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Date : 20071018

Dossier : IMM-6292-06

Référence : 2007 CF 1064

Ottawa (Ontario), le 18 octobre 2007

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE SHORE

 

 

ENTRE :

NAJWA FERZLY

demanderesse

et

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

 

défendeur

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

SURVOL

[1]                                       Votre amie de cœur, madame Ferzly, devra déposer une garantie de 10 000 $ comptant et vous devrez vous présenter au bureau d’Immigration Canada le premier jour après votre libération et ensuite une fois par semaine. Vous devez les aviser de tout changement d’adresse. Vous comprenez? Donc, il faut absolument qu’il y ait 10 000 $ de déposés comptant, aussi c’est un montant qui est important, mais pas tant que ça, je pense que je vous fais confiance, vous Madame.

 

            Vous j’ai certains doutes, mais je pense que madame a quand même un certain contrôle et il faut que vous réalisiez que si vous voulez avoir un avenir ici, vous êtes mieux de faire les choses selon les règles. Maître Moussa va vous expliquer qu’après ça il y a un gros X sur le dossier, si vous ne faites pas ça dans les règles.

 

            Donc, un billet d’avion, preuve d’achat de billet d’avion pour un départ avant le 7 juillet ou au plus tard le 1er juillet 2006, 10 000 $ comptant, vous devrez vous présenter au bureau d’Immigration Canada le premier jour ouvrable après votre libération et ensuite une fois par semaine, puis aviser de tout changement d’adresse.

 

Naturellement, vérification de départ, ça je n’aurai pas besoin de vous expliquer, maître Moussa va sûrement vous expliquer que si vous quittez le Canada par vous-même à quelque moment que ce soit, pour où que ce soit, pour quelque durée que ce soit dans le monde, même aux États-Unis pour aller magasiner une journée, si vous ne faites pas vérifier votre départ, votre amie va perdre le 10 000 $, ça va être considéré comme si vous n’aviez jamais quitté le Canada. [Non souligné dans l’original.]

 

[Décision de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié du Canada (décision de la CISR), p. 4.]

 

INTRODUCTION

[2]               La demanderesse, Mme Najwa Ferzly, a versé un dépôt de 10 000 $ comptant à titre de garantie afin que M. Basson Blaise Bassolé soit relâché d’un centre de détention de l'immigration. L’une des conditions de mise en liberté imposée par l’agent de l’Agence des services frontaliers du Canada (l’ASFC), M. Manuel Pereira, était que M. Bassolé se présente à l’aéroport Pierre‑Elliott‑Trudeau à Montréal, le 28 juin 2006, pour monter à bord d’un vol prévu pour 22 h 05 à destination du Burkina Faso. Cette condition avait été imposée à M. Basson Blaise Bassolé après qu’il eut acheté et présenté à la Commission de l’immigration et du statut de réfugié (la Commission) un billet d’avion en vue d’obtenir sa mise en liberté. Cependant, M. Bassolé a décidé lui-même de tenter de quitter le Canada d’Ottawa, le 28 juin 2006, à bord d’un vol à destination de Boston aux États-Unis (É.-U.), violant ainsi une condition de sa mise en liberté. En raison de cette violation, M. René D’Aoust, directeur de la Section des investigations et des renvois de l’ASFC, a ordonné la confiscation du dépôt de 10 000 $. Mme Ferzly demande le contrôle judiciaire de cette décision.

 

[3]               Mme Ferzly plaide que M. D’Aoust a commis une erreur en concluant qu’il y avait eu violation d’une condition relative au dépôt de garantie. Elle allègue qu’on n’a jamais ordonné à  M. Bassolé de se présenter à l’aéroport de Montréal. Quoi qu’il en soit, elle soutient que, puisque M. Bassolé a finalement quitté le Canada à partir de l’aéroport de Montréal, les conditions ont été respectées et qu’on devrait lui remettre son dépôt de garantie.

 

[4]               L’intimé plaide que M. D’Aoust n’a pas commis une erreur en ordonnant la confiscation du dépôt de garantie, puisque M. Bassolé a violé l’une des conditions de sa mise en liberté qui l’obligeait à se présenter à l’aéroport de Montréal pour monter à bord d’un vol à destination du Burkina Faso. Les conclusions de M. D’Aoust étaient tout à fait raisonnables compte tenu des éléments de preuve dont il disposait. Enfin, M. D’Aoust a correctement exercé son pouvoir discrétionnaire lorsqu’il a ordonné la confiscation du dépôt. Pour cette raison, la Cour ne devrait pas modifier la décision de M. D’Aoust.

