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Date : 20071221

Dossier : T-861-06

Référence : 2007 CF 1358

Ottawa (Ontario), le 21 décembre 2007

EN PRÉSENCE DE MADAME LA JUGE DAWSON

 

ENTRE :

 

ARTHUR ROMAN ZINS

 

demandeur

 

et

 

L’AGENCE DU REVENU DU CANADA

 

défenderesse

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]        Le 8 décembre 2005, la Cour canadienne de l’impôt a rendu son jugement à l’égard de l’appel de M. Arthur Zins contre un nouvel avis de cotisation établi relativement à l’année d’imposition 1998.

 

[2]        Comme l’a expliqué la Cour canadienne de l’impôt, dans des motifs intitulés Zins c. Canada, [2006] 1 C.T.C. 2603 :

            Au cours des quatre derniers mois de l’année 1998, M. Arthur Zins s’est investi dans un stratagème de télémarketing. Il menait ses activités sous le couvert du Jewish Men’s Group. Il a éventuellement été reconnu coupable de fraude relativement à ces activités, et les fonds saisis par la police ont été distribués à des organismes caritatifs conformément à une ordonnance restitutoire. Le cas en l’espèce porte sur l’établissement du revenu net de M. Zins aux fins de l’impôt sur le revenu à la suite de ses activités de télémarketing illégales.

 

[3]        La Cour canadienne de l’impôt a conclu qu’il fallait renvoyer l’affaire au ministre du Revenu national (le ministre) en tenant pour acquis que :

 

(i)         la somme de 43 614 $ devait être incluse dans le revenu de M. Zins pour l’année d’imposition 1998;

 

(ii)        M. Zins était passible des pénalités prévues au paragraphe 163(2) de la Loi de l’impôt sur le revenu, L.R.C. 1985 (5e suppl.), ch. 1 (la Loi), pour avoir omis de déclarer le revenu additionnel de 43 614 $;

 

(iii)       M. Zins avait droit à des dépens adjugés à hauteur de 50 p. 100 du tarif de la Cour canadienne de l’impôt.

 

[4]        Le 3 octobre 2007, la Cour d’appel fédérale a rejeté un appel de la décision de la Cour canadienne de l’impôt. Voir : Zins c. Canada, [2007] A.C.F. no 1294 (C.A.) (QL).

 

[5]        Dans la présente demande, censément introduite en vertu de l’article 423 des Règles des Cours fédérales, DORS/98-106, M. Zins sollicite la réparation suivante :

[traduction

1.         Une ordonnance portant que la défenderesse applique les lignes directrices qui entrent en ligne de compte dans le cours normal de l’application équitable, par l’Agence du revenu du Canada [ARC], de ses procédures en matière d’« équité » et de « remise », afin d’examiner si le demandeur se trouve aux prises avec des « difficultés financières » de nature telle qu’il est justifié de réduire dans une large mesure, voire d’annuler, jusqu’à 49 000 $ d’obligation fiscale, y compris les intérêts et les pénalités se rapportant à certaines années comprises entre 1992 et 2005.

 

2.         Une ordonnance portant que la défenderesse « compense » une somme d’environ 19 000 $, soit celle qui, selon le demandeur, représente 50 p. 100 des pertes réelles admissibles qu’il a subies en obtenant avec succès une réduction d’environ 55 000 $ de cotisation d’impôt sur le revenu devant la Cour canadienne de l’impôt.

 

3.                  Une ordonnance portant que la défenderesse « compense » une somme estimative d’un montant maximal de 10 000 $ à titre de réduction de l’obligation fiscale relative à une dépense prouvée d’environ 38 272 $, payée à quatre bénéficiaires méritants dans les années 2002 et 2003, à la suite d’une saisie policière, en décembre 1998, du revenu de même source, c’est-à-dire ladite somme de 38 272 $, étant une dépense effectuée les années suivantes par suite d’une activité productrice de revenus précisée en 1998.

