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Date : 20071120

Dossier : IMM-5773-06

Référence : 2007 CF 1217

Ottawa (Ontario), le 20 novembre 2007

EN PRÉSENCE DE MADAME LA JUGE DAWSON

 

ENTRE :

 

VALLY OLLAH SEPEHRI NODIJEH

 

 

demandeur

 

et

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

 

défendeur

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]        Vally Ollah Sepehri Nodijeh est un citoyen d’Iran qui a demandé le statut de résident permanent au Canada aux termes du Programme des candidats de la province du Nouveau‑Brunswick. Ce programme exige qu’un demandeur se présente à une entrevue au Canada. M. Sepehri devait donc demander, et obtenir, un visa de visiteur. Sa demande de visa de visiteur a été rejetée et la présente demande de contrôle judiciaire concerne la décision d’un agent des visas, laquelle a rejeté la demande de visa de M. Sepehri.

 

[2]        M. Sepehri ne soulève qu’une seule question dans le cadre de la présente demande. Il fait valoir que les motifs sur lesquels s’est fondé l’agent des visas pour rejeter sa demande étaient insuffisants. Je conclus que les motifs étaient suffisants et, par conséquent, la demande de contrôle judiciaire sera rejetée. Pour en venir à rejeter la demande, je n’accorde aucune force probante à l’affidavit de l’agent des visas déposé à l’encontre de la demande de M. Sepehri parce que, selon moi, les motifs de l’agent qui ont été rédigés à l’époque de la décision ne devraient pas être complétés au moment où on demande à la Cour d’apprécier la suffisance des motifs.

 

[3]        Avant de se pencher sur les faits de la présente affaire, la question de la suffisance des motifs de l’agent soulève un enjeu relatif à l’équité procédurale. Cela entraîne deux choses. Premièrement, il n’est pas nécessaire de procéder à une analyse pragmatique et fonctionnelle afin de déterminer la norme de contrôle applicable, parce qu’il appartient à la Cour de décider de la teneur de l’obligation d’équité dans tous les cas. Deuxièmement, la nature de l’obligation de motiver une décision dépend des circonstances particulières dont la Cour est saisie. On a conclu que l’obligation d’équité dont bénéficie généralement un demandeur de visa de résident permanent se situe vers l’extrémité inférieure du registre. Voir l’arrêt Patel c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (2002), 288 N.R. 48 (C.A.F.), qui se fonde sur l’arrêt Chiau c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2001] 2 C.F. 297 (C.A.). La nature de l’obligation d’équité dont bénéficie généralement un demandeur de visa de visiteur ne peut être plus exigeante, même lorsque le visa de visiteur est demandé en relation avec une demande de résidence permanente en traitement.

 

[4]        Quant à ce qui, en droit, constitue des motifs suffisants, la règle générale est qu’ils sont suffisants lorsqu’ils remplissent les fonctions pour lesquelles l’obligation de motiver a été imposée. Voir l’arrêt Via Rail Canada Inc. c. Office national des transports, [2001] 2 C.F. 25 (C.A.), aux paragraphes 21 et 22. Dans le présent contexte, on exige des motifs pour permettre au demandeur de visa de savoir pourquoi sa demande a été rejetée et d’examiner la possibilité de présenter une demande d’autorisation et de contrôle judiciaire de cette décision.

 

[5]        Quant aux circonstances de la présente affaire, l’alinéa 20(1)b) et le paragraphe 22(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 (La Loi), ainsi que les articles 179, 191 et 192 du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002‑227 (le Règlement), exigent conjointement qu’un demandeur de visa de visiteur établisse qu’il quittera le Canada à la fin de la période autorisée pour son séjour. En l’espèce, l’agent a conclu que M. Sepehri n’avait pas satisfait à cette exigence. Le contrôle judiciaire porte sur les motifs pour lesquels l’agent a tiré cette conclusion.

 

[6]        À cet égard, les notes du Système de traitement informatisé des dossiers d’immigration (STIDI) rédigées par l’agent (lesquelles, cela est bien reconnu, font partie des motifs de l’agent) mentionnent que l’agent a convoqué M. Sepehri en entrevue afin d’explorer ses liens avec l’Iran, la raison pour laquelle il voulait immigrer au Nouveau‑Brunswick et ses connaissances à l’égard de cette province. Les notes du STIDI mentionnent également les préoccupations de l’agent pendant et après l’entrevue, selon lesquelles :

 

·        M. Sepehri n’était pas bien établi en Iran, car son entreprise n’avait démarré qu’un an et demi plus tôt, son épouse ne travaillait plus à l’extérieur du foyer et son frère ainsi que ses parents vivaient aux États‑Unis.

