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Date : 20070830

Dossier : IMM-3691-06

Référence : 2007 CF 872

Ottawa (Ontario), le 30 août 2007

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE O'REILLY

 

 

ENTRE :

WAHIDULLAH SALIMI

AHMADULLAH SALIMI

demandeurs

et

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               M. Wahidullah Salimi et son frère, M. Ahmadullah Salimi, sont des citoyens de l’Afghanistan. Ils vivent actuellement avec leurs parents, ainsi que leurs frères et sœurs, dans un camp pour réfugiés de Peshawar, au Pakistan. Ils ont quitté Kaboul en 1992. Un groupe d’amis et des membres de leur famille demandent à les parrainer pour qu'ils deviennent résidents permanents au Canada.

 

[2]               En 2006, un agent d’immigration du Haut Commissariat du Canada (l’agent) à Islamabad a conclu que les demandeurs n’étaient pas admissibles à la réinstallation au Canada au motif qu’ils n’avaient pas réussi à établir qu’une guerre civile, un conflit armé ou une violation massive des droits de la personne dans le pays de leur nationalité continuait d'avoir des conséquences graves et personnelles sur eux. L’agent a ajouté que les demandeurs pouvaient retourner en Afghanistan en participant à un programme de rapatriement financé par le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (le HCRNU).

 

[3]               Les demandeurs soutiennent que l’agent a omis de les traiter équitablement en ne leur donnant pas l’occasion de répondre à la preuve documentaire sur laquelle il s’était appuyé. De plus, ils prétendent que l’agent n’a pas tenu compte de la situation réelle à laquelle ils seraient confrontés s’ils retournaient en Afghanistan.

 

[4]               Je ne vois aucune raison d’annuler la décision de l’agent et rejette donc la présente demande de contrôle judiciaire.

 

I.        Question

[5]               L’agent a-t-il omis de traiter les demandeurs équitablement ou de tenir compte de la situation qui règne actuellement en Afghanistan?

 

II.     Analyse

[6]               Je ne peux annuler la décision de l’agent que si je conclus qu’il a traité les demandeurs de façon inéquitable, ou si sa décision n’était pas étayée par la preuve.

 

a)     Le régime législatif

 

[7]               Pour obtenir gain de cause, les demandeurs devaient réussir à établir qu’« aucune possibilité raisonnable de solution durable n’est [à leur égard] réalisable dans un délai raisonnable dans un pays autre que le Canada », selon l’alinéa 139 (1)d) du Règlement sur l'immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002-227 (le Règlement), dont les dispositions pertinentes figurent en annexe. Ils devaient également établir qu’ils appartenaient à la « catégorie de personnes de pays d'accueil », laquelle comprend l’étranger ayant besoin de se réinstaller parce qu’il se trouve hors du pays dont il a la nationalité, et qu’« une guerre civile, un conflit armé ou une violation massive des droits de la personne […] ont eu et continuent d'avoir des conséquences graves et personnelles pour lui » (alinéa 146(1)a) et article 147 du Règlement).

 

b)   La décision de l’agent

 

[8]               L’agent a conclu que les demandeurs n’avaient pas réussi à établir qu’ils satisfaisaient aux exigences du Règlement. Plus particulièrement, il a jugé que les préoccupations des demandeurs au sujet de leur retour à Kaboul étaient de nature économique et sociale, et qu’elles ne découlaient pas  des conséquences d’une guerre civile, d’un conflit armé ou d’une violation des droits de la personne. Les demandeurs ont signalé le manque de soins de santé, de soutien familial, de possibilités de formation et perspectives d’emploi et de réseaux de distribution d'eau et d'électricité à Kaboul. L’agent a conclu que la situation des demandeurs n’était pas différente de celle de millions d’autres personnes qui avaient fui l’Afghanistan durant la guerre civile. En outre, il a jugé qu’il existait une « solution durable » à leur égard grâce au programme de rapatriement à Kaboul géré par du HCRNU visant à faciliter. L’agent a déclaré dans un affidavit qu’il avait informé les demandeurs de l’existence de ce programme et qu’il leur avait demandé de présenter des observations sur la question du rapatriement. Le programme du HCRNU a permis le rapatriement du Pakistan de près de trois millions d’Afghans depuis 2002, dont 70 000 personnes sont retournées à Kaboul.

 

c)  Les demandeurs ont-ils réussi à établir que l’agent les a traités de façon inéquitable ou qu’il a omis de tenir compte d’éléments de preuve importants?

 

[9]               Je ne suis pas convaincu que l’agent a traité les demandeurs de façon inéquitable. Ces derniers ont eu l’occasion de présenter leur cause et de répondre aux préoccupations soulevées par l’agent.