 

4.                  Une ordonnance portant que la défenderesse recouvre un montant maximal de 37 000 $ se rapportant à des impôts, à des pénalités et à des intérêts pour 1998, auprès de quatre tiers identifiés qui ont reçu un montant global de 38 272 $ du revenu de même source pour 1998 qui est en litige, ladite obligation fiscale estimative pour 1998 n’excédant pas 37 000 $, et ce, en acquittement total et définitif de l’obligation fiscale de l’appelant pour 1998; ladite ordonnance, si elle est exécutée, étant rendue en vertu du paragraphe 224.3(1) de la Loi de l’impôt sur le revenu ou des autres dispositions de cette loi ou autres politiques et pratiques applicables de l’ARC que peuvent dicter les circonstances liées à un juste recouvrement de l’obligation du contribuable auprès de bénéficiaires tiers concernés par le revenu de même source qui est en litige.

 

5.                  Une ordonnance portant que, subsidiairement au recouvrement auprès de tiers (voir le point 4          qui précède) d’une obligation fiscale pour 1998 d’un montant estimatif maximal de 37 000 $ qui est en litige, la Cour pourrait considérer que la réception du revenu en question de 38 272 $ par quatre tiers identifiés - des groupes de bienfaisance à but non lucratif – est assimilable au fait que le demandeur a payé un montant d’impôt, attendu que l’obligation fiscale pour 1998, si elle est recouvrée auprès des tiers, aurait de toute façon été affectée au bien collectif par l’entremise du système de distribution fiscale, en ce sens que l’obligation en question, d’un montant maximal de 38 272 $, se trouve déjà entre les mains du bien collectif, et que le fait d’exiger du demandeur, pour l’année 1998, un montant d’impôt allant au-delà de la somme de 38 272 $ serait peut-être contraire aux politiques qu’applique l’ARC contre ce qui équivaut à une « double imposition ».

 

6.                  Une ordonnance visant à suspendre la procédure de recouvrement jusqu’à ce que l’on ait réglé les questions soulevées par le demandeur quant à une réduction éventuelle de ses obligations fiscales, décrites aux points 1 à 5 ci-dessus, devant les instances compétentes et conformément à l’application régulière de la loi, de façon à ne pas mettre en péril de façon prématurée et injuste la solvabilité, l’employabilité et l’état de santé du demandeur en agissant avec une précipitation injustifiée ou arbitraire, relativement au redressement justifié auquel le demandeur pourrait avoir équitablement droit.

 

7.                  Une ordonnance visant à mettre en œuvre les voies ou les procédures additionnelles que la présente Cour peut estimer appropriées et qui sont susceptibles de mener à un règlement équitable des questions soulevées dans la présente demande, telles qu’énumérées ci-dessus, attendu que ces voies ou ces procédures peuvent inclure le renvoi de l’affaire au ministre, le renvoi de l’affaire à la Cour canadienne de l’impôt, le renvoi de l’affaire à la Cour d’appel fédérale, une procédure de demande d’admission, etc.

 

[6]        J’examinerai à tour de rôle chacune des réparations demandées.

 

1)         La demande concernant l’application des procédures de l’ARC en matière d’équité

et de remise.

[7]        M. Zins invoque les arguments suivants à l’égard de cette demande :

[traduction

10.       Procédures de remise de l’ARC

 

            Le demandeur aux présentes fait valoir ce qui suit :

 

a)                  se fondant sur des renseignements financiers que la défenderesse avait en main depuis le début de l’année 2005, le demandeur avait demandé, il y a un an et demi de cela environ, que l’ARC envisage de renoncer à la totalité du montant d’impôt dû, y compris les intérêts et les pénalités connexes, par la voie des procédures existantes de l’ARC en matière de remise;

 

b)                  attendu que la demande concernant l’application, par l’ARC, des procédures de remise (voir le point 10a) ci‑dessus) figure au point 12 de l’affidavit du demandeur, dont les extraits pertinents sont les suivants :

 

« […]12. […] J’ai envoyé une lettre datée du 16 mars 2006 à un certain Vishnu Persaud, du Bureau des services fiscaux de Toronto-Nord de l’ARC (voir les passages, mis en encadré, d’une copie de cette lettre du 16 mars 2006, à l’annexe 4 jointe ci-après), dont les extraits pertinents sont les suivants : […]. Je présume que vous êtes essentiellement d’accord pour dire que les renseignements que vous aviez en main depuis un an […] m’ont mis dans une situation déficitaire croissante d’un montant nettement supérieur à 1 000 $ par mois […]. Outre la dette fiscale concernant 1998, je crois savoir que je dois plusieurs milliers de dollars à l’ARC pour plusieurs autres années. […] j’espère que vous considérerez de manière consolidée mes droits à une réparation fondée sur les dispositions en matière d’"équité" et de "remise" pour toutes les années d’obligation […]. »;

