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Date : 20070720

Dossier : IMM-5041-06

Référence : 2007 CF 762

Ottawa (Ontario), le 20 juillet 2007

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE PHELAN

 

 

ENTRE :

NICOLE AMANDA SIMMONS

demanderesse

et

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L'IMMIGRATION

défendeur

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

I.          Introduction

[1]               Il a été conclu dans l'examen des risques avant renvoi (ERAR) de la demanderesse qu'elle pouvait se prévaloir de la protection de l'État à Saint-Vincent-et-les-Grenadines (Saint-Vincent) en ce qui a trait à la violence conjugale dont elle avait été victime. Il s'agit du contrôle judiciaire de cette décision.

 

II.         Les faits

[2]               La demanderesse, une citoyenne de Saint-Vincent, est venue au Canada en 2002 et a présenté une demande d'asile. La Commission de l'immigration et du statut de réfugié (la Commission) a conclu que son récit au sujet de la violence conjugale dont elle avait été victime était crédible, mais a rejeté sa demande au motif qu'elle pouvait se prévaloir de la protection de l'État.

 

[3]               Au cours du processus d'ERAR, elle a présenté un affidavit de sa mère qui déclarait que jusqu'en décembre 2004, l'époux de la demanderesse s'intéressait encore à elle – et que ce n'était probablement pas de façon bienveillante. Elle a aussi présenté une lettre d'un docteur qui soutenait que, compte tenu de ses antécédents (y compris ses pensées suicidaires) et des menaces auxquelles elle ferait face à Saint-Vincent, son pays d'origine ne pourrait pas lui offrir un traitement adéquat et elle n'y serait pas en sécurité.

 

[4]               L'agent d'ERAR a tenu compte de la conclusion de la Commission au sujet de la protection de l'État, du fait que les policiers avaient pris des mesures en réponse aux plaintes de la demanderesse et du fait que son époux continuait à nourrir de mauvaises intentions envers elle. L'agent a conclu qu'aucun nouvel élément de preuve portant sur la protection de l'État n'avait été présenté depuis la décision de la Commission.

 

[5]               L'agent a accepté le rapport du docteur, mais a conclu que la lettre portait principalement sur la protection de l'État. Le rapport traitait de la capacité de l'État à protéger la demanderesse contre son intention de se suicider. Bien qu'il eût reconnu qu'elle avait peut-être tenté de se suicider, l'agent a conclu que la preuve était insuffisante à ce sujet. Finalement, il a remarqué que la crainte que la demanderesse se suicide n'est pas en soi un motif qui justifie un redressement.

 

III. Analyse

[6]               La norme de contrôle applicable aux décisions d'ERAR est la décision manifestement déraisonnable pour les questions de fait, la décision raisonnable pour les questions mixtes de droit et de fait, la décision correcte pour les questions de droit et finalement, la décision raisonnable en ce qui a trait à l'examen de la décision dans son ensemble.

23.              En ce qui concerne la norme de contrôle applicable aux décisions des agents d'ERAR, dans la décision Kim c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2005] A.C.F. no 540 (1re inst.), au paragraphe 19, le juge Mosley, après avoir effectué une analyse pragmatique et fonctionnelle, a conclu que « la norme de contrôle applicable aux questions de fait devrait être, de manière générale, celle de la décision manifestement déraisonnable; la norme applicable aux questions mixtes de fait et de droit, celle de la décision raisonnable simpliciter; et la norme applicable aux questions de droit, celle de la décision correcte ». Le juge Mosley a aussi souscrit à l'observation du juge Martineau dans la décision Figurado c. Canada (Solliciteur général), [2005] A.C.F. no 458 (1re inst.), au paragraphe 51 : lorsque la décision d'un agent d'ERAR est examinée « globalement et dans son ensemble », la norme de contrôle applicable devrait être celle de la décision raisonnable simpliciter. Cette jurisprudence a été suivie par la juge Layden‑Stevenson dans la décision Nadarajah c. Canada (Solliciteur général), [2005] A.C.F. no 895 (1re inst.), au paragraphe 13. Pour les motifs exposés par mes collègues, je reconnais que telle est la formulation correcte de la norme de contrôle applicable.