 

LES FAITS

[5]               Le 3 avril 2006, M. Bassolé a été mis en détention parce qu’il y avait un risque qu’il ne quitte pas volontairement le Canada à la suite d’un rejet de sa demande de statut de réfugié au sens de la Convention et de l’examen des risques avant renvoi (l’ERAR).

 

[6]               Le 5 avril 2006, M. Louis Dubé, commissaire de la Section de l’immigration de la Commission, a ordonné la mise en liberté de M. Bassolé. Cependant, ce dernier devait d’abord fournir une preuve d’achat d’un billet d’avion pour un départ du Canada, billet au moyen duquel il quitterait le pays en se soumettant aux conditions strictes qu’on lui avait imposées quant au lieu, à la date et aux modalités de son départ. Dans ses motifs, la Commission a indiqué que, s’il n’obtenait pas l’autorisation d’aller en France, M. Bassolé devrait se rendre au Burkina Faso, et qu’il y avait un grand risque qu’il ne quitte pas de lui-même le Canada pour le Burkina Faso. D’ailleurs, c’est pourquoi un dépôt en argent avait été exigé (décision de la CISR, pages 3 et 4).

            Votre amie de cœur, madame Ferzly, devra déposer une garantie de 10 000 $ comptant et vous devrez vous présenter au bureau d’Immigration Canada le premier jour après votre libération et ensuite une fois par semaine. Vous devez les aviser de tout changement d’adresse. Vous comprenez? Donc, il faut absolument qu’il y ait 10 000 $ de déposés comptant, aussi c’est un montant qui est important, mais pas tant que ça, je pense que je vous fais confiance, vous Madame.

 

            Vous j’ai certains doutes, mais je pense que madame a quand même un certain contrôle et il faut que vous réalisiez que si vous voulez avoir un avenir ici, vous êtes mieux de faire les choses selon les règles. Maître Moussa va vous expliquer qu’après ça il y a un gros X sur le dossier, si vous ne faites pas ça dans les règles.

 

            Donc, un billet d’avion, preuve d’achat de billet d’avion pour un départ avant le 7 juillet ou au plus tard le 1er juillet 2006, 10 000 $ comptant, vous devrez vous présenter au bureau d’Immigration Canada le premier jour ouvrable après votre libération et ensuite une fois par semaine, puis aviser de tout changement d’adresse.

 

Naturellement, vérification de départ, ça je n’aurai pas besoin de vous expliquer, maître Moussa va sûrement vous expliquer que si vous quittez le Canada par vous-même à quelque moment que ce soit, pour où que ce soit, pour quelque durée que ce soit dans le monde, même aux États-Unis pour aller magasiner une journée, si vous ne faites pas vérifier votre départ, votre amie va perdre le 10 000 $, ça va être considéré comme si vous n’aviez jamais quitté le Canada. [Non souligné dans l’original.]

 

 

(Décision de la CISR, p. 4.)

 

 

[7]               « L’ordonnance de mise en liberté ou l’ordonnance d’imposition de conditions », rendue le 5 avril 2006, énonce les conditions relatives à la mise en liberté de M. Bassolé, notamment le versement pour le compte de celui-ci d’un dépôt de garantie de 10 000 $ par Mme Ferzly, et elle précise que M. Bassolé est tenu de : (1) se présenter à la date et à l’endroit fixés par l’agent pour respecter les conditions qui lui sont imposées par la Loi; (2) fournir à Immigration Canada (le Ministère) son adresse et l’aviser de tout changement; (3) se présenter devant un agent d'immigration au Centre d'Immigration Canada le plus près de sa résidence le premier jour ouvrable après sa libération et ensuite une fois par semaine; (4) fournir une preuve d’achat d’un billet d’avion pour un départ du Canada au plus tard le 1er juillet 2006, avant sa mise en liberté; et (5) faire confirmer son départ (décision de la CISR, pages 3 et 4).