 

c)                  étant donné que l’ARC n’a pas donné de réponse à la demande de prise en considération de sa procédure de remise en ce qui concerne le dossier du demandeur, ce dernier fait valoir avec respect que l’ARC a causé, de manière injuste et inéquitable, un retard injustifié en n’appliquant pas ses procédures de remise pour renoncer de manière justifiée à la totalité de l’obligation fiscale en litige du demandeur;

 

d)                  en ce qui concerne le point 10c) ci-dessus, le demandeur est d’avis que la Cour serait avisée de procéder à une évaluation de la situation du demandeur de façon à justifier la renonciation à la totalité de l’obligation fiscale en litige du demandeur, conformément aux procédures actuellement en vigueur de l’ARC en matière de remise.

 

11.              Les procédures de l’ARC en matière d’équité

 

a)                  par voie d’une lettre datée du 16 mars 2006 (voir le point 10b) ci-dessus), le demandeur a demandé que l’ARC applique de manière équitable ses lignes directrices en matière d’équité, de façon à justifier la renonciation à la totalité des intérêts et des pénalités qui s’appliquent à l’obligation fiscale du demandeur;

 

b)                  étant donné qu’à la date des présentes, l’ARC a envoyé à l’appelant le  9 août 2006 (deux mois environ après l’affidavit du 9 juin 2006 joint au dossier du demandeur) un dossier d’information sur les dispositions en matière d’« équité » en demandant de fournir les renseignements qui lui permettraient de justifier une demande de renonciation aux intérêts et aux pénalités liés à l’obligation fiscale du demandeur;

 

c)                  attendu que le demandeur fait valoir dans les présentes que, depuis le début de l’année 2005 et relativement à la correspondance applicable qui a suivi, l’ARC avait en main des renseignements lui permettant de justifier une renonciation à la totalité des intérêts et des pénalités liés à la totalité de l’obligation fiscale du demandeur, lequel échange de renseignements est décrit au point 8 de l’affidavit du demandeur joint aux présentes et dont les extraits pertinents sont les suivants :

 

« À L’ATTENTION DE M. VISHNU PERSAUD / 10 mars, […] L’honorable John McCallum […] m’a demandé de répondre à votre lettre du 19 septembre 2005 […] si vous décidez d’interjeter appel auprès du tribunal d’instance supérieure, une garantie suffisante en guise de paiement intégral serait satisfaisante en attendant que le litige soit réglé […] L’ARC peut envisager d’annuler les intérêts à payer, ou d’y renoncer, si une personne éprouve des difficultés financières […] Je note que […] vous faites actuellement des paiements mensuels de 100 $ […] Il convient peut-être de signaler que, depuis la décision rendue le 12 janvier 2006 de suspendre les mesures de recouvrement, il n’y a pas eu d’autre mention d’une "garantie suffisante en guise de paiement" associée à cette suspension du recouvrement. À cet égard, je ne puis que présumer que les renseignements dont vous disposez […] voir les renvois faits aux renseignements concernant le revenu, les dépenses et les frais médicaux qui ont été transmis à Mme Wong, de l’ARC, en date du 12 février et du 1er mars 2005 […] et la confirmation de la perte d’un second emploi au milieu de juillet 2005 […] et la confirmation d’environ 2000 $ de frais dentaires […] confirment tous un niveau constant d’"impécuniosité", qui justifie qu’il n’y ait pas de demande additionnelle de "garantie suffisante en guise de paiement intégral" […] »

 

d)                  comme il n’y a pas eu de réponse de l’ARC quant au fait d’appliquer sa procédure en matière d’équité au dossier du demandeur jusqu’à la lettre du 9 août 2006 (voir le point 11b) ci-dessus), le demandeur allègue avec respect que l’ARC a causé de manière injuste et inéquitable un retard injustifié en n’appliquant pas ses procédures en matière d’équité pour renoncer de façon justifiée à la totalité des intérêts et des pénalités du demandeur quant à l’obligation fiscale en litige;

 

e)                  en ce qui concerne le point 11d) qui précède, le demandeur fait valoir que la Cour serait avisée d’accélérer l’évaluation de la situation du demandeur de façon à justifier une renonciation à la totalité des intérêts et des pénalités du demandeur en l’espèce.

