grant relief under subsection (3) if it is satisfied that the federal board, commission or other tribunal

 

a) a agi sans compétence, outrepassé celle-ci ou refusé de l’exercer;

 

(a) acted without jurisdiction, acted beyond its jurisdiction or refused to exercise its jurisdiction;

 

b) n’a pas observé un principe de justice naturelle ou d’équité procédurale ou toute autre procédure qu’il était légalement tenu de respecter;

 

(b) failed to observe a principle of natural justice, procedural fairness or other procedure that it was required by law to observe;

 

c) a rendu une décision ou une ordonnance entachée d’une erreur de droit, que celle-ci soit manifeste ou non au vu du dossier;

 

(c) erred in law in making a decision or an order, whether or not the error appears on the face of the record;

 

d) a rendu une décision ou une ordonnance fondée sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments dont il dispose;

 

(d) based its decision or order on an erroneous finding of fact that it made in a perverse or capricious manner or without regard for the material before it;

 

e) a agi ou omis d’agir en raison d’une fraude ou de faux témoignages;

 

(e) acted, or failed to act, by reason of fraud or perjured evidence; or

 

f) a agi de toute autre façon contraire à la loi.

(f) acted in any other way that was contrary to law.

 

 

            Les dispositions applicables de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27, sont les suivantes :

96. A qualité de réfugié au sens de la Convention — le réfugié — la personne qui, craignant avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un groupe social ou de ses opinions politiques  :

 

96. A Convention refugee is a person who, by reason of a well-founded fear of persecution for reasons of race, religion, nationality, membership in a particular social group or political opinion,

 

a) soit se trouve hors de tout pays dont elle a la nationalité et ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de chacun de ces pays;

 

(a) is outside each of their countries of nationality and is unable or, by reason of that fear, unwilling to avail themself of the protection of each of those countries; or

 

b) soit, si elle n’a pas de nationalité et se trouve hors du pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle, ne peut ni, du fait de cette crainte, ne veut y retourner.

 

(b) not having a country of nationality, is outside the country of their former habitual residence and is unable or, by reason of that fear, unwilling to return to that country.

 

97. (1) A qualité de personne à protéger la personne qui se trouve au Canada et serait personnellement, par son renvoi vers tout pays dont elle a la nationalité ou, si elle n’a pas de nationalité, dans lequel elle avait sa résidence habituelle, exposée  :

 

97.(1) A person in need of protection is a person in Canada whose removal to their country or countries of nationality or, if they do not have a country of nationality, their country of former habitual residence, would subject them personally

 

a) soit au risque, s’il y a des motifs sérieux de le croire, d’être soumise à la torture au sens de l’article premier de la Convention contre la torture;

 

(a) to a danger, believed on substantial grounds to exist, of torture within the meaning of Article 1 of the Convention Against Torture; or

 

b) soit à une menace à sa vie ou au risque de traitements ou peines cruels et inusités dans le cas suivant  :

 

(b) to a risk to their life or to a risk of cruel and unusual treatment or punishment if

 

(i) elle ne peut ou, de ce fait, ne veut se réclamer de la protection de ce pays,

 

(i) the person is unable or, because of that risk, unwilling to avail themself of the protection of that country,

 

(ii) elle y est exposée en tout lieu de ce pays alors que d’autres personnes originaires de ce pays ou qui s’y trouvent ne le sont généralement pas,

 

(ii) the risk would be faced by the person in every part of that country and is not faced generally by other individuals in or from that country,

 

(iii) la menace ou le risque ne résulte pas de sanctions légitimes — sauf celles infligées au mépris des normes internationales — et inhérents à celles-ci ou occasionnés par elles,

 

(iii) the risk is not inherent or incidental to lawful sanctions, unless imposed in disregard of accepted international standards, and

 

(iv) la menace ou le risque ne résulte pas de l’incapacité du pays de fournir des soins médicaux ou de santé adéquats.

 

(iv) the risk is not caused by the inability of that country to provide adequate health or medical care.

 

(2) A également qualité de personne à protéger la personne qui se trouve au Canada et fait partie d’une catégorie de personnes auxquelles est reconnu par règlement le besoin de protection.

 

(2) A person in Canada who is a member of a class of persons prescribed by the regulations as being in need of protection is also a person in need of protection.

 

153.(1) Pour ce qui est du président et des commissaires de la Section de la protection des réfugiés, de la Section d’appel des réfugiés et de la Section d’appel de l’immigration  :

 

153.(1) The Chairperson and members of the Refugee Protection Division, Refugee Appeal Division and Immigration Appeal Division

 

[. . .]

 

[. . .]

 

b) ils prêtent le serment professionnel ou la déclaration dont le texte figure aux règles de la Commission;

 

[. . .]

(b) shall swear the oath or give the solemn affirmation of office set out in the rules of the Board;

 

[. . .]

 

            Les dispositions applicables des Directives no 7 du président : Directives concernant la préparation et la tenue des audiences à la Section de la protection des réfugiés, sont les suivantes :

19. Dans toute demande d’asile, c’est généralement l’APR qui commence à interroger le demandeur d’asile. En l’absence d’un APR à l’audience, le commissaire commence l’interrogatoire et est suivi par le conseil du demandeur d’asile. Cette façon de procéder permet ainsi au demandeur d’asile de connaître rapidement les éléments de preuve qu’il doit présenter au commissaire pour établir le bien-fondé de son cas.