 

[8]               Le 5 avril 2006, Mme Ferzly a signé un dépôt de garantie de 10 000 $. Le formulaire de dépôt de garantie indiquait que les conditions de mise en liberté relatives au dépôt étaient celles contenues dans l’ordonnance de mise en liberté ou l’ordonnance d’imposition de conditions, telles qu’elles ont été énumérées ci-dessus. En signant l’entente de dépôt, Mme Ferzly a reconnu qu’elle comprenait et acceptait que, dans le cas d’une violation ou du non-respect de l’une ou l’autre des conditions en question, la somme déposée était susceptible d’être confisquée au profit de Sa Majesté (dépôt de garantie, dossier certifié du tribunal, page 22).

 

[9]               Pour satisfaire aux conditions susmentionnées et obtenir sa mise en liberté, le 6 avril 2006, M. Bassolé a rencontré l’agent d’exécution de l’ASFC, M. Pereira, et lui a présenté un billet d’avion pour un départ du Canada à bord d’un vol en partance de l’aéroport Pierre-Elliott-Trudeau à Montréal, le 28 juin 2006, à 22 h 05, faisant escale à Casablanca et ayant comme destination finale Ouagadougou, au Burkina Faso. M. Bassolé a été mis en liberté compte tenu de cette preuve d’achat d’un billet d’avion, et tous les autres documents et instructions le visant préparés ultérieurement étaient fondés sur la supposition qu’il partirait du Canada à bord de ce vol (copie du billet d’avion, dossier certifié du tribunal, p. 19; notes au dossier prises par Manuel Pereira, datées du 6 avril 2006, dossier certifié du tribunal, p. 20; affidavit de Manuel Pereira, signé le 8 août 2007).

 

[10]           Le 16 juin 2006, M. Pereira a rencontré M. Bassolé pour lui donner des précisions sur son départ prévu de Montréal vers le Burkina Faso le 28 juin 2006. M. Pereira a informé M. Bassolé que tous les documents requis pour son retour au Burkina Faso, y compris son billet d’avion, seraient envoyés au bureau de l’ASFC situé à l’aéroport de Montréal. M. Pereira a informé M. Bassolé qu’il devait se présenter devant un agent de l’ASFC à l’aéroport de Montréal en vue d’obtenir ses documents de voyage et de faire confirmer son départ (affidavit de Manuel Pereira, signé le 8 août 2007, au paragr. 10; notes au dossier prises par Manuel Pereira, datées du 16 juin 2006, dossier certifié du tribunal, p. 18).

 

[11]           Le 28 juin 2006, au lieu de se présenter de lui-même à l’aéroport de Montréal, comme M. Pereira lui avait demandé de le faire, M. Bassolé a tenté de quitter le Canada pour se rendre aux États-Unis à partir de l’aéroport d’Ottawa, violant ainsi l’une des conditions de sa mise en liberté. M. Bassolé a été mis en état d’arrestation et accompagné par deux agents de renvoi à l’aéroport de Montréal (notes au dossier prises par Michel Renaud, datées du 29 juin 2006, dossier certifié du tribunal, p. 14).

 

[12]           Mme Ferzly était présente à l’aéroport d’Ottawa lors de l’arrestation de M. Bassolé et avait réclamé à ce moment qu’on lui rende son dépôt de garantie de 10 000 $, ce qui lui avait été refusé. Elle avait aussi demandé si elle pouvait elle-même conduire M. Bassolé à l’aéroport de Montréal, ce qui lui avait été refusé (affidavit de Najwa Ferzly, signé le 15 janvier 2007, aux paragr. 57 à 60).

 

[13]           En réponse aux demandes de Mme Ferzly concernant le remboursement de son dépôt, M. Pereira lui avait téléphoné pour l’aviser que, comme M. Bassolé n’avait pas satisfait à la condition qui lui avait été imposée de se présenter à l’aéroport de Montréal, il était probable qu’il recommande la confiscation du dépôt (affidavit de Manuel Pereira, signé le 8 août 2007).

 

[14]           Le 18 septembre 2006, une lettre a été envoyée à Mme Ferzly indiquant que, comme M. Bassolé ne s’était pas présenté à l’heure et à l’endroit fixés par l’agent d’immigration, l’ASFC avait l’intention de confisquer le dépôt en espèces de 10 000 $. La lettre invitait Mme Ferzly à présenter des arguments expliquant pourquoi le dépôt ne devrait pas être confisqué (lettre datée du 18 septembre 2006, dossier certifié du tribunal, p. 9).