[Souligné dans l’original.]

 

 

[8]        En réponse à ces observations, le ministre a déposé l’affidavit du chef d’équipe du recouvrement des recettes, du Bureau des services fiscaux de Toronto-Nord de l’ARC. Dans cet affidavit, le chef d’équipe déclare sous serment ce qui suit :

[traduction

2.         J’ai examiné les dossiers de recouvrement d’Arthur Roman Zins, les dossiers informatiques de l’ARC concernant Arthur Roman Zins, de même que la base de données du Registre de l’équité, et je puis confirmer que le ministre n’a pas examiné et tranché une demande d’allègement d’intérêts et de pénalités ou une ordonnance de remise concernant l’année d’imposition 1998 d’Arthur Roman Zins.

 

3.         Mme Pat Muir, agente de recouvrement à l’ARC, m’a dit avoir envoyé, en date du 9 août 2006, une lettre à Arthur Roman Zins ainsi qu’une trousse d’équité à remplir. Est jointe au présent affidavit, en tant que pièce « A », une copie de la lette datée du 9 août 2006.

 

4.         J’ai examiné le dossier de recouvrement d’Arthur Roman Zins, les dossiers informatiques de l’ARC concernant Arthur Roman Zins, de même que la base de données du Registre d’équité, et je puis confirmer que le ministre n'a pas reçu de réponse à la lettre envoyée à M. Zins par Pat Muir le 9 août 2006 et demandant que ce dernier remplisse la trousse d’équité.

 

[9]        Ni M. Zins ni le chef d’équipe n’ont été contre-interrogés sur leurs affidavits.

 

[10]      Lors de la plaidoirie, M. Zins a admis ne pas avoir rempli les formulaires demandés à l’appui de sa demande de réparation car il estimait que l’ARC n’avait pas répondu à sa demande d’application du paragraphe 224.3(1) de la Loi et qu’elle ne l’avait pas traité équitablement.

 

[11]      M. Zins n’a pu établir, tant en ce qui concerne les procédures de remise que les procédures d’équité, qu’il avait fourni au ministre des renseignements à jour et complets qui auraient permis à ce dernier d’examiner convenablement la demande d’allègement datée du 10 mars 2006. Dans ce contexte, la présente demande est prématurée. M. Zins doit fournir les renseignements nécessaires au ministre et prévoir ensuite un temps raisonnable avant qu’une décision soit rendue.

 

[12]      Dans la mesure où M. Zins demande à la Cour d’ordonner au ministre d’appliquer les procédures pertinentes en matière d’équité ou de remise, il s’agit là d’une demande de mandamus. L’une des conditions à remplir avant qu’il soit possible de rendre une ordonnance de mandamus est qu’il doit y avoir un droit clair d’obtenir l’exécution d’une obligation publique et, en particulier, que la personne qui sollicite le mandamus doit avoir satisfait à la totalité des conditions préalables qui donnent naissance à l’obligation. Voir : Apotex Inc. c. Canada (Procureur général), [1994] 1 C.F. 742 (C.A.), au paragraphe 45, conf. par [1994] 3 R.C.S. 1100.

 

[13]      Le fait que M. Zins n’ait pas établi que la totalité des renseignements requis a été fournie au ministre empêche la Cour d’accorder une réparation de la nature d’une ordonnance de mandamus.

 

[14]      Dans la mesure où M. Zins laisse entendre que la Cour devrait elle-même accorder l’allègement que peut justifier l’application des procédures d’équité ou de remise, ce pouvoir discrétionnaire relève du ministre aux termes de la Loi et ne peut être exercé que par ce dernier ou par son délégué. La Cour n’a pas compétence pour exercer le pouvoir discrétionnaire du ministre.