 

·        M. Sepehri avait admis avoir déjà tenu une conduite malhonnête.

 

[7]        En conséquence, M. Sepehri n’a pas convaincu l’agent qu’il quitterait le Canada au moment où il serait tenu de le faire.

 

[8]        À mon avis, bien que, malheureusement, ces motifs aient été minces, ils étaient juste suffisants pour permettre à M. Sepehri de savoir pourquoi sa demande de visa de visiteur avait été refusée et de déterminer s’il devait introduire une instance en autorisation et en contrôle judiciaire. À ce titre, les motifs étaient adéquats.

 

[9]        Comme il a déjà été mentionné, l’agent des visas a signé un bref affidavit dans la présente instance, dans lequel il a déclaré avoir examiné les notes du STIDI, qu’elles reflétaient ce qu’il se rappelait ainsi que ce qu’il comprenait du dossier et qu’elles indiquaient la raison pour laquelle il en était venu à rendre sa décision. Ensuite, dans les deux pages suivantes de l’affidavit, il a expliqué pourquoi la demande avait été rejetée.

 

[10]      L’affidavit n’était pas inacceptable en ce qu’il ne soulevait pas des points dont il n’avait pas été question dans les notes du STIDI. Toutefois, comme l’a récemment fait remarquer ma collègue, la juge Gauthier, dans la décision Jesuorobo c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2007 CF 1092, la section 14 du guide de traitement des demandes OP 11 de Citoyenneté et Immigration Canada donne instructions aux agents de « s’assurer que les notes versées au STIDI sont complètes et exactes » et prescrit que les notes doivent « détailler les raisons du refus ». Cela reflète la réalité que, au cours des nombreux mois écoulés entre la décision et la préparation de l’affidavit dans le cadre de l’instance en contestation de la décision, l’agent aura traité de nombreuses autres demandes. Comme l’a fait observer ma collègue, la juge Mactavish, dans la décision Abdullah c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2006] A.C.F. no 1482, au paragraphe 14, cela « avait dû inévitablement avoir une incidence négative sur [l]a capacité [de l’agente] à se rappeler ce à quoi elle avait pensé précisément » en appréciant la demande.

 

[11]      En raison des instructions données aux agents par rapport à la nécessité que les notes du STIDI soient complètes, le manque potentiel de fiabilité de la preuve qui est préparée des mois après la décision, alors que l’on sait que cette dernière est contestée, ainsi que l’injustice inhérente au fait de permettre à un agent de compléter ses motifs au moment où la suffisance des motifs initiaux est en cause, je suis d’avis qu’aucune force probante ne devrait être accordée à l’affidavit de l’agent.

 

[12]      La juge Gauthier en est arrivée à la même conclusion dans la décision Jesuorobo, précitée, au paragraphe 12.

 

[13]      La demande de contrôle judiciaire sera donc rejetée. Les avocates n’ont proposé aucune question en vue de la certification et je suis convaincue que le présent dossier n’en soulève aucune.

JUGEMENT

 

LA COUR STATUE que :

 

1.         La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

 

 

 

« Eleanor R. Dawson »

Juge

 

 

Traduction certifiée conforme

Christian Laroche, LL.B.


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATES INSCRITES AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                                                IMM-5773-06

 

INTITULÉ :                                                               VALLY OLLAH SEPEHRI NODIJEH

                                                                                    c.

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                                         TORONTO (ONTARIO)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                                       LE 31 OCTOBRE 2007

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                                                      LA JUGE DAWSON

 

DATE DES MOTIFS :                                              LE 20 NOVEMBRE 2007

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Wennie Lee                                                                  POUR LE DEMANDEUR

 

Catherine Vasilaros                                                       POUR LE DÉFENDEUR

 

 

AVOCATES INSCRITES AU DOSSIER :

 

Lee & Company                                                           POUR LE DEMANDEUR

Avocats

Toronto (Ontario)

 

John H. Sims, c.r.                                                         POUR LE DÉFENDEUR

Sous‑procureur général du Canada

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