 

[15]           Mme Ferzly a exposé ses arguments dans une lettre, datée du 13 octobre 2006, dans laquelle elle prétendait que M. Bassolé n’avait pas violé les conditions de sa mise en liberté et que [traduction] « même la condition que vous mentionnez a été entièrement respectée » (lettre datée du 13 octobre 2006, dossier certifié du tribunal, pages 7 et 8).

 

[16]           Après avoir examiné les arguments de Mme Ferzly et l’ensemble de la preuve, M. D’Aoust a décidé de confisquer le dépôt de garantie de 10 000 $, compte tenu du non-respect par M. Bassolé de la condition de mise en liberté selon laquelle il devait [traduction] « se présenter à la date et à l’endroit fixés par l’agent ou la Section de l’immigration pour respecter les conditions qui lui sont imposées par la Loi » (décision d’ordonner la confiscation, datée du 6 novembre 2006, dossier certifié du tribunal, pages 2 et 3).

 

LES QUESTIONS EN LITIGE

[17]           (1)     M. D’Aoust a-t-il commis une erreur en concluant que M. Bassolé avait violé une des conditions de sa mise en liberté?

(2)        M. D’Aoust a-t-il eu raison d’ordonner la confiscation du dépôt de 10 000 $ comptant versé par la demanderesse?

 

L’ANALYSE

            La décision selon laquelle M. Bassolé a violé une des conditions de sa mise en liberté n’était pas manifestement déraisonnable

 

[18]           La conclusion selon laquelle il y a eu violation d’une des conditions de mise en liberté est une conclusion de fait et, par conséquent, il y a lieu de faire preuve d'un degré élevé de retenue à son égard. La norme applicable est celle qui est définie à l’alinéa 18.1(4)d) de la Loi sur les Cours fédérales, L.R.C. 1985, ch. F-7. La Cour ne peut intervenir que si elle est d’avis que la décision est fondée sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments de preuve dont le décideur dispose. Cette norme est celle de la décision manifestement déraisonnable (Kang c. Canada (Ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile), 2006 CF 652, [2006] A.C.F. no 826 (QL), au paragraphe 13; Uanseru c. Canada (Solliciteur général), 2005 CF 428, [2005] A.C.F. no 532 (QL), au paragraphe 16).

 

[19]           Le décideur peut soupeser la preuve, et c’est ce qu’il a fait en l’espèce pour parvenir à une conclusion de fait qui ne peut être écartée à la légère. Contrairement aux allégations de Mme Ferzly, tous les éléments de preuve dont disposait M. D’Aoust indiquent clairement, a) que l’agent d’immigration, M. Pereira, avait imposé à M. Bassolé l’obligation de [traduction] « se présenter à la date et à l’endroit fixés par l’agent [d’immigration] », c’est-à-dire qu’il devait se rendre à l’aéroport Pierre-Elliott-Trudeau à Montréal, le 28 juin 2006, pour monter à bord d’un vol prévu pour 22 h 05, à destination du Burkina Faso, muni du billet d’avion qu’il avait acheté et présenté à la Commission pour obtenir sa mise en liberté; b) que M. Bassolé a violé ladite condition en tentant de quitter le pays de l’aéroport d’Ottawa sur un vol en partance pour Boston (copie du billet d’avion, dossier certifié du tribunal, p. 19; notes au dossier prises par Manuel Pereira, datées du 6 avril 2006 et ses notes au dossier, datées du 16 juin 2006, dossier certifié du tribunal, pages 18 et 20).

 

[20]           Les conditions communiquées de vive voix par la Commission lors de l’audience ne sont pas les seules conditions imposées à M. Bassolé. L’ordonnance de mise en liberté ou l’ordonnance d’imposition de conditions rendue par la Section de l’immigration énonce sans équivoque la condition selon laquelle M. Bassolé doit [traduction] « se présenter à la date et à l’endroit fixés par l’agent […] pour respecter les conditions qui lui sont imposées par la Loi », comme première condition de la mise en liberté de M. Bassolé. En signant l’ordonnance de mise en liberté ou l’ordonnance d’imposition de conditions, M. Bassolé a accepté que sa mise en liberté était assujettie à cette condition (ordonnance de mise en liberté ou ordonnance d’imposition de conditions, dossier certifié du tribunal, p. 23).