 

2)         La demande de compensation concernant les dépens adjugés par la

Cour canadienne de l’impôt

[15]      M. Zins estime qu’il a droit à la somme de 19 974,22 $ au titre des dépens ordonnés par la Cour canadienne de l’impôt. Le ministre n’accepte pas le bien-fondé de ce calcul.

 

[16]      M. Zins demande en personne à la Cour de réduire de 19 974,22 $ son obligation fiscale.

 

[17]      La Cour n’a pas compétence pour quantifier les dépens que la Cour canadienne de l’impôt impose. En fin de compte, si les parties ne parviennent pas à s’entendre, ces dépens doivent être tranchés par la Cour canadienne de l’impôt, conformément aux règles qui lui sont propres. Tant que cela n’est pas fait, il ne peut pas y avoir de compensation d’obligations concurrentes.

 

3)         La demande d’une décision portant que l’obligation fiscale de M. Zins soit réduite

en raison d’une dépense d’un montant de 38 272 $.

[18]      Dans ses observations écrites, M. Zins a demandé que l’on réduise son obligation fiscale de 38 272 $, laquelle somme a été versée à quatre organismes de bienfaisance que M. Zins disait représenter pendant qu’il exécutait son stratagème de télémarketing. Ce paiement a été effectué à partir de fonds saisis auprès de M. Zins. Les fonds ont été payés aux organismes de bienfaisance en exécution d’une ordonnance de sursis de la Cour supérieure de justice de l’Ontario (ordonnance restitutoire).

 

[19]      Je ne comprends pas pourquoi M. Zins continue d’invoquer ce motif de réparation car, lors de la plaidoirie, il a reconnu le caractère définitif de la décision de la Cour d’appel fédérale à l’égard du calcul de son obligation fiscale pour l’année d’imposition 1998.

 

[20]      Disons toutefois par souci de clarté que la présente demande de modification de l’obligation fiscale de M. Zins ne peut être retenue parce que la Cour canadienne de l’impôt a examiné cette question et l’a rejetée. La Cour canadienne de l’impôt a le pouvoir original et exclusif d’entendre les appels interjetés contre le calcul que fait le ministre d’une obligation fiscale, et la Cour ne peut attaquer ou modifier de façon incidente les décisions de la Cour canadienne de l’impôt.

 

4)         La demande que le ministre recouvre des fonds auprès des organismes de bienfaisance qui ont reçu les fonds saisis auprès de M. Zins et qui ont été versés en exécution de l’ordonnance restitutoire.

 

5)         Subsidiairement, la demande que la Cour considère les paiements effectués aux organismes de bienfaisance comme des paiements faits par M. Zins au titre de son obligation fiscale.

[21]      Ces demandes de réparation sont fondées sur le paragraphe 224.3(1) de la Loi, dont le texte est le suivant :

224.3(1) S’il sait ou soupçonne qu’une personne donnée détient des fonds qui ont été saisis par un membre d’un corps policier, dans le cadre de l’application du droit criminel du Canada, entre les mains d’une autre personne (appelée « débiteur fiscal » au présent article) tenue de faire un paiement en vertu de la présente loi ou d’une loi d’une province avec laquelle le ministre des Finances a conclu un accord en vue de recouvrer les impôts payables en vertu de cette loi, et qui doivent être restitués au débiteur fiscal, le ministre peut exiger par écrit de la personne donnée que les fonds autrement restituables au débiteur fiscal soient en totalité ou en partie remis au receveur général au titre de l’obligation du débiteur fiscal existant en vertu de la présente loi ou de la loi de la province, selon le cas.

[Non souligné dans l’original.]

224.3(1) Where the Minister has knowledge or suspects that a particular person is holding moneys that were seized by a police officer in the course of administering or enforcing the criminal law of Canada from another person (in this section referred to as the “tax debtor”) who is liable to make a payment under this Act or under an Act of a province with which the Minister of Finance has entered into an agreement for the collection of taxes payable to the province under that Act and that are restorable to the tax debtor, the Minister may in writing require the particular person to turn over the moneys otherwise restorable to the tax debtor in whole or in part to the Receiver General on account of the tax debtor’s liability under this Act or under the Act of the province, as the case may be.