 

[10]           Je ne suis pas non plus convaincu que l’agent a omis de tenir compte d’éléments de preuve importants relatifs au programme de rapatriement du HCRNU. La preuve documentaire sur laquelle l’agent s’est appuyé révèle que des millions de personnes qui se trouvaient dans une situation semblable à celle des demandeurs sont retournées en Afghanistan grâce au programme du HCRNU. Il est vrai qu’il existe toujours un courant en sens inverse d’Afghans qui retournent au Pakistan pour des raisons économiques. En effet, le programme du HCRNU, appuyé par l’Office d'aide humanitaire de la Commission européenne, fournit seulement une aide financière minimale. Cependant, la grande majorité des personnes rapatriées demeurent en Afghanistan.

 

[11]           Je souscris à l’argument des demandeurs selon lequel l’agent doit examiner le fondement de leur demande et la situation actuelle qui règne dans le pays où il existerait une solution durable à leur égard : Velautham c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2005 CF 1113, [2005] A.C.F. no 1385 (C.F.) (QL). Cependant, je suis convaincu que l’agent a examiné les prétentions des demandeurs et y a répondu. De plus, sa conclusion selon laquelle une solution durable était réalisable en Afghanistan à l’égard des demandeurs était appuyée par la preuve documentaire dont il disposait.

 

[12]           Par conséquent, je dois rejeter la présente demande de contrôle judiciaire. Les parties n’ont proposé aucune question de portée générale aux fins de certification et aucune question n’est énoncée.

 


JUGEMENT

 

LA COUR ORDONNE :

 

1.                  La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

2.                  Aucune question de portée générale n’est énoncée.

 

« James W. O’Reilly »

Juge

 

 

Traduction certifiée conforme

 

Caroline Tardif, LL.B., trad.

 


Annexe

 

Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002-227

 

Exigences générales

  139. (1) Un visa de résident permanent est délivré à l’étranger qui a besoin de protection et aux membres de sa famille qui l’accompagnent si, à l’issue d’un contrôle, les éléments suivants sont établis :

[…]

d) aucune possibilité raisonnable de solution durable n’est, à son égard, réalisable dans un délai raisonnable dans un pays autre que le Canada, à savoir :

(i) soit le rapatriement volontaire ou la réinstallation dans le pays dont il a la nationalité ou dans lequel il avait sa résidence habituelle,

(ii) soit la réinstallation ou une offre de réinstallation dans un autre pays;

 

Personnes protégées à titre humanitaire outre‑frontières

 

  146. (1) Pour l’application du paragraphe 12(3) de la Loi, la personne dans une situation semblable à celle d’un réfugié au sens de la Convention appartient à l’une des catégories de personnes protégées à titre humanitaire outre-frontières suivantes

 :

a) la catégorie de personnes de pays d’accueil;

 

Catégorie de personnes de pays d’accueil

  147. Appartient à la catégorie de personnes de pays d’accueil l’étranger considéré par un agent comme ayant besoin de se réinstaller en raison des circonstances suivantes :

a) il se trouve hors de tout pays dont il a la nationalité ou dans lequel il avait sa résidence habituelle;

b) une guerre civile, un conflit armé ou une violation massive des droits de la personne dans chacun des pays en cause ont eu et continuent d’avoir des conséquences graves et personnelles pour lui.

 

 

 

Immigration and Refugee Protection Regulations, SOR/2002-227

 

General requirements

  139. (1) A permanent resident visa shall be issued to a foreign national in need of refugee protection, and their accompanying family members, if following an examination it is established that

(d) the foreign national is a person in respect of whom there is no reasonable prospect, within a reasonable period, of a durable solution in a country other than Canada, namely

(i) voluntary repatriation or resettlement in their country of nationality or habitual residence, or

(ii) resettlement or an offer of resettlement in another country;

 

 

Humanitarian-protected persons abroad

 

  146. (1) For the purposes of subsection 12(3) of the Act, a person in similar circumstances to those of a Convention refugee is a member of one of the following humanitarian-protected persons abroad classes:

 

 

(a)   the country of asylum class;

 

 

Member of country of asylum class

  147. A foreign national is a member of the country of asylum class if they have been determined by an officer to be in need of resettlement because

(a) they are outside all of their countries of nationality and habitual residence; and

 

(b) they have been, and continue to be, seriously and personally affected by civil war, armed conflict or massive violation of human rights in each of those countries.

 

 

 

 

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                                IMM-3691-06

 

INTITULÉ :                                               WAHIDULLAH SALIMI ET AUTRE

                                                                    c.

                                                            LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                        TORONTO (ONTARIO)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                       LE 25 MAI  2007

 

MOTIFS DU JUGEMENT  

ET JUGEMENT :                                     LE JUGE O’REILLY

 

DATE DES MOTIFS :                             LE 30 AOÛT 2007

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Carey A. McKay

 

POUR LES DEMANDEURS

 

 

John Provart

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

 

CAREY A. MCKAY

Toronto (Ontario)

 

POUR LES DEMANDEURS

 

JOHN H. SIMS, c.r.

Sous-procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

 

 

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

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