 

[21]           De plus, la Commission avait ordonné à M. Bassolé de présenter une preuve d’achat d’un billet d’avion pour obtenir sa mise en liberté. Il lui a remis un billet d’avion pour un départ de Montréal vers le Burkina Faso, le 28 juin 2006; sans ce billet d’avion, M. Bassolé n’aurait pas été mis en liberté. Ce billet d’avion a été versé au dossier de M. Bassolé. Toutes les autres instructions données à M. Bassolé étaient fondées sur ce billet même. M. Bassolé ne pouvait pas changer unilatéralement son plan de départ (décision de la Commission, p. 3, dossier de la demanderesse, pièce D; copie du billet d’avion, dossier certifié du tribunal, p. 19; notes au dossier prises par Manuel Pereira, datées du 6 avril 2006, dossier certifié du tribunal, p. 20).

 

[22]           M. Pereira a rencontré M. Bassolé le 16 juin 2006 et lui a répété qu’il devait se présenter à l’aéroport de Montréal le 28 juin 2006 pour faire confirmer son départ vers le Burkina Faso (notes au dossier prises par Manuel Pereira, datées du 16 juin 2006, dossier certifié du tribunal, p. 18).

 

[23]           Mme Ferzly reconnaît que l’une des conditions de mise en liberté de M. Bassolé était qu’il se présente à la date et à l’endroit fixés par l’agent d’immigration pour respecter les conditions qui lui étaient imposées par la Loi. Elle a indiqué que cette condition [traduction] « l’inquiétait » (affidavit de la demanderesse, signé le 15 janvier 2007, paragraphes 18 et 22, dossier de la demanderesse).

 

[24]           Mme Ferzly admet également que M. Pereira a rencontré M. Bassolé le 16 juin 2006. En outre, les notes de l’agent versées au dossier indiquent clairement que l’obligation de se présenter à l’aéroport de Montréal avait été signalée à M. Bassolé à ce moment (affidavit de la demanderesse, signé le 15 janvier 2007, paragraphe 33, dossier de la demanderesse; notes au dossier prises par Manuel Pereira, datées du 16 juin 2006, dossier certifié du tribunal, p. 18).

 

[25]           La décision de M. D’Aoust selon laquelle M. Bassolé avait violé une des conditions de sa mise en liberté n’était pas fondée sur des conclusions de fait erronées, ni tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments dont il disposait. D’après la preuve, la conclusion de M. D’Aoust selon laquelle M. Bassolé avait violé une des conditions de sa mise en liberté n’était pas manifestement déraisonnable et, par conséquent, la Cour ne devrait pas intervenir.

 

La décision d’ordonner la confiscation du dépôt de garantie de la demanderesse était bien fondée

[26]           La question de savoir si M. D’Aoust a eu raison d’ordonner la confiscation du dépôt de sécurité de Mme Ferzly est assujettie à la norme de la décision raisonnable. Cette décision est une question mixte de fait et de droit à l’égard de laquelle la Cour doit appliquer une grande retenue. La Cour ne devrait intervenir que dans le cas où la décision de M. D’Aoust n’est étayée par aucun motif capable de résister à un examen assez poussé (Khalife c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2006 CF 221, [2006] A.C.F. no 293 (QL), aux paragraphes 19 et 20 (1re inst.); Kang, précitée, au paragraphe 17).

 

[27]           À première vue, la décision de M. D’Aoust d’ordonner la confiscation du dépôt de garantie était tout à fait raisonnable compte tenu des éléments de preuve dont il disposait. Rien au dossier n’indique qu’il a tenu compte de considérations étrangères. Il faut présumer que M. D’Aoust a tenu compte de tous les éléments de preuve dont il disposait (Chowdhury c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2002 CFPI 363, [2002] A.C.F. no 477 (QL)).

 

[28]           Le dépôt de garantie est exigé pour faire en sorte que les immigrants détenus qui doivent être mis en liberté se conforment à la législation en matière d'immigration et aux conditions qui leur sont imposées (Uanseru, précitée, au paragraphe 18; Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27, paragraphe 58(3)).

 

[29]           En signant le dépôt de garantie, Mme Ferzly savait que le non-respect par M. Bassolé de l’une ou l’autre des conditions de mise en liberté entraînerait la confiscation de son dépôt de garantie (dépôt de garantie, dossier certifié du tribunal, p. 22).