[emphasis added]

 

[22]      En ce qui concerne tout d’abord la demande visant à ce que le ministre recouvre les fonds auprès des quatre organismes de bienfaisance, il y a, à mon humble avis, deux raisons pour lesquelles il convient de rejeter cette demande.

 

[23]      Premièrement, le paragraphe 224.3(1) de la Loi est qualifié à juste titre d’outil d’exécution mis à la disposition du ministre. Il s’agit de l’un des nombreux outils que comporte la Loi, et le ministre a le pouvoir discrétionnaire d’ordonner dans n’importe quelle situation quelles méthodes de recouvrement seront employées. La Cour ne peut ordonner au ministre comment procéder dans une situation particulière quelconque.

 

[24]      Deuxièmement, bien que le ministre soit tenu d’exercer son pouvoir discrétionnaire de bonne foi, rien n’indique en l’espèce qu’il a agi d’une manière oppressive ou inéquitable. En fait, il semblerait que, au vu des faits de la présente affaire, la Loi ait empêché le ministre d’avoir recours au paragraphe 224.3(1).

 

[25]      En effet, dans les circonstances qui s’appliquent à M. Zins, l’alinéa 225.1(1)f) de la Loi empêchait le ministre d’obliger une personne à remettre des fonds, en application du paragraphe 224.3(1) de la Loi, avant le lendemain du « jour du début du recouvrement ». Aux termes de l’alinéa 225.1(1.1)c) de la Loi, le jour du début du recouvrement était le 90e jour suivant la date de l’envoi par la poste de l’avis de cotisation à M. Zins. Il s’agissait de 90 jours après le 5 juillet 2002, soit le 5 octobre 2002 ou aux environs de cette date. Le texte des paragraphes 225.1(1) et 225.1(1.1) de la Loi figure à l’annexe jointe aux présents motifs.

 

[26]      Il s’ensuit donc que le ministre ne pouvait avoir recours au paragraphe 224.3(1) de la Loi avant le 5 octobre 2002 ou aux environs de cette date. À cette date, il avait été ordonné, conformément à l’ordonnance restitutoire, de payer les fonds en litige aux quatre organismes de bienfaisance. Par conséquent, les fonds ne pouvaient plus être restitués à M. Zins, ainsi qu’il était exigé pour que le paragraphe 224.3(1) de la Loi puisse être appliqué d’une manière quelconque.

 

[27]      Quant à la demande subsidiaire visant à ce que la Cour considère la réception de la somme de 38 272 $ par les quatre organismes de bienfaisance comme [traduction] « assimilable au fait que le demandeur a payé un montant d’impôt », selon moi, la Cour n’est pas habilitée à le faire. Les impôts sont soit payés, soit impayés. La Cour ne peut pas considérer qu’un impôt a été payé.

 

6)         La demande d’ordonnance suspendant la procédure de recouvrement.

[28]      En droit, pour que la Cour puisse accorder une suspension, la partie qui en fait la demande doit convaincre la Cour que :

 

            1.         il y a une question sérieuse à trancher;

 

2.         un préjudice irréparable sera causé si la suspension n’est pas accordée;

 

            3.         la prépondérance des inconvénients favorise l’octroi de la suspension.

 

[29]      Il faut que chacun de ces trois éléments soit établi. Voir : RJR-MacDonald Inc. c. Canada (Procureur général), [1994] 1 R.C.S. 311.

 

[30]      La preuve ne me convainc pas que l’un quelconque des trois éléments requis a été établi, et il s’ensuit qu’aucune suspension ne peut être accordée.

 

7)         La demande de réparation additionnelle.

[31]      Aucune réparation additionnelle précise n’a été sollicitée.

 

Conclusion et dépens

[32]      Pour ces motifs, la présente demande sera rejetée.

 

[33]      En général, les dépens sont adjugés à la partie qui a gain de cause dans un litige et, en l’espèce, il n’y a pas lieu, selon moi, de s’écarter de ce principe.

 

[34]      Le ministre a indiqué que, s’il avait gain de cause il solliciterait des dépens de 500 $. M. Zins a convenu qu’il s’agit là d’un montant raisonnable, mais il a demandé un délai de trois mois pour pouvoir l’acquitter. Cette demande est accordée.