 

19. In a claim for refugee protection, the standard practice will be for the RPO to start questioning the claimant. If there is no RPO participating in the hearing, the member will begin, followed by counsel for the claimant. Beginning the hearing in this way allows the claimant to quickly understand what evidence the member needs from the claimant in order for the claimant to prove his or her case.

 

23. Le commissaire peut changer l’ordre des interrogatoires dans des circonstances exceptionnelles. Par exemple, la présence d’un examinateur inconnu peut intimider un demandeur d’asile très perturbé ou un très jeune enfant au point qu’il n’est pas en mesure de comprendre les questions ni d’y répondre convenablement. Dans de telles circonstances, le commissaire peut décider de permettre au conseil du demandeur de commencer l’interrogatoire. La partie qui estime que de telles circonstances exceptionnelles existent doit soumettre une demande en vue de changer l’ordre des interrogatoires avant l’audience. La demande est faite conformément aux Règles de la SPR.

23.  The member may vary the order of questioning in exceptional circumstances. For example, a severely disturbed claimant or a very young child might feel too intimidated by an unfamiliar examiner to be able to understand and properly answer questions. In such circumstances, the member could decide that it would be better for counsel for the claimant to start the questioning. A party who believes that exceptional circumstances exist must make an application to change the order of questioning before the hearing. The application has to be made according to the RPD Rules.

 

 

            Les dispositions applicables des Règles de la Section de la protection des réfugiés, DORS/2002-228, sont les suivantes :

43. Sauf indication contraire des présentes règles  :

 

43. Unless these Rules provide otherwise

 

a) la partie qui veut que la Section statue sur toute question soulevée dans le cadre d’une procédure, notamment sur le déroulement de celle-ci, lui en fait la demande selon la règle 44;

 

(a) a party who wants the Division to make a decision on any matter in a proceeding, including the procedure to be followed, must make an application to the Division under rule 44;

 

b) celle qui veut répondre à la demande le fait selon la règle 45;

 

(b) a party who wants to respond to the application must respond under rule 45; and

 

c) celle qui veut répliquer à la réponse le fait selon la règle 46.

 

(c) a party who wants to reply to a response must reply under rule 46.

 

44.(1) Sauf indication contraire des présentes règles, toute demande est faite sans délai par écrit. La Section peut permettre que la demande soit faite oralement pendant une procédure si la partie n’aurait pu, malgré des efforts raisonnables, le faire par écrit avant la procédure.

 

44.(1) Unless these Rules provide otherwise, an application must be made in writing and without delay. The Division may allow a party to make an application orally at a proceeding if the party with reasonable effort could not have made a written application before the proceeding.

 

(2) Dans sa demande écrite, sauf indication contraire des présentes règles, la partie  :

 

(2) Unless these Rules provide otherwise, in a written application the party must

 

a) énonce la décision recherchée;

 

(a) state what decision the party wants the Division to make;

 

b) énonce les raisons pour lesquelles la Section devrait rendre cette décision;

 

(b) give reasons why the Division should make that decision; and

 

c) indique si l’autre partie, le cas échéant, consent à la demande, dans le cas où elle connaît l’opinion de cette autre partie.

 

(c) if there is another party and the views of that party are known, state whether the other party agrees to the application.

 

(3) Sauf indication contraire des présentes règles, la partie énonce dans un affidavit ou une déclaration solennelle qu’elle joint à sa demande écrite tout élément de preuve qu’elle veut soumettre à l’examen de la Section.

 

(3) Unless these Rules provide otherwise, any evidence that the party wants the Division to consider with a written application must be given in an affidavit or statutory declaration that accompanies the application.

 

(4) La partie qui fait une demande par écrit transmet  :

 

(4) A party who makes a written application must provide

 

a) à l’autre partie, le cas échéant, une copie de la demande et, selon le cas, de l’affidavit ou de la déclaration solennelle;

 

(a) to any other party, a copy of the application and any affidavit or statutory declaration; and

 

b) à la Section, l’original de la demande et, selon le cas, de l’affidavit ou de la déclaration solennelle, ainsi qu’une déclaration écrite indiquant à quel moment et de quelle façon une copie de ces documents a été transmise à l’autre partie, le cas échéant.

 

(b) to the Division, the original application and any affidavit or statutory declaration, together with a written statement of how and when the party provided the copy to any other party.

 

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                                        IMM-729-06

 

INTITULÉ :                                                       NALINI DEVIKARA SWAMINATHAN 

                                                                            c.

                                                                            LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                                TORONTO (ONTARIO)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                               LE 16 JANVIER 2007

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                                             LE JUGE O’KEEFE

 

DATE DES MOTIFS :                                     LE 25 JANVIER 2007

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Kumar S. Sriskanda                                             POUR LA DEMANDERESSE

 

Anshumala Juyal                                                   POUR LE DÉFENDEUR

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Kumar S. Sriskanda

Scarborough (Ontario)                                         POUR LA DEMANDERESSE

 

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada                       POUR LE DÉFENDEUR

 

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