 

[30]           Mme Ferzly savait très bien que M. Bassolé avait violé une des conditions de sa mise en liberté en ne se présentant pas à l’aéroport de Montréal. Elle a accompagné M. Bassolé à l’aéroport d’Ottawa et était présente lorsque l’agent d’immigration, M. Renaud, a signalé à M. Bassolé qu’il aurait dû se présenter à Montréal. Elle a alors réclamé son dépôt de garantie (notes au dossier prises par Michel Renaud, datées du 29 juin 2006, dossier certifié du tribunal à la page 14; affidavit de Najwa Ferzly, signé le 15 janvier 2007, paragraphes 57 à 60).

 

[31]           Il n’y a pas eu manquement aux règles d’équité procédurale. Mme Ferzly a eu la possibilité de présenter des arguments à l’encontre de l’ordonnance de confiscation imminente, ce qu’elle a fait par lettre datée du 13 octobre 2006, comme le reconnaît M. D’Aoust dans sa décision (lettre datée du 18 septembre 2006, dossier certifié du tribunal à la p. 9; lettre datée du 13 octobre 2006, dossier certifié du tribunal aux pages 7 et 8; décision d’ordonner la confiscation, datée du 6 novembre 2006, dossier certifié du tribunal aux pages 2 et 3).

 

[32]           La décision de M. D’Aoust d’ordonner la confiscation dudit dépôt de garantie a été prise de bonne foi. Rien dans la preuve ne révèle que M. D’Aoust a agi par malice en décidant d’ordonner la confiscation du dépôt de garantie de Mme Ferzly (décision d’ordonner la confiscation, précitée).

 

[33]           Pour parvenir à la décision d’ordonner la confiscation du dépôt de garantie, M. D’Aoust a tenu compte de plusieurs facteurs qui sont exposés dans sa décision, notamment :

a)         M. Pereira a signalé à M. Bassolé qu’il devait se présenter à l’aéroport de Montréal pour faire confirmer son départ vers le Burkina Faso;

b)         M. Bassolé a ignoré ces instructions et a plutôt tenté de quitter le Canada de l’aéroport d’Ottawa vers les É.-U. mais s’est vu refuser l’entrée dans ce pays;

c)         M. Bassolé a menti aux agents d’immigration américains lorsqu’il leur a dit qu’il n’avait jamais demandé l’asile au Canada;

d)         M. Bassolé a dû être mis en état d’arrestation à l’aéroport d’Ottawa en vue de l’exécution de son renvoi qui devait avoir lieu à Montréal le 28 juin 2006.

(Décision d’ordonner la confiscation, datée du 6 novembre 2006, dossier certifié du tribunal, pages 2 et 3; notes au dossier prises par Michel Renaud, datées du 29 juin 2006, dossier certifié du tribunal, page 14; recommandation de Manuel Pereira datée du 15 août 2006, dossier certifié du tribunal, pages 10 et 11.)

 

[34]           Compte tenu de tous ces facteurs, M. D’Aoust a décidé que le dépôt de garantie de Mme Ferzly devait être confisqué étant donné que les conditions imposées avaient été dûment acceptées. Dans ces circonstances, la décision était logique et raisonnablement solide car elle était fondée sur l’ensemble des éléments de preuve dont disposait M. D’Aoust.

 

[35]           Enfin, la décision de M. D’Aoust a été prise de bonne foi, en conformité avec les principes de justice naturelle. Aucune des considérations n’était inappropriée ou étrangère à l'objet de la loi et, par conséquent, la Cour ne devrait pas modifier la décision.

 

CONCLUSION

[36]           Pour ces motifs, la présente demande de contrôle judiciaire sera rejetée.


 

JUGEMENT

LA COUR ORDONNE :

1.                   La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

2.           Aucune question grave de portée générale n’est certifiée.

 

« Michel M.J. Shore »

Juge

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Caroline Tardif, LL.B., trad.


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                                                IMM-6292-06

 

INTITULÉ :                                                               NAJWA FERZLY

                                                                                    c.

                                                                                    LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

                                                                                    ET DE L’IMMIGRATION

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                                         OTTAWA (ONTARIO)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                                       LE 1er OCTOBRE 2007

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                                                      LE JUGE SHORE

 

DATE DES MOTIFS :                                              LE 18 OCTOBRE 2007

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Najwa Ferzly

 

POUR SON PROPRE COMPTE

Brian Harvey

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Najwa Ferzly

 

 

POUR SON PROPRE COMPTE

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 

 

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