 


 

JUGEMENT

POUR LES MOTIFS QUI PRÉCÈDENT, LA COUR STATUE que :

 

1.         La présente demande est rejetée.

 

2.         Le 31 mars 2008 au plus tard, Arthur Roman Zins paiera à Sa Majesté la Reine les dépens, qui sont fixés au montant global de 500 $.

 

 

 

« Eleanor R. Dawson »

Juge

 

Traduction certifiée conforme

David Aubry, LL.B.

 


 

ANNEXE

 

 

Le texte des paragraphes 225.1(1) et 225.1(1.1) de la Loi est le suivant :

 

 

225.1(1) Si un contribuable est redevable du montant d’une cotisation établie en vertu des dispositions de la présente loi, exception faite des paragraphes 152(4.2), 169(3) et 220(3.1), le ministre, pour recouvrer le montant impayé, ne peut, avant le lendemain du jour du début du recouvrement du montant, prendre les mesures suivantes  :

 

a) entamer une poursuite devant un tribunal;

 

b) attester le montant, conformément à l’article 223;

 

c) obliger une personne à faire un paiement, conformément au paragraphe 224(1);

 

d) obliger une institution ou une personne visée au paragraphe 224(1.1) à faire un paiement, conformément à ce paragraphe;

 

e) [Abrogé, 2006, ch. 4, art. 166]

 

f) obliger une personne à remettre des fonds, conformément au paragraphe 224.3(1);

 

g) donner un avis, délivrer un certificat ou donner un ordre, conformément au paragraphe 225(1).

 

225.1(1.1) Le jour du début du recouvrement d’un montant correspond  :

 

a) dans le cas du montant d’une cotisation établie en vertu du paragraphe 188(1.1) relativement à un avis d’intention de révoquer l’enregistrement délivré en vertu du paragraphe 168(1) ou l’un des paragraphes 149.1(2) à (4.1), un an après la date de mise à la poste de l’avis d’intention;

 

b) dans le cas du montant d’une cotisation établie en vertu de l’article 188.1, un an après la date de mise à la poste de l’avis de cotisation;

 

c) dans les autres cas, 90 jours suivant la date de mise à la poste de l’avis de cotisation.

225.1(1) If a taxpayer is liable for the payment of an amount assessed under this Act, other than an amount assessed under subsection 152(4.2), 169(3) or 220(3.1), the Minister shall not, until after the collection-commencement day in respect of the amount, do any of the following for the purpose of collecting the amount :

 

 

(a) commence legal proceedings in a court,

 

(b) certify the amount under section 223,

 

(c) require a person to make a payment under subsection 224(1),

 

(d) require an institution or a person to make a payment under subsection 224(1.1),

 

 

 

(e) [Repealed, 2006, c. 4, s. 166]

 

(f) require a person to turn over moneys under subsection 224.3(1), or

 

 

(g) give a notice, issue a certificate or make a direction under subsection 225(1).

 

 

225.1(1.1) The collection-commencement day in respect of an amount is

 

(a) in the case of an amount assessed under subsection 188(1.1) in respect of a notice of intention to revoke given under subsection 168(1) or any of subsections 149.1(2) to (4.1), one year after the day on which the notice was mailed;

 

 

 

 

(b) in the case of an amount assessed under section 188.1, one year after the day on which the notice of assessment was mailed; and

 

(c) in any other case, 90 days after the day on which the notice of assessment was mailed.

 

 

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                                    T-861-06

 

INTITULÉ :                                                   ARTHUR ROMAN ZINS

                                                                        c.

                                                                        L’AGENCE DU REVENU DU CANADA

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                             TORONTO (ONTARIO)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                           LE 4 DÉCEMBRE 2007

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                                          LA JUGE DAWSON

 

DATE DES MOTIFS :                                  LE 21 DÉCEMBRE 2007

 

 

COMPARUTIONS :

 

Arthur R. Zins, pour son propre compte         DEMANDEUR

 

John Grant                                                       POUR LA DÉFENDERESSE

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Arthur R. Zins, pour son propre compte         DEMANDEUR

 

 

John H. Sims, c.r.                                            POUR LA DÉFENDERESSE

Sous-procureur général du Canada

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