(Voir la décision Demirovic c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2005] A.C.F. no 1560, 2005 CF 1284.)

 

 

[7]               Le fond de la décision porte sur la question de savoir si la situation à Saint-Vincent a changé au niveau de la protection de l'État de manière générale ou d'une façon qui touche plus particulièrement la demanderesse. La décision doit être examinée dans son ensemble et la décision raisonnable est la norme applicable.

 

[8]               Malgré l'argument de la demanderesse selon lequel l'agent a commis des erreurs de droit, je n'en relève aucune. L'agent n'exigeait pas qu'il y ait un lien entre les motifs énoncés à l'article 96 et ceux prévus à l'article 97 de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés (LIPR). L'agent a conclu qu'il n'y avait pas suffisamment d'éléments de preuve qui lui permettaient de conclure que la demanderesse pouvait être un danger envers elle-même.

 

[9]               Il a noté que la demanderesse avait eu des pensées suicidaires toute sa vie. Bien qu'il n'y ait aucune analyse de la suffisance des soins psychologiques ou psychiatriques disponibles à Saint‑Vincent, rien ne donnait à penser qu'elle n'aurait pas accès à de tels soins. Dans la mesure où la demanderesse a des préoccupations quant à la disponibilité ou la suffisance de tels soins, ces préoccupations ne comptent pas comme motifs prévus à l'article 97, puisqu'il s'agit d'une des exceptions aux risques prévus à l'article 97, conformément au sous-alinéa 97(1)b)(iv).

 

[10]           L'agent n'a pas omis de tenir compte de la preuve documentaire qui attestait que les policiers ne sont pas toujours efficaces, surtout lorsque l'agresseur est un policier ou un ami d'un policier. En fait, malgré l'allégation selon laquelle l'époux de la demanderesse avait des amis au sein de la police, ce dernier a agressé un policier – il s'agit d'un acte qui risque de ne pas lui attirer la sympathie des forces policières.

 

[11]           L'agent n'a pas analysé la décision de la Commission quant à l'existence de la protection de l'État et il n'était pas tenu de le faire. Il a tenu compte de la décision ainsi que des autres preuves qui lui avaient été présentées, comme il le devait.

 

[12]           La demanderesse conteste l'appréciation que l'agent a faite de la preuve, mais à mon avis, l'agent a fait exactement ce qu'il était tenu de faire en examinant toute la preuve. Il n'a rien omis, et il n'y avait rien de déraisonnable dans son approche. La Cour ne peut pas substituer son appréciation de la preuve à celle de l'agent.

 

[13]           Dans l'ensemble, la décision de l'agent était raisonnable et, par conséquent, la demande de contrôle judiciaire sera rejetée. Il n'y a aucune question à certifier.

 

JUGEMENT

LA COUR STATUE que la demande de contrôle soit rejetée.

 

 

« Michael L. Phelan »

Juge

 

Traduction certifiée conforme

Evelyne Swenne, traductrice


Cour fédérale

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

Dossier :                                        IMM-5041-06

 

INTITULÉ :                                       NICOLE AMANDA SIMMONS

 

                                                            c.

 

                                                            LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

 

 

 

LIEU DE L'AUDIENCE :                 Toronto (Ontario)

 

DATE DE L'AUDIENCE :               Le 26 juin 2007

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                              Le juge Phelan

 

DATE DES MOTIFS :                      Le 20 juillet 2007

 

 

COMPARUTIONS :

 

Osborne G. Barnwell

 

POUR LA DEMANDERESSE

 

Michael Butterfield

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Osborne G. Barnwell

Avocat

Toronto (Ontario)

 

POUR LA DEMANDERESSE

